
privilèges & de leur liberté. Il fit la même promette
aux Cyrénéens qui fe biffèrent féduire par
cet efpoir; alors, fe mettant à la tête d’une ncm-
breufe armée, il defcendit du mont Taurus, & fe
précipita comme lin torrent dans les campagnes
de la Ciltcie tandis que Ton fils, avec une flotte
nombreufe, attaquoit les villes maritimes de la
Phénicie. Les Cyrénéens furent les premiers à
embraiter fa caife , & à leur exemple, les villes
lui ouvrirent leurs portes. Gaza, T y r & Joppé ,
qui oppofèrent quelque réfiftance , furenr punis
par le pillage. L'ifl'e de Chypre , alors en proie
aux faélions, lui fut livrée par Pigmalion, dont il
avoit corrompu la fidélité. Ses profpérités ne furent
pas fans mélange de revers : fon fils Démétrius
perdit une bataille fous les murs de Gaza, en Syrie,
& fa défaite fit rentier lés villes de Phénicie fous
la domination de Ptolomée., qui n’ambitionna d’autres
fruits de fa vi&oire, que l’honneur de rétablir
Seleucus, fon allié, dans Babylone; il lui fournit
des troupes dont le commandement fut confié à
un général préfomptueux *, qui, plein de mépris
pour la jeuneffe de Démétrius, s’imagina qu’il lui
fuffiroit de le combattre pour le vaincre. Il marcha
fans précaution, & le jeune prince, informé de
fa négligence, fondit fur lui & difperfa fon armée.
Antigonus, inftruit que fon fils avoit été défait dans
les plaines de Gaza, dit froidement : Ptolomée a
•vaincu des enfans, il aura bientôt des hommes à combattre.
Il franchit le Taurus avec toutes fes forces,
il entra dans la Phénicie qui fut rangée fous fon
obèiffance. Les deux partis également rebutés de
la guerre, firent une paix qui fut rompue auffi-
tôt que jurée. Démétrius commit les premières
hoftilités , en defcendant dans l’ifle de Chypre,
qui fut b conquête. La flotte de Ptolomée, dif-
perfée par la tempête, ne put l’arrêter dans le cours
de fes profpérités. Ce fut dans ce temps qu'Antigonus
fe fit proclamer roi de l’Afie; il fut le premier des
fuccefleurs d’Alexandre qui prit ce titre, & fon
exemple fut. imité par tous les gouverneurs des
autres provinces. Antigonus fe regarda comme le
monarque univerfel, Ô£ enflé de fes fuccës, il
forma le deffein de conquérir l’Egypte : il fut mal
fécondé par la fortune; fa flotte, difperfee par les
vents, ne put féconder les opérations de 1 armée
de terre, qui eut beaucoup à fouflrir. Ptolomée
profita de cette circonftance pour faire*défçrter les
troupes de fon ennemi ; les foldats mercénaires
fuccombèreiit aifément à la feduâion de fes pto-
meffes, aimant mieux feryir fous un roi magnifique
qui favoit récompenfer,, que fous un roi févere
qui ne favoit que punir. Cette défection 1 obligea
'd’abandonner l’Egypte fans avoir pu l’entamer, ha
difgrace ne put humilier fa fierté, & perféverant
à & croire fupérieur aux autres rois, il traitoit
Ptolomée de capitaine de vaiffeau ; Seleucus, de
çondu&eur d’êléphans; & Lyfimaque , de garde
du tréfor royal. Ces rois dédaignes réunirent leurs
forces, lui livrèrent une bataille près d lpius, ville
de Phrygie. L’împéfueux Démétrius, dans le pre*
mier choc, difperie l’ennemi, & entraîné par fon
courage imprudent, il pourfuic les fuyards avec
une chaleur qui lui ravit la vidoire. Il fe trouve
par-tout invefti fans pouvoir rejoindre le corps de
l’armée : fon père, effrayé de fon danger, tente
de .s’ouvrir un paflage pour le dégager ; il fe précipite
comme lin furieux au milieu des élèphans
& des ennemis. Ses foldats, étonnés de fon défe:-
poir, l’abandonnent fans combattre : il tombe percé
de coups fur une foule de morts qu’il avoit immolés.
Il mourut la douzième année de l’ère dés féleu-
cides; on lui donna le furnom de Cyçlope, parce
qu’il étoit borgne. ( T—N. )
( On a retenu $ Antigonus ou Antigone plufietirs
mots mémorables. C’en lui qui a dît le premier
que la royauté ejl une honnête feivitude , & que fi
on favoit ce que pèfe une couronne, on craindrait de
fe la mettre fur la tête. Ce barbare qui avoit fait
brûler v if Antigène auquel, après tout, il avoit
obligation , & qu’il avoit engagé à la perfidie qu’il
ofa punir en lui, étoit devenu, dans fa vieilleffe,
d’une douceur extrême, quelqu’un s’en étônnoit :
on conferve par la douceur, dît Antigone, ce qu'on
acquiert par la force. Il étoit avare, & amaffoit de
l’argent par toute forte de petits moyens, on lui
oppofoit l’exemple d’Alexandre, qui avoit toujours
paru dédaigner l’argent. Alexandre moiffonnoit, répondit
- il , moi , je ne fais que glaner. Un poëte
l’appelloit Dieu dans fes vers. Mon valets de-chambre
, d i t - i f fait bien le contraire. Un philôfoplie de
la fe&e des Cyniques , lui demanda une drachme ;
c’efi trop peu pour un Prince, dit Antigone. Le C y nique
alors demanda un talent. — C'efl trop pour un
Cynique. )
I Antigonus Gonatas , fils de Démétrius ,
Poliorcètes, dont il vient d’être parlé dans Parti*
cle précédent, & petit-fils $ Antigonus , objet
de ce précédent article , fut également célèbre par
fon courage & fes malheurs , il fut furnommé
Gonatas, parce qu’il avoit été élevé à Gone , ville
de Theffalie ; fon père qui avoit fait trembler l’A fie ,
& qui avoit réuni tant de peuples fous fa domination
, ne lui laiffa pour héritage que la Macédoine
, & quelques contrées de la Grece. Il fignala
les premiers jours de fon règne par fes vi&oires
fur les Thébains ; mais il fe rendit plus refpeG-
table par fa piété filiale , que par fes talçns militaires.
Son père retenu à la cour de Seleucus ,
écrivit aux Athéniens & aux Corinthiens : Ne me
comptez plus au nombre des vivans, n’ayez plus d’ér
garcf à mes lettres, ni à mes ordres , ni à mon
fceam; c’efi: à mon fils que vous devez l’obéif-
fance, il eft votre roi puifque je fuis captif. Antigonus
, véritablement touché du malheur de fon
père, ordonna un deuil public, & donna les témoignages
les moins fufpeds d’une profonde affliction
t infenfible aux attraits du trône, il n’écouta,
I que la nature , & il -écrivit à Seleucus en ces ter-
| mes ; » Je yqus offre tout ce qui me refte de l’héritage'
•« rîtàge de mes pères ; & fi y pour vous en* affiner j
« la poffeffion, vous avez befioin de ma tête, vous
si pouvez en difpofer; ce facrifice n’aura rien de pé- ;
j) nible pour moi, fi vous rendez la liberté à mon
71 père 57. Ses prières furent inutiles; & devenu maître
d’un royaume agité de troubles domeftiques ,
il eut à combattre Pyrrhus, roi d’Epire , qui ,
.après l’avoit vaincu, le dépouilla de fes états, &
fe fit proclamer roi de Macédoine. Ce prince conquérant
, pour affurer le fruit de fa vi&oire, vou-
loit l’avoir en fa puiffance ; il tepourfuivit de contrée
en contrée, & l’alfiégea dans Argos, où un
mur, s’écroulant fous les coups, des machines de
guerre, l’écrafa fous fes débris. Après fa mort,
Antigonus entra en poffeffion de fes états dont il
avoit été privé pendant fept mois. Ce fut fous fon
règne que les.Gaulois répandus dans l’Afie, ne laif-
foient aux rois de l’Orient que l’alternative, ou de
leur payer tribut, ou d’effuyer leurs .brigandages.
'/Gonatas fut le feul des fiicceffeurs d’Alexandre qui
ne confentit jamais d’être leur tributaire, & il fe
prépara courageufement à'tes combattre s’il étoit
attaqué. Ces barbares, étonnés.de,fon refus, inondèrent
bientôt fes frontières. Leurs prêtres, après
avoir confulté les entrailles des victimes, leur prédirent
que cette guerre leur feroit funèfie ; mais
ils fe flattèrent de fléchir les dieux par le facrifice
de ce qu’ils avoient de. plus cher ; & faifis d’un
fanatifme impie, ils égorgent fur l’autel d’Hercule
leurs femmes & leurs enfans. La nature outragée
.excitateur remords; & lorfqù’ils furent en préfence
de l’ennemi, ils crurent voir dans tes Macédoniens
autant d’Euménides armées pour tes punir de leur
fureur : ils paffent des tranfpotts de l’ivrefle à l’abattement
& l’inertie. Cette vidoire délivra la Grèce
des invafions des barbares ; mais \or{<gcC Antigonus
efpéroit en recueillir le fruit, il vit fes frontières
dèvaftées par Alexandre, roi d’Epire, qui
prit 1e prétexte de venger la mort de Pyrrhus ,
fon père,pour fatisfaire fon ambition. Les deux partis
en viennent aux mains, &• Gonatas abandonné de
fon armée, eff vaincu & fait prifonnier. La Macédoine
paffa fous la domination d’Alexandre , qui
à fon tour fut vaincu & dépouillé de fes états par
Démétrius , fils dé Antigonus. Ce,prince régna quarante
quatre ans. dans la Grèce , & trente-quatre
dans la Macédoine : il mourut âgé de quatre-
vingts ans. Sa poftérité régna dans la Macédoine
jufqu’à Perfée qui en fut 1e dernier roi ; & alors
ce royaume fut réduit en province romaine.
A n t ig o n u s , fils d’Ariftobule, roi des Juifs ,
implora la proteéfion de Pacorus , roi des Parthes,
à qui il promit mille talens, & cinq cens femmes,
s’il vouloit l’aider à monter fur 1e trône de Judée.
Le roi barbare, féduit par l’éclat de cette promeffe,
' fe tranfporta à Jérufalem, alors en proie à deux
fadions dont l’une favorifoit Hircan & Phafelus,
& l’autre foutenoit Antigonus. Dès que les Parthes
furent maîtres de la v ille, ils fe faififfent d’Hir-
çan & de Phafeks qui furent jettés dans tes fers'.
Hifioire, Tom. I,
Phafelus, înfiruit du fort cruel quil’attendoit, pré*
vint fön arrêt en fe donnant la mort. Hérode,
fon frère, fauva fa vie par la fuite. Antigonus,
arbitre des deftinées d’Hircan , daigna 1e laiffer
vivre , mais fil eut la barbare précaution de
lui arracher les oreilles avec fes dents , pour le
rendre incapable des fondions du façerdoce. La
loi judaïque excluoit du miniftère facré tout homme
mutilé ; Antigonus fe crut alors paifible poffeffeur
du feeptre & de l’encenfoir ; mais Hérode, qui s’é-
toit réfugié à rome, en obtint du fecours pourfe
rendre maître de Jérufalem ; il fe faifit $ Antigonus
qu’il envoya à Antoine pour 1e punir. Ce
Romain, charmé d’avoir en fa puiffance 1e protégé
d’un prince dont 1e père avoit humilié la fierté
de Rome par. la défaite de Craffus , condamna fon
captif à expirer fous la hache du bourreau, trente-huit
ans avant la naiffance de Jéfus-Chrifi. ( T-n. )
( Il y a des hifioires mémorables d’un Antigonus de
Carifte, qui vivoit fous les deuxpremiersPtolomées.)
ANTIMONARCHIQUE, adj. ( Hifi. & Polit. )
ce qui s’oppofe ou réfifte à la monarchie ou au
gouvernement royal.
L ’a n t im o n ARCHIQUE eft fréquemment ufité
dans le même fens que Républicain. (G )
ANTINE (D . M a u r F r a n ç o i s d ’ , -( Hifi.
mod. ) bénédidin de la congrégation de Saint-Maur,
a travaillé aux cinq premiers volumes de l’édition
de Ducange , de 1736 ; à la colledion dés hifio-
riens de France, & à l’art de vérifier les dates,
1750, in-4°. Ce dernier ouvrage'à été/ réimprimé
in -folio en 1770, par tes foins' de D. Clément,
qui l’a confidérablement augmenté.
ANTINOUS. {Hifi anc, ) C ’efi 1e 330111 de ce
trop équivoque,ow trop peu équivoque ami d’Adrien ,
qui eft une tache, éternelle dans la vie rie cet empereur.
Il mourut l’an 12.9 de Jéfu?-Chrift. Les
uns difent qu’il fe noya, dans 1e /hil ; les autres
que, dans un facrifice offert;aux Dieux pour
la prolongation des jours d’Adrieçt , il voulut être
la vidime , & s’immola lui - même. Si ce fait eft
vrai , il aimoit encore plus Adrien qu’il n’en étoit
aimé, & comment met-on ®une générofité fi folle
dans un fentiment contre nature ? Qu’Àdrien l’ait
pleuré, rien de plus naturel; mais il lui érigea des
temples, lui donna des prêtres, des prophètes ,
un oracle , & l’adora mort suffi bien que vivant.
Il fit frapper des médailles en fon honneur ; on
en a encore quelques-unes où il eft repréfenté en
Bacchus ; c’étoit un Grec de Bythinie.
ÀNTIOCHUS I , ou A n t io c h u s S o t e r ;
( Hifi. de Syrie. ) ce nom donné à plusieurs rois
de Syrie jette une grande confufion dans leur histoire
, & ce n’eft que par leur furnom qu’on peut
tes diftinguer les uns des autres. Le premier qui 1e porta etoit fils de Séleucus, capitaine & fuccef-
feur d’Alexandre dont il recuillit tes plus riches
héritages. Ce fut lui qui fut 1e fondateur de l’empire
de Syrie, qui domina fur la plus grande partie