
pépinière ils’eft répandu, dans diverfes provinces
du Royaume, des taureaux & des geniffes,
de race Suifle pure.
Des deux Taureaux arrivés de Suifle, Furç
Sgé dé trois ans, avoir quatre pieds fix pouces
dé hauteur depuis la terre jufqu’aü garot, fept
fuçds deux pouces de longueur, du fommet de
a tête à la naifiance de la queue , & fept pieds
deux pouces de tour, mefure prife fur la poitrine
• fa tête étoit courte & large ; fes mulcles
fefliers étoient faillans; il avoir te fanon très-pendant
v car il delcendoit jufqn’à 15. pouces
de terre. L ’autre, âgé de deux ans, avait quatre
pieds deux pouces de hauteur , fix pieds de
longueur & fix pieds de tour. Ils n’étoient pas
encore les plus grands du canton de Fribourg,
dont on les avoit tiré» ^
Quand on parcourt la France en cbfervant
l’état des Bêtes à cornes, on ne peut s’empêcher
de faire des reproches à un grand nombre de
cultivateurs fur leur négligence dans te choix des
Taureaux. Souvent dans des pays qui compor-
teroiefit de plus belles races, on en voit qui
n’ont que trois pieds dix pouces de hauteur,
fix pieds de longueur & quatre pieds & demi de
groflèur. Beaucoup de Fermiers & Métayers font
lervir de jeunes taureaux dès tes premiers inl-
tans de leur puberté, & enfuite ils les coupent
pour en faire des boeufs-, par ce moyen , i ls
n’ont jamais de bons taureaux ni de beaux
boeufs.
Quoique le taureau foît en pleine puberté
à deux ans , iî eft bon d’attendre jufqu’à trois
avant de lui livrer des vaches v il n’en efi que
plus fort & conferv.e fa vigueur jufqn’à neuf
ans r fi on lui permet de s’accoupler plu tôt, il
faut le réformer aufli plutôt; alors on l’engraiife
& on le vend au boucher ; mais la viande n’en
peut être jamais bonne. Sa vie naturelle, fuivant
M. de Buffon * eft de 14 à 15 ans., c’eft-à-
dire fept. fois- le tems de fon ac.croiffement,
qu’il acquiert en deux ans. Lorfqifon s’aperçoit
11 il devient lourd & pefant il n’eft plus en état
e faillir les vaches. En avançant en âge beaucoup
de taureaux, très-doux auparavant, font
•intraitables & dangereux; il ne faut plus attendre
pour s’en défaire . M. de Brieude,
Médecin , qui m’a procuré de bons & excellent
renfeignemens. fur les Bêtes à cornes d’Auvergne
, allure que les taureaux qui paffent
plufieurs mois, de l’année dans les lieux fauvagés
& inhabités du Mont-d’or & du Cantal , ne
font jamais furieux ni farouches y ce qu’il attribue
à ta familiarité à laquelle ils font habitués
dans les étables pendant le tems où ils ne
peuvent al 1er dans le&montagnes.On croit en effet
avoir remarqué, même en pays de plaine, qu’on
a., plus, à craindre des taureaux qui reftenf .toujours
à l’étable & qu’on ne délie que pour faillir
fes vaches, que de ceux qui vont de tems-eiK§
tems aux champs, où ils accompagnent le trouai
peau : l’ennui feul efl capable de les irriter. Cet J
idée détermine des Fermiers à placer le ta iJ
rcau à l’ennée de l’étal,te , tandis que d’autres
le relèguent dans Tendroit le plus reculé.
Le taureau en rut, dit Mf de BrLucië, fait en,
tendre des mugiff-mens rauques & lugubres; ij
enfonce' fes cornes dans la terre,, il les porte
contre les arbres, les bayes ; il gratte avec fes
pieds ; il écume ; les yeux font étincelans ; il eft
errant & vagabond toute la journée , paillant
par dillraélion , non par befoin. On reconnolt
plutôt en lu i, dans ces mornens, un être en
louffrance & tourmenté par la violence des de-|
firs, que par la fureur de nuire. Aufli ne fait-
il point de mal & ol.éit-il à ceux qui le Joignent.
Je confeilte néanmoins de ne pas l’ap-l
procher dans ces mornens.
Lorfqu’un troupeau eft compofé feulement quel
de vingt vaches, un taureau peut fuffire. En
Auvergne , on n’en met que deux quelque nombre
qu’il y ait de vaches au-deflus de vingt, en forte]
que s’il y en avoit quatre-vingt ou cent, chaque]
taureau devroit couvrir 40 ou 5.0 vaches; ce qui]
eft trop eonfidérable.
Pendant que les troupeaux font dans les éta-1
blés, le taureau ne s’épuife pas auprès des vaJ
ches ; on ne lui livre que celles qui font en I
chaleur. Ce n’en eft que la plus petite paitiejl
& encore de loin en I-oirr. Dans les pâturages où
tout eft en liberté, le taureau pourfuit les
bêtes' en chaleur ; il fes couvre à lon^ gré fansl
qu’on dirige Taéle, comme on eft obligé de le!
faire au cheval ; car le taureau ne répand!
pas aufli facilement fa femence que ce dernier.!
11 y a beaucoup de pays où le taureau du!
fermier fert d’étalon à toutes les vaches des!
particuliers , moyennant un rétribution pour!
chaque faut. Plus en amène de vaches, plus!
le gain augmente ; maïs le taureau s’épuife plu*!
tôt , & il faut te renouveller plus fouvent. I
On nourrit le taureau comme les vaches ; ill
paît ordinairement avec elles dans les: pâturages;!
à l’étable il a les mêmes alimens. On a- feule-!
ment égard au tems où if-e ouvre le plus de va-l
ches, pour lui donner de plus quelques poi-J
gnées de grains. Il y a des fermes, ou il dt|
d’ufage de lui en faire manger immédiatement!
après chaque faut.
On emploie quelquefois les taureaux po*»pl
labourer, ou feuts ou concurremment avec deîl
boeufs. Quand on les attèle avec des boeufs, o«l
choifit les plus doux, St on les place entre tëfl
boeufs ou le plus près de la charrue.
Choix des Vaches»
et Dans les efpèces d’animaux, dont Thofr^^l
a fait des troupeaux, & où la multiplication eft
Vbbjet principal, la femelle eft plus néceffaire,
plus utile que le mâle ; le produit cfe la vache
Sft un bien qui croît & qui lé renouvelle à cha-
Rueinftant ; la chair du veau eft une nourriture
Suffi abondante que faine & délicate : le lait eft
l’aliment des enfans, le beurre Taflaifonncment
| s la plupart de nos mets, le fromage la nourriture
la' plus ordinaire des habitans de la cam-
.>|agne. Que de pauvres familles font aujourd’hui
Méduites à 'v iv re de leur vache! Ces ‘ mêmes
IdmiTies qui tous les jours, & du matin au foir,
gémiflent dans le travail & font courbés fur la
fharrue, ne tirent de la terre que du pain noir,
& font obligés de céder à d’autres la fleur, la
jfîjbftance de leur grain : c’eft par eux, & ce n’eft
pas pour eux que les moiflons font abondantes ;
les mêmes hommes qui élèvent, qui multiplient
le bétail , qui lé foignent & s’en occupent perpétuellement,
n’ofent jouir du fruit de leurs travaux
: la chair de ce bétail eft une nourriture
dont ils font forcés de s’interdire l’ufage, réduits
|ar la néceflité de leur condition, c’eft-à-dire,
par la dureté des autres hommes, à vivre comme
lés chevaux, d’orge, d’avoine ou de légumes*
'Sroffiers & de Tait aigre. »
de la Nature, on ofoit oppofer une image riante
& confolante, choifie parmi des circsnftances
tèoins rares qu’on ne croit, on repréfenreroit,
diine part, "des propriétaires bons, humains,
jfttentifs au bonheur de ce qui les entoure, donnant
des terres, à cultiver à-des hommes qui n’ont
aucune propriété & prefqu’aucune reflbùrce,
léur avançant les premières femences, achetant
pour eux des vaches , qu’ils fe trouvent en état
de nourrir par cette heureufe difpofition, n’exi-
gèant rien , ou n’exigeant qu’une modique rede2
vance ; on feroit voir, d’une aùtre part, des familles
Igienées par ces bienfaits à une aifance, préférable
apx richeffes , recueillant du grain pour vivre
pendant toute Tannée, vendant de tems en tems
uq veau , faifant du beurre & du fromage ,
engraiflër un porc & élever quelques
vmaüles, confommant une partie de ces denrées
,?f^ ^ faiPant de celles qui leur font le moins pro-
f | f les » P0^ acquérir ce qui leur manque. Ce
apleau fans doute ne détruiroit pas l’effet de
f jT1 de Buffon, & il ne juflifieroit pas
aj ureté de bien des hommes ; mais il rendroit
ommage aux âmes vraiment bienfaifantes , tou-
S rs m?deftes , toujours occupées à cacher la
1 & ^ lefquellesil n’eft pas jufte
0na^ tomber blâme que méritent les1 autres,
nnp 1 6 Pardonnera cette courte obfervation
? ’a arraclîée- M. de Buffon, en
leur? Sommes de la dureté envers
r ^ mbl3bles 1 a l’intenrion de piquer
■ A ~?roPre des riches. Il me ferablc qu’il
W dgriçUitUret Tome I I , *
vaut mieux les exciter au bien en leur offrant
des exemples faciles à fuivre. C’eft de lui que j’ai
emprunté les qualités d’un bon taureau, j’emprunterai
aufli celles d’une bonne, vache.
«, H faut qu’elle foit,~eu égard à fon efpèçe,
dun grand corfage , quelle ait lé ventre
gros, lefpace compris entré la dernière faufte
côte & les os du baffin un peu long, le front
large, les yeux noirs, ouverts & vifs, la tête
ranïaffée , le poitrail & les épaules charnus, les
jambes groflés & tendineufes, les cornes belles,
poliesjSc brunes, les oreilles velues, les mâchoires
ferrées, le fanon pendant, la queue longue &
garnie de poils, la corne du pied petite’ & d’un
bleu jaune, les jambes courtes, le pis gros &
grand, les mammeions ou trayons gros & longs.
La vache eft en pleine puberté à dix-huit
mois. Quoiqu’elle puiffe déjà engendrer à cet
âge, on fera bien d’attendre jufqu’à trois ans,
avant de lui permettre de s’accoupler. Elle eft
dans fa force depuis trois jufqu’à neuf. Elle
vit de 14 à 15 ans, fuivant M. de Buffon,
c’eft—à-dire, fept fois le tems de fon accroiffe-
ment qui a lieu en deux ans. Mais il me femble
que ce favant Naturalifte a fixé le terme trop bas.
Communément les vaches en vivent vingt.. On
porteroit le terme de leur vie plus loin, fi Ton
en jugeoit par les- exceptions ; car j’ai connu
une vache qui a été vingt-fix ans dans la même
étable. Depuis l’âge de deux ans elle a eu un
veau tous les onze ou douze mois. A vingt-fix
on Ta vendue , après avoir donné un veau ,
à-peu-près lè prix qu’elle ayoit coûté. Il eft
poffible qu’elle ait vécu encore quelque tems.
Cette bête étoit de Tefpèce moyenne du pays;
elle avoit bon appétit, donnoit autant de lait
que chacune dés autres. On a élevé & on con-
ferve fon dernier veau qui eft une femelle. Je
fais que, dans une autre étable, une vache, d’aflez
belle taille, a vécu vingt-deux ans, n’ayant
jamais manqué depuis l’âge de deux de donner
un veau tous les dix mois. On Ta trouvée morte
un matin dans l’étable, vraifemblablement d’un
coup de fang, car rien n’annonçoit dudépériffe-
ment dans cette vache.
Il ne paroît pas qu’il y ait des vaches, comme
il y a des bêtes à laine de différente efpèce.
Quelques particularités dans la forme fuffifent
pour faire diftinguer celles d’une province ou
d’un royaume ; car le climat & la nature des
alimens influent non-feulement fur la conftitu-
tion phyfique de tous les animaux, mais encore
fur leur conformation extérieure. Les marchands
de bêtes à cornes, qui en ont l’habitude, ne s’y
trompent pas plus que les maquignons ne fe
trompent à la vue d’un cheval, qu’ils recon-
noiffent pour être breton ou normand. La taille
eft ce qui frappe les moins connoiffeurs. Les plus
hautes vaches font les Flandrines, les Breffanes
& les Hollaridoifes-, qu’on retrouve dans les
T