VO Y AG E
DU C A P IT A IN E S U R V IL L E .
Voici l’article du journal de Monneron, subrécargue
du vaisseau le Saint-Jean-Baplisle, relatif au
séjour que fit le capitaine Surville à la Nouvelle-Zélande.
Cet officier reconnut cette grande île le 12 décembre 1769,
par la latitude australe de 35° 37’ : les vents ne lui permirent
pas de trouver un mouillage avant le 17, jour où il jeta l’ancre
dans une baie qu’il nomma Lauriston, du surnom du gouverneur
Laws. Le lendemain Surville descendit à terre, le chef
du village vint au devant de lui sur le bord du rivage. Les insulaires
étaient épars de côté et d’autre; ils tenaient à la main
des peaux de cbiens et des paquets d’berbes qu’ils haussaient et
baissaient alternativement, dans l’intention sans doute de lui
rendre bommage; c’est ainsi que se passa en espèce de salutation
la première entrevue : le jour suivant la r-éception fut bien
différente, les Indiens étaient eu armes et par troupes. Le chef
était venu dans sa pirogue au devant de Surville pour l’en-
gager, par signe, à l’attendre sur le bord du rivage, parce que
les Indiens étaient dans de vives alarmes sur la descente à terre
d’une grande partie de l’équipage de son vaisseau. Survillc sc
conforma à ce qu’il désirait à cet égard ; mais, lorsque le chef
lui fil la demande de son fusil, il s’y refusa. Le chef, sans se
rebuter du peu de succès de sa première demande, pria cet officier
de lui prêter son épée pour la montrer aux gens de son
village. Le capitaine ne fit aucune difficulté de lui remettre
cette arme; le chef, s.itisfalt, accourut la montrer aux insulaires
qui paraissaient attendre avec inquiétude le dénouement
de cette entrevue. Le chef harangua à haute voix, et avec chaleur,
ce^nombreux attroupement; et dès ce moment il s’établit,
entre les insulaires et l’équipage du vaisseau, un commerce qui
procura des vivres et des secours de toute espèce aux malades.
Ce chef demanda à Surville la permission de l’accompagner à
bord de son vaisseau pour en examiner la construction : ce capitaine
y consentit; mais, dès que le canot commença à s’éloigner
de la côte, le cri des femmes elles alarmes des Indiens déterminèrent
Surville à le ramener promptement à terre, où
cet officier fut témoin de l’affection sincère de ce peuple envers
leur chef.
L ’illustre Cook côtoyait alors la Nouvelle-Zélande, il releva
même la baie où était Surville, sans se douter qu’un vaisseau
français eût abordé avant lui à cette île alors peu connue. On
lit dans la relation de son second voyage : « Lorsque je pro-
« longeais (en décembre 1769), sur VEndeavour, la côte de
» la Nouvelle-Zélande, le capitaine Surville était mouillé dans
» la baie Douteuse, sans que j’en eusse par les insulaires aucune
>■ connaissance. ■>
Surville éprouva une tempête dont il est mention dans le
journal de Cook, qui lui fit perdre ses ancres; son vaisseau
courut de grands dangers, mais cet habile marin savait, dans
ces grandes circonstances, déployer avec un sang-froid imperturbable
toutes les ressources de son art. Aussi avait-il la confiance
de son équipage à tel point qu’il n’était pas intimidé à
la vue des plus immiiiens dangers.
Au commencement de la tempête, la chaloupe où étaient