
curer fur les manières de donner fes terres à des
Cultivateurs pour les faire valoir. La location à
titre de chetel eft la plus naturelle. Le partage
des fruits par moitié paroît être une règle de
jufticè, la plus généralement adoptée, & dont le
métayer ne fe plaint pas. Il eft plus difficile de bien
proportionner le prix d’une location en argent
aux avances du fermier, à fes foins & à fes rifques.
Je vais tâcher.cependant de pofer ici quelques
bafes, après une courte difeuffion fur la durée
des baux à ferme ou à prix d’argent.
Sur la durée des Baux à ferme.
On demande lequjJ eft le plus avantageux de
faire des jBaux de neuf ou de dix-huit années ?
Si l’on confidère le bien de l ’agriculture & celui
du cultivateur, les baux de dix-huit années méritent
la préférence. L ’article des coutumes, &
notamment de celle de Bretagne, où il eft dit
que les baux ne feront pas de plus de neuf ans,
demanderoit d’être changé-, car c’eftpar l’amélioration
des terres que l’Agriculture s’enrichit de
plus en plus. La certitude d’une longue jouiflance,
détermine un fermier à faire des avances les premières
années de fon Bail. Il ne craindra pas de
bien marner, de renouveller fes prairies naturelles,
d’en faire d’artificielles, de défricher ou défoncer
des portions de terreins, de conduire dans fes '
champs des curares de rivières, d’étangs, de
marres, après les avoir laiffé expofées à l’air un
tems fuffilant, de deffécher des marais, d’augmenter
le nombre de fes beftiaux pour avoir plus
d’engrais, &c. Le terme de neuf ans ralentit
toute ardeur, s’oppofe à des entreprifes, & ne
permet prefque aucune amélioration. Pour s’en
convaincre, il ne faut que comparer l’état des
fçrmes, dont les fermiers changent tous les neuf
ans avec celui des fermes des mains-mortables, ou
des propriétaires bons, humains, juftes, qui renouvellent,
à la vérité, leurs baux tous les neuf ans,
mais toujours aux mêmes fermiers. Les terres des
uns diminuent de prix à la fin de chaque Bail ;
celles des autres augmentent fans cefle de valeur.
Quand quelques circonftances forcent ces derniers
à changer de fermiers, l’affluence de ceux qui
fe préfentent eft très-confidérable. Cette cômpa-
raifon me paroît le témoignage le plus frappant
& le meilleur en faveur des Baux de dix-huit ans.
Le côfps complet d’Agriculture, de Bretagne
fournit un exemple de l’avantage qu’il y aurdit
à faire des Baux de plus de neuf ans, « Un habile
cultivateur qui s’étoit établi de Normandie en
Bretagne, prit une ferme pour neuf ans-- elle
étoit en mauvais état. Il fe hâta d’y femer des
prairies artificielles de trèfle, afin d’en foutenir
les récoltes par un bétail proportionné. On ne
tarda pas à lui faire entrevoir que le prix du Bail
feroit augmenté en raifon du bien qu’il avoit fait.
Il prévint le Propriétaire en prenant une autre -
&rme deu* Qy même trois ans avant que le premier
Bail fut expiré. C’eft fur cette nouvelle ferme
qu il fema d’année en année les prairies de trèfle
qu exigeoit fon bétail, en forte qu’en quittant
la première, il la laifla, à la vérité, mieux difpo-
léequelorfqu i l l ’avoit reçue, mais très-inférieure
. c.f <IU e^e ^toit lorfquè fes améliorations & fa
vigilance tournoient à fon profit. S’il avoit eu
un Bail de dix-huit ou de vingt ans, il eût continué
un plan d’exploitation qui eût enrichi le
fol pour trente ans-, & l’état qui n’cft riche que
parle produit des améliorations individuelles, eûft
profité de fes foins. Son fuccefieur, qui n’auroifc
eu qu à continuer, a été dans la néceftité de jetter
les fondemens d’une culture qui ne pouvoit lui
donner de bénéfice que deux ans après. »
L intérêt des propriétaires s’oppofe quelquefois
à la longueur de ces Baux. Un fermier peut être
un mauvais économe, un mauvais cultivateur,
un mauvais payeur. Si le propriétaire eft peu
fortuné, il feroit cruel pour lui de voir détériorer
fes terres, de dépenfer, pour réparer fes fermes,
de l’argent qu’un fermier foigneux lui auroit
épargné, de languir dans le befoin, pendant qu’il
lui eft dû des fermages. Qu’on fe figure la pofitioa
d’un tel propriétaire!
Néanmoins on ne fauroit trop engager les pro*
priétaires à choifir de bons fermiers en faifantj
fur leur compte toutes les informations que- là
prudence confeille, &àleurpafler deux Baux de
chacun neuf ans, dont le dernier feroit réfilié
de droit, même avant de commencer, fi le fermier
ne rempliffoit pas les claufes & conventions*
On ftipuleroit dans ces Baux la liberté pour lô
propriétaire de faire valoir lui-même quand i l
le jugerait à propos, ou de retirer, avec une fimpld
diminution de fermage, telles terres qu’il voudrai!
planter en bois.
Bafes pour ajfeoir , autant qu*il efî.pojfible, uns
jujle location de ferme à prix d’argent.
Un principe dont il ne faut pas s’écarter dans
la location d’une ferme, c’eft que le cultivateur
non-feulement puifle y vivre, mais encore élever
fa famille, & fe .procurer une certaine aifance.
Tout homme doit trouver dans fes travaux une
récompenfe. Il eft jufte que le propriétaire profite
de fa propriété | mais jamais au détriment ,
du cultivateur, qui ordinairement fe donne beaucoup
de peines & de foins. En un mot, je regarde
un Bail à ferme comme un contrat de fociété
de négoce, dans lequel le propriétaire fournit
pour fa part les terres qui font comme la matière
première. Le fermier les met en oeuvré à l’aide
de fes bras, & de ceux des valets & journaliers
qu’il falarie, par l’emploi de fes beftiaux, & en fe
fourniffant des inftriimens & de tout ce qui eft
néceflaire pour fon exploitation. Il convient que
l’un & l’autre partage les produits de la fociété
en proportion de la valeur 4 e chaque mife. C e lli
du propriétaire. eft relative à la qualité des
terres. '
Pour donner une idée des avances d’un
fermier, qui entre en ferme, j’ai raflemblé tous
les objets de la dépenfe que peut faire celui
qui en prend une de 300 arpens de terre,
de 100 perches,à 22 pieds la perche. Le pays,
où j’ai recueilli ces avances, eft limé à 16 lieues
& au midi de Paris-, c’étoit en 1787. L ’exploitation
y commence par le premier labour, qui
fe fait à Pâques, des terres deftinées à être enle-
mencées en froment l’automne fuivant : on ne ’
récolte que l ’année d’après ; en forte que le
fermier entrant eft obligé de faire tous les frais
néceflairespendant 17 mois. Les prix fans doute ;
ne peuvent être les mêmes par-tout, ni toutes ■
les années ; mais il y a des pays où les avances j
font encore - plus confidérâbles. J ’ai penfé que
mes leéleurs ne défaprouveroient pas que, je
leur préfentafle ces calculs ; quelques minutieux
qu’en foient les détails, il eft bon qu’on
les trouve quelque part. Au refle , on verra
que je n’ai rien forcé dans les prix.
Nourriture du fermier -& de fa femme, en
y comprenant les parens & amis, qui viennent ;
|Lpeçs vviiffiiftpet*r ..............? . . . ................. A gcoO _ijvi.*
Linge & meubles à leur ufage.. 1500
Gages de trois chartiers, dont le
premier à 180 livres, le fécond à
150 liv , & le troifième à 120 liv. ;
ceux du berger à j 80 liv, ; ceux de
deux fervantes, dont l’une à- 90 liv.
& l’autre à' 75 liv. ; ceux d’un,
vacher pendant quatre mois, à
24 liv. : chacun devant être payé
pour 17 mois, & le vacher pour
deux termes de quatre mois............ 1172
Soixante-&-huit fetiers de méteiï,
mefure de Paris, pour les nourrir,
à 16 liv. : ce méteil eft compofé
de froment & de feigle ; ils en
conforment quatre fetiers par mois.
Le pain du fermier & de la fermière
eft pris fur cette quantité. . . . 1088
Huit pièces de vin, de 240 à 250
pintes, a 20 l i v . ....................... 240
. c°cnons dont la viande fe
joint à des légumes, à ic ô liv .. . . 600
Graines & poiflon falé & autres
glimens pour les jours maigres. . . . • 200
Sel: il en falloir trois miaots
qui valoient alors cent quatre-vingt
quatorze livres deux fols. Il a bien
diminué depuis.................. 104,
Prix de huit chevaux de chacun
4 - ° ■ ....... : .................................. 3849
Leurs harnois, tant de charrue
jue de charrette & de lim on .. . . 486
■ , . - ci-contre. . . i c i i o \
Leur nourriture en avoine, deux '
cent quarante fetiers de Paris., de
14 boifleaux chacun, à j J liv__ 2074
En fourrage pour 15 mois, c’tftà—
dire en lainfoin ou foin.,............ 1600
Prix de quinze vaches, à 160 liv. 2409
Leur nourriture dans le pays
confifle., pendant le printeins, en
menues pailles ou b aies de grains
& en longues pailles, que le fermier
fortant efl obligé de laiffer.
Prix de depx cens brebis on
moutons, de trois ans, à 30 liv. la
Pai/ e .................................................. 3000
Leqr nourriture pendant près de
deux mois . y , . 174
Loyer de 100 moutons ou brebis
pour joindre au troupeau afin de
former un parc complet pendant
quatre mois ; le , loyer efl à 1 liv.
5 C la bête. ^Quelquefois on les
acheté ; fuppofons qu’on les lo u e .. 12«
Prix.de xo douzaines de volailles,
dont une partie efl de jeunes poulets,
à 7 hv. 10 f. la douzaine.. . . 72
Leur nourriture jufqu’à la ré-
coltê^...................................................
Enfemencement de,cent arpens *
en automne,.dont 90 en froment
& dix tant en feiglS qu=en méteil.
On emploie un fetier pefant 240 à
Z50 livres par arpent, quantité trop
confidérable fans doute. Le froment
bien choifi & bien pur à 22 liv. le
fetier, & le feigle à 10 liv................ 2080
Enfemencement de cent arpens
en mars, dont 90 en avoine & dix
en vefee. Trente fetiers d’avoine,
mefure de Paris de 24 boilfeaux,
fuffifent polir enfemencer les 99
arpens ; il fuit dix fetiers, mefure
du froment, pour enfemencer les
dix arpens en veice. Les 30 fetiers
d’avoine à 14 liv ., & les 10 de vefee
à ? Ev.................................................. 57C>
Salaire de douze hommes qui
coupent le froment & le feigle à la
faucille : ce fQnt ordinairement des
Berichons ou des Limouiins ; chacun
coupe huit arpens ou environ, &
reçoit a.8 liv. , c’eft à 6 liv l’arpent. 476
Salazre des hommes qui coupent
i la faulx l’avoine; & la vefee ■ ee
font des gens du pays : on leur
donne une liv. de l’arpent pour
Iavoine, & 2 liv. pour la vefee
plus difficile h faucher. Pour 90
i } 7b h
3QI20 liv.