Comme M. Lasco Jones vient d’arriver en ce port, je sollicite
humblement Votre Excellence de faire examiner la conduite
de M. Jones, avant son départ de Sydney, et de me permettre
de produire contre lui les témoignages nécessaires pour compléter
les renseignemens qui m’ont été communiqués.
Je suis parfaitement persuadé que Votre Excellence désire
protéger l’innocent et punir le coupable ; que les naturels de la
Nouvelle-Zélande vous trouveront toujours prêt à leur prêter
toute votre assistance et à protéger, autant que possible , leurs
personnes contre l’insulte et la violence, et leurs petites propriétés
contre la rapine et le pillage. Bien que ces peuples ne
possèdent pas grand’cbose, ce peu cependant constitue tout
leur avoir. Les Européens n’ont point le droit de débarquer
sur leur île pour détruire leurs plantations de patates et autres
végétaux, les dépouiller de leurs vêtemens, les maltraiter, et
les massacrer quand ils osent résister à une oppression si inique.
Outre l ’accusation que je veux former contre M. Lasco
Jones, je désirerais présenter deux ou trois témoins dignes
de confiance, qui ont séjourné à la Nouvelle-Zélande, et
sont instruits de la position des naturels, afin qu’ils déclarent,
pour éclairer Votre Excellence , ce qu’ils savent du traitement
que les Nouveaux-Zélandais ont reçu des maîtres et des marins
des navires. Quand ces renseignemens et ces dépositions auront
été soumis à l’examen de Votre Excellence, elle jugera
quelles espèces de défenses pourront être imposées aux maîtres
des navires destinés pour la Nouvelle-Zélande, et quelles instructions
leur pourront être données.
Si les naturels de la Nouvelle-Zélande étaient traités avec
justice et humanité par les Européens, si leurs personnes et leurs
propriétés étaient protégées contre la fraude et la violence, je
suis persuadé que toute espèce d’hostilités et de meurtres cesserait
de leur part, et il s’ensuivrait bientôt des rapports
d’amitié entre eux et la colonie, qui seraient très-profitables .à
cette dernière. C’est une race d’hommes noble et capable de
toute e.spèce d’amélioration morale. Ils apprendraient bientôt
nos arts et acquerraient le goût de l’industrie. J’en suis complètement
convaincu par la connaissance que j’ai acquise de
leur caractère et de leurs qualités.
{Missionnary Register, nov. 465. )
Comme on a beaucoup cherché à décréditer les Nouveaux
Zélandais à l’occasion du massacre qu’ils ont fait des
équipages du B oyd et du Parramatta, nous allons insérer
les deux dépositions suivantes pour qu’on puisse apprécier
exactement les faits.
D E U X D É P O S IT IO N S TO U C H A N T L E M A S SA C R E CONSOMMÉ PA R L E S
N O U V E A U X -Z É L A N D A IS SU R L E S É Q U IP A G E S DU BOYD E T DU
PA R R AM A T TA .
Palais-de-Justice, Parramatta, vendredi, i novembre i8i3.
Déposition de John Resent, relative à la perte du Royd,
Après avoir prêté serment, dépose qu’il est arrivé sur le
King-George (navire appartenant à Port-Jackson) à la baie
des Iles, en mars 1812; le maître ayant maltraité quelques-
unsdcs Nouveaux-Zélandais, le déposant craignit que le navire
ne fût enlevé et l’équipage massacré ; alors, jugeant qu’il serait
plus sûr pour lui d’aller à terre et de vivre avec les naturels,
il quitta le navire, et demeura un an sur l’île. Durant son
séjour parmi les naturels, il reçut les détails suivans sur la
perte du Royd, par la bouche d’un des fils des chefs, qui parlait
très-bien l’anglais, ayant fait deux voyages à bord duAiar,
capitaine Wilkinson. Quand le Alar appareilla de Port-Jackson
pour l’Angleterre, le capitaine Wilkinson obtint du capitaine
Thompson, maître du Royd, qu’il prendrait le cbef et son
compagnon à bord du Royd, avec la promesse de les débarquer
à la Nouvelle-Zélande, où il allait chercher des espars.