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caravanes de mer établies pour le mênie fùjet ;
telle efl la caravane de valflèaux qui va de Conf-
tantinople jufqu’à Alexandrie.
On appelle aufli caravanes, les campagnes de
îliçr, que les chevaliers de Malte font obligés de
ftirc contre les Turcs & les corfaires, afin de parvenir
aux commanderies & aux dignités de l’ordre !
ç>n les nomme de la forte, parce que les chevaliers
ont foüvçnt enlevé la caravane, qui va tous
les ans d’Alexandrie à Conftantinople, (G )
CAR A V AN SERAI, f, m. {Hifi. mod.) grand bâtiment
public deftiné à loger les caravanes.
. .Ce mot vient de l’arabe cairawan, ou du per-
fan karvan, qui fignifie caravanne, & de ferai, hôtel
ou grande maifpn, ç’eft-^-dire , hôtellerie des
VQyagettss,
Ces caravanferais, ou, comme Chardin les appelle,
caravanferails, font en grand nombre dans
l’Orient , OÙ ils ont été bâtis par la magnificence
des princes des différens pays.
. Ceux de Schiras & de Casbin en Perfe paflent
pour avoir coûté plus de foixante mille écus à bâtir;
ils font ouverts à tous venans,'de quelque nation
& religion qu’ils foient, fans que l’on s’informe ni
de leur pays, ni de leurs affaires, & chacun y
çft reçu gratis.
. Les caravanferais font ordinairement un vafte &
grand bâtinfent quarré, dans le milieu duquel fë
trouve une cour très-fpacieufe : fous les arcades qui
l’environnent, régné une efpëce de banquette élevée
de quelques piés au-deflus du rez-rde-chauffée,
où les marchands & voyageurs fe logent comme
ils peuvent, eux & leurs équipages; les Bêtes defom-
ine étant attachées au. pié de la banquette. Au def-
fus des portes qui donnent entrée dans la cour,
il y a quelquefois de petites chambres que les concierges
des caravanferais favent louer fort cher à
ceujf qui veulent çtre en particulier.
. Quoique les caràvanferair tiennent en quelque
fprte lieu en Orient des auberges, il y a cependant
une différence très-grande entr’eux & les auberges;
c’eft que dans les caravanferais, on ne trouve
abfolument rien ni pour les hommes ni pour les
animaux, & qu’il y faut tout porter ; ils font ordinairement
bâtis dans des lieux arides, fiériies &
déferts, où Fon ne peut faire venir de l’eau que
de loin & à grands frais, n’y ayant point de caravan-
ferai fans fa fontaine. Il y en a aufli plufieurs dans
les villes, où ils fervent non-feulement d-auberge,
mais encore de boutique, de magazin, même de
place de change.
Il n’y a guère de grandes villes dans l’Orient,
fur-tout de celles qui font dans les états du grand
feignepr, du roi de Perfe, & du Mogol, qui n’ayent
de ces fortes de bâtimens. Les caravanferais de
Conffantinople, dllpahan, & d’A gra, capitales des
trois empires, font fur-tout remarquables par leur
magnificence & leur commodité.
En Turquie, il n’éft permis qu’à la mere &
aux foeurs du grand-feigneur, ou aux, vifirs &
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bachas qui fe font trouvés trois fois eu bataillé
contre les chrétiens, de fonder des caravanferaisi
(G) P . J
CARAVANSERASKIER, f. m. {Hiß. mod.) directeur
ou intendant, chef d’un caravanferai.
Dans chaque caravanferai qui fë rencontre fur
les routes & dans les déferts, il y a un caravanfe-
raskier. ; dans ceux qui font fitués dan§ les villes,
çleftines à ferrer ou étaler les marchandas,
comme dans celui d’Ifpahan, il y a aufli un officier
ou garde-magazin, qu’on appelle caravanferaskier.
Il répond des marchandiles dépoféfes dans le caravanferai,
moyennant un certain droit ou rétrri
bution qu’on lui paye. (G)
C A R C A V I , (Pierre de) (Hiß. litt, mod.)
confeiller au grand confeil, & garde de la bibliothèque
du roi, ami de Fermât, de Pafcal, de
Robçrval, de Defcartes avec lequel il fe brouilla
cependant. Mort à Paris en 1684.
CARDAN , ( Hiß, litt. mod. ) Jérôme Cardan,
medeçin , aftrologue & fou célèbre du feizième
fiecle, rapporte dans l’hifioire qu’il nous a laiffée
de la vie que quand la nature ne luifàifoit point
fentir quelque douleur, il s’en proeuroit lui-même
■ en fe mordant les lèvres ou en fe tiraillant les
doigts jufqu’à ce qu’il en pleurât , parce que s’il
lui arriÿoit d’être fans douleur , il reflentoit des
faillies & des impétuofités d’efprit fi violentes,
qu’elles^ lui étoient plus infupportables que la douleur
même. Ce Cardan a tiré l’horofcope de J. C . ,
folie dont Pierre d’A illi, cardinal & évêque do
Cambrai , & depuis > Tibère Rufiilianus Sextus lui
avoient donné l’exemple; mais ce qu’il y eut de
fingulier , fut que Cardan fe voyanf perfécuté pour
cet horofcope, aima mieux-s’expofer à toiis les dangers
qui pouyoient en arriver , que de renoncer
à l’honneur de rinvention, en citant l’exemple do
ces deux hommes qui Pavoient précédé dans cette
folle impiété. Il prétendoit avoir comme Socrate
un démon familier. En parlant de fon intelligence ,
il la plaçoit entre les fubftances humaines & la
nature divine , & il mefufcoit en quelque forte ces-
diftances ; il y a plus loin , difoît-il , des facultés,'
d’un homme à celles d’un ange , que des, facultés
d’un chien à celles d’un homme, parce que dans
les progreffions géométriques, la même loi donne,
en avançant, des proportions toujours plus éloignées
; 2 , 4 , 8 , 16 &c. Mais pourquoi le créateur
auroit-il été obligé d’établir la loi des. pro-
greflions géométriques entre les divers objets de
la création?:
La médecine chez Cardan efl prefque toujours
fondée fur l’aftrologte judiciaire ; fes écrits font
pleins de faits pour le moins hazardés ; il prétend
ciu’il y a des hommes, qui en tenant ta tête immobile,
peuvent donner à leurs cheveux tel mouvement
qu’ils veulent ; il affure que dans fa jeu;-
nefie il voyoit clair dans les ténèbres, que l’âge
avoit affoibli en lui cette faculté, qu’il voyoit cependant
encore ea s’éveillant au milieu de la nuit ,
mais
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mats qu’il ne difcernoit plus aufli parfaitement les
objets que dans un âge plus tendre; toutes ces !
merveilles dont il rapporte des raifons phyfiques
& médicinales , font pour le moins bien fufpeCtes
de la part d’un homme qui entroit en extâfe quand
il vouloit, & qui prétendoit voir aufli clair dans
lès ténèbres de l’avenir que dans celles de la nuit.
Il avoit prédit à Edouard V I , roi d’Angleterre ,
d’après les règles de l’aftrologie , plus de cinquante
ans de règne ; Edouard VI mourut à feize ans. Ces
mêmes réglés lui avoient fait voir clairement qu’il
lui ;étbit impoflible à lui-même de vivre jufqu’à
quarante-cinq ans ; il régla en conféquenùe l’arrangement
dé fa fortune, ce qui l’incommoda beaucoup
le refte de fa vie. Quand il fe vit trompé
dans fes calculs, il refit fon thème 9 & trouva
qu’au moins il ne pa'fferoit pas la foixante - quinzième
année. La nature s’obftina encore à démentir
l’aftrologie ; mais pour cette fois il ne voulut
pas avoir lè démenti, & fe laiffa mourir de faim,
Faftrologie lui étant plus chère que la vie ; en
revanche il méprifoit beaucoup la magie, mais un
aftrologue n’en a pas le droit. Né à Pavieen 1501,
mort à Rome en 1576. Ses oeuvres ont été recueillies
en 1663 par Charles Spon, en dix volumes
in-fbl. Ce fera le traiter bien favorablement, que
de s’en tenir fur fa perfcnne & fur fes ouvrages,
au jugement qu’en a porté M. de Thou » Cardan,
dit-il , » femble quelquefois être au - deffus de
» l’homme , mais plus fouvent au-deffous d’un
y enfant «.
: Sa devife n’étoit pas d’un fou , la vpici : Tempus
tnea po/fej/îo, tempus ager meus. »Le temps efl: ma
w richeffe, c’eft le champ que je cultive «.
Il eut un fils, Jean-Baptifte Cardan , auquel il
eut la douleur de voir trancher la tête en 1560 :
fon crime étoit d’avoir empoifonné fa femme. Le
père fit à cette occafion fon traité : De utilitate
ex adverjis capiendâ. De Vutilité qu’on doit tirer de
l ’adverjité. Jean-Baptifte étoit aufli médecin , &
avoit aufli du favoir : on a de lui un traité de ful-
gure , & un autre de abjlinentiâ ciborum fztidorum ,
imprimés parmi les oeuvres de fon père.
CAREL. Voye^ Childebrand.
C AR G L I , ( Hifl. d’Anglet. ) gentilhomme de la
province de Lincoln, bouffon de la reine Elizabeth.
Leur facétie la plus ordinaire étoit de parler latin
enfemble, parce que Cargli ne le favoit pas, &
qu’elle prétendoit l’avoir oublié. Quel chien de latin
parlez-vous donc là, Cargli ? lui dit-elle un jour.
*— Madame, un latin de fou , & vous un latin de
femme , nous devons nous entendre. Elle lui der
mandoit une autre fois ce qu’on difoit d’elle à la
cour. On dit, madame, que de plus de vingt maris
qui vous ont été pré/,entés , vous n’avez pas eu l’efprit
d’en choïfir un.
CARIBERT, oaCherebertVIII, roi de France.
( Ht foire. de France. )
Hifoire. Tom% /. Deuxieme Part^
C A R
Contran, roi de Bourgogne.
Sigebert, ou Sigibert I V , roi dAuftrafie.
Chilpéric I I , roi de Soiflons.
Ces princes partagèrent les états de ClotaireI, leur
pere, luivant l’ufage d’alors, c’eft-à-dire, par le fort.
Chilpéric, le plus jeune & le plus audacieux, avoit
fait plufieurs tentatives pour réunir dans fa per-
fonne la monarchie entière. Caribert eut Paris, &
c’eft pour cette_raifon qu’on lui donne le titre de
roi de France, exclufivement à fes frerès, dont
les royaumes ne formoient, avec le fien, qu’un
feul corps de monarchie. Le partage ne fut pas
tel qu’il s’étoit fait entre les enfans de Clovis ; les
limites des quatre royaumes ne furent pas les mêmes
: par exemple, celui de Paris fut augmenté
de la Touraine , q u i1 auparavant dépendoit du
royaume d’Orléans, & de l’Albigeois , qui avoit
appartenu à celui d’Auftrafie. Gontran eut le royaume
d’Orléans, augmenté de toute l’ancienne Bourgogne
& du Sénonois ; Châalons-fur-Saone fut le
fiege de fa domination. Sigebert, le plus vertueux
de ces princes, eut rAuftraue,avec toutes fes dépendances
au-delà du Rhin. Chilpéric enfin eut le
royaume de Soiflons : on efl: étonné de trouver
dans Ion lot les villes de Bayeux, de Rennes,
& d’autres plus éloignées encore. Il efl à croire
que les feigneurs , maîtres de fixer le fort de chacun
, en ufoient ainfi, dans la crainte que ces princes
ne fe fuffent défunis, s’ils avoient en leurs
états féparés. Nous avons déjà obfervé, que quoiqu’il
y eût plufieurs royaumes ;• la domination
françoife ne formoit qu’un feul corps de monarchie.
Dans les occafions extraordinaires, comme quand il
falloit porter la guerre au-dehors, les délibérations
fe faifoient en commun entre les feigneurs des quatre
royaumes.
Le régné de Caribert n’eft marqué par aucun
événement mémorable; il fe comporta avec
affez de douceur & de modération. On lui reproche
fon. incontinence. Il répudia la reine Ingober-
g e , & époufa fuceflivement Meroflede, Mercoëfe,
& Theodechiide, celle-ci étoit fille d’un pâtre.
L’origine des deux autres n’étoit pas moins abjecte.
La bénédiction ne s’étendit pas fur ces mariages :
il n’en eut aucun enfant mâle. La reine Ingoberge
lui donna une fille qui fût . mariée à EthelberfT,
roi des Cantiens. Il eut, de fes concubines, deux
autres filles , qui toutes deux prirent le voile ,
l’une à Tours, l’autre à Poitiers. Caribert mourut
en 570, dans la cinquantième année de fon âge
& la neuvième année de fon régné. Il mourut
dans les liens de l ’excommunication, dont faint-
Germain évêque de Paris, l’a voit chargé. Les papes,
comme l’ont remarqué tous les modernes,
n’interpofoient point encore leur autorité dans ces
conjonctures toujours infiniment délicates ; chaque
prélat étoit juge fouverain dans fon diocèfe pour le.
fpirituel.
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