
lence d’un, tyran foible qui fe croît for t, Alaric
pourfuit fa marche., maître des deux rives du
tibre, & Rome eft réduite à l’extrémité ; le fénat
tremblant envoie des ambaffadeurs, qui demandent
grâce à genoux & tout en larmes. « Je fens
j> en moi, leur dit Alaric, quelque chofe qui m ex-
» cite à mettre Rome en cendres. Les ambaffadeurs
à ce m o t, redoublent de foumiffions 8c d inf-
tances. » Eh bien ! dit-il, qu’on m’épargne la peine
5> de la piller ; qu’on me remette tout l’or & tous
d? les meubles précieux qui fe trouveront dans la
» ville. — Que laifferez - vous donc aux habi-
3> tans ? — La vie , & c’eft plus qu’ils ne méritent.
Il fe laiffa pourtant toucher & fe contenta dune
très-foible portion du butin qu’il eût pu faire &
qu’il pouvoit exiger 3 mais il ne cnit pas devoir
s’éloigner avant d’avoir reçu les fommes convenues.
Honorius, prince qui, comme le dit Mon-
tefquieu, ne favoit faire ni la paix ni la guerre,
fit d’expreffes défenfes de rien payer , mais pour •
en ufer ainfi, il falloit être le plus fort, ■ & Hono-
rins ne l’étoit pas. Alaric revint une fécondé fois
devant Rome, & la bloqua de toutes parts. La
ville afliégée fiit bientôt réduite à une éxtreraite
plus affreufe que tout ce qu’elle avoit encore éprouvé.
Les Romains éperdus revinrent implorer- une
pitié dont leur infidélité les rendoit indignes. Alaj-
ric, toujours modéré dans la vtéloire , leur fit
grâce3 mais aux premières conditions, il en ajouta
d’autres : il exigea un tribut annuel, 8c demanda
de plus qù’on lui abandonnât leNorique, laVéni-
tie & la Dalmatie ; & ^ulant montrer aux Romains
fon mépris, il leur donna pour maître le
préfet Attale, qu’il fit empereur de fa feule autorité.
On s’étonne qi\ Alaric, maître du fceptre
des Romains , ne l’ait pas gardé pour lui. Mais tel
étoit l’orgueil dç ces rois barbares, que fatisfaits
d’ébranler ou d’affermir à leur gré le trône des
empereurs, ils dédaignoient de s’y affeoir. Le roi
des Vifigoths, après avoir ainfi humilie 1 orgueil
romain, fit fe s préparatifs pour afîieger Ravenne,
où Honorius fe tenoit honteufement caché. L empereur
Attale, qu’il ne diftinguoit pas defesfu/ets,
eut ordre de îe'fuîvre à cette conquête. Les affaires
d’Honorius ne pouvoient être plus dêfefpérees :
les barbares de la Germanie fondoient à 1 envi fur
fes états : fa domination étoit prefque éteinte dans
les Gaules & en Efpagne. Convaincu de Kmpoffi-
bilité de continuer la guerre, il envoya des ambaffadeurs
à Attale, lui propofer la moitié de fes états
pour gage de la paix qu’il follicitoit. Cette propo-
fition ne devoit pas être dédaignée par Attale : mais
Alaric alors mécontent de ce prince l’obligea de rendre
le fceptre, & le chaffa en prefenee dé larrtiee.
Alaric délibéra enfuite s’il devoit accorder la paix à Honorius. Son confeil y paroiffoit difpofe ; mais
les Huns, alliés des Romains, ayant charge un
détachement de Vifigoths, il prit cet aéte d’hoftilité
pour une nouvelle perfidie d’Honorrus, rejetta
jiout accommodement : il marcha aüfii-tot ver^
Rome , qui, pour cette fois , fut obligée de lé
cevoir dans fes murs. - On le loue beaucoup de fa
modération. Il eft vrai que fes foldats n’y commirent
que les défordres qu’il ne put empêcher. Quoique
les Ariens, dont il fuivoit les erreurs , fuffent
depuis long-temps expofés à la perfécution des orthodoxes
, il ne crut pas devoir, ufer de repréfailles
: il ordonna de relpeéler les églifes, 8c défend
it , fous les peines les plus rigoùreufes, de faire
aucun outrage à ceux qui s’éroient réfugiés dans
ces afyles facrès. Il y fit reporter des vafes d’or que
la cupidité du foldat avoit enlevés. Il ne refia que
trois jours dans Rome : il en fortit pour aller faire
la conquête de la Sicile & de l’Afrique ; mais une
tempête ayant brifé une partie de fes vaiffeaux, il;
mourut à Cofence. Ses officiers craignant que le
fouvenir des maux qu’il avoit faits en Italie, ne
portât les peuples à s’en venger fur fon corps, lui-
cxeufèrent un tombeau au milieu du fleuve Bazento
ou Vazent©', dont ils détournèrent les eaux pour
cet effet. Sa mort fe rapporte à l’an 410 de notre
ère. Son portrait nous efl parvenu fort défiguré. On
nous l’a repréfentè comme un prince avide de faiig
8c fouillé de carnage ; mais fa conduite envers les
Romains efl allez juflifiée par les perfides procédés
d’Honorius. Atauifè , fon beau-frère, lui fuccéda
du confentement dés chefs de fa nation.
20. Alaric I I , roi des Vifigoths. Du temps de
Clovis ; la Gaule étoit partagée entre les Romains
que les François ehaffoient alors de ce pays ; les
Bourguignons, qui outre les provinces auxquelles
le nom de Bourgogne efl refié, poffédoient le
Lyonnois 8c les provinces voifines de l’Italie ; les
Vifigoths, qui joignoient à l’Efpagne, le Languedoc
& d’autres provinces méridionales de la France*.
Alaric étoit leur roi, & c’étoit pour le temps un
affez grand roi. Clovis avoit un rival dans Siagrius,
fils de ce comte Gilles qui avoit été le rival de
Childéric, père de Clovis. Siagrius, ainfi que le
comte Gilles, étoit gouverneur dans la Gaule pour
les Romains. Clovis défait Siagrius près de Soiflons 1
le vaincu- va chercher un alyle auprès d’Alaric y.
Clovis menace Alaric, fe fait livrer Siagrius, 8e
hii fait trancher la tête ; premier fujet de divifio»
entre Alaric 8e Clovis. Les princes Bourguignons
fe faifoient une guerre cruelle pour fe dépouiller les
uns les autres ; Clovis 8e Alaric prirent parti pus
contre l’autre dans cette querelle pour tâcher d’en
profiter ; fécondé fource de divifion..Alaric, jeune ,,
vaillant, ambitieux comme Clovis, poffédant-une
"partie de la Gaule, devoit naturellement être fon
rival 8c fon ennemi. Alaric étoit. Arien , Clovis;
catholique ; Clovis tira un grand parti de cette:
eirconfiance- pour mettre le clergé dans- fes:
intérêts 3 il ne parloit que de défendre la divinité
du Verbe 8c la confubftantialitê du père 8c dit
fils ; il transforma cette querelle d’ambition en une
guerre de religion. _ 1
Après diverfes -hoftilitês, les deux rivaux fe ren*
contrèrent dans la plaine de Vouillé, prés (fePoùr
tiers ; comme cette expédition efl la plus impôt1-1
tante de celles de C lovis, 8c qu'Alaric y périt , elle
eft aufli chez les hiftoriens la plus chargée de cir-
conftances, ou merveilleufes, ou au moins fin-
gulières. Une biche indiqua aux François »un gué
pour paffer la Vienne ; cet endroit s’appelle encore
le Pas Je la biche. On vit une aurore boréale qui
paroiffoit partir du clocher de faint Hilaire de Poitiers
; ce fut un figne célefle qui annonçoit aux
François la viâoire 3 des François, en entrant dans
l’églife, entendirent chanter deux verfets cl un
pfeaume qui la leur prom.ettoient encore plus po-
fitivament; ils jurèrent de nefe point faire la barbe
qu’ils n’euffent vaincu 3 ces fortes de voeux aident
encore à vaincre. Les Vifigoths furent défaits 3
Clovis renverfa de cheval Alaric 8c le tua de fa
main (en 507) 3 tout ce qui eft entre la Loire 8c
les Pyrénées fut fournis pour quelque temps au
vainqueur. Mais Théodoric, roi des Oftrogoths,
c’eft-à-dire des Goths d’Italie, vengea fon gendre
Alaric, en remportant fur C lovis, auprès d’Arles,
une viâoire qui priva Clovis d’une grande partie
de fes conquêtes, qui1 réunit le royaume des Vifigoths
à celui des Oftrogoths, 8c qui conferva pour
la fuite le premier au jeune Amalaric , fils d Alaric
8c petit-fils de Théodoric.
Alaric, ainfi que Théodoric fon beau-pere ,
n’étoît pas tout-à-fait un barbare 3 il ne fut pas uniquement
célèbre, par les armes * il s’occupa des loix ,
u engagea le plus grand jurifconfulte de fon temps',
Arien , à raffembler celles du code Théodofien ,
8c à en faire un abrégé à l’ufage des Vifigoths ; de- ,
là vient que les provinces méridionales de la France,
celles précifément qu’occupoient les Vifigoths , font
encore aujourd’hui régies par le droit romain. Ala-
‘ric rendoit lui-même la juftice à fes fiijets 3 mais il
la leur rendoit févère , 8c quelques-uns de fes jugera
e ns fe fentent de la barbarie de fon pays 8c
de fon fiècle : il condamna un féditieux 8c un rebelle
nommé Pierre, qui avoit excité des mouvemens
parmi le peuple, à être brûlé v if dans un taureau
d’airain , foi t qu’il connût l’invention de Perille,
adoptée par Phalaris, foït qu’il fe fut rencontré avec
ce barbare, 8c qu’il eût comme lui 1 honneur de
cette invention abominable.
A laric ou A l r ic , (J#/?* de Suède.} roi de
Suède. Il régnoit dans ces fiècles de barbarie, où,
les rois du Nord n’étoient que des brigands, occupés
à fe dépouiller les mis. les autres. Alaric ne fut
pas plutôt monté fur le trône, qu’il voulut s’emparer
de celui de Geftillus, roi des Goths. Ce prince
trouva un appui dans Frottoir, roi de Danemarck,
qui fit marcher à fon feeours deux généraux nommés
Godeftac 8c Eric. Gauto , fils ÜAlaric, périt
dans le premier choc. Alaric voulut venger fon fils
de fa propre main. Il appella Geftillus en duel. Ce
prince, courbé fous le poids de l’ag e , pouvoit a
peine foulever fes armes. Maigre fa foibleffe, le
magnanime vieillard vouloit combattre 3 Eric, jeune,
brave 8c généreux, Je prévint, fe préfentaau rendez
vôus, 8c porta au roi de Suède un coup mortel.
{M. DE Sa c y .) Alaric I I , {Hifi. de Suède.) fils d’Agnius,roi
de Suède , étoit né en 172 3 fon frère Eric partagea
avec lui lê trône vacant par la mort de leur
père en 192. Ils ne régnèrent pas long-temps en
paix 3 une. jaloufie réciproque les dévoroiy elle
éclata bientôt 3 des mauvais procédés ils pafferent
aux injures , 8c des injure? aux coups. On rapporte
que s’étant trouvés tous deux fans armes au rendez
vous, ils débridèrent leurs chevaux, 8c s’af-
fommèrent avec les courroies. ( M . d e S a c y . )
( Il ne faut point tromper le leéteur, les temps
dont il s’agit dans ces deux articles, précèdent de
beaucoup ceux où l’hiftoire de Suède , comme celle
de tous les autres peuples modernes, commence
à être véritablement connue.)
ALBANI. Nom d’une famille romaine »originaire
d’Urbin , 8c dont étoit le pape Clément XI 8c fes
neveux les cardinaux Annibal 8c Alexandre Aluani.
ALBANIN ou Balbanin, f. m. peuple qui,
félon M. d’Herbelot, n’a aucune demeure fixe ,
fubfifte de fes courtes fur la Nubie ßc l’Abyffmie »
a une langue qui n’eft ni l'arabe , ni le cophte, ni
l ’abyffin, 8c fe prétend defcendu des anciens Grecs
qui ont poffédé l’Egypte depuis Alexandre.
ALBATENIÜS , (Hifi. litt. nwd. ) ainfi nommé,
parce qu’il étoit de Satan ou Bantan en Mésopotamie
, fe nômmoit Muhacamed-ben-Geber 3 il ne
faut pas cependant le confondre avec le fameux
Geber , auteur arabe, aufli bien que lui. Albatenius
eft aufli nommé quelquefois Mahometes AraEtenJis,
parce que fes observations aftronomiques ont été
faites à Araéfo. On a de lui un traité de f ci entuî
flellarum , dont il n’y a eu d’imprimé que la traduction
latine. L’original arabe eft en manufcrit à la
bibliothèque du Vatican. Il obfervoit vers 880. Il
mourut en 929.
ALBE ( le duc d’ ) {Hiß. mod.) Voye^ToLEDE;
qui eft le nom de fa maifon.
ALBÉRIC, ( Hiß. mo-d. ) marquis de Tofeane *
fille de îa courrifàne Marozie, laquelle étoit fille
de la courrifàne Théodora 3 ces deux femmes célèbres
par le crime , la galanterie 8c la beauté ,
faifoient 8c défaifoient les papes à leur gré, leur
fils les perfécuta, 8c toute cette race fut très-funefte
à Rome. Tout y étoit foandale- 8c. défordre fous
; leur puiffance. Pour comble de maux, un patrice
romain nommé' Crefcence , fous prétexte d’affranchir
fa patrie, s’en fit le tyran, jufqu’à ce qu’en-,
fin l’empereur Othon. III, délivra Rome de tous
ces fléaux,. 8c mit les papes en liberté. Ces évè-
ne mens auquel Rouffeau a fait allufion dans ces
vers 1
Il choïfit les Offrons-, & voulut- par leurs mains-,
Du joug des Albérics & des fers do. Ctefcence
Affranchir les Romains.
Ces é vènemens rempliffent le dixième fiècîe, flur-
. ; tout la fécondé moitié,