fous la domination des Romain*, fermèrent les
yeux fur le vice de fa naiffance. Ce prince tomba
dans le mépris, parce qu’au lieu d’ambitionner les
vertus qui font les grands rois, il ne cultiva que
les talens agréables qui peuvent honorer quelques
particuliers. On lui donna le furnom d Aulete ,
qui fignifie flûteur, parce qu’il excelloit à jouer
de la flûte; & ce nom humiliant parut flatter fa
vanité : mais il ne put fe diflimuler qu’il étoit
l ’objet du mépris de fes fujets ; & fentant le be-
foin d’ un appui pour fe foutenir, il épuifa l’Egypte
pour acheter la prote&ion des Romains. Le
vuide caufé par fes profufions fut rempli par les
impôts dont il accabla fes fujets, qui fe révoltèrent.
Les tyrans font lâches & timides , . parce qu’ils fe
festent coupables. Aulete fe voyant farts amis , alla
chercher un afyle dans les murs de Rome ; il y
mendia les fumages des premiers magiftrats : fes
tréfors furent plus perfuafifs que fon éloquence.
Les Egyptiens envoyèrent aufli des ambaffadeurs
pour défendre leur caufe au tribunal de ce peuplé
foi des rois; mais tous périrent par le fer & le
poifon. Les Romains , témoins de tant d’attentats,
avoient confervé un rerie de pudeur au milieu
de la corruption : leur indignation ^éclata contre
ce roi meurtrier, qui, pour fe fouflraire aux outrages
, fe retira dans le temple de Diane à Ephèfe :
fes tréfors lui acquirent un vengeur dans Gabinius,
proconful de _Syrie, qui, pour One fomme de
trente millions , dont Antoine reçut la moitié,
abandonna fon gouvernement pour aller chercher
dans l’Egypte des aliinens à ion avarice. Pélufe
fut fa première conquête : dès qu'Aulete fe vit lé
maître de cette porte du royaume, il ne s’occupa
que du foin de fatisfaire fes vengeances. Ce premier
fuccès fut fuivi d’une nouvelle viéloire. Aulete,
arbitre de la deftinée de fes fujets, ne parut fen-
Hble qu’au plaifir de punir; 8t les Romains, largement
payés , furent les inftrumens de fes vengeances.
L’ Egypte fut. inondéé de fang 8c accablée
de fubfides. Le tyran épuifoit la fortune des
peuples pour remplir fes engagemçns avec Antoine
& Gabinius. Les grands donnèrent l’exemple du
plus humiliant efclavage, parce qu’ils font toujours
bien payés de la honte de porter des fers.
La fuperftition tira les peuples de Fopprçffion. Un
chevalier Romain tua un chat, dont le meurtre
fît prendre les armes à toute la-nation acharnée
à demander la mort du facrilége : l’autorité du
roi 8c de Gabinius fut obligée de céder aux importunités
des rebelles qui, dans leurs fureurs reli*
gieufes , mirent en pièces le malheureux affaffin
de l’animal facré. Aulete, que cet exemple rendit
circonfpeét 8c timide, traîna fur le trône une vie
obfcure 8c languiffante. 11 joignoit à fon habileté
à' jouer de }a flûte, un goût effréné pour la danfe ;
il nomma par fon teftament, fon fils 8c fa fille
aînée pour fes béritiers, & les mit avec fori royaume
fous la tutelle des Romains. ( T—n. )
AU L IQ U E , adj. ( Hifi. mod. ) dénomination de
certains officiers de l’empereur qui compofent une
cour fupérieure, un confeil dont la jurifdiétion s’étend
à tout en dernier reffort fur tous les fujets de 1 empire dans les procès dont ilconnoît. Nous difons
confeil aulique, cour aulique , chambre aulique , con-
J ciller aulique , &>c.
Le confeil aulique eft établi par l’empereur, il
en nomme les officiers ; mais l’éleâeur de Mayènce
a droit de vifite. Il eft compofé d’un préfident,
catholique , d’un vice-chancelier préfenté par cet
éle&eur , 8c de dix-huit afleffeurs ou confeillers 8
dont neuf font proteftans, 8c neuf font catholiques.
Ils font partagés en deux tribunaux : les gen*
de qualité occupent l’un , 8c ceux de robe l’autre.
Ils tiennent leurs affemblées en préfence de l ’empereur
, d’où leur vient le nom de juflitïam impe-
ratoris, juftice ou tribunal de l’empereur, comme
celui du confeil aulique , de ce qu’il fuit la cour de
1 empereur,aulà, 8c que fa réfidence eft toujours dans,
le lieu que l’empereur habite. Cette cour 8c la
chambre impériale de Spire font affez dans l’ufage
de fe contrarier, à caufe de la prévention qui a
lieuentr elles , 8c que nulle caufe ne peut s’évoquer
de lune à l’autre. L’empereur ne peut empêcher
ni fufpendre les déeifions d’aucune de ces cours,
ni évoquer à fon tribunal une caufe dont elles ont
une fois pris connoiffance, à moins que les états
de 1 empire n’en foient d’avis. Il eft néanmoins des
cas où ce confeil s’abftient de prononcer définitivement
fans la participation de l’empereur; 8c
dans ces cas on prononce, fiat votum ''ad Ccefqrem ,
que le rapport s’en fajfeà Céfar , c’eft-à-dire à l’em-
pçreyr en fon confeil.
Le confeil aulique n’a été originairement inftitué
que pour conjjoître des différens entre les fujets,
des empereurs. On y a depuis porté les contefta-
tîons4es fujets de l’empire, 8c il s’eft attribué fur
la chambre impériale de Spire ou de Wetzlar,une
çfpece de droit de prévention , qui ne fe fouffre
pourtant que dans les procès des particuliers : lés
princes n’ont pas encore, reconnu cette jurifdi&ion.
Mais fous les empereurs Léopold ,... Jofepk, 8c
Charles V I , le confeil aulique a fait plufieur? en-
treprifes contraires aux libertés germaniques,comme
de confifquer les duchés de Mantoue & de Guaf*
talle, de mettre au ban de l’empire les éle&eurs de
Bavière 8c de Cologne.
Le confeil quoique çeffe aufli-tôt que l’empereur
meurt, s’il n’eft continué par ordre exprès des vicaires
de l’empire, au nom defquels il rend alors fes juge-»
mens , il fe fert de leur fceau. Heiff, hi(l. de Uempire.
u - r o i . . :
AULU-GELLE, grammairen latin fameux, qui
vivoit vers Fan 130, fous l’empire d’Adrien, 8c
mourut, àç ç qu’on^croit, vers le commencement
de l’empire de Marc-Aurele, On çonnoît fes Nuits
Attiquesçn vingt livres , 6c J es favantes remarques
.de Lambeçius fur cet ouvrage, dont 11 y a plu-
fieurs éditions eftimées. Il zn a paru en 1776, une
traduction par l’Abbé de Verneuil, en 3 vol; in-i 2,
C e titre de. Nuits Attiques a beaucoup moins., de
s-apport aux matières traitées dans l’ouvrage, qu’aux
«irconftances où il a été compofé. L’Auteur étoit
à Athènes, & il employa les longues foirées de
l ’hyver à compofer ce livre.
AUMALE. ( Hifi. de Fr.) Ville fituée fur les
confins de la Normandie 8c de la Picardie, a eu
des comtes -particuliers , 8c ayant paffé dans la
maifon de Lorraine , fut érigée en duché, Fan
154 7, par le roi Henri I I , en faveur du duc de
Guife , François, qui le céda dans la fuite à fon
fécond frère, lequel a formé la branche d!Aumale*
•Cette branche, qui fous Henri I I , François II 8c
Charles IX , jouiffoit du crédit de fa maifon, fans
y ajouter , 8c comribuoit fans éclat aux projets
ambitieux de cette maifon, acquit une célébrité
funefte par fon attachement confiant à la ligue,
Le premier due d Aumale, chef de cette branche,
précéda les temps de la ligue ; mais il en eut l’ef-
prit. On fait qu’au commencement du règn» de
Henri I I , les prétentions des Princes de Guife
allèrent jufqu’à s’égaler aux princes du fang, 8c
jjufqu’à vouloir confondre les rangs entre la maifon
royale de France 8c la leur. Ces prétentions lurent
accueillies à la cérémonie du facre de Henri II,
où fous prétexte de fuivre l’ancien ufage qui ré*
gloit les rangs entre les pairs, fuivant l’ordre de
leurs pairies, fans aucune exception en faveur des
princes du fang, on nomma pour repréfeiiter les
anciens pairs laïques, des princes du fang 8c des
princes Lorrains, dans un ordre qui plaçoit quel-:
ques-uns des princes Lorrains avant quelques-uns
des princes du làng. En 1548 Henri II fit des entrées
folemnelles oc triomphantes dans les places
conquifes fur le duc de Savoye, pendant le règne
de François I. Il étoit à cheval, précédé des fei-
gneurs de fa cour ; 8c le due de Vendôme, Antoine, .
qui n’étoit pas encore roi de Navarre, marchoit
leul en qualité de premier prince du fang. Cet
ordre fut fuivi par- tout, excepté à Chambéri. Dans
oette ville, le duc de Vendôme, en voulant prendre
fon rang, fut furpris de voir le duc à!Aumale
fe mettre à fa gauche. Quoi donc , mon compagnon
, lui .dit-il, tiendrons-nous rang enfemble ? oui,
monfieur,, répondit le Duc d'Aumale, le Roi m’a
oeffigné cette place comme au gouverneur de la province.
Il avoit en effet le gouvernement du Dauphiné,
auquel on avoit annéxé ceux de la Savoye
.& de la Breffe, qui étoient alors fous la domination
de la France. « Mais, dit le duc de Ven-
» dôme , c*ejl tout ce que je pourrois permettre
v au duc de Lorraine , chef de votre maifon. I l efi
w vrai9 répondit le due dAumale, que vous ave^
91 le pas fur lui en France, mais non ailleurs ; car
9) il efi fouverain., & vous fiujet & vajfal de la çou-
»> ronne ; M. de Lorraine ne relève que de Dieu de
ï> de fon épée. 11
Le duc de Vendôme rentra, 8c la marche fut
arrêtée. Le roi envoya dire au duc de Vendôme
de reprendre fa place. Vendôme obligé d’obéir aux
tiifioiu* Tom± f Deuxième part.^
ordres- du roi, intéreffé d’ailleurs à ménager ce
monarque qui s’étoit chargé de négocier lui-même
le mariage du duc de Vendôme avec l’héritière
de Navarre , fe contenta de dire au duc d Aumale :
Vous pouve1 , mon compagnon, marcher fur la meme
ligne que moi; car f i le roi avoit ordonné à un laquais
de prendre le rangée vous prenez, je le fiouf-
friroispar refpeél pour les ordres de fa majefié. (Mémoires
de Vieille-Ville.) Cette conteftation n’eut
point pour le moment d’autres fuites;, mais elle
prépara les haines qui éclatèrent dans la fuite
entre les maifons de Bourbon 8c de Lorraine.
Le même duc dû Aumale, étant allé au-devant
du Cardinal Charles de Lorraine fon frère, lorf-
que celui-ci revint du concile de Trente, penfa
recevoir fa part de l’infulte que le maréchal de
Montmorenci, gouverneur de Paris 8c de l’Ifle de
France , fit à ce cardinal, fur ce qu’il entroit avec
des gardes dans la capitale; mais le liazard fit que
le duc d Aumale, après avoir vu fon frère, rentra
par la rue S. Martin, tandis que le cardinal, rentrant
par la rue S. Denis, fut rencontré 8c attaqué
par le maréchal de Montmorenci ( voir l’article
Lorraine , 8c dans cet article, l’article particulier
du cardinal Charles de Lorraine.) Les
jours fuivans, le duc d’Aumale raffembla fes amis ,
le maréchal de Montmorenci les fiens ; on s’at-
tendoit à tout moment à quelque choc entre les
deux partis; mais le roi leur ordonna de défarmer ,
8c ils obéirent.
Le duc d’Aumale, ainfi que ceux de fa maifon J
fit la guerre aux Huguenots avec divers fuccès;
il fut tué en 1577, au fiége de la Rochelle, par
fa faute ou par celle du duc de Bouillon , ion
neveu 9 qui, de lui-même, ou par lé confeil du
duc d !Aumale, prévint d’un jour l’expiration d’un©
trêve.
Charles de Lorraine , duc d Aumale, fon "fils
aîné, fe diftingua, même parmi les princes de fa
maifon, par fon attachement perfévérant aux intérêts
de la Ligue ; il lés eût cependant abandonnés,
fi Henri IV ne lui eût pas refufé le Gouvernement
de Picardie. La ville de Ham lui ap-
partenoit. En 1595 , d’Humieres tué devant cette
place; l’amiral de Villars tué de £ang froid devant
Dourlens; le maréchal d’Au mont, bleffé à mort
devant le bourg de Comper en Bretagne ; Cambrai
pris par les Efpagnols, tous ces défaftres de
la France irritant le parlement de Paris comte le
duc d’Aumale qui n’y avoit pas peu contribué-;
il rendit contre ce prince un arrêt par lequel il
le déclarait criminel de lèçe-majefié au premier chef#
& coupable du parricide de Henri Ï I I9 & pour ces
crimes, le condamnait à être tiré tout v i f à quatre
chevaux , fes quartiers attachés aux quatre principales
portes de Paris, s’il pouvait être appréhendé, finon
en effigie , fa maifon d’Anet rafée & /es bois coupés
à hauteur de ceinture, fes biens confifqués, & fes
enfans dégradés de nobleffe. Le roi., qui n’eût pas
approuvé cet excès de zèle, étoit abfent alors ;