
Elle efi remarquable par fon port grêle & léger, &
fur-tout par l’élégance de fon feuillage- Les
feuilles riaiffent par paquets fur les rameaux, &
vers l’extrémité v elles font longues, étroites, &
d’un vert p âle, tandis que leurs nombreufes
nervures font d’une couleur rouge fort agréable.
Les fleurs viennent en grappes courtes, difpofées
horizontalement entre les paquets de feuilles.
Elles ont peu d’apparence, & produifent des
çfpèces de noix applaties & membraneufes fur
les bords. Ces noix font convexes d’un côté,
concaves de l’autre, & arrondies dans leur circonférence.
V f agi. Les branches de cet arbre que 1 on
cultive à la Cochinchine , dans le royaume
de Siam & dans les îles de Java & de Sumatra',
répandent, lorfqu’on les cafle, un fuc laiteux qui
produit, à ce que l’on préfume, la réfine du,
Benjoin du commerce. Mais la plus rare & la
plus riche production efi celle que 1 on retire
de l’arbre même. Lorfqu’il a cinq ou fix ans,
on fait des incitions à la couronne du tronc,
dans fa longueur & un peu obliquement, Il en
découle une liqueur qui d’abord eft blanche,
glutineufé & tranfparente - elle s’épaiflit enfuite
à l’air, fe durcit peu-à-pèiV, & devient jaune
ou rougeâtre. Ceft cette liqueur qui , dans cet
ctat, forme la précieufe réfine benjoin. On nen
retire pas plus de trois livres du même individu,
parce qu’aufli-tôt que la récolte eft faite, lés
poffeffeurs arrachent l’arbre pour mettre à fa. ;
place de jeunes plants qui font plus productifs,
& dont la réfine eft plus belle & meilleure que
celle des vieux arbres.
Cette réfine eft regardée comme un partum
précieux. Qn l’emploie en médecine pour les
maladies de poitrine, & les dames s’en fervent
comme d’un cofmétique,
C L e Badanier au vernis, eft un arbre de
la forme & de la grandeur du manguier, Ses
branches viennent .autour du tronc, quatre ou
cinq enfemble; elles font difpoféês par étages,
& prefque horizontales, Chaque faifceàu eft à
quelque diftance l’un de l’autre. Les feuilles,
quoiqu éparfes fur ies rameaux, font néanmoins
le plus communément raflemblées vers F extrémité,
& difpofées en rofettes terminales , comme dans
toutes les autres efpèces de Badanier. Elles font
lancéolées, linéaires, nerveufes & longues de
dix à onze pouces,, fur environ deux pouces de
large. Les fleurs font petites, d’un blanc jaunâtre
avec des étami;nes rouges ; elles font difpofées en
grappes pendantes, & viennent vers 1 extrémité
des rameaux.ÇeS grappes produifent trois ou quatre
fruits. Ce font des noix ovoïdes de figure irrégulière
, comprimées des deux côtés, & apparies
comme des châtaignes. Chacune d’elle ren^
ferme une amande d’un blanc jaunâtre, très-
réftneufe, M auifi fçrme que celle ^ h cjrç-
Igjgai*
Lorfque le trône de cet arbre eft parvenu à
une certaine grofleur, il en découle un fuc qui
d’abord eft d’un blanc' fale, épais & vifqueux ;
Tsiais, expofé à l’air, il devient bientôt après d’un
jaune b ru n , & fe change enfin en une réfine
noire comme de la poix, dure, luifante, & friable
comme Le maftic ou le fandarac. Cette réfine,
dans fon état de liquidité, eft fi cauftique, que
lorfqu’elle touche la peau, elle la brûle & l’u lcère
plus vivement que ne fait le fuc de l’acajou,
jj fauvage ou du manguier puant. Mais, quand.une
fois elle eft sèche, alors elle n’a plus de mau-
vaife qualité, & l’on peut boire, fans aucun
danger, dans les vafes qui en font enduits ou
verniffés.
Cet arbre croît fur ies montagnes deplufieurs
provinces méridionales de la Chine, & dans les-
Moluques. Les émanations qui en fortent paffenü
pour être aufli dangereufes que le fuc laiteu»
de l’arbre. Son bois eft folide, durable" & difficile
à couper. Les amandes de fes fruits fe man-<
gent fans aucun danger, lorfqu’on leur a faic
perdre, par la déification, le fuc laiteux qu’elle»
contenoient.
Mais le principal ufage qu’on fait de cet arbre,
foit à la Chine, foitaux Moluques ou au Japon,
eft d’en tirer ce vernis fi eftimé, dont les habit1
tans de la Chine, du Tonquin & du Japon en-!
duifent avec tant d’élégance & de propreté, la
plupart de leûrs meubles , tels que des tables &
l’ervices de tables , & les murs mêmes de leurs
appartemens. Il ne faut pas confondre ce vernis
avec la laque qui eft une gomme réfine , for®
; différente , quoiqu’elle ferve à-rpeu-près au#
mêmes ufages.
Culture des Efpèces en Europe,.
Les Badaniers fe cultivent dans des vafes qufc
l’on renferme dans les ferres chaudes les trois
quarts de l’année ; on les place dans les couches
de tannée, à l’endroit le plus chaud ,. & en
même -tems le plus aëré, Ils aiment une terre
’ légère, fablonneufe & fubftantielle, telle que
celle qui eft compofée de terre à oranger, de
terreau de bruyère ., & de terreau de feuilles
d’arbres réfineux, mélangée pap égales parties ,
depuis plufieurs années. Quoiqu'ils ne craignent
■ pas l’humidité, ils préfèrent cependant des arro-
femens légers & multipliés, à une trop grande
quantité d’eau â-la-fois, v !S .
Pendant les mois de Juin, de Juillet & d’Août,'
on peut les fortir des ferres & les mettre en
plein air, à une expofition chaude, avec la précaution
d’enterrer les vafes dans lefquels ils font
plantés , dans le terreau d’une vieille couche.
Cette précaution eft d’autant plus néceflaire , que
les arbres font plus forts & plus avancés en âgé ;,
mais comme la terre qui leur convient le mieux
s’appauvri; aâez promptement, il eft bon de la
. jenouYeü«
renouVeOer chaque année par des demi-change^
cm des rempotages qu on peut leur donner ,
fans inconvénient, dans le courant de Juin, à
la fortie des ferres -, ou à la fin d’Août, quelques
jours avrfnt de les rentrer dans les ferres.
L MultiplicationLes Badaniers fe multiplient
| affez difficilement de graines & de marcottes,
niais plus difficilement encore de boutures. La
f multiplication, par la voie des femences, eft
f fort incertaine, lorfque les, graines n’ont pas été
envoyées direéletnent de leur pays] natal, ftrati-
| fiées dans la terre, foit parce: qu’elles;., perdent
promptement leur propriété germinative ,' foit
parce que les chaleurs qu'elles éprouvent en
paftant la ligne les deffèchent & font périr le
germe. Quoi qu’il en foit, aufli-tôt que ces.graines
arrivent en Europe, n’importe dans quelle faifon,
il convient de les1 femer dans des pots & de les
placer dans les tannées-.des ferres chaudes, fi
c’eft en hiver,, ou fo.us; des chafîis & fur des
couches, chaudes, fi elles arrivent en d’autres
faifons. Mais comme les enveloppes qui renferment
les femences, font dures & coriaces, il eft né—
ceflaire d’arrofer fréquemment les nouveaux-fe-
mis, & de leur donner beaucoup de chaleur,
Lorfqu’ils font levés, on modère les arrofemens;
. & , dès que le jeune plant a quatre à. cinq pouces
de haut, il convient de ie,repiquer féparément
;■ dans des pots à oeillets. Il eft, important de ne
pas attendre plus tard pour, faire-cette tranf-
: plantation , parce qn’alofs la reprife du jeune
plant qui pouffe de longs pivots, feroit infiniment
ipojns fûre ; en le repiquant, il faut avoir
l’attention de pincer l’extrémité du pivot de la
racine, de placer enfuite les. pots dans une couc he
d’une chaleur; douce & tempérée , d’ombrager
les, individus & de, leur donner de légers baffi-
; nages pour-aider leur reprife.
Les marcottes peuvent fe faire dans les différentes
faifons d e 'l’année* mais celles que l’on I
I fait à. l’époque où les arbres commencent à en- ;
| trer en fève , réunifient plus ordinairement *
1 on prend pour cela des jeunes branches de l’a- ]
vant-dernière pouffe ; on les ligature avec un ;
;m d archal délié , & on leur fait une incilion
tomme aux oeillets. Cette incifion ne doit enlever
de la branche, qu’environ le tiers-de fon épaif-
feu r , & on peut lui donner jufqu’à un pouce
&demi de longueur au-deffous de la .ligature -, -
on ploie enfmte la .branche dans un pot à tnar- i
cottes & on laffujettit avec une terre un peu 1
forte que 1 on couvre de moufle. Ces, branches !
iont quelquefois neuf mois * fans pouffer de ra- !
«mes; fi, après ce long*efpacede teins,elïesn’en i
étoieut pas encore allez* abondamment pourvues, :
il faudrott les laiffer attachées à l’arbre ijufqu’à ’
q“ «l?s fuffent parfaitement enracinées: mais '■
alors on ne rifque rien de les féparer & de les !
tranlplaster avec une terre,neuve, dans des pots
plu, grands, feulement il faut choifir pour* nette 4snmUuxe, Tome II. 1.«
Opération, le printems ou l’été., afin que'les
jeunes marcottes aient le lents de prendre a fiez
de force: pour réfilter à l ’hiver. On les traité
■ enfuite comme les .jeunes plans provenus -de.
j graines ,, dont nous avons parlé ci-deffm.
La mulriplicasion, par boutures, réuffit rrès-
; rarement, de quelque manière & en quelque faifon
qu on les fa fie. ..Cependant il ne faut pas
la négliger., lorfque * c’eft le feul moyen qu’on
ait à fa difpofition. Il convient de prendre, de
préférence, dé jeunes branches .vigourenfes, d’en
■ ôter les fouilles, à 1 exception des cinq * ©u fix
‘ dernières qui fe trouvent à l’extrémité de la
* branche que l*on coupe à un pouce ou deux
! du.pétiole, & de les planter dans de petits pots
avec une terre fablonneufe & légère.
] On place enfuite ces pots fur : une couche’
d’une chaleur modérée,. & on les couvre d'une
cloche prefque opaque. Si les pétioles des feuilles
tombent d eux-mêmes-au bout d’une quinzaine dû f
jours, on peut concevoir quelque efpérance, &
il.faut continuer à foigner exaélement les boutures,
foit en leur, donnant un peu d'air, foit
en les ;arrofant , lorfque la terre cefié: d’être hu -
tmde. Si la couché venoit à perdre de fa chaleur,
il feroit à propos de la raviver'un peu
; par des réchauds de fumier , fans cependant
toucher aux pots, ni déranger les cloches; qui
ks recouvrent. En faifan,t les boutures à la fin
du printetns, celles qui reprennent ont .ordinairement
affez de racines. pour fournir à leur
, accroiffement, & être en état de paffer l’hiver.
! Mais il faut les laiffer dans .les mêmes pots & .
(les placer ,^dès le mois, de Septembre, dans la
tannée d une ferre chaude , à l ’endroit le pliis
aéré, & près du fourneau. Au mois de'Juin fui-o
vaut, on les rempotera , & en les plaçant fous
une hache à ananas, elles profiteront beaucoup
: pendant cette fécondé année.
En général, tous ces arbres font très-rares en
Europe,. à peine en exifte-t-il quelques individus
dans trois qu quatre jardins , & encore , n’y*
trouve-t-on que les efpèces N .”! i & t.
Ufage.Mois, indépendamment de leur rareté
ces arbres réunifient des qualités qui doivent les
faire rechercher. Leurs tiges droites, d’où partent
des rayons de branchés étagées de diftance
en diftance , lesquelles donnent naiffance à de*
rameaux qui fuirent la même direélion ; leurs
feuilles qui.viennent par paquets, en forme de
rofette, à l’extrémité des rameaux & à la jonélion
des branches; un feuillage permanent, dont les
nervures: & les plus petites ramifications font
d'un beau rouge dans la plupart des efpèces-:
tout enfin contribue à donner à ces arbres'un»
forme auffi pirtorefque qu’élégante , & les rend
très-propres, à , orner les ferres chaudes & à y
répandre de la variété,: Ils deviendront encor*
plus intéreffan5 , fi fon confidère les ufages -
auxquels on les emploie, dans les pays ou ils