
474 C A C
fauvâ ainfi ccs tréfors. ç.° Enfin il rapporta
des obfervations & des inftruétions, auffij)iécieufes
que ces richefles , puifqu’elles donnoient des
moyens fùrs de les mettre à profit : & l’on peut
xegardercelles de ces obfervations qui concernent
la cochenille filveftre & mettent en état de la
cultiver en grand à Saint-Domingue, comme
les plus précieufes; puifque, depuis que le
même Thiéry a découvert que cette efpèce de
-cochenille eft naturelle à cette Ifle, elle ne peut
s'y perdre.
Ce n’êft pas ici le lieu de parler des autres
plantes précieufes dont il a enrichi la Colonie,
par la même occafion , & qu’il a aulîi cultivées
depuis, comme, par exemple, le véritable Indigo
de Guatimala; la véritable Van ille -L é e ;
une efpèce de Coton nain, très - précieufe,
& qui mûrit trois mois après avoir été femée -,
le véritable Jalap du Mexique, ( Convolvulus
Jdlapa. Lin. Mant.) &c.
Le zèle de Thiéry de Ménonville ne s’eft pas
arrêté-là. Auffi-rôt après fon arrivée, ou plutôt Ion
retour au Port-au-Prince, il voulut s’adonner
lui-même, i.° à multiplier ces plantes & ces
infeéles, afin de fe mettre , le plutôt poffible,
en état de mettre les Colons à portée d’en entreprendre
la culture 2.° à faire a (fez d’expérien-
d’elfais, d’épreuves & d’obfervations , pour
être en état d’établir des principes & des règles
capables de diriger fûrement les Colons qui
adopteraient ces cultures* & pour conftater &
prouver d’une manière palpable?, combien ces
cultures étoient faciles à établir, par qui que
ce foit, même par les plus dénués de reffources,
& dans les terrèins les plus maigres, & quels
avantages confidérablesoir en pouvoir retirer. Les
premiers fuccès qu’il a obtenu ont furpaffé fon
attente-, & dans les trois premières années, il
avoit déjà réufîi à multiplier le Caélier Nopal,
& les deux efpèces de cochenilles, au point
d’en faire une plantation d’une àlfez grande
étendue. Une cireonftance qui, en même-tems
qu’elle met à portée de juger des fuccès qu’il
devoir à l'opiniâtreté de fon travail, prouve
bien la nature des vues de bienfaifance qui le
dirigeoient ; c’efl l’annonce qu’il faifoit inférer
dans le fupplément du n.* 3, dès Affiches Américaines,
du 18 Janvier 1780, afin de tâcher
d’obtenir des renféîgnemens fuffifans, pour fe
mettre à portée de déterminer par des régies
fûres; r.° le tems le plus convenable, tant à
la plantation du Caéïier Nopal , & dès autres
Caétiers qui peuvent nourrir les deux efpèces
de cochenille, qu’à la femaille de là cochenille
dans chaque canton de la Colonie où il pouvoir
préfumer, qu’il ferait le plus utile d’en
établir la culture-, 2/0 quels feraient ceux do
•fCES cantons,, dans lefquels ces cultures ne pour-
C A C
roient pas s’établir avec fuccès; mm combien
on en pourrait faire de récoltes par an dan»
les cantons propres à ces cultures: voici cette
annonce.
« Le fieur Thiéry de Ménonville, Botanific du
R oi, réfidant au Port-au-Prince, s’oblige enver»
MM. les Adminiftrateurs de la Colonie & les Colons
, de dillribuer dans un an de la date du pré-
fent avis, gratis &. de préférence à tout autre fan»
diftinétion du riche & du pauvre, à chaque ha-
bitant delaBande-du-Sud depuis Aquin jufqu’au I
cap de Dame-Marie, du fond de la plaine du CuU|
de-Sac, del’Arcabaye, du Mirbalais, de l’Artibo-l
nîte, des Gonaïves, fur-tout de tous les environs!
de la Défolée, enfin de laBande-du-Nord depuisI
le Môle-faînt-NicoIas jufqu’au fort Dauphin I
qui lui enverront, fans frais, un mémoire mé-l
téorologique, exaéî& fidèle, des pluies de leur!
territoire , depuis le vingt du préfent mois de!
de Janvier jufqu’au même jour de l’an 1781.1 J ]
des plantes de Nopal pour y élever les coche-1
nilles fine & filveftre ; 2.0 les infeéles de ces deux]
efpèces ; 3.° du plant de la véritable Vanille-Lée; I
4.0 des femences du vrai Jalap du Mexique; ^.•1
des femences du véritable Indigo de. Guatimala; I
6 ° des femences du Coton de la nouvelle Vera-1
Crux, fupérieur à tous, autres connus jufqu’àl
préfent, tant parce qu’il eft nain, qu’il s’ouvre I
trois mois après qu’il a été femé , qu’il évite lai
chenille , qu’il peut être femé toute l’année, que.I
parce que fes- péricarpes font plus gros, fa foie J
plus blanche, plus fine & plus forte. »
Ainfi ce vertueux Citoyen,éloignéd’ètre riche, J
s’engageoit de diftribuer gratis k fes Concitoyens I
des ïburces de fùbfiftance & de fortune acquifesl
au travers de tant de danger & de hafards, pari
tant de travaux & de fueurs, & ne demandoitl
d’autre reconnoiffance d’un tel bienfait, que d’êtreI
mis plus à portée de-leur rendre-ces foureesleîl
plus abondantes poffibles. C’eft ainfi qu’il conti-l
nuoit fans relâche, avec une application", une!
ardeur & une- perféVérance bien digne de fofl'l
premier courage, à faire toutes fortes d’èffortsi
pour couronner & bonne oeuvre.-Mais,, au
ment où if fé voyoit enfin près d-ir bonheur del
pouvoir mettre entre* les mains- d’un grand nom-1
1 bre de colons ces riches moyens d’âifance.,, de li-1
vrerà fon pays cette fertile branche de commercer
en état de rapports, & de le-voir délivré, parf°!f|
moyen y d’un tribut onéreux : au moment ou »•
entrevoyoif déjà' près db lu i, avec tr-apfporM
le tems auquel ilponrrait enfin jouir dei’indicibiej
fatisfàéîion que goûte l’homme de bien lonqu^l
favoure de fes yeux le fpeélacle enivrant dûne |
fomme quekonqueigde bien-être, ajou tée au b011 |
heur de fes femblàbles, il fe vit arracher a i
récompenfe qui- lui étoit fi bien due. Une nev. j
maligne l’attaqua.. Il en mourut en. 1780*
C a c
A fa mort, on trouva dans fes papiers, outre
ta relation de fon voyage à Guaxaca , un traité
de la culture du Caélier Nopal & de l’éducation
de la cochenille dans les Colonies françoifes de
l’Amérique. Dans ce traité ,en expofanr les divers
procédés qu’il a obfervés être pratiqués au Mexique,
relativement à cette culture & à cette éducation,
les informations qu’il y a prifes & les inftruélions
; qu’il y a reçues à cet égard ; & en rendant- compte
des tentatives, obfervations, expériences & découvertes
qu’il a faites fur le même fujet, il éta-
i blit les principes & les règles, d’après lefquels
il lui paroit que doivent fe diriger ceux qui entreprendront
l’éducation des deux fortes de cochenille,
& la culture des Caôtiers qui con viennent
à cette éducation , s’ils veulent retirer de cette
culture & de cette éducation tous les avantages
quelles peuvent leur procurer. Ce traité contient
des tentatives & expériences bien dirigées & bien
fuivies, des principes établis x & des règles pofées
avec beaucoup de fagacité &. de difeernement,
dès obfervations & des découvertes utiles & inté-
reffantes, dans lefquelleson reconnoîtun Obfer-
vateur attentif &. éclairé. Mais, comme je l’ai déjà
dit, l’Auteur , furpris par la mort, n’a pas donné
ja dernière main à ce traité.
Le cercle des Philadelphes, établi à Saint-Domingue,
bien perfuadé de l’importance des travaux 1
; de Thiéry de Ménonville, & que l’établiffement
de la culture de la cochenille à Saint-Domingue
ne pouvoit qu’être fort avantageux à la Colonie
& à l’Etat, a pris foin de recueillir & de mettre i
en ordre fon ouvrage, a de plus chargé plu-
fieurs de fes Membres, de cultiver le Caôtier
Nopal au Cap-François, & d’y fuivre l’éducation
de la cochenille, fuivant les règles établies
par Thiéry, afin de s’a (Tuner, en premier lieu,
du degré de confiance que méritoit ce traité,
& en fécond lieu, fi la culture de la cochenille
réuffiroit au Cap , comme elle avoit réufîi
au Port-au-Prince, fous la direction de Thiéry.
Le fuccès a> paffé leurs efpérances & leur a
paru fuffire; r.? pour encourager les Colons à
adopter cette branche féconde de commerce &de
culture ; 2.” pour les mettre en état d’afiurer que
tous les principes établis & toutes les règles polées
■ par Thiéry, mérirent d’être adoptés &fuivis avec
la plus grande atten tion. Le cercle a vérifié par fes
Loinmiflaires, prefque tous ces principes &
Prefque toutes ces règles. Cette vérification
e.Ur a donné lieu de faire plufieurs nouvelles
,, lervations, qu’ils ont ajoutées utilement k
ouvrage de Thiéry.
Ce font les règles, principes & obfervations
ontenus dans cet ouyrage, dont j’ai cité plus
rîA C rïfre’ ^ue îc va*s expofer le plus fuc-
amtement <pi’il mè fera poffible, fans rien
«mettre da néceffairc.
C a c 47^
’ V e la culture du Caclier Nopal, n.* 39, au
Mexique, & dans les Colôn'cs Françoifes de
VAmérique méridionale, pour Véducation de La.
cochenille : & premièrement de la N o p a l e r i e .
J ’ai déjà dit qu’au Mexique on ne cultive
la cochenille que fur le Cacîier Nopal feulement.
Ce CaèTier s’y nomme vulgairement,
Nopalt qui eft un nom Mexicain. On y nomme
Nopalerie, un terrein planté en Nopals, pour
l’éducation de la cochenille.
On verra ci-après que la cochenille n’a pas
d’ennemis plus redoutables que le froid & la
pluie. Ainfi, avant d’établir une Nopalerie, il faut
d’abord s’informer de la chaleur, & de la nature
du Ciel, c’eft-à-dire, de la durée^ de la nature, êc
desépoquesdes pluies de chaque année entière dans
le lieu où l’on fe propofe de l’établir. J ’ai déjà-
dit que c’eft de la province de Guaxaca, que
l’on tire la plus belle cochenille de tout lo
Mexique. Ainfi, il y a tout lieu de croire que
tout canton qui jouira d’une température &
d’un ciel pareils à ceux de cette Province ,
feront très-convenables à Téducation de la cochenille.
O r , dans les plaines de Guaxaca, la
température eft, fuivant les obfervations de
Thiéry, de.feize degrés au-deflùs dn terme de
la congélation, félon le thermomètre de Réar- .
mur, à quatre heures du marin pendant le
mois de Mai-: & dans cette province, le ciel
eft parfaitement fe c , régulièrement pendanj les
fix mois entiers de chaque Hiver , & ne répand
abfolument aucune pluie, depuis le moisd’O c -
tobre, jufqu’au mois a Avril, fi ce n’eft quelques
fois, en Janvier, une ou deux petites pluies fi
douces qu’elles ne nuifent jamais à la cochenille.
Cependant, quant à cette chaleur, une température
de dix-neur degrés de chaleur à quatre heures
du matin, pendant le mois de Mai, telle qu’eft
la température du Port-au-Prince, qui eft la partie
la plus brûlante de fille de Saint-Domingue,
& peut-être de toute l’Amérique, n’exclut pas la
culture de la cochenille; puifqu’elle y a très-
bien réufii pendant trois années confecutives
fous la Direction de Thiéry ; & qu’on y a fa it,
chaque année / trais récoltes comme à Guaxaca..
Le ciel du Port-au-Prince eft d’ailleurs totalement
pareil à celui de Guaxaca. Cependant cette
chaleur du matin plus forte au Port-au-Prince
qu’à Guaxaca eft un peu préjudiciable à la
cochenille, puifque cette dernière y eft d’un
lixième plus petite qu’à Guaxaca. Thiéry foup-
çonne même que le degré de chaleur, qui exifte
ordinairement dans les plaines de Guaxaca, n’eil
pas le plus favorable à l’éducation de la cochenille;
parce qu’il eft notoire que la cochenille
des montagnes de cette province, eft plus
grofle que celle des plaines. Il attribue cette
différence en partie, à ce que la chaleur eft
moindre dans les montagnes, & en partie à ce
que les Nopaleries des montagnes font plus
O 00 ij