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fon ternes au rang des premiers poëtes ] quand on
voit un auteur du temps, en parlant des hommes
célèbres que la Normandie a produits, ajouter :
A cette heure même elle nous fournit MeJJieurs de Bois-.
Robert, Scudery, Rotrou, Corneille , Saint-Amand
& Benferade.
On en croira plutôt le rondeau de Malleville,
où après avoir dit que le cardinal eft coëffé de l’abbé
de Bois-Robert, qu’il appelle Frère René 3 il ajoute:'
Ce n'eft pas que frère René
D'aucun mérite foit orné >
Qu’il foit dofîe , qu’il fâche écrire,
Mais c’eft feulement qu'il eft né
Coëffé.
L’abbé de Bois-Robert eut un moment de difgrace,
mais comme il avoit peu d’ennemis & qu’il avoit
fu fe ménager l’amitié de Citois, premier médecin
du cardinal, ce moment fut court. Le médecin vint
au fecours du plaifant dont la bonne humeur don-
noit de l’efficacité à fes remèdes, il mit au bas
d’une ordonnance, Recipe Bois Robert, & dans la
converfation, il ne ceîfoit de dire au cardinal: Mon-
feigneur, n oublie^ pas que toutes -nos drogues font
inutiles , fi vous ny mêleç une dragme de Bois-Robert.
En effet, un homme qui faifoit rire, devoit être
bien précieux à ce trille, fombre & févère politique
qui ne rioit jamais. Fais-moi rire, dit à arlequin le
prince farouche dans la comédie de la vie efl un
fonge. H ‘
La difgrace de l’abbé de Bois-Robert avoit été
jiifqu’à l’exil, & l’académie avoit demandé fon
rappel.
L’abbé de Bois-Robert mourut en 1662, oublié
depuis vingt ans, c’eft-à-dire depuis la' mort de fon;
proteéleur.
BOISSÀRD, (Jean-Jacques) ( Hifi. litt. mod?)
favant antiquaire, auteur de quelques ouvrages
eflimés des antiquaires : Theatrum vitoe humanot.
De divinatione & magicis proefiigiis. Topographia
urbis Rom<z. Embkmata. Poemata. Né à Belançon en
1528. Mort à Metz en 1602.
BOISSAT, ( Pierre de ) ( Hifi. litt. mod. )
chevalier & comte Palatin , titre qui lui fut conféré,
auffi bien qu’à Chapelain, par le vice*-légat d’Avignon
, Gafpard Lalcaris , fut un des quarante premiers
académiciens dont le cardinal de Richelieu
compofa l’académie françoife à fa naiffance. Per-
lonne ne fauroit aujourd’hui fon nom , fans la
grande & fâcheufe affaire qu’il eut à Grenoble , la
réparation que la nobleffe du Dauphiné exigea pour
lu i, & le foin qu’il prit de la faire agréer à l’académie
françoife. L’hiftoire de M. de Boijfat n’eft
pas comme celle de plufieurs littérateurs célèbres, '
uniquement renfermée dans leurs écrits. Nicolas,
Chorier, fon compatriote, a écrit fa vie fous ce
t'tre : De Pétri Boejfatïf. equitis 6» comitis Palatini,
vitâ amicifque litteratis libri duo. Grenoble , 1680.
M. de Boijfat, qu’on nommoit dès fon enfance
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Boijfat l'efprit , étôit un gentilhomme du Dauphiné,
né à Vienne en 1603. Il fervit en qualité
de volontaire en 1622 , fous le connétable de Lefi-
diguières, contre les huguenots du Vivarais. Il ht
un voyage à Malthe où il fut traité comme le fils
d’un homme qui en avoit écrit l’hiftoire à la fatis-
fa&iori de lordre. En 1625 le connétable de Lef-
diguières ayant invité la nobleffe Ndu Dauphiné à
fecourir le duc de Savoie contre les Génois, M. de
Boijfat fe diflingua dans cette expédition. E111627,
il fe diftingua encore à la défenfe de Fille de R é ,
fous M..de Toiras, & en 1628 au fiége de la
Rochelle. Il fe fit auffi un nom par fon bonheur
ou fon adreffe, mais certainement par fa valeur,
dans divers combats finguliers , grand mérite alors,
& qui le rendit cher à Gafton, due d’Orléans. Ce
prince fe l’attacha en qualité de gentilhomme de fa
chambre, lui donna fa confiance & l’employa pour
ou contre la France dans toutes les expéditions
qui demandoient de la réfolution & du courage.
En 1636, Boijfat voulut revoir fa patrie. Etant à Grenoble
il fe trouva, pour fon malheur, à un bal
que donnoit le~comte de Sault, lieutenant de roi
en Dauphiné. Boijfat étoit déguifé en femme, &
: à la faveur du mafque, il fe permit de tenir, à la
comteffe de Sault des propos dont elle s’offenfa &
dont elle fe vengea en grande dame, c’eft-à-dire
en employant la force pour faire à Boijjat la plus
cruelle injure qu’un homme de coeur pût recevoir..
La vengeance que Boijfat jura folemnellement de
tirer d’un tel aftront, s’adreffoit naturellement au
comte de Sault, foit qu’il fut complice.ou non de
la violence de fa femme ; la nobleffe du pays qui
voyoit.d’un côté le commandant de la province,,
de l’autre un brave homme cruellement outragé ,
intervint dans cette affaire, rendit impoffible toute
voie de fait, évalua le point d’honneur , régla
toutes les opérations refpedives , & les fit exécuter
en fa préfence. L’afte en fut dreffé autentiquément
le 25 février 1638, & figné de foixante-quatre ou
foixante-cinq gentilhommes des meilleures maifons
du pays. M. de Boijfat en envoya copie à l’aca- :
démis, & voulut avoir fon avis fur cet accommodement.
Cenrart, fecrétaire, lui répond: « Nous
» avons appris avec contentement combien vos
» intérêts ont été chers à meffieurs de la nobleffe
» du Dauphiné ; & avec quel foin ils vous ont
j> procuré la fatisfaâion que vous avez reçue.
» Toute la compagnie trouvoit.... votre reffénti-
» ment légitime. Mais fi le mal étoit grand , il
j> faut avouer auffi que le remède qu’on y a ap-
» porté, eft extraordinaire ; & il femble que vous
» ne l ’euffiez pu refufer fans vous faire tort à
,» vous-même, & fans offenfer ceux qui vous l’ont
» préparé avec tant de fageftè & de jugement.
» Elle croit donc que vous avez eu raifion de dé-
» férer aux avis & à la prudence de ces meffieurs ,
” & que vous ne pouviez avoir de plus sûres &:
» dé plus illuftres cautions de la réparation, de
» votre honneur, que tant de perfonnes à qui il
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» eft plus précieux que leur propre v ie , qui en
y? connoiffent parfaitement les loix . . . . . enfin ,
» monfieür , elle eftime qu’un gentilhomme ne
» peut être traité plus - ^lorieufement que vous
a l’avez été par tous ceux de votre profeffion,
» qui, dans cet accommodement, ne paroiffent
v pas moins vos proteâeurs que vos juges. »
Il eft affez remarquable que ce foit précifément
dans le temps où la nobleffe du Dauphiné travail-
loit à cette conciliation, à cette tranfaélion fur le
point d'honneur , que Corneille ait fait entendre
ces vers dans le Cid.
Les fatisfaâions n’appaifent point une ame ;
Qui les reçoit a tort, qui les fait fe diffame ,
Et de pareils‘accords l’effet le plus commun,
Eft de déshonorer deux hommes au lieu d'un.
L’aventure de Boijfat eft. de 1636. On travailla
13 mois à l’accommodement, figné le 25 février
1038. C ’eft en 1637 qu’a paru le Cid.
Depui's cette aventure, Boijfat ne reparut plus
à Paris ni à la cour. Vienne fut pour lui un tombeau
où il s’enfevelit ; il devint dévot & fauvage ;
il portoit la barbe longue & les cheveux négligés ;
il étoit toujours couvert d’habits greffiers ; il prê-
choit la populace , faifoit des jmiffions & des pèlerinages.
En 1656,1a reine de Suède, Chriftine ,
paffa par Vienne.; on fàvoit que Boijjat lui étoit
connu par fes poëfies; les principaux habitans le
prièrent de fe mettre à leur tète & de la haranguer.
Il y confentit, mais fans rien changer à fon
extérieur & à fes manières, & pour tout compliment
, il n’entretint la reine que des jugemens de
Dieu & du mépris du monde. La reine étonnée
dit : Quel efi donc ce capucin qu'on me donne pour
Boijfat?
Une chofe affez remarquable encore , c’eft qu’il
î f avoit guère paru de Boijfat que des ouvrages latins,
lcrfqu’il fut nommé à l’académie françoife. Les uns
en profe, font des relations des différentes expéditions
militaires où il s’eft trouvé ; les autres en
vers , font un poème à la louange de Charles-
Martel , fur la défaite des Sarrafins, à la bataille
de Poitiers; une paraphrafe en vers latins des inf-
titutes de Juftinien, comme on a mis dans ces
derniers temps la'coutume de Paris en vers ; des
fyW es, des élégies, des hèroïdes, des métamor- f
phofes, des épigrammes , & c. Ses ouvrages fran-
çois font une Relation des miracles de Notre-Dame
de l'Obier, avec des vers à la louange de la fainte 1
Viergeen cinq langues, ( grecque, latine, efpagnole,
italienne, françoife ) & une Morale chrétienne ,
ouvrages de fa retraite. Si l’on en croit l’auteur de
fa v ie , VHifioire Négrepontique, contenant la vie &•
les amours d'Alexandre Caflriot , roman qui parut I
en 1631 ; & les Fables d’Efope, enrichies de difeours I
moraux, philofophiques, politiques & hifioriques , I
ouvrages imprimés fous le nom de Jean Baudouin I
de l’académie françoife, font de Boijfat, qui ne les 1
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trouvant pas affez graves pour lui, confentit que
fon ami les adoptât. Mais i ° . comment fon ami
confenjoit-il d’adopter les ouvrages d’un .autre ?
20. Les fables d’Efope par Baudouin & fes difeours
moraux, &c. font un très-mauvais ouvrage, mais
en quoi manque-t-il de gravité ?
Boijfat mourut le 28 mars 1662.
i BOISSIÈRE, (Joseph de la Fontaine de la)
oratorien , dont les fermons ont été imprimés à
Paris, en fix vol. in-12. Mort en 1732.
BOISSIlU , (D enis de Salvaing de) premier
préfident de la chambre des comptes du
Daupniné ,• auteur iïun Traité de l'ufâge des fiefs,
& autres droits feigneuriaux dans le Dauphiné,
Grenoble , 1731 , in-folio. Ses décifions fur les matières
féodales fervent de loi dans quelques parle-
mens du royaume. Son commentaire fur Xîbii
d’O vide, qu’il avoit .fait avant vingt ans , eft l’ouvrage
d’un favant confommé ; le livre fcandaleux
de arcanis amoris & veneris, lui a été attribué ;
mais M. Lancelot a prouvé qu’il eft de Nicolas
Chorier. ( Mém. de littérat. tom. 12, hifi. pag. 316
& fuiv.J II eut pour le moins beaucoup de part
au livre de la fcience héroïque de Vulfon de la
Colombière , & comme fous le nom de celui-ci
& à la faveur de l’incognito ,■ il traite avec grande
diftinétion fa propre famille, ceux qui ont fu après
coup la part qu’il avoit à cet ouvrage , ont eu
pour fufpeâ ce qui la concerne : on a même dit
à ce fujet que les autres hommes dévoient leur èxif-
tence' à leurs ancêtres , mais, que les ancêtres de Salvaing
de Boiffieu lui dévoient la leur.
On a recueilli les oeuvres fugitives de Salvaing
de Boiffieu, profe & vers, fous le titre de Mifcella,.
Lyon, 1662, in-S°. Mort en 1683 le 10 avril ,
âgé de 83 ans.
BOISSY, ( Louis de ) ( Hifi. litt. mod. ) auteur
comique, moderne. Son théâtre eft en neuf vol.
i/z-8 J. On joue de lui au théâtre françois, le François
à Londres, les Dehors trompeurs, & le Babil-,
lard. Plufieurs autres de fes pièces ont eu dans le
temps un grand fuccès à la comédie italienne. Il
naquit à Vie en Auvergne en 1694. Il fut reçu à
l’académie françoife en 1751. Il eft mort en 1758.
Un autre Boissy , ( Jean - Baptifte Thiaudière
de ) connu fous le nom de l’abbé de Boijfy, fut
de l’académie des inferiptions & belles-lettres. Il
étoit né à Paris le 20 oélobre 166.6. Il fut attaché
à la maifon de Rohan & à la perfonne du cardinal
de Rohan , Armand-Gaftôn. Il fut chargé de
l’éclucation du prince Maximilien, frère du cardinal,
tué en 1706 à la bataille de Ramillies, & de
celle du prince de Soubife, fon neveu, mort de
la petite vérole le 6 mai 1724 à vingt-fept ans ;
ce fut l’abbé de Boijfy qui engagea le cardinal de
Rohan à faire l’acquifition de la bibliothèque du
préfident d(e Ménars , laquelle avoit été la fameufe
bibliothèque de M. de Thou. L’abbé de Boij/y fnt
reçu à l’académie des belles-lettres au mois de
février 1710. Les deux. premiers mémoires qu’on