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*rouve par extrait dans l’hiftoire de cette academie ,
*ome I , font de M. l’abbé de Boijfy. L’ùn roule
fur les expiations cheç les anciens Grecs & Romains,
i’autre fur les vi6lirn.es humaines. L’abbé de BoiJJy
mourut le 27 juin 1729.
BOISY. V o y e i Gouffier.
BOIVIN, ( Hijl. httl mod. ) Louis & Jean, deux
frères diftingués dans les lettres, tous deux de
l’académie des infcriptions ; le cadet fut de plus de
l’académie françoife, ou il remplaça le favant M.
Huet, avec lequel il avoit une grande conformité
de talens & 'de travaux. Le cadet fut ‘le pupille ,
& l’élève de l’aîné, qui avoit quatorze ans de plus
que lu i, & dont la gloire eft d’avoir formé ce
difciple très-fupérieur au maitre. Louis éfoit un
favant bizarre, d’une érudition diffufe & confafe,
d’un efprit qui ne fe fixoit jamais à aucune idée,
d’un caraélère infociable, d.une ardeur pour la
difpute , & d’une aigreur qui le firent éloigner
.pour quelque temps des afiemblées de l’académie :
il s’irritoit des objeélions, & en demandoit instamment
; il fe fâchoit également quand on en faifoit
& quand on n’en faifoit pas. Il fallut un long
temps à l’académie des belles-lettres pour s’accoutumer
à fon ton , & pour démêler à travers des
apparences fi rebutantes quelques bonnes qualités,
quelques vertus même. Il fe connoiflbit,& s’étoit
peint ainfi lui-même :
» Mon humeur efi fauvage & retirée, fort ap-
yy prochante (Je celle de l’oifeau de Minerve : fran-
» che jufqu’à la rufticité, fière jufqu’à l’indépen-
n dance, flottante & incertaine jufqu’à ne me
•» déterminer à quoi que ce foit, entreprenante
» jufqu’à vouloir tout favoir & tout pratiquer,
yy prélomptueufe jùfqu’â faire vertu d’ambition ;
w cachant fi peu mes défauts, que fouvent j’en
« fais vanité , & rarement m’imaginé-je qu’ils
v n’aient pas quêlque choie d’héroïque «.
On a trouvé parmi les papiers une pièce ïntu-
îée : Lettre à mon père & à ma mère dans le ciel.
Il avoit, pour un favant de cette efpèce, une
manie affez fingulière, celle des vers françois.
Chapelain étoit alors l’arbitre du goût ; tout le
monde le confultoit -, Boivin le confulta : dès le
commencement de l’ouvrage , Chapelain fronça le
fourcil, & à mefure qu’il avançoit, Chapelain re-
prenoit, dit M. de Boze, dans les vers du jeune
poète, ce qu’il n’appercevoit pas lui-même dans
les fiens, & ce qui -auroit dû les en guérir tous
deux. Son dernier mot fut de confeiller à Boivin
de renoncer aux vers françois. Ce fut un coup "de
foudre pour tsoïvin, il penfa en mourir de douleur
; il avoit la reftburce d’appeller de cette déci-
fion, mais, on n’appelloit point alors d’une déci-
fion de Chapelain en matière de vers & de goût.
Boivin exhala fon defefpoir dans un écrit intitulé :
Flux de mélanclutlie. »Dans l’état oiije fuis, dit-il,
» il n’y a que Dieu qui puiffe me confoler..........
w Je fuis fi ennuyé du monde, que fi ce chagrin
* me continue, j’efpère au moins qu’il m’en tirera
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yy bientôt : il me femble que j’écris mon tefta«
-» ment «.
On pourroit croire qu’il s’agit de chagrins réputés
généralement plus graves que celui dont nous
avons parlé, mais l’auteur s’explique.
» On m’a fait entendre que ce n’étoit pas mon
» talent de faire des vers françois, quoiqu’il me
» femble que je ne faurois vivre fans cela. Il n’eft
» pas croyable combien un mot comme celui-là
» eft difficile à digérer à gens de mon humeur....
» Mon naturel eft porté aux vers plus qu’â toute
» autre chofe, & un des plus judicieux hommes
» de France ^’approuve pas que j’en fafle de fran-
» çois l A quoi me ferviront ces latins, quand j’y
» ferois un Virgile, puifque l’on n’en a que faire
» de deux«.
On voit qu’il s’étoit flatté d’être le Virgile françois.
M. le Peletier , 1e miniftre, qui avoit pris chez
lui Louis Boivin, pour lui rappeller fes études &
diriger celles de fes fils, fut obligé de s’en défaire
honorablement, en le donnant à M. Bignon, premier
préfident du grand-confeil, comme un dépôt
qu’il lui confioit.
M. Boivin l’aîné portoit dans les. affaires la même
contention d’efprit que dans les lettres ; il étoit
plaideur auffi bien que difputeur. Il eut, pour une
redevance de vingt-quatre fols, un procès qui dura
douze ans, & qui lui coûta douze mille livres de
frais , tort dont la plus grande .partie retombe fur
les loix.
M. Boivin s’en confola en vrai plaideur : F a i,
dit-il, gagné mon procès pendant dou^e ans, & je ne
l ai perdu quun jour. C ’en ainfi que ceux qui jouent
au jeu ruineux des lotteries, ne perdent que le jour
du tirage, & gagnent tout le refte du temps ; au
fond on leur vend une denrée excellente & féconde
en jouiffances, l’efpèrance.
Il n’y a d’ouvrages imprimés de Louis Boivin ,
que quelques mémoires imprimés en entier ou
par extrait dans le recueil de l’académie des belles-
\ lettres.
Il avoit traduit 1 évangile en vers françois ; il
■ avoit fait fur l’hiftorien Jofephe des notes beau-
i coup plus étendues que le texte.
Il aimoit tant l’académie à caufe des occafions
de difpute qu’elle lui fourniffoit , qu’il: difputoit
fur-tout contre l’ufage abufif., félon lui, des vacances.
U trou voit que vivre fans difputer ri’étoit pas
contentement. Il demandoit à Dieu de mourir dans
les vacances : il mourut dans les vacances de pâ-
ques 1724 le 22 avril.
Jean Boivin étoit dUm cara&ère plus, doux &
plus aimable. Elevé durement par fon frère, qui
l’enfermoit avec des livres jufqu’à ce qu’il eût
rempli fa tâche, & qui par amour pour la fcience
faifoit mal-adroitement tout ce qu’il pouvoit pour
l’en dégoûter , qui portant dans le jeu la même
tyrannie, ne lui permettoit pas de le gagner au
jeu des échecs qu’il lui ayoit appris., & l’empêb
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choit d’aller fe coucher jufqu’à ce qu’il eût tout
reperdu, Jean Boivin eut toujours pour ce frère
une tendreffe, un refpeâ & une reconnoiffance
inviolables. Comme il avoit un meilleur caraélère,
il avoit auffi un meilleur efprit. Il remplit avec
diftinfrion une place à la bibliothèque du roi, une
chaire de profeffeur en grec au collège royal , &
fes devoirs académiques dans les deux illuftres
compagnies qui l’avoient adopté. A la bibliothèque
duroi, il découvrit dans un manufcrit des homélies
de faint Ephrem, fous le texte de ces homélies, un
autre texte de plufieurs des livres de l’écriture-fainte,
en lettres onciales ; ce texte ancien avoit été effacé
exprès ; ce ne fut que par le travail le plus opiniâtre
, le plus pénible & le plus ingénieux, qu’il
parvint à retrouver cet ancien texte, lequel étoit
des premiers fiècles de l’églife ; c’étoit un des
plus précieux manuferits qui fuffent dans aucune
bibliothèque du monde;-Cette découverte eft célèbre
parmi les fa vans.. La plupart d’entre eux fe
louent beaucoup auffi des fecours qu’ils avoient trouvés
pour leurs ouvrages dans fon érudition , & ,
ce qui eft plus précieux, dans fon goût, on con-
noît fes notes qui accompagnent la traduâion du
traité du fublime de Longin par Boileau. Il entra
dans la fameufe querelle des anciens & des modernes
; mais il combattit pour les Grecs avec la
politeffe d’un françois & la modération des fages
de la Grèce. Il fit graver le bouclier d’Achille pour
détruire l’objeâion tirée de la multiplicité & de la
confufion des objets, & ©n fit valoir cette exécution
de la defeription d’Homère comme l’a&ïon du
philofophe qui marcha devant ceux qui nioient le
mouvement. Oferions-nous cependant ne pas trouver
cette exécution fans réplique ? qu’on exécute
par une efpèce de gageure une chofe très-difficile,
feulement pour prouver qu’à toute force elle n eft
pas impoffible, on n’a. pas pour cela juftifié l’auteur
qui en a parlé comme d’une chofe toute
{impie, toute ordinaire, & qui n’a pas befoin d’explication.
C ’eft toujours à l’auteur à prévoir toutes
les difficultés raifonnables qui pourront s’offrir au
ïigfleur & à les réfoudre d’avance.
• M. Boivin le cadet fot encore plus conftamment
attaché que Famé à M. le Peletier, le miniftre.
Il écrivit en latin & en très-beau latin la vie de
ce bienfaiteur & dê fon bifayeul, le favant Pierre
Pithou. Le recueil de l’académie des belles-lettres
eft rempli de mémoires exceliens de M. Boivin. Il
époufa en 1716 une nièce de la fameufe madé-
moifelle Chéron, peintre & poète. Elle avoir,
dit-on, l’efprit & les talens de fa tante. Il mourut
le. 29 oétebre 1726. Il étoit né le 28 mars 1663. .
Les deux Boivin étoient fils & petit-fiTs d’avocats
célèbres de Normandie. Nous ignorons s’ils
étoient de la même famille que François Boivin,
fécretaire du maréchal de Briftac fous le règne de
Henri I I , & qui fuivit ce maréchal dans les guerres
du Piémont, dont il écrivit l’hiftoire depuis 1550
jufqu’en 1561. Ils étoient neveux, parleur, mère,..
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de Pierre Vattier, profeffeur d’Arabe au collège
royal, homme très favant. Il ayoit fait une traduction
latine de toutes les oeuvres d’Avicenne,
& en mourant il avoit fort recommandé ce manufcrit
à fa famille. Madame Vattier, fa veuve,
& Louis Boivin, l’aîné de fes neveux, vinrent exprès
a Paris pour remettre ce manufcrit à Chape-
' lain ; depuis ce temps ils ont toujours ignoré ce
qu’il étoit devenu ; ils favoient feulement que M.
Thevenot, garde de la bibliothèque du roi, & qui
avoit été ami de Pierre Vattier, ayoit cormoiffance
& du manufcrit & du lieu où il étoit, mais qu’il
en faifoit myftère & fe contentoit de dire qu’il ne
fèroit jamais confié qu’à dés gens capables d’en
procurer l’édition ; ce fecret mourut avec M. Thevenot.
C ’eft une recherche que M. de Boze pro-
pofe aux fa vans dans l’éloge de Louis Boivin ;
» je la propofe, dit-il, dans- lé lieu du monde le
» pluspropre à publier desmonitoires fur les pertes,..
» ou les larcins de cette efpèce «. ( l’académie des
belles-lettres. )
BOLESLAS, {Hiß. de Pologne, j ( Il y a eu cinq
rois de ce nom en Pologne. Le premier qui le porta-
fut auffi le premier qui eut le titre de roi en Pologne;
ce fut l’empereur Othon III qui le lui donna
en 999, & le pape Sylveftre II le lui confirma
quelques années après, ou fi l’on veut, il le lui
conféra de nouveau, prétendant qu’il n’apparte-
noit qu’au pape de conférer un titre de royauté ;
les prédéceffeurs de Boleßas I n’avoient eu que le -
titre de ducs ou de princes ; Miciflas, fon prédé-
ceffeur immédiat, fut le premier prince chrétien
en Pologne. Voici l’hiftoire des cinq Boleßas rap- •
portée plus en détail par M. de Sacy. )
BOLESLAS I , furnommé Crobri. ( Hiß., de Pologne
) C ’eft le premier fouverain de Pologne qui
ait porté le titre de roi. Il fuccéda à Miceflas fon ■<
pere , qui. avoit introduit l ’évangile dans cette
contrée. Mais une partie du peuple étoit encore-
attachée à fon ancien culte. Boleßas , par des
voies douces & lentes , parvint à étouffer par
degrés les-anciens préjugés. Il ne renverfa point
les idoles , il les laiffa fe détruire elles-mêmes
protégea les,prêtres chrétiens fans perfécuter leurs;
adverfaires , & ne donna point à ces derniers cette.-
raifon à oppofer à l’évangile, qu’il eût été prêché
les armes à la main. Il attira dans fes états Voi—•
cechus, évêque de Prague, l’apôtre de la Hongrie,
de la Prüfte, de la Bohême & d’une partie de la-
Ruffie. Mais il ne put le fixer en Pologne. Cet
prélat fut affaffiné par les Pruffiens en ‘ 097. Boleßas
acheta fon corps des affaffins même qui-:
l’avoiént maffacré. On prétendit que ceux-ci ayant
voulu le vendre, au poids de Fbr, lorfqiFon le mite
dans la balance,il ne pefoitprefque rien. Nous né déterminerons
point le dégré de croyance qu’on doit"
accorder .à ce prodige.. Mais quand Boleßas auroit::
payé ces reliques de la moitié de fes tréfors, il
en fut bien dédommagé , puifqu’eUei lui valurent;
une couronne—