
toar conféqucnt, confidérer ce commerce comme
fourniffant aux propriétaires & aux métayers du
Limoufin & de la Marche, un débouché facile
pour débiter au loin des denrées qui refteroient
dans la Province, ou plutôt n’y feroient pas
produites. Les boepfs gras, en gagnant la capitale,,
y tranfpcrtent avec eux le prix du toin ,
des raves, de la farine de feigle & de bled noir
farrafin, dont ils ont été engraiffés j & la rentrée
de ces valeurs en Limoufm, fufïit pour encourager
l’arrofement des prairies, la culture des
raves, du feigle, &c. »
Engrais à Vétàblt feulement.
La manière d’engrailfer feulement à l'étable
ou de pouture ne diffère de la précédente,-que
parce qu ôn ne commence pas l’engrais au pâturage.
Lorfque les enfemeneemens des terres
font finis, c’eft-à-dire, a la ToufTaints, alors on
met les boeufs à l’engrais dans les étables, &
on continue tout l’Hiver , & jufques à la Saint-
Jean. Cette méthode eft employée dans les environs
de Chollet en Anjou, d’où viennent à Paris
de très-bons boeufs, & dans toute la partie du bas-
Poitou, appelée Boccage. Les plantes dont on y
fait ufage font le foin choifi , les cho.ux à
moelle & à mille têtes, les raves, connues dans
le pays fous le nom de R ilbe s, les navets longs,
le feigle,'lorge, l’avoine & la vefee en coupage,
c’eft-à-dire, en vert, le raigrafs, cultivé fur-
tout aux environs de Chollet, enfin le fon de
feigle & de froment, l’avoine en grain grolfière- ,
ment moulue, les glands même & les châtaignes
en quelques cantons. .
On partage, comme en Limoufin, la nourriture
des boeufs en pîufieurs r e p a s e n ne donnant
pas deux fois de fuite ce même^ aliment.
En Limoufin , on leur donne trois fois du foin
dans les vingt-quatre heures, en plaçant deux
diftributions de r a v e s o u de farine de feigle,
ou de farrafin, entre celles du fo in ; en Poitou
, ils font fix repas différens dans la matinée
& fix dans l'après-midi Chaque repas n’eft
que d’une petite quantité d’alimens & toujours
fuivi d’un petit intervalle de repos. Dès quatre
heures du matin , ils ont un peu de foin , en-
fuite des choux, puis des raves, puis du foin,
puis des navets & du foin après ; quand
ils l’ont mangé, on les fait boire , dans les
premiers tems hors de l’étable , fur la fin , dans
l'étable afin qu’ils ne for ter t pas. Quelquefois
à. cette dernière ration on fübftitite de l’avoine
en grain, ou du fon , ou des glands , ou des.
châtaignes. Les boeufs ruminent enfuite pendant
quelques heures & on recommence à leur
donner les mêmes- alimens dans le même ordre
fans les faire boire.
Dans le mois de Novembre., c e f o n t lés
feuilles baffes des. choux &. les feuilles des- ra- ‘
ves, qu’on fait manger ; aux premières gelées; I
on emploie les racines des rayes & les tiges I
des choux à moelle , ou les feuilles des choux I
à mille-têtes ; au mois de Mars, on a recours I
aux feuilles des navets tardifs, que l’on n’a point I
tiré de terre & aux montans des choux , qui
font d’un très-grand produit, fur-tout les_choux
à mille-têtes. Aux feuilles des raves & des I
choux fuccède le „coupage ou le feigle & autres
grains en herbe, & au coupage la vefee en
vert. On croit crue pour eugraifler complette-
ment deux boeurs , il' faut le produit de trois I
arpens de 900 toifes, moitié en choux, moi*- I
tié en raves, trois quarts d’arpens de coupage I
& autant de vefee ; quelquefois les boeufs font I
gras avant que le coupage foit mangé. 11 faut I
1 obferver qu’on ne donne pas à boire du tout I
aux boeufs d’engrais ., quand on les nourrit leu- I
\ lement de vert, ce qu’on fait quelquefois; on I
' ajoute toujours à leur boiffon du fon ou de la I
• farine.
Ce détail fuppofe une grande attention & I
une grande aflidùité de la part de celui qui I
foigne les boeufs- d’engrais ; auiîi y a-t-il un I
homme uniquement occupé de cet objet. Lelt |
ordinairement le chef de la ferme, ou le plus I
intelligent de fes enfans ou de fes domdti- I
qiies. ‘ :
L ’extrême propreté eft regardée comme effen- I
tielle ! la nourriture eft dépofée dans un endroit
où rien ne la peut fouiller ; tous les jours , la I
crèche , le râtelier & le vafe dans lequel on
fait boire lés boeufs, font' nétoyés ; la litière I
; eft renouvellée deux fois par jour, le fumier en- I
levé tous les huit jours & même plus fouvent; I
on étrille les boeufs chaque jour avec une carde I
à carder la laine*; cet inftrumenr eft celui qu on I
emploie dans le Querci & dans d autres Pro-v I
vinces pour le même ufage *, en outre on bon-, I
chpnne pîufieurs fois dans la Journée les boeurs, l
avec une poignée de paille dure.-
Quelques perfonnes font fi fcrupuleufement I
attachées à la propreté qu’en entrant dans la
grange où eft dépofée la nourriture elles quifc
tent les fahois, qui leur ont g f e r v i dehors, 1
' pour en prendre cPautres,, qu’elles laiflent aa 1
la grange- . ' *' ' ÿ , I
Avec tous ces-foins, il faut cinq ou fix mois
pour engraiffer complettement un boeuf. Le pro- I
fit dédommage amplement de la peine. Sur un I
; métairie de 100 arpens de 900 roues , y I
: engraiffe fix ou huit boeufs, le profit^ordinaire I
fuf chaque boeuf peut être de ïç o a 100 • 1
Excepté le fon & Favoine , lé refte ne coûte I
la peine dé :le cultiver. O n diftmgue les can 1
tons où l’on fe dpnne le plus a ce genre l
commerce , par un air daifance, quon 1
voit pas ailleurs- A H H H B M I
On' engraiffe anfti de pouturp feulem I
dans d’autres Provinces -que le Poitou. Quelques
cantons. de la Normandie engraiffent
|de cette manière , avec du foin & 12 à 15
livres chaque jour d’un mélange de farine
|de feigle, d’orgepd’avoine, de pois, de vefee.
IMais ce n’eft pas la manière* ordinaire de la
[Normandie ; l’engrais à l’herbe fraîche dans les,
herbages y eft le plus employé. Il y a des- pays
où l’on fait avaler aux boeufs de graifté des
boules de pâte. On verra plus loin l’état des
Pays qui engraiffent & la manière d’engraiffer
propre à chacun.
f Après avoir expofé ce qui concerne les différentes
êfpèces de bêtes à cornes en particulier, je
•traiterai maintenant quelques objets, qui appartiennent
également au taureau, à la vache, & au
gbëuf.
f Objets communs a toutes les Bêtes a cornes.
Efï-ilplus avantageux denourrirfes Bêtes a cornes
a l’étable que de les envoyer dans les pâturages.
■ . La pratique de M, Tfchiffeli, de Berne, imprimée
dans les Mémoires de la Société économique
de Berne, 17 72 , fécondé partie & rapportée
par M. P Abbé Rozier, au mot bétail, pré-
aenre ici une queftion intéreffante en économie
■ rurale. M. Tfchiffeli, Sécretairc du Confeil fu-
iprème, cultivateur très-inftruit & très-bon observateur,
étant dans biffage de nourrir fon troupeau
de vaches â l’étable toute l’année, fonexem-
j>lc a été imité par di’îtuffes cultivateurs du même
®ays, qui s’en applaudiffent ; l’Argow ou l’E r -
iov ie en celui, où elle a le plus de fuccès. Suivant
M. l’Abbé Rozier, un particulier des environs
de Lyon l’a §-ffayé avec le même avantage.
M. l’Abbé Rozier , après avoir écarté feulement
de la queftion les polirions, où on élève des boeufs
pour vendre ou pour les boucheries, lorfqu’on
a la facilité de les envoyer fur les hautes mon tannes,
afin de profiter des avantages offerts par
la nature, 'examine les- motifs de M. Tfchiffeli
K ; les: objections qu’on peut lui faire & conclut.
« Que le propriétaire, qui entendra bien
fes intérêts , conlèrvèra feulement le fourrage fec
& néceuairc pour nourrir abonclament fon bé-
J|3' Pendant l’Hiver & durant les pluies d’Eté,
R que 'l’autre partie fera mangée en vert à
ta b le . ■ ■ • . ; • ■
r " ; uun p i expolant les motifs de M. Tfchiffeli,
1 , difeutant & n’en tirant que les coiffé—
f lenGes qui me paroiffent devoir en être, tirées.
X,^es fû î ne quittent point les étables ;
A-on ^ Tfchiffeli, fiont moins expofées aux
X zooî~s contagieufies & redoutables, que cellés
^ paillent dans des pâturages ‘communs, ap-
communes communaux i il n’eff paspolfible
de multiplier & d’améliorer le bétail, lorfiqu’on
ne peut empêcher que des vaches de belle eff
pèce foient couvertes par des taureaux, qui ne
fiont pas de choix ou que des geniffes deviennent
pleines, avant l’âge de deux ans & demi
à trois ans. Le profit qu’on peut efipérer des
Bêtes à cornes dépendant de leur bonne iànté
cette bonne fanté eft plus affurée , fi on les nourrit
toujours à l’étable, où on leur donne des-
alimens bons , fufffians, réglés, & des'eaux falu-
ibres à boire, où on les foigne , où elles fe re -
pofent&jouiflént d’une douce température. Dans,
les pâturages communs, elles ne trouvent prefqu©
rien a manger au commencement du Pnntems -,
; elles font réduites à dévorer les haies & les buiffons ;
■ lesgêlées , les pluies & les vents glacés les pénètrent,
les ardeurs de l’Eté développent en elles les germes
des maladies, que les intempéries du Prin-
tems font-naître. Èn Eté, lesinfieéles les tour— ’
mentent & les empêchent de paître.Souvent elles
font forcées de boire des eaux bourbeufes& croupies.
Elles broutent des herbes, couvertes quelquefois
de mit liâ t , ou pleines d’humidité qui
leurcaufent des maladies funeftes-En Automne,
elles piétinent & foulent les prairies ; elles y font
des trous, où l’eau féjourne, de manière qu’au
Printems fuivant , il n’y pouffe point d’herbe,
ou il n’en pouffe que de mauvaife qualité; ce
qui arrive fur-tout, fi c’èft dans un pays où on
arrofe les prés. On ne peut plus les faucher à
raze de terre. Les boeufs ne s’engraiffent jamais
fi bien à ce pjkurage qu’à l’établelorf([u’on leur
donne à manger à pîufieurs reprifes. Les vaches
n’y ont pas autant de lait. Enfin , un motif, qui
n’eft point dans M. l’Abbé Rozier, & qui fe trouve
dans une des lettres de M. Tfchiffeli, imprimées
dans le volume c ité , c’eft que fi on s’abftienr
de faire brouter lès prairies en Automne, l’herbe,
qui y refte n’eft pas inutile ; cette herbe, eft
cumpoféc de plantes vivaces, qui fe pourraient
& fervent d'engrais, ou fe fanent. O r , dans le
canton de la Suiffe habité par M. Tfchiffeli, if
furvienr quelquefois au Printems des gêlées fu - '
neftes; les plantes vivaces, qui font reliées fortes,
quand la dernière herbe n’a pas été con— ••
fommée en Automne , fair abrrpour les graines
annuelles , qui commencent à germer.
Les motifs de M. Tfchiffeli me font penfer qu’on
peut écarter de la queftion plus de polirions qu.e
M. l’Abbé Rozier n’en a écarté. Car fes exceptions
pour l’entretien total à l’étafile, ne regardent
que les propriétaires de troupeaux de boeufs,
qui les élèvent pour vendre & pour les hou— .
cheries & qui ont la facilité de les .envoyer paître
fur les hautes montagnes, telles que les alpes de
Provence & du Dauphiné , les Monts-Jura , le '*
Mont-Pilat, les montagnes d’Auyergne, du V i -
varais, du Languedoc, les Pyrénées, &c. où
l ’on profite désavantagés qui s’y trouvent. Tndé^
pendamment de ce'' qu’il falloit comprendre dans