
que les épines que porte cette pîahte font toutes,
fans exception, très-roides & très-piquantes
, loi fait croire que cette plante n’a pas été
connue par les Boraniftes, qui en ont traité
avant lui, pùifque la plante qu’ils ont décrite
comme étant celle fur laquelle on élève lacohenille
fine, n’eft , fuivapt eiix, armée que de quelques
épines molles & innocentes, Sccroît naturellement,
encore fuivant eux, non- feulement au Mexique,
mais encore à la Jamaïque & en plufieuis autres
endroits de l’Amérique.
Le Cagtier Nopal eft cultivé au Mexique
depuis un tems immémorial. On n’eft pas dans
l ’ufage de l’y multiplier autrement que par boutures.'
Thiéry foupçonne que ce Caélier eft une
variété de quelqu’efpècé inconnue qui aura été
modifiée par l’influence de cette antique culture:
& qu’il n’exifte pas dans la nature tel qu’on le
voit maintenant au Mexique. Il s’eft alluré par
des expériences concluantes, qu’aucune plante
n’eft aufti avantageufe que le Caélier Nopal, non-
feulement pour l’éducation de la cochenille fine,
mais encore pour l’éducation de la cochenille
filveftre *, excepté'le Caélier fplendide qui eft
aufti avantageux à tous égards.
Je fuis très^portéà croire , quoiqu’en dife cet
Auteur, que le Caélier Nopal & le Caélier fplen-
dide ne font pas deux efpèces diftinéles, mais
font feulement deux variétés d’une feule &
'même efpèce,
Obfervation,
Linnæus fe plaignoit que l’hiftoire des efpèces
de Caéliers droits étoit encore bien obfcure '&
bien imparfaite , & -invitoit les voyageurs à des
obfervations ultérieures. On peut encore en
dire autant de toutes les feélionsde ce genre. II
y a encore dans l’Amérique méridionale un grand
nombre deCaéliers fur lelquelson n’a que des récits
trop vagues. Thiéry de Ménonville dit avoir
remarqué, dans Tintérieur du Mexique feulement,
depuis Vera-Crux jufqu’à Guaxaca, plus de trente
efpèces de Caéliers , de la feule feétioü de ceux
qui font... compofés d’articulations comprimées
en forme de femelles, qui n’ont encore été décrites '
par aucun Auteur, & qu’il regrette bien de n’avoir
pas eu le tems de décrire. Sans compter toutes
celles des autres feélions de ce genre qu’il a aufti
• reniarquées& encore moins pu décrire, puifqu’elles
avojent un rapport plus éloigné au principal objet ,
de fes recherchés méritoires.
Culture des CaBiers en Amérique.
De la culture du Cacier Nopal ; de V éducation de
la cochenille, tant fine' que Jilvcfire, fur ce CaBier
au Mexique , & dans nosColonies; & de la culture
des autres CaBiers fur lefquels on peut élever
utilement ces deux infcBes.
■ La plus^grande partie de ce que jèvais dire, &
fl® ce que j ai déjà dit de ces infeéles & des Caéliers
quiles concernent, eft extrait dù livreront j’ai
dit un mot, & qui a pour titre; Traité de lacultuf
du Nopal & de Véducation de la cochenille, âam[*
colonies Françoifes de l’Amérique, précédé d’un voy
ge aGuaxacd, parM, Thiéry de Ménonville, Avocat
en Parlement, Botanifie de Sa Majefté Tres-Ckré
tienne ; auquel on a joint une préface , des notes
& des objervations relatives a la Culture de %
cochenille : le tout recueilli & publié parle Cercle
des Philqdelpkes , établi au Cap-François| J
côte de Saint-Domingue. Au Cap - François à]
Paris, & à Bordeaux, i/*-8.° 1786; &. 1787 avec
un fupplémcnt.
Hifiorique.
Lors de la conquête du Mexique par les Efpa- I
gnols, les Mexicains cultivoient la cochenille
depuis uti tems immémorial. Les Efpagnols frap- I
pé's eje la beauté des teintures, que les Mexicains I
obtenoientde cette produélion, preft’entirent d’a-1
bord les avantages qu’ils en pqprroient retirer. Ils I
le font donc appliqués dçs-lors, & ont continué' I
jufqu’à préfent, à conferver ? & à étendre la cuji I
ture de cette produélion. Et depuis ce tems juf- I
qu’à préfent, ils font feuls en pofieffion, d’en I
vendre aux autres nations, à Cadix, an n u lle-I
ment, pour une fomme d’environ huit millions^ I
argent de France.
Le Gouvernement François voit avec peine,
depuis long-:tems , fortir de France chaque année, I
plùfieurs millions de numéraire pour l’acquifition
de cette matière. Elle eft devenue néceffaire à ]
nos manufaélures qui excellent dans l’art de l’em-
ployer pour en faire les fuperbes teintures écar- I
late , cramoifie , &c. dont elle fait la baie. Il a 1
donc fait, en divers tems, depuis plus de cent I
ans, plufieurs tentatives pour tâcher de trouver I
s’il n’y auroit pas quelque moyen ppflible d’iiw I
troduire la culture de cette produélion dans nos j
Colonies de l’Amérique t & d’augmenter leurs ri- I
cheffes par l’addition de cette fertile branche de
commerce. Il a invité, incité, engagé, les Gouver- I
neurs de ces Colonies, & les Savans à y faire des j
recherches, afin de. découvrir fi cet infeéle y I
exilloit naturellement. Plumier entr’autres à cru I
l’avoir découvert à Saint-Domingue : & il allure
avoir montré, au Gouverneur de cette Colonie,
de la cochenille qu’il avoit recueillie fur des
plantes de la partie Françoife de cette Me. On3
ignoré, que cet .illuftre Savant étoit, cette fois, 1
dans l’erreur : on a ajouté foi à cette affertion ; I
plufieurs Auteurs l’ont répétée depuis ; & néan- fl
moins petfonne n’a tenté de mettre à profit cette J
découverte à laquelle on croyoit. C’étoit toujours I
epvain que tous les bons. Citoyens déficient de fl
voir mettre enfin la main à l’oeuvre pour affran- I
chir la France de l’onéreux tribut quelle P21® I
à cet égard, chaque année,, à l’Efpagne j I
reftoit -toujours feule en pofiéMon de cetw p P
cliefle- C’étoit toujours envain que ces mêmes
[fcons Citoyens, repréfentoient aufti les avantages
eonlidérables que l’établiflement de cette
culture procureroit à un grand nombre, de
[Colons. S
I Enfin eft venu Ni colas-Jofeph Thiéry de Mé-
yjonville, natif de Saint-Mihiel en la ci-devanr
I province de Lorraine, Avo cat, & Botanifie du
[Roi, qui a eu le zèle, le courage, la perfévé-
rancele talent, la.prudence, l’adivité , & en-
|fin la fanté néceffaires pour former le projet
[de fe rendre, à >cet égard , le Bienfaiteur de la
[France, & pour mettre ce projet à exécution.
(Malgré la vigilance des Efpagnols fi jaloux de
la propriété exclufive des riches cultures du
Mexique; malgré que, par cette raifon, il foit
[défendu même aux Efpagnols, de quelque partie
du monde qu’ils arrivent à la Vera- Crux.
d’entrer dans l’intérieur du Mexique fans un
(pafle-port du Vice-Roi ; malgré qu’il foit très-
[défendu à tout étranger de s’introduire dans le
Mexique,, fans être munis d’ordres particuliers ;
! de la Cour d’Efpagne; malgré que la tentative
qu’il fit, étant à la Vera-Crux, afin d’obtenir du
^Vice-Roi un pafle-port pour entrer dans le Mexique
fous le prétexte d’y herborifer en qualité de
[Botanifie de Sa Maj.efté Très-Chrétienne, lui ait
ffi mal réuflî, qu’il s’en fuivitque le Gouverneur
[de la Vera-Crux reçut au contraire de la part du
[Vice-Roi, une lettre motivée fur un délibéré
Idel’aiidience Royale du Mexique d’après les con-
[clufions dù Procureur-Général, par laquelle il
étoit très-expreffémënt défendu de le laifier fortir
[de la banlieue de cette V ille , dans la crainte,
imarquoit la lettre, de découvrir à l’Etranger, les
[riches cultures de ce pays ; malgré les nombreux
[gardes établis dans lé Mexique, & qu’on y ren-
fleontre à chaque pas, & dont chacun a le droit &
Il ordre de fe faire repréfenter le pafle-port de tout
■ étranger qu’il rencontre ou, fi ce dernier ne lui en
Ipréfente un, de l’arrêter ; malgré qu’il fût ha-
flmllé à la Françoife, & qu’il n’y eût pas de
fljnoyen de changer fon coflume ; malgré qu’il
Pgnoroit la route, & qu’il n’ofoit s’en informer
1 •crainte de fe trahir; malgré tous les obftacles
Rml devoir ' s’attendre à rencontrer d’ailleurs
1 3 ns un pays habité par des Peuples dont il ignoroit
il ne connoiffoit perfonne ,où tout
Cler Pu^ c étoit, par état, fon ennemi, &c.
1^ Malgré tant d’obftacles, cet homme ardent,
v tnennepûr arrêter le zèle, réuflitfi bien, en
L ?™ ^es plus grands dangers, qu’il pénétra juf-'
iMé ■ Uaxacamême, c’eft-a-dire, dans le coeur du
diflance delà Vera-
we r* en/ a^fant précipitamment quarante lieues
n i>a°^te• P^ef[ par les chemins les plus mauvais/
ÇeclLeUrk plus infupportablê du Soleil, dans
fe d ^r^^ant- Ce fut dans ce lieu
produit la plus grande quantité de coche-
I mcuUure. Tome IL
■ nillè, & celle de la meilleure qualité, qu’il
voulut obferver & qu’il obferva, par lui-même,,
la culture de cette produélion, & qu’il s’inf-
truifit de tous les procédés- qui y font mis en
pratique, relativement à cette culture., Ce fut
là même, qu’il acheta ce précieux infeéle vivant,
avec les plantes qui le nourrilfent. Il parvint
à traverser de. nouveau ces cènt vingt lieues
de pays, avec cinq chevaux chargés de cette
contrebande, à faire embarquer le tout à la Vera-
Crux, nonobflant ceux quifurveilloienr fes aélions
■ de la part du Gouverneur qui étoit préfent
dans la ville. Et enfin, après s’être embarqué
en préfence du Gouverneur, lui-même, qui
avoit ordre dut Vice-Roi de drelfer pfocès-
verbal de fon départ , il débarqua , le 25
Septembre 1777,, au Port-au-Prince, avec les
précieux fruits de fon larcin aufti périlleux que
glorieux.
Ï1 y rapporta, 1.® des plantes de Caélier
Nopal, fur lequel feul on élève au Mexique,
comme je l’ai déjà dit, la cochenille fine & la
c'ochenille filveftre. l.° Ces deux infeéles bien
vivans & en bon état. 3.0 Le beau Caélier
fplendide, qu’on ne cultive a i Mexique que
pour fon fruit; mais qui, fuivant les expériences
qu’il a faites depuis, eft, comme je flai dit*,
aufti bon que le Caélier Nopal,-pour l’éducation
en grand de ces deux infeéles il eft même
meilleur, puifqu’il eft plus ample dans toutes
fes parties, & plus vigoureux, & encore parce
qu’il fe contente du terrein le plus maigre
dans lequel il réuftit très-bien. 4.0 Le Caélier
de Campêche, qu’il a découvert pouvoir être
employé avec luccès, . pour l’éducation, en
grand, de la cochenille filveftre, & qui peut
nourrir la cochenille fine, en petite quantité,
à la vérité, mais cependant de manière à prévenir
la perte de cette efpèce de cochenille,
quand on n’a pas d’autres reflources pour la
conferver ; -comme cela eft arrivé -dans la tra-
verfée de la Vera-Crux à Saint-Domingue: car
comme il fut pendant trois mois & demi en
mer, pour faire cette traverlëe, & que pen-
dant ce tems, l’air fut • extrêmement humide ,
s’il n’eût pas eu le bonheur de prendre des
plantes de cette efpèce en paffant à Campêche,
il eût perdu en chemin toutes fes plantes de
Caélier Nopal, & toute fa cochenille fine: vu
que toutes celles de ces dernières plantes qui
portoient de la cochenille, pourriftoient fuc-
ceflivement, & qu’il fe voy oit tous les jours
dans le cas défolànt d’en jetter à la mer avec
la cochenille dont ils étoient chargés. Il ne put
conferver de fes plantes de Caélier Nopal que
celles qui étant bien enracinées, ne portoient
point de .cochenille ; & il n’a nourri & confervé
cet infeéle, pendant les derniers tems de la i
trayerfée qu’avec le Caélier de Campêche qui
O o o