
pas qu’il lui fut permis de régner fans fon père,
il eut la gloire de brifer fes fers & de le reporter
fur le trône, où il confentit feulement de fervir
de guide à un père aveugle, en qualité de collègue
ou d’afîocié. Ifaac mourut peu de jours apres
fon rétabliffement, Alexis IV lui fuccéda.
Mais pour opérer cette révolution, Alexis IV
avoit pris avec les croifés des engagemens onéreux
oc. néceffaires ; il devoit leur fournir des
Jfom mes confidérables dont ils avoient befoin pour
la crôifade : il fallut donc en revenir à fouler par
néceflit'é des peuples cp\'Alexis III avoit déjà foulés
par cupidité. Les peuples murmurèrent ; les
croifés trouvèrent encore qu'Alexis manquoit aux*
promeffes qu’il leur avoit faites ; tout le monde
•étoit mécontent, alors il s’éleva un'nouveau concurrent
qui perfuadaaux peuples qu’il les délivre-
Toit des croilés , tyrans plus funeftes pour eux que
ies deux Alexis. Ce nouvel ufiirpateur, qui régna
■ fous le nom d’Alexis V , fe nommoit Ducas, &
étoit furnommé Murtzulphe, parce que fes four-
cils fe joignoient, & lui tomboient fur les yeux ;
il avoit été grand - maître de la garderobe fous
Ifaac - Lange & Alexis IV ; Il détrôna ce dernier
Prince, & le fit étrangler, mais il ne jouit pas de fon
crime ; il crut devoir commencer fon règne par
une guerre contre les croifés ; ceux - ci reprirent
Conrtantinople, & Alexis V étant dès-lors réputé
•détrôné , les Grecs élurent pour empereur Théodore
Lafearis mais les Latins, qui avoient pris
deux fois Conftantinople, réfolurent de le garder,
& de transférer l’empire des Grecs aux Latins; ce
qii’ils firent en élifant pour empereur , Baudouin ,
comte de Flandre, & alors commença ce qu’on
appelle l'Empire des Latins, qui dura cinquante-
huit ans. L’éleôion de Baudouin s’étoit mite le
fécond Dimanche d’après Pâques de l’an 1204. Baudouin
continua la guerre contre Murtzulphe, le
prit & parut vouloir fe contenter de lui faire crever
les yeux ; mais les François étoient trop irrités
contre Murtzulphe pour le laifier v ivre, ils le
précipitèrent du haut d’un rocher. Il mourut en
1204, peu de tems après fa révolte & fon couronnement
; cependant il avoit affez régné pour
montrer fur le trône beaucoup d’avidité, d’injuftice
& de cruauté. Tous les détails de cette étonnante
•révolution ont été coufignés dans l’hiftoire par une
lettre fort curieufe de l’empereur Baudouin à l’arche
vèquede Cologne.
Le nom d'Alexis eft célèbre aufli dans la Ruflie,
pour avoir été porté par un grand empereur §c
par un prince malheureux.
Le czar Alexis■ - Michaelowitz, €efi-à-dire, fils de
Michel, fit la guerre auxPolonois & aux Turcs ,dif-
puta le trône de Pologne à Jean Sob-ieskij agrandit- fes
états par la conquête de Smolensko , de Kiovie & de
LUkraine,ce qui prépara des guerres,à fes iucceffeurs;
il protégea le commerce , fit exécuter les loix , plus
grands avantages fans aucuns inconvéniens ; mais
fa .plus- grande gloire eft d’avoir été le père^ du
czar Pierre I. Il fut au czar Pierre ce que Philippe
avoit été à Alexandre , ce que Pepin-le-bref avoit
été à Charlemagne , le digne précurfeur d’un
grand prince-, le digne père d’un fils plus grand
que lui. Il mourut en 1076 ou 1677. Alexis-Petrowitz , fils du czar Pierre-le-grand,'
ennemi de fon père, hautement oppofé à toutes fes
réformes, fut condamné à mort, <k. vraifemblable-
ment exécuté ; du moins il mourut très-fubitement*
peu de jours après fa fentence le 26 juillet 1718 dans
fa vingt-neuvième année. C’eft de Charlotte-Chrif*
tine-Sophie de Brunfwich-Wolfemhuttel,fa femme,
morte à Pétersbourg le 1 novembre 1715 , qu’on
raconte qu’elle ne mourut ni dans ce temps ,.ni dans
ce lieu , qu’elle fe fauva,, fe déguifa , vint en
France , ou elle fut reconnue par le comte de Saxe
dans les tuilleries, •& qu’elle eft morte bien avant
dans ce fiècle, au village de Vitry près Paris.
A L FAQ U IN , f. m. prêtre des Maures : il y
en a encore de cachés en Efpagne. Ce mot eftcom-
pofé de deux mots arabes, dont l’im fignifie exercer
Voffice de prêtre, ou adminijlrer les chef es f ointes , &
Fautre fignifie clerc : Yalfaqui -ou alfaqum de 'la
grande mofquée de Fez eft fouverain dans les affaires
fpirituelles , & dans quelques affaires tempo-
Telles ou il ne s’agit point de peine de mort. {A . R.')
A L FARAB I, pnilofohe mufulman du dixième
fiècle, dont on conte des merveilles , qui ont bien
l’air de fables. Au retour du pélérinage de la Mé-
que, il paffa par la Syrie & parut à la cour de
Seifeddoulet, lultan de Syrie, qui aimoit les lettres
-& les arts. Il difputa fur les fciences contre les
do&eurs, il triompha des docteurs ;-on fit venir des
muficiens, il triompha des muficiens ; il joua en-
fuite différens airs de fa compofition , un air plai-
fa n t , & il fit rire tous les afliftans , un air tou-1
chant, & il les fit tous pleurer, un air ennuyeux
apparemment , & il les fit tous dormir, ce qui
n’empêche pas' qu’on ne lui faffe honneur de cé
dernier air, parce qu’ on fùppofe qu’il voulait les
endormir. Le fultan , charmé de cette univerfalité
de talens , voulut le retenir & le fixer à fa cour ;
Alfarabi s’excufa d’y refter , & il fit prudemment;
•s’il eft vrai qu’il eut triomphé des docteurs ; mais
il n’y gagna tien , car en paffant dans une forêt
de la Syrie, il fut tué par des voleurs, l’an 954,
de J, C . Il avoit écrit- fur toutes les fciences , car
il les poffédoit toutes ; une partie de fes ouvrages
fe trouve , dit-on , dans la bibliothèque de Leyde;
ALFENUS VARUS (Publius) , (Hifl. rom.)
cordonnier à Crémone, puis jurifconfulte , puis
conful romain, l’an 755 de Rome. C ’eft bien certainement
de lui qu’Horace parle dans la fatyre 3®.
du livre I.
Ut Alfenus vafer j ornai
Abjeclo inftrumento artis , clausâque tabemâ
, Sutor, erat.
Il n’eft pas aufli certain que ce foit lui- qui,
ayant été envoyé par Augufte pour commander
vers le Pô à la place de Poli ion, ait exempté les
terres de Virgile du fort des autres terres du voi-
finage, aflignées aux foldats après la défaite de
Brutus , & qu’en conféquence ce foit de ce Varus
que parle Virgile , .églogue fixième :
Super tibi erunt qui dicere laudes
V a n , tuascupiant & triftia condere bella . . <v
Te nojlra , Vare , myricce ,
Te nemus omne canet : ncec Phabo gratior ulla eft
Quam Jibi quce Vari pvcefcripfit.pagina nomen*
Et dans l’églogué neuvième r
Imo hcec , quce Varo necdum perfecta canebat ?'
Vare , tuum nômen , J'uperet modo Mantua nobis-t,
Mantua, vce'mi ferez nimiàm vicina crernona
Contantes fublimefirent ad fidera Cycni.
Et plus bas : :
Me quoque dicunf
Vatem pajlores , fed non ego credulws illis ‘
jNam neque ad'hue Varo videor nec dicere Cirinâ
Digna j fed argutos inter Jîrepere anfer olores.
Ici nous fômmes bien tentés de rendre a nos
léfteurs le fervice dè les empêcher d’être trop fa-
vans fur ce qui concerne lès différens Varus, Var
rius & Quintilius dont il eft parlé dans Virgile &
dans Horace , & de les affurer que la matière eft
pleine d’embarras & d’incertitude.
M. Dacier ^le traduéleur d’Horace. ) croit que le
Varus dont il eft parlé,au moins dans ce. dernier vers :
Nam neque 'adhuc Varoyideor , nec- dicere Cinnâ
Digna.
eft le poète Varius, & il lit en conféquence:
Nam neque adhuc Vario.
Ce qui eft contraire àprefque toutes les éditions, &
©’eft dommage , carié fens féroit fort naturel. Virgile
parlant avec modeftie de fbn talent, diroit :
je n’en crois point les bergers qui me flattent du
titre de poète ; je mêle le fimement aigre d’un oifon
au chant mélodieux- de ces cygnes ; Cinna, dans
ce cas , feroit Càïus Helvius Cinna , poète renommé
chez les Romains.
Mais il eft poffible auflï. que Vîrgilè ne fe.compare
dans ces vers à aucun poète , qu’il ne parle-
que d’hommes puiffans & illuftres dont fes chants
ne lui paroiffent pas dignes , & qu’il ne fe compare
que d’une manière générale à un oifon, troublant
par fon c r i, le chant des cygnes. Aufli lé P.
de la Rue & cPautres critiques croient-ils- qu’il s’agit
dans tous ces vers de Quintilius Varus, battu en
Germanie & aux mânes duquel Augufte redèmanr-
doit avec tant dé. douleur fes légions détruites , &
que Cinpa eft celui envers- lequel Augufte exerça
fa clémence. D’autres enfin trouvent ua- QuintU
Bus Varus de. Crémone, auquel ils appliquent tous
ces vers de Virgile.
Quant à Varius, il ne paroît pas que Virgile en
parle dans aucun endroit , quoiqu’il fut-de fes amis.
Horace en parle fouvent. .
Scriberis Vario fortis.
Forte epos aeef
Ut nemo.j Variuiducit^ ■
Virgïlitts j poft hune Varius dixere quid ejfem.
Dilecli tibi Virgilius Variufque poïtee.
Plotius & Varius JinueJftz Vtrgiliufque
Occurunt ; anima , qualcs neque candidiores
- Terra tu lit , neque queis me f it devinctior alter.
Mais quel eft le Varus à qui Horace adreffe la
dix-huitième ode du premier livre ? M. Dacier ne
balance point fur cette queftion. » C ’e ft, dit-il, le’
» poète Quintilius Varus , parent de Virgile«. Le
poète ! .eh bien ! eft-ce lé même que Varius, ou ÿ
a-t-il un Quintilius Varus différent de Varius ,
& qui fut aufli un poète célèbre ?
Quant au Quintilius ,'fur la mort duquel Horace-
adreffe à Virgile la vingt-quatrième ode du premier
livre, & qui n’èft pas plus nommé Varus dans cette
vingt-quatrième ode , que le Varus de la dix-huitième
n’eft nommé Quintilius, M. Dacier ne doute
pas que ce ne foit le même Quintilius Varus qu’il'
appelle le poète. Mais en ce cas il eft un peu étonnant
que dans l’ode dix-huitième Horace ne lui
parle que devin & d’ivrefle , & que dans la vingt--
quatrième, qui eft fon oraifôn funèbre, & qui eft
adreffée à Virgile, il ne dife pas un mot du talent-
poétique de ce Quintilius Varus; on peut remarquer
feulement que Féloge qu’il en fait
Cui pudor & jufiitia foror,
Ihcorrupta fides } nudâque veritas.
fé rapporte affez- à celui qu’il a fait de Varius co n jointement'avec
Plotius & Virgile :
Anima t quales neque candidiores
Terra tulit.
Il y a eu dés auteurs qui ont cru que. ce Quin--
tilius dont Horace déplore la perte avec Vir--
gile, eft Quintilius Varus ; mais Virgile & Horace'
etoient morts au temps dé la défaite de ce Varus.
On voit qu’on ne fait pas bien précifément quel
eft le. Varus , foit dè Virgile, foit d’Horace, qu’il
n’ëft pas prouvé que Virgile parle dans un feul.
endroit de notre Alfenus Varus, & qu’Horace n’en?
parle bien évidemment, que dans l’endroit où il:
l ’appelle Alfemis Vafer, & où il rappelle fon premier
métier de cordonnier.
Il y a encore d’autres Alfenus ou Alphenus ; un’
SeXtus Alphenus dont il. eft beaucoup queftion dans ■
le difeours dé Cicéron pour Quinélius, & un A lfenus
Varus, général d’armée , & préfet du.pré^
toire fous Viteuius., ®
A L F O N , ( Hifl. du nord..') étoit fils de*
Sigard', roi-déDànemarck. Son pere aimoit la paix;
dans un fiècle où la manie des -combats-étoit prefque'-
la feule vertu. On ne peut lui faire un mérite de :
fôn éloignement pour la guerre ; cette qualité pré-
cieufè & fi rare étoit un effet dè fon indolence
biem plus que dè fon amour pour l’humanité. A
peine fut - il monté fur le trône. de Danemarck
> qu’il abandonna fes droits fur la Suède que Siwald-
J fon père avoit conquife. Ce prince pufillanime ne"
C jouit pas cependant de la tranquillité qp’il croyoit^