
5?2 B E N
BENJÀNS , f. m. pl. ( Hijloire moderne. ) J
forte d’indiens répandus datas toute l’A fie, par les I
mains defquels le fait tout le commerce. Ils font
le courtage pour les compagnies de France, d’Angleterre
& de Hollande.Ils ne le cedent en rien pour >
Inexpérience, pour l’habileté & l’avidité du gain,
ni aux Arméniens , ni aux Juifs. Ils font aulïi la
banque. Ils ont beaucoup de crédit , & font
d’affez bonne foi. Ils ont aes caillés où l’on peut
dépofer en fureté fon argent. ( A. R. )
BENIVIENI, (J érome) (Hijl. litt. mod.)
gentilhomme & poète florentin , eft connu pour
avoir renouvçllè le goût & la manière du Dante
& de Pétrarque, dont on s’étoit trop écarté en
Italie dans le quinzième fiècle. La plupart de fes
poéfies font pieufes , & roulent fur l’amour divin ;
on eftime fur-tout fes Cançone ddl'amor celejle e
d ivin e , où l’on trouve les idées les plus fublimes
de Platon fur l’amour. Il fut l’ami du célèbre Jean
Pic de la Mirande , & voulut être enfermé dans
le même tombeau. Il mourut en 1542., à 89
ans.
BENOIT (Saint) {JSîJL mod.) Les vertus
chrétiennes de faint Benoît, • fa vie cénobitique ,
fa fainteté, fes miracles appartiennent à Fhiftoire
eccléfiaftiqûê, & ne font pas de notre reiïbrt.
Nous confxdérerons feulement en lui un des premiers
inftituteurs de la vie monaftique en occident,
l’auteur d’une règle admirée par laint Grégoire ,
& adoptée par prefque tous les cénobites . fur-tout
le fondateur d’un ordre laborieux, favant & éclairé,
oui a dû fes riçheflés au travail & à la culture des
terres, fa confidératien littéraire à des études profondes
, à des ouvrages immenfes, auxquels des
écrivains difperfés dans le monde & des efprits
partagés par les foins du fiècle n’auroient pu fuf-
fire. Cet ordre n’a jamais troublé ni Fégfife par ;
des fe% s , ni l’état par des cabales ; on ne l’a
point vu rechercher la direction des princes , c’eft-
à-dire le gouvernement des empires; il n’a jamais
ni foulevé les peuples, ni abufé les rois ; dans les
temps difficiles, il a conftamment réfifté au torrent
du tanatifme & de la révolte qui entraînoit tous
les ordres religieux ; on n’a point vu les bénédictins
marcher avec eux dans la proceflion ridicule
& facrilège de la ligue. Aucun préjugé de cloître
ne les a jamais écartés des devoirs de fujets & de
citoyens. Benoît & fes compagnons, voyant le
monde en proie aux pallions & aux erreurs, dé-
folé par les conquérans & les barbares, recueillirent
le peu de paix qui reftoit fur la terre, & la
fixèrent, avec la vertu & le travail , dans la retraite.
Les uns défrichèrent les campagnes , les
autres multiplièrent les manuferits , çônfervèrent
lés monumens de l’antiquité , fervirent l’état ,
l’églife & les lettres, Le conquérant Totila voulut
voir Benoît dans l’afyle où il s’étoit caché, & il
devint moins barbare après l’avoir entendu. Ce
goût pur de la retraite & du travail s’eft confervé
jJajis ces faintes congrégations ; les fucçeffçur« aç-
B E N
tuels recueillent en paix les fruits des travaux de
ceux qui les ont précédés; maïs ils en jouiffent
fans fafte & fans aéfordre , en répandant l’abondance
, en faifant fleurir l’agriculture autour d’eux
& dans leurs riches domaines. Eh ! qui donc en
jouir oit ? Faut-il donner les biens de ces folitaires
à dévorer à des courtifans qui les laifferont en
friche polir habiter les cours , & fe ruiner dans
les villes ? D’ailleurs l’efprit de faint Benoît anime
toujours fes fucceffeurs. D ’autres travaux plus adaptés
aux temps, aux befoins aéhiels , à l’état même
de ces religieux , & à leur fortune , ont remplacé
les travaux manuels dont leur fociétè naiflante ne
pou voit fe dilpenfer : ils ne font plus laboureurs,
ils font favans. Si leurs écrits .ont tous les avantages
de l’érudition_, ils en ont aufli les inconvé-
nienS ; mais qu’eft-ce que ces inconvéniens, en
comparaifon des avantages ? Des ouvrages trop
volumineux, & où tout n’eft pas utile ; voilà tout
ce que la légèreté même du bel efprit a pu leur
reprocher ; mais quand on ne regarderoit -ces ouvrages
que comme de vaftes amas de matériaux
que le talent doit mettre en oeuvre, & parmi lef-
quels le goût doit choifir, pourroit-on le plaindre
de leur abondance-?
Saint Benoît s’étoit d’abord retiré dans le fond
d’une caverne , au milieu du défert le plus fauvage ;
là il étoit heureux du feul bonheur d’oublier le
monde , d’ignorer tout & d’être ignoré. Ce bonheur
partagé par quelques difciples, & d’autant
plus vivement fenti, que la guerre étaloit fes horreurs
à l’entour & ne refpectoit que cet afy le, y
attira fuccefîivement un fi grand nombre de difciples
, que Benoîtint obligé de quitter fa caverne
& d’aller former un plus grand établiflement au
i mont Cafîin, dans l’Apennin ; c ’eft là le chef-lieu
j de l’ordre, & comme la métropole d’où il a envoyé*
des colonies dans les différentes contrées de
l’occident. Laiffons-le fe glorifier d’avoir produit
quarante papes, deux cens cardinaux, cinquante
patriarches, mille fix cens archevêques, .quatre
mille fix cens évêques, quatre empereurs, douze
impératrices, quarante-une reines, & trois mille
fix cens faints canonifés ; félicitons-le d’avoir eu
les Mabillon , les Montfaucon 9 les,Martenne, les
d’Achery, les Ruinart, les Vaiffette, les Bouquet,
&c. Voilà une gloire qu’on ne peut lui çontefter,
8ç dont il n’y a rien à rabattre. Il n’en eft pas toujours
de même des faints. Dom Mabillon en avoit
retranché quelques-uns dans le grand recueil des
aétes des faints de l’ordre de faint Benoît ; un bé-
liédidin de la congrégation de faint Maur 9 nommé
Baftide, s’en plaignit comme d’un affront & d’un
tort fait à l’ordre, & préfenta une requête contre
dom Mabillon au chapitre général de 1677. Il faut
publier, à l’honneur de l’ordre, qu’il eut plus
d’égards à la critique exaéle de dom Mabillon ,
qu’au zèle dévot de dom Bàftidç, & qu’il rejetta la
requête.
Saint Benoît ètofr né çn 480 au territoire de
Nurfie 3
B E N
N u r fie d a n s le duché de Spoletô ; îl âVôït été
élevé à Rome ; il mourut vers Fan 543. C ’eft une
grande queftion entre les favans, fi fon corps eft
refté au mont Caflin, ou s’il a été apporté à l’abbaye
de Fleury fur jLoire , aujourd’hui faint
Benoît.
On trouve les ouvrages de ce faint dans la bibliothèque
des pères ; (a vie a été écrite par faint
Grégoire.
Un autre faint Benoit, abbé d’Aniane, dans le
diocèfe de Montpellier, égala prefque, trois fiècles
après , la réputation du premier ; il étoit fils d’un
comte de Maguelone ; on le voit paroître avec
diftindion à la cour 8c dans les armées de Pépin
le Bref 8c. de Charlemagne ; il fonda enfuite dans
une de fes terres Fabbaye d’Aniane dont il fut le
premier abbé. Il fut Finftrument dont Charlemagne
m fervit le plus utilement pour la réforme du
clergé, fur-tout du clergé régulier. Louis le Débonnaire
l’établit chef 8c fupérieur-général de tous
les monaftères de France. On a de lui le code des
règles 8c la concorde des règles. Il mourut en
8a i . >
M. de Sacy a trouvé dans l’hiftoire de Dane-
marck un Benoît qui mérite la mention qu’il
en fait. Ce Benoît étoit frère de Canut -IV,
dit le faint, roi de Danemarck. Lojfque le perfide
Asbiorn , chef des rebelles, vint en 1086
à Odenfée', fous prétexte de rendre compte au roi
des deffeins de l’armée ennemie ; mais en effet,
pour pénétrer les fiens, Benoît, que fa défiance
rendoit plus clairvoyant que Canut, pénétra dans
Famé du traître, y lut tous fes projets , & voulut
qu’on l’arrêtât ; mais il ne fut point écouté. Lorf-
qüe l’armée parut fous les murs de la v ille , il
voulut foutenir le liège, 8c fon confeil ne fut pas
fuivi ; les rebelles entrèrent , Benoît défendit
avec, une valeur héroïque la porte de l’églife où
fon frère étoit renfermé. Canut récitoit des
pfeaumes, tandis que Benoît couvert de fon fang
8c de celui des ennemis , donnpit & reçeyoit
mille coups, La porte de l’églife étoit fermée
par les cadavres entaffés qu’il avoit abattus. Un
député des rebelles fe prélente & demande à parler
aü roi : Benoît foupçonne que c’eft un affaf-
fin & veut qu’on le repouffe.; Canut veut qu’on
l’iiitroduife , 8c_çe député le poignarde. Alors l’é-
glife devient un champ de bataille ; Benoît après
avoir fai,t des prodiges de bravoure , tombe „&
meurt viâime de l’amitié fraternelle. Canut qui
périt pour les intérêts du clergé , fut canonifé, &
Benoit qui mourut pour fauver fon frère ‘ 8c fon
roi, ne le fut pas. Son attachement pour Canut
eft d’autant plus louable, que pendant plufieurs
fiècles les rois de Danemarck n’ont pa$ eu de plus
grands ennemis que leurs frères 8c leurs plus proches
parents. (M. de Sacy. )
Il y a eu quatorze papes du nom de Benoît. Le
plus iljuftre de tous eft Benoit X IV , Profper
Hijloire. Tom. ƒ, Deuxieme part?
B E N f p z
Lambertînî, faVant aimable, théologien tolérant,
prélat homme du monde, prince habile. Né à
Bologne en 167^, il en fut fait archevêque en
1731 ; il avoit été fait cardinal en 1728 ; il fut élu
pape en 1740 à la place de Clément XII. Pour
éteindre les querelles du janfénifme, il avoit eu
l’idée d’un corps de doârine , où fans toucher aux
opinions de Baïus , de Janfénius & de Quefnel,
telle vérité feroit proferite & telle erreur condamnée
; il vouloit faire ligner ce corps de doctrine*
qui eût tenu lieu de formulaire & de la bulle
Unigenitus ; mais cette figpature étoit encore de
trop ; ce font ces fignatures qui gâtent tout, parce
qu’elles ont je ne fais quel air de ligue & d’affo-
ciation de parti : on oublie que les vérités énoncées
dans tel formulaire, dans tel corps de doétrine, font
éternelles ; on fonge feulement que le formulaire,
le décret eft une nouveauté, 8c qu’on a vu naître
l’ufage de le ligner. Aufli ce projet n’eut-il point
d’execution, 8c Benoît XIV qui ne Favoif conçu
que pour le bien de la paix, étoit trop fage pour
le fuivre en vpyant qu’il pouvoit allumer la guerre.
Cet efprit de paix oc de modération fut l’ame de
fon gouvernemenr. Particulier , il avoit cultivé les
lettres; fouverain, il les protégea, en quoi, il
fut différent de quelques autres papes, nommément
du pape Adrien V I , qui ayant dû aux lettres fon
élévation , ne fit rien pour elles, lorfqu’il fut parvenu
à la tiare. Benoit XIV rendit des honneurs
aux favans, & leur accorda de juftes récompeiifès.
Il fonda des académies à Rome, il envoya des
gratifications à celle de Bologne. La Sorbonne
reçut de lui fon portrait & fes ouvrages ; il fit
tracer une méridienne ; il fit tirer de terre l’obé-
lifque dé Séfoftris, & orna la'ville de Rome de
plufieurs monumens antiques ; chaque année de fon
pontificat fert d’époque à la réforme de quelques
abus, à l’introduâion de quelque ufage utile. Ses
ouvrages font en feize volumes in-folio. Le plus
célèbre eft fon Traité fur le fynode. Il mourut en
1758 , & eut pour fucceffeur Clément XIII. Tous
les éloges qu’on pourroit en faire, ne vaudroient
pas l’hommage que lui a rendu le fils du miniftre
\Valpole, à fon retour dTtalie en Angleterre, par
une infcripüon italienne qu’on a traduite ainfi en
françois :
A Profper Lambertini,
Evêque de Rome ,
Surnommé Benoit X IV ,
Qui, quoique prince abfoiu ,
Régna avec autant d’équité
Qu’un doge de Venife.
Il rétablit le luftre de la tiare ,
Par les moyens qui feuls la lui ont fait obtenir .
G’eft-à-dire par les vertus :
Aimé des papilles ,
Eltimé des proteftans ,
Prêtre humble & délîntéreflc ,
Prince fans favori >
Ft'ff