
de ce traitement on pourra avoir la fatisfaèlion
de voir plufieurs plantes s’élever jufqn'à vingt
pieds de hauteur & perfectionner leurs fruits.
Il n’y a que les plantes qui flcuriffent dès ,1e
printems , dont on puifle efpérer des fruits
parfaitement mûrs : les tiges'qui fleuriffent plus-
tard j périment ordinairement avant la-maturité
de leurs fruits. La méthode la plus fûre pour
faire fruélifier lés Bananiers, c’eff, après qu’ils
ont crû pendant quelque rems dans les pots,
& qu’ils ont pouffé de bonnes racines, de les
dépoter en prenant grand foin de ne pas endommager
leurs mottes, & de les planter auffi-
tôt en pleine couche, c’eff-à-dire , fans pots
ni cailles , dans la couche de tan de la ferre
chaude. En les plantant ainfi, il convient de
mettre un peii de vieux'tan auteur de la motte,
afin que les racines ptiiflent plus aifément pénétrer
dans la couche. Bientôt après cette, plantation
, les racines s’étendront dé plufieurs pieds
de tous côtés, & les plantes végéteront beaucoup
plus rapidement que dans les pots ou
caiiies. Il faut avoir foin de renouvcller la
couche avec de nouveau tan, chaque fois qu’ii
efi nécefiaire. Quand on procède à ce renouvellement,
il faut avoir la précaution de biffer
une allez grande quantité de vieux tan autour
des racines , non-feulement pour ne pas les déranger
, mais pour empêcher que le nouveau
tan ne les brûle. Ces plantes , mifes ainfi en
pleine couche, demandent beaucoup plus d’eau
que celles qui font dans des vafes. La ferre chaude
deftinée aux Bananiers, doit avoir au moins vingt
pieds çle hauteur. Si elle eff moins haute, il vient
un moment auquel les plantes, parvenues juf-
qu’en haut, appuient contre le vitrage, & enfin
le brifent par la force de progreflion de leur
rapide accroificment. On a vu les vitrages
brifés, & les feuilles accrues de deux ou trois
pouces au-deflus, dans l’efpacc d’une feule nuit.
Par cette méthode, de planter & cultiver ainfi
les Bananiers en pleine couche, on obtient aifément
dans notre climat des plantés suffi fortes■
que dans leur pays natal, & dont le régimé,
pelant jufqu’à quarante livres , eff chargé de
fruit suffi parfaits & aufli bons que ceux qu’on
peut obtenir dans les deux Indes.- Cependant
le degré de bonté & de-, délicatefle des fruits
d’aucun Bananier , n’eft pas tel qu’il puifle engager
à faire les frais qu’exige fa culture en Europe
dans une autre vue que celle de fatisfaire la
cruioflté : & ii eff plus que probable , que quiconque
entreprendrait de faire , de ces fruits, '
crûs dans nos ferres, un objet de commerce,
n’auroit pas de ce comeffible un débit qui pût
l’indemnifer de fa dépenfe.
" Le voyageur qui apporterait en Europe,le
Bananier des fages nain, n.° -z, G , ferait à nos
amateurs un cadeau qui ne pourrait manquer
de leur être très- agréable. Cette variété intéreffante
, qui eff une de celles dont le fruit eff
le plus délicat & le plus abondant, exigerait
beaucoup moins de dépenfe , pour fructifier dans
nos ferres, _ que les Bananiers qu’on y cultive
actuellement , & y fructifierait beaucoup plus
aifément- & beaucoup plus fouvent ; puifqu’elle
donne fes fruits trois ou quatre mois après fa
plantation , & que les ferres chaudes les plus
ordinaires feraient d’une hauteur plus que fuf-
fifânte pour fon entier accroiflement.
J Ufâges.
Les fruits des deux premières efpèces de Bananier
, n.° i & ri.° 2 , font des meilleurs &
des plus utiles des deux Indes. C ’eft la nourriture
la plus- générale & la plus ordinaire des
Indiens, ainfi que des nègres de nos Colonies.
Qes plantes arborées font aufli utiles & aufli
néceflaires à la vie , dans ces contrées, que les
cocotiers , qui nef crôiflent pas par - tout où
proipèrent les Bananiers. Ces 'fruits y font la
première nourriture de l’homme, & principalement
dans l’Inde maritime ou aqueufe, dans
les Ifles & Archipels de l’Inde, où le riz & les
autres plantes fromentacées n’abondent pas au*
tant que dans le continent Indien. Les fruits
des variétés, n,° i, D , &n. ° i, F, du Bananier
de paradis-,"font ceux qu’on choifit de préférence
pour cet ufage. La mère les fait cuire
fous la cendre -, puis elle en mâche la chair,
quelle fait palier de fa bouche dans celle de
fon enfant, auquel elle ne donne pas d’autre
nourriture, outre fon la it , pendant Içs fept ou
huit premiers mois de la v ie , après lefquels
elle commence feulement à l’accoutumer- peu-
à-peu à d’autres nourritures. Les fruits du Bananier
des fages, n.° 2 , & de toutes fes variétés
, font les meilleurs/& les plus délicats à
manger cruds. On eff -d’ufage de les fervir
ainli au defîer t & avec les fucreries , fur les
tablés les plus délicates, & fur-tout ceux des
variétés ,_n.° 2. C , & 2, D. Cependant cette
efpèce, n.° 2 , eff employée, plutôt comme
régal que comme nourriture ordinaire -, ce qui
fait qu’elle eff cultivée en moindre quantité
que l’efpèce n.0 i , dont les fruits , quoique
moins délicats, font plus utiles, & tiennent ,
pour ainfi dire, lieu de pain. Ces fruits de
î’efpèce, n.° i , & de fes variétés, fpnt beaucoup
moins agréables à manger crûs, mais ils
font très-bons cuits. On fait frire , principalement
les plus auftères, foit à l’huile • foit au beurre,
ou bien on les coupe par tranches & on en fait des
beignets avec le beurre, les oeufs & la farine,
de la même manière qu’on fait en France les
beignets de pommes de reinette. On en fait
encore d’autres mets alfaifonnés avec le fucre
& la canelle. Les voyàgéurs européens , lors
de leur départ des pays fertiles en Bananiers,
ont imaginé, depuis peu d’années, d’embarquer
une provifiou
«ne proviiion d'une forte de farine, qu'ils font
avec la pulpe déffechée de ce fruit. Cette farine
fournit, pendant la route, une nourriture
i faine & agréable, dont ils fe trouve très-bien.
Plufieurs Indiens coupent ces fruits par tranches
i pour les faire fécher, foit au fo u r , foit au fo-
t leil, & les conferver pour leur nourriture,
| pendant les mois où ces fruits font les moins
f abondans. On mange encore de plufieurs autres
f manières, les fruits de cette efpèce. Par exemple,
\ à Cayenne on en fait une bouillie , qu'on
I nomme Embagnan, qui efi d’un ufage allez or-
| dinaire. A la Grenade, on en fair une forte de
[ pain qui y efl d’un grand ufage. Dans les An-
f tilles, ainfi qu’à Cayenne, on en fait commu-
[ nément une boiffon très-ufttée fous le nom de
j vin de Banane. Pour préparer cette boiffon,
1 on prend des fruits bien mûrs, foit de cette
f efpèce n.* i , foit de l'efpèce n.° i . On les
I fait paffer au travers d’un tamis, puis on met
I cette pulpe en tourteaux , qu’on fait enfuite
, fécher au foleil ou fous les cendres chaudes,
f Enfin , on délaye ces tourteaux dans l’eau.
| D’autres font cette boiffon différemment ; ils font
î cuire ces fruits dans l’eau, puis les paffent an
travers d’un tamis, pour en féparer la peau ;
[ enfuite ils délayent & braffe la pulpe dans la
1 même eau, à laquelle ils ajoutent d’autre eau,
| autant qu’ils le jugent à propos. Cette boiffon efl
(agréable & nourriffante : à Cayenne-, on la re-
Igarde comme falutaire & nécefiaire pour les g Nègres. On eftime dans l’Inde que les fruits des
[ Bananiers font de facile digefiion , quoique
Profpère-Alpin affirme le contraire. On efi d’accord
cependant , que ceux qui fe mangent
| crûs, éteignent quelquefois l’appétit par leur
vifeofité, & font venteux. Les fruits de l’ef-
[ P^c.e n*° 2 , & de fes variétés, font ceux q u i,
mangés crûs, font les.plus aifés à digérer. On
remarque que ces fruits font recherchés avec
moins d’empreffement par les Indiens que par
[les Européens, auxquels ils font aufli plus faïu-
James. Ils font fur-tout defirés avec ardeur par
les voyageurs Européens nouvellement débarqués.
Ceux qui s’embarquent font aufli dans
1 ufage de pendre fur les vaiffeaux des régimes
entiers, chargés de ces fruits qui commencent
a mûrir. Ceux qui ont vécu iong-tems dans
‘ « Pays n’en font plus tant de cas.
On emploie aufli ces fruits en médecine,
- fopt utiles pour adoucit le rhume, pour les
maladies inflammatoires de la poitrine & des
contre l’épaiflifl'ement de la bile , l'ardeur
d urine, &c. comme adouciffants, hnmec-
G f f n rafraichiffans. Les fruits des variétés
m i B. n.° i C , & ri-.° j B , rôtis ou frits, font
Une nourriture employée ordinairement contre
a diarrhée.. Les fruits de l'efpèce n.° a , fe
tangent cuits fous la cendre , contre la difurie,
“ provoquent l’urine fans douleur. Mais il efl
■ agriculture. Tome I L
Bon. d‘étre prévenu à l’égard de ces fruits de
l’efpèce n.° 3, qu'ils ont la propriété de teindre
en rouge,.l'urine de ceux qui en mandent -
ce qui effraie les étrangers & leur fait prendre
ce fruit en horreur, quoiqu’il ne foit nullement
nuifible. On a coutume de cueillir une bonne
partie des fleurs mâles de chaque Bananier, pour
les confire en vinaigre comme des câpres &
les employer aux mêmes ufages que ces dernières
Les feuilles vertes de toutes les efpèces fervent
ordinairement de fiappes & de ferviettes, qu’on
renouvelle à chaque repas, & font très - propres
à cet ufage. En Amérique, on fe fert fréquemment
de ces feuilles pour enfevelir les mort*.
On en emploie ordinairement deux pour un
homme adulte. Les feuilles fèches fervent de
Pipes à fumer : pour cela ils les roulent en
(orme de cyhndre dans lequel ils enveloppent
des feuilles de tabac fèches, & en font ainfi
des rouleaux d’environ un pied & demi de
lonp eur , avec lefquels ils fument en mettant
■ lefen à une des extrémités & tenant l’autre dans
leur bouche^ Mais les feuilles de l’efpèce n.’ 2
étant amèreS, ne, font pas propres à cet ufage
Ces feuilles fèches fervent encore à envelopper
différentes marchandifes, & fur-tout le fncre
quon apporte ainfi en Europe. On fe fert auffi
de ces feuilles pour écrire ; mais c’eft un D2n;Pr
peu durable. r r *
La fubflance interne ou la moelle des tiret
le fépare facilement de la fubflance iibreufe au}
1 enveloppe, & elle s’emploie utilement, concaffée
& cuite en bouillie, pour engraiffer les porcs
La partie inférieure de cette moelle concafféô
& cuite , S'emploie auffi pour la nourriture
des hommes, ainfi que le coeur ou Diantone
qui fert à cet ufage comme légume. Les tires
font encore une nourriture ordinaire des élé
phants , qui font très-friands des fruits mûrs'
Lorlque nos voyageurs s’embarquent dans nn pars
fertile en Bananiers, pour retourner en Europe
ou pour quelquautre voyage de long cours ’
ils ne manquent pas d’embarquer avec eux une’
provifion de tiges de Bananiers, qui fom «,
connus être une excellente nourriture pow
leurs belhaux pendant toute la route L ’eau
exprimée des tiges efl eftimée utile pour l’inflammation
des reins & l’ardeur d’urine
H efl utile d’être prévenu que la liqueur qui '
découle de toute plaie faite, (Eit aû tronc , & c
aux feuilles, foit au régime, ou aux fruits des
Bananiers fait fur le Enge & les habits des
taches indélébiles. ( M. L a s ex r . ) 1 Ues
BANANES. M. Delahaye, Curé du Dondon,
Ifle de Saint-Domingue, dans un ouvrage intitulé
: A n de convenir les vivra (alimens) m
pmn , Jans mélangé de farine , s’exprime ainfi fur
les Bananes; « Si les Bananes, dit-S, ne donnent
pas un très-beau pam, il efl bon & donne peu
de peine a fabriquer ; fa pulpe efl peu liante &