
& Mercure, entre la verge $ Aaron & le caducée.
\ Article abrégé. ) Aaron d’Alexandrie ( - Hiß. litt, moderne. ) ,
prêtre chrétien & médecin en Egypte, vers l’an
62.2, eft le premier qui ait traité de la petite vérole,
maladie venue de l’Arabie.'Ses ouvrages,, écrits en
langue fyriaque , furent traduits en arabe, vers
la nn du foptième fiècle,par ordre du calife Mervan I, Aaron-Rashid , ou Al-Rashid , ou Rachid ,
c’êft-à-direßejuße {Hiß. des Arabes) vingt-cinquième
calife &le cinquième de la race des Abaffides, étoit
fils de Mahadi. La loi déféroit le califat, non au fils, ni
au plus proche parent, mais au plus âgé de la famille.
Mahadi avoitdeux fils,Hadi ou Hahi-Mufa & Aaron.
Soit prédilection pour Aaron, foitconnoiffancede la
fupériorité de fes talens, Mahadi le nomma pour fon
fucceffeur, au préjudice de Mufa. Aaron jugea cette
préférence injufte & refüfa d’en profiter : Mufa,
moins touché de la modération de fon frère que
de l’intérêt de fon fils, déclara celui-ci fon héritier.
Ce renverfement de la loi fcandalifa les Mufulmans
zélés ; Mufa éprouva des contradictions, il s’irrita ,
& il alloit fe porter aux dernières violences contre
fon frère, lorfqu’il mourut. Aaron fut proclamé
calife , l’an de notre ère 786, de l’hégire 164. Son
régne fut brillant & heureux. Il étendit fes conquêtes
dans les trois parties du monde, depuis FEfpagne &
l’Afrique jufqu’aux Indes. Il gagna en perfonne huit
grandes batailles, 11 impofa tribut à l’empire Grec
du temps de l’Impératrice Irène, & Nicéphore,
fucceflêur d’Irène, lui ayant écrit à fon avènement
une lettre très-fière., pour lui demander la refiitution
du tribut payé par Irène, Aaron ne lui répondit’qu’en
s’avançant jufqu’aux portes de Confiantinople, &
en foumettant Nicéphore à un tribut plus confidé-
rable. Nicéphore, pour mieux l’appaifer, joignit au
tribut de riches prêfens. Parmi ces. prêfens, il y
avoit des. épées, le calife en fit l’eflai en préfence
des ambaffadeurs Grecs, & les ayant toutes coupées
avec fon cimeterre <* Vous voyez ,»leur dit-il, fi
» les armes de votre maître peuvent réfifter aux
» miennes. Mais , eût-il mon cimeterre, il lui fau-
» droit encore mon bras pour s’en fervir r>.
Ce fut fous le règne £ Aaron, que les Arabes
commencèrent à aller commercer à la Chine.
De tous les fbuverains du monde, Aaron ri’efti-
moit, & ne vouloit pour allié que Charlemagne.
Ces deux princes, lans s’être jamais vus., eurent
toujours, l’un pour l’autre, le coeur d’un ami. La
feule renommée établit entre ces rois , une amitié
plus tendre & plus confiante que celle qu’un commerce
aflidu fait paître & que l’habitude entretient
entre des particuliers. Les hifloriens fe font plu à
décrire les prêfens qu'Aaron envoya en différentes
rencontres à Charlemagne ; une tente d’une étendue
auffi vafie & d’une diftribution intérieure, aufîî commode
que les palais les plus fômptueux; urte horloge
d’un travail fingulier ; mais fur-tout un éléphant,
le premier qui eut encore paru en France , le
feul qu’eût alors k calife, le dont il fe priva fans
Iiéfiter^ ayant entendu dire que Charlemagne ers
défiroit un ; il envoya., dit-on, aufîî à ce prince »
les clefs du faint fépuïçhre , & lui abandonna la
propriété des lieux faints ; fait qui auroit befoira
d’être confirmé ou expliqué, & qui a fervi de fondement
à toutes les fablés où Charlemagne eft re-
préfenté comme l’inventeur des croifades, & le
premier conquérant de la Terre-Sainte. Mais ce qui
eft plus vrai & plus important, c’eft la parfaite
conformité de talens, de lumières, de vertus qui
fe trouvoit entre ces deux grands princes ; tous-
deux furent plus célèbres encore par les arts de la
paix , que par les talens de la guerre, & par la
fcience utile du gouvernement, que par la gloire
fùnefte des conquêtes; tous deux protégèrent &
cultivèrent les lettres, & s’entourèrent de fàvans
qu’ils inftruifoient eux-mêmes ; tous deux eurent,
fur tous leurs fujets, cette fùpêriorité de mérite
qui devroit diftinguer tous les fouverains,& qui
fomble être le véritable droit de régner, antérieur
à toute loi, & indépendant de toute convention.
Charlemagne monté fur le trône , dix-huit ans
avant Aaron, paroît avoir fervi de modèle à ce
prince, & c’eft fa plusgrande gloire.
Aaron aimoït à répandre l’inftruéfion parmi le
peuple ; il étoit perfuadé que la connoiflance des
devoirs en facilite la pratique, il avoit été frappé
du difeours d’un fage avec lequel il s’enfermoit uir
jour pour lire & expliquer un paffage important
d’un auteur, concernant les devoirs de l’homme;,
Aaron ordonna de fermer la porte de fa chambre „
pour n’être pas interrompu dans fa leâuré. « Faites
33 plutôt ouvrir toutes les portes, lui dit le favant
qui l’accompagnoit, v une Ie&ure utile eft un bien-*
» fait dont un prince ne doit point priver fés peuples»*
Aaron avoit fur-tout en recommandation la juftice;
& la vérité; mais un conquérant peutil tou jours être
jufte ? Un jour marchant à la tête de fon armée , il
fut abordé par une femme qui vint lui porter des
plaintes de quelques vexations que-les foldats avoient
commifès en paflant fur fes terres. Aaron trop indulgent
pour des foldats qui lui étoient trop necef—
faires, dît à cette femme *. N’aveç-vouspas lu dans
n CAlceran , que les princes défilent tous les lieuse
n par ou paffent leurs armées ? - - Oui ; mais f y ai lu
» a u jf, répondit cette femme, les maifons des
» princes feront détruites à caufe- de leurs injufices 3?»
Le dommage fut réparé.
On a ,.dans l’Orient, une vénération particulière'
pour les fous; le. proverbe que les fous 6» tes
enfans prophétifent, y eft très-accrédité ; les Mu-
firlmans croient que Dieu parle dans ceux que la.
raïfon ne fait point parler, & que par conféquent-
ils ne peuvent rien dire que de vrai ; il vaudrait,
mieux croire plus Amplement, que la raïfon n’a-
giffant point encore dans les enfans & n’agiffant;
pliis dans les fous, leurs difeours ne méritent aucune
attention. Aaron vouloit bien que les fous,
confervaffent leurs- privilèges, mais il ne vouloit
pas que ce.s privilèges fuffent ufurpés pair
A a R
€es impofteurs. Il parut, fous fon règne, un fou
■ qui fe difoit Dieu. Le calife voulut l’éprouver &
te le fit amener. « Il a paru depuis peu, lui dit-il,
» un homme qui fe difoit envoyé de Dieu : ‘je le fis
"93 interroger ; l’impoflure fut avérée » O je l'envoyai
>3 au fupplice ». Aaron efpéroit que la crainte d un
pareil fort engagerait celui-ci à tout avouer, pendant
qu’il le pouvoit encore impunément ; mais,
fans s’émouvoir, il répondit au calife,: « Tu fis
9) bien ; je n avois point accordé le don de
»3 prophétie à ce miférable , 6» il n avoit aucune mijfion
93 de ma pan ». Cette réponfe, dit-on, fit voir
qu’il étoit fou; mais elle auroit pu être faite par
un homme d’efprit.
Aaron faifoit, comme Charlemagne, d’abondantes
aumônes ; il étoit Mufulman zélé, & fidèle aux ob-
fervances de la”lo i; on a remarqué qu’il faifoit,
par jour, jufqu’à cent génuflexions; quil fit, juf- :
qu’à huit fois, le pèlerinage de la Mèque ; qu’il eft le
dernier calife qui l’ait fait en perfonne, & que tournant
du moins la fuperftition en charité , quand il
ne pouvoit faire lui-même ce vôyàge , il le faifoit
faire à fes dépens, par trois cens pauvres. Il mourut,
en l’an 809, après vingt-trois ans de règne.
AARSENS ou AERSENS,(François) {Hifl.
inod. ) fils d’un greffier des Etats-Généraux des
Provinces-Unies, fut formé dans la politique par
du Pleffis-Mornày. Il remplit avec fuccès & avec
^éclat différentes ambaffades en France, en Italie,
«n Allemagne , en Angleterre. Il fut le premier
ambaffadeur des ProvinCeS-Unies reconnu en France
dans cette qualité : Henri IV fixa fon rang immédiatement
après Celui de l’ambaffadeur de Ve-
iiife. Il a laifle des mémoires eftimés fui- fes ambaffades
de France en 1609 & 1624, & d’Angleterre
en 1620 & 1641. C ’eft un des plus grands
hommes d’état qu’ ait eu la république de Hollande.
Te cardinal de Richelieu difoit qu’il n’avoit connu
que trois grands politiques , dont Aerfiens étoit un. ’
AB A B , f. m. {Hifl. moderne. ) c’eft le nom des ;
matelots que le Turc lève dans fon empire, lorf-
que les eiclaves lui manquent poür le lervice de
Ja marine. Vingt familles fourniffent un Abab qui
eft fondoyé par les dix-neuf dont il n’eft: pas. Sa paie
eft d’environ cinq cens livres par an. ( Article refié. )
A B A CO T , f. m. nom de l’ancienne parure de
H tête des rois d’Angleterre ; fa partie fupérieure
formoit une double couronne. (A. R.)
A B A CU C , voyez HABACUC.
ABAILARD, ou ABELARD, ( Pierre ) ( Hifl.
moderne. ) un des plus célébrés do&eurs ail douzième
fiècle. Il étoit breton, né au village de Palais,
à quatre lieues de Nantes:: ce qui,l’a fait ap-
peller par quelques auteurs le Pèripatètïcïen Palatin.
De même qué les peuples barbares ne favent que
.fairela guerre, les favans barbares ne favent que
difputer. Abailard étoit le plus fiibtil dialeéficien
& le plus ardent difputeur de fon fiècle ; c’eft à
^argumentation fcolaftique, unique fcience alors,
unique talent, tant dans la philofophie que dans
rA B A i8 7
la théologie, qu'il a dû fa grande réputation, aès
perfécutions éclatantes, & l’honneur de plaire à
Héloïfe. Difciple , rival de gloire, & vainqueur
de Guillaume de Champeaux, archidiacre de 1 è-
glife de Paris, autre dofteur célèbre dans le même
genre , il éleva autel contre autel , école contre
ecole. Tantôt chaffé par la perfécùtion , tantôt
rappellè par l’eftime publique, fouvent fugitif ,
par-tout révéré , , par-.tout fuivi d’une foule d écoliers
, abfent, préfent, également redoutable a
Champeaux , contre lequel il difputoit fans celle,
fur quoi ? fur les univerfaux ; Champeaux ne put
échapper à cette guerre d’argumens, qu en devenant
evêque de Cnâlons ; Abailard eut à peu près
les mêmes démêlés avec Anfelme, fon maître en
théologie, comme Champeaux l’avoit été en phi-
iofophie. La fource de ces querelles étoit toujours
la fiipériorité d'Abailard fur fes maîtries, fon mépris
pour eux , & la facilité avec laquelle il leu**
enlevoit leurs écoliers. D ’après ce double principe
d’amour-propre & d’intérêt bleffès, on Pp
doit pas être furpris de l’acharnement de ces dil-
putes , les univerfaux n’étoient que le pretexte.
Abailard, las des orages & des contradi&ions que
lui attiraient fon mérite & fon humeur, chercha
fa confolation dans l’amour : on fait comment s e-
tant introduit chez Fulbert, chanoine de 1 églne de
Paris, pour ènfeigner la philofophie à Héloïfe la
nièce, il parvint à lui infpirer une paffion, qui
n’a peut-être jamais eu d’égale pour la vivacité ni
pour la durée. Il naquit un fruit de leur amour
qu’ils nommèrent Aflrolabius , apparemment en
mémoire de l’afironomie qui les occupoit alors.
Abailard tira fon Héloïfe de la maifon de Fulbert,
& l’envoya faire fos couches chez une feeur qu il
avoit en Bretagne ; il offrit enfuite à Fulbert d e-
poufer fecretement fa nièce : mais Héloïfe , par
une délicâteffe fingulière , ne vouloit pas même
confontir à un mariage fecret : le facrifice de fa
réputation étoit fait, elle vouloit tout devoir &
tout donner à l’amour, rien à la néceffité ; le nom
de femme, difoit-elle, eft plus faint & plus irapo-
fant, mais celui d'amie eft plus doux. Uxor nomen
efl dignitatis , non voluptatis. , difoit (Elius Verus.
D’ailleurs elle craignoit d’être un obftacle à la fortune
que les talens d!Abailard lui promettoient
dans.l’état eccléfiaftique. Les philofophes , difoit-
elle , ne doivent point fe marier , cet engagement
n’eft pas fait pour eux ; les embarras dû
ménage nuilent à la liberté d’efprit néceffaire pour
l’étude : cependant comme elle ne favoit point réfifter
à Abailard, elle l’époufa fecretement, parce
qu’il le voulut. Fulbert, qui n’avoit prétendu que
réparer l’honneur de fa nièce,& qui n’entendoit rien
à toutes ces délicateffes, s’empreffa , contre la parole
donnée, de publier ce mariage : Héloïfe per-
fifta toujours à le nier. Fulbert ne voyant dans
cette conduite qu’une foumiffion aveugle aux intentions
d’un mari injufte, s’en prit à celui-ci ; &
fe portant aux derniers excès de la vengeance de
Aa 2