
r * vintKéce^ii'e. Un attachement fi marqué ; fut
lu ÿ e a ; le fènat voulut arrêter ce fcandale, & leur
défendit de fe voir. Amilçar, pour fe fouftraire à
I arrêt fiétriffant des magiflrats, donna fa fille en
mariage à fon ami. La loi ordonnoit de ne jamais
fepaier le gendre du beau-père. Ce fut en ufant du
pi ivilege de cette loi qu’il fut autorifé à le mener
avec lui en Efpagne, où il le chargea de toutes les
expéditions où l’on pouvoit acquérir le plus "de
gloire. Ce fut dans la guerre de Numidie qu'Af-
drubal fit connoître tous fies talens. Les Numides
voyant les Carthaginois occupés en Efpagne, eurent
la témérité de déclarer la guerre aux Carthaginois.
Afdrubal quitta« l’Efpagne pour paffer en. Afrique;
fes victoires pacifièrent les troubles , & firent
rentrer les peuples dans l’obéiffancc.. Après la mort
de fon beau-père, l’armée d’Efpagne le proclama
général, & ce choix fut confirmé par le fenat, qui
crut ne pouvoir mieux confier fes deffinées qu’à
un élève. d’Amilcar. Les premiers jours de fon
commandement furent marqués par la défaite d’un
prince Efpagnol, qui ©fa le provoquer au combat.
La conquête de douze^ villes qui lui ouvrirent leurs
portes, fut le fruit de cette victoire. La modération
dont il ufa envërs^illes, engagea des contrées
entières a fe foumettre. Plein de. reconnoiffance
pour la mémoire d’Amilcar, il follicita le fénat de
Carthage de lui envoyer Annibal, qu’il fe chargea de
former comme il avoit été formé lui-même par fon-
père, & fupérieur à l’envie, il ne craignit point
d’être effacé par ce jeune guerrier, que les voeux
des foldats appelaient au commandement. Un
mariage qu’il contra&a avec une princeffe Efpagnole,
acheva de lui gagner tous les coeurs de la nation.
Après qu’il eut étendu fes conquêtes, il crut
devoir s’en affiner la poffeffion,_en bâtiffant une
ville qui pût fèrvir de rempart à ce nouvel empire.
II lui donna le nom de Carthage la neuve, & cette
ville devint dans la fuite la plus riche & la plus
commerçante du monde. Les Romains, alors occupés
contre les Gaulois, qui avoient fait une irruption
dans l’Italie, n’étoient point en état de l’arrêter
dans le cours de fes profpérités. Il étoit plus intéref-
fant pour eux de protéger leurs’foyers que de porter
leurs forces dans une terre étrangère ; ainfi ils conclurent
le fameux traité , par lequel les Carthaginois
s’engageoient à ne point paffer l’Ebre, à ne jamais
troubler Sagonte & les autres colonies Grecques
dans la jouiffance de leurs privilèges. Ce traité fut
religieufement obfervé, & Afdrubal tourna fes armes
contre cette partie de l’Efpagne qui s’étend
depuis l’Océan jufqu’à l’Ebre. Les rois & les peuples
, fubjugués par fon affabilité, n’oppofèrent aucune
réfiffance. Carthage conquérante fans effufion
de fang, vit toute l’Efpagne le faire un mérite de
fa foumiffion. Tandis qu>Afdrubal jouiffoit paifible-
ment de fes conquêtes, il fut affaffiné par un ef-
clave Gqulois dont le maître avoit été condamné
a mort par le général Carthaginois. Ce ferviteur
fanatique, tranquille & ferein au milieu des tourmens,
ne parut fenfible qu’à la gloire d’avoir
vengé fon maître. ( T - 'n . )
i Asdrubal Bauca , fils d’Amilcar , & frère
d’Annibal , eut les inclinations belliqueufes qui
diflinguoient ceux de fa maifon. Inftruït dans le
métier de la guerre par fon père & fon beau-frère,
il fe montra le digne éleve de fes illufires maîtres.
Ce fut lui qui fut établi gouverneur de l’Efpagne,
lorfqu’Annibal partit pour porter la guerre en Italie ;
on lui laiffa le commandement de la flotte pour
protéger les côtes, & une puifïante armée pour contenir
les peuples dans l’obéiffance. Tandis qu’An-
nibal triomphoit en Italie, Cneïus Scipion fubju-
guoit tout le pays, depuis l’Ebre jufqu’aùx Pyrénées.
Magon , qui commandoit dans cette partie de
l’Efpagne, fut défait par ce Romain. Les troupes
viéiorieufes fe répandirent dans la campagnë, fans
obferver ni ordre ni difcipline. Afdrubal, qui étoit
venu au fecours de fon collègue , profita de la difi-
perfion & de la fécurité préfomptueufe des Romains.
Il fe mit à la tête de dix mille hommes de
pied & de mille chevaux , paffa l’Ebre & fondit fur
cette multitude éparfe, dont le plus'grand nombre
fut paffé au fil de l’épée. La fortune ne lui fur pas-
aufn favorable la campagne fuivante. Il mit en mer
quarante - cinq vaiffeaux de ligne, dont il donna
le commandement à un Ainïlcar , qui paffoit
pour le plus grand homme de merde fon temps. Il
y eut une aftion fanglante où la fortune des Ro-
mains triompha de la valeur des Carthaginois. A f-
drubal équipoit une nouvelle flotte , & fit voile
pour la Sardaigne, il fe propofoit de defcendre en
Italie, & d’y conférer avec Annibal fur le plan de
cette guerre. Mais Servilius avec une efcadre de
foixante & dix galères, l’obligea de rentrer dans
fes ports. Les Romains, affoiblis par leà pertes qu’ils
eflùyoient en Italie-, étoient dans l’impuiffance de
fournir des fecours à l’Efpagne ; Afdrubal s’en pro- .
mit l’entière conquête. IL fanoit des préparatifs formidables
, lôrfqu’il reçut de Carthage l’ordre de
paffer en Italie, pour porter du fecours à fon frère
épuifé par fes propres viâoires. A peiné fe met-
toit-il en marche, qu’il apprit qu’Ibéra étoit vivement
preffée par les Romains. Il fait fes difpofi-
tions pour la délivrer. Au bruit de fon arrivée le
fiège eft levé , & l’ennemi vient camper près de
fon armée. Les deux partis étoient dans une égale
impatience de combattre, ôn en vint bientôt aux.
mains. Annibal dirigeoit en grand capitaine les mou-
vemens de fon année, & fes premiers avantages
lui préfageoient une pleine viâoire, lorfque les
Efpagnols, ou lâches ou infidèles, lâchèrent le pied,
& l’abandonnèrent dans la plus grande chaleur du
combat. Le motif de cette défeSion étoit le chagrin
qu’ils avoient d’être tranfportés en Italie. Vingt
mille Carthaginois relièrent fur la placé , & dix
mille furent faits prifonniers. Afdrubal, trahi par les
alliés de Carthage, n’a- de reffôurce que dans lui-
même : il équippe une puiffante flotte, & met à-la
voile pour la Sardaigne, où il étoit- appelle par les
voeux de tous les habitans, fatigués de la domination
dés Romains ; dès qu’il fut débarqué, il renvoya
fes vaiffeaux en Afrique, pour marquer aux
infulaires qu’il me'ttoit en eux foute fa confiance.
Les Sardes fe rangent en foule fous fes énfeignes.
Manlius , qui commandoit dans cette île, raffemble
une année & livre un combat, où Afdrubal, qui
touchoit au moment de la viâoire, élt lâchement
abandonné par ces infulaires dont il défendoit les
droits & la liberté. Il trouve à peine le moyen de
retourner en Efpagne, où toutesles provinces, pendant
fon abfence, s’étoient déclarées pour les Romains.
Son génie fécond y crée une nouvelle armée
dans un pays où Carthage n’a plus ni alliés ni fujets.
II y balance la fortune des Romains, il livre deux
combats, & quoique toujours vaincu , il foutient
la réputation de grand capitaine , parce que dans
fes malheurs il n’eut point de fautes à fe reprocher.
Annibal n’en impofant plus dans l’Italie par l’éclat
de fes vi&oires, fe vit abandonné de tous fes
alliés, la fortune parut alors fe lafîér de fervir les
Carthaginois dans tous les lieux où ils portèrent
la guerre ; le jeûne Scipiofl le fignala en Efpagne
par la prife de Carthagène. C’étpit-là que les ri-
cheffes des Africains étoient accumulées : cette ville
étoit l’arfenal où étoient dépoféès leurs armes &
toutes leurs munitions & leurs machines de guerre.
C ’étoit faper la puiffance de Carthage dans fes
fondemens ; il falloit un Afdrubal pour en retarder
la chûte ; il fe maintint avec gloire jufqu’au moment
où Edefco , prince Efpagnol, fort accrédité
parmi fa nation, embraffa le parti des Romains.
Son exemple entraîna plufieurs autrés chefs, qui
aimèrent mieux combattre fous BS| enfeignes d’un
peuple belliqueux, que fous les drapeaux de ré^
pubîicains commerçans. Afdrubal, voyant que fon
armée s’affoibliffoit chaque jour par de nouvelles
déferrions, comprit qu’il falloit remporter des victoires
pour rétablir la réputation de^ fes armes.
Les circonflances ne lui permettoient point d’attendre
l’arrivée de Magon & d’un autre Afdrubal,
qui lui avoient été affociés dans le commandement.
Le mal étoit ufigent, il ne prit confeil que de la
néceffité. Il fe laffa de la lenteur de fes collègues,
& choififTant une pofition où il avoit droit de fe
croire invincible , il engagea une aéflon , où les
hifloriens affurent qu’il fut battu. Mais il faut que
fa perte ne fût pas confidérable, puifque ce revers
ne l’empêcha point de faire fa jonétion avec fes
collègues , ce qu’il n’avoit pu exécuter avant le
combat. De plus, ils firent le partage .des provinces,
ce qui fuppofe qu’ils en étoient encore les maîtres.
Afdrubal fut chargé de conduire une armée en
Italie , pour y favorifer les opérations de fon frère
Annibal. Il traverfe lés Gaules, précédé' de fes
éléphans, & dans tous les lieux de fon. paffage il
laide des montimens de fa générofité. On lui permet
par-tout de faire des recrues , & les Gaulois,
féduits par fa magnificence, s’empreffent à marcher'
fous fes Ordres. Les Liguriens le reçurent comme
le libérateur de leur pays. Sa marche fut fi rapide
que Plaifance étoit affiégée avant que les Romains
& Annibal même foupçonnaffent fon entrée
dans l’Italie. Il fut contraint d’en lever le fiège pour
hâter fa jonâion avec fon frère. Les lettres écrites
pour établir.leurs relations, furent interceptées.
Lesconfuls , inftruits de leur deflein, réunirent leurs
armées , & voulant le prévenir , ils s’approchèrent
de fon camp pour mieux obferver tous fes mou-
vemens. Afdrubal, trop foible pour réfifter à leurs
forces réunies , prit la réfolution de faire fa retraite
, & d’éviter une aâion où il ne pouvoit avoir
que du défavantage. 11' étoit dans un pays dont il
ignoroit les routes , il fut dans la néceffité de fe
confier à des guides infidèles qui le trompèrent.
Il erra quelques jours fans pouvoir tenir une route
certaine ; les Romains le joignirent près du fleuve
Metaro, dont il ne connoifToit ni la profondeur, ni
les iffues. Mais , foutenu par fon intrépidité naturelle,
il affeéla toujours la même confiance : fes
difpofitiôns favantes annonçoient un général con-
fommé. L’avantage de fa pofition & la fagefle de
fon ordre de bataille, fuppléoient à la ftipériorké
du nombre. Il donne le fignal du combat & l’exemple
de la plus grande intrépidité. Déterminé à
vaincre & à mourir, il voit tomber à fes pieds
des milliers de foldats qui tous briguent l’honneur
de mourir à fes yeux. Honteux de furvivre à cette
milice courageuie, il fe précipite au milieu d’une
cohorte où il trouve une môrt digne d’un fils
d’Amilcar & d’un frère d’Annibal. Lé barbare
ClaudiiTS deshonorant fa viétoire , lui fit couper la
tête, qui fut jettée quelques jours après dans le
camp de fon frère Annibal. Le héros Carthaginois,
faifi d’horreur & de pitié , ne lut dans l’avenir
qu’un enchaînement d’événemens funefies , & il
préfagea dès ce moment quel feroit le deftin de
Carthage. (T— vA Asdrubal , général des Carthaginois dans la
derniere guerre punique , n’étoit point de la famille
Barcine ; mais il paroît avoir e u , pour le nom
romain , la même averfion qui diftingua ceux de.
cette maifon. Entraîné par fon caraétère turbulent
& farouche, il accéléra la ruine de fa patrie, par
les^ efforts même qu’il fit pour la relever de fit
chute. Le peuple, entraîné à fon tour par renthou-
fiafme républicain qu'Afdrubal faifoit paroître, fux-
vit les impulfions de ce génie inquiet & fougueux.
Citoyen fâcheux & chef tyrannique , deux excès
fouyent plus voifins l’un de l’antre qu’on ne penfe ,
il n’introduifit dans l’état que confufiori & anarchie
, il troubla tout par l’abus du pouvoir"; il fit
condamner à l’exil quarante des principaux citoyens
il fit jurer, au peuple que jamais il ne parlerait
de leur rappel : les grands •& le'fénat gémirent
dans loppreffion , & les plaintes furent punies
comme le cri de la révolte. Ces illuftres bannis
fe réfugièrent auprès de Mafliniffa, roi de Numi-
die j qui s intérefta pour eux, & demanda leur re