que notre Dieu avait tout fait; qu’il était toujours présent
avec nous; qu’il prenait continuellement soin de nous; qu’il
entendait et voyait tout ce que nous faisions et disions.
Le chef désirait qu’un Européen vînt les instruire; il dit
qu’il lui donnerait une ferme, et qu’il vivrait près de lui.
Mou-Ina et son peuple habitent une vallée riche et fertile.
Il y a un grand nombre de beaux enfans; on pourrait former
dans cette vallée une station importante pour les missionnaires
, et je ne doute pas qu’ils n’y fussent accueillis avec
bienveillance. Nous eûmes une longue conversation à ce sujet
avec le prêtre et Mou-Ina, qui semblait un homme capable.
Après dîner, pour nous dégager de la foule du peuple, nous
fîmes une promenade sur le rivage. Les naturels nous suivirent
en divers groupes. Nous les priâmes de s’en aller , car nous désirions
être seuls. Ils cédèrent sur-le-cbamp à notre demande.
Nous revînmes au bout de quelques heures, et passâmes la
soirée en conversations utiles.
4 octobre. Nous nous sommes levés ce matin de bonne
heure, dans l’intention d’examiner l’entrée de la rivière. Le vent
soufflait très-frais. Le prêtre dit que nous aurions sa pirogue de
guerre, et qu’il nous accompagnerait pour défendre aux vents
et aux vagues de s’élever.
Aussitôt que le déjeuner fut achevé, le prêtre, M. William
Puckey et un bel équipage de jeunes naturels, lancèrent la
pirogue à leau , puis nous fîmes route vers les pointes de l’entrée
, distantes de quatre milles environ. Te Manguina me recommanda
de n’avoir aucune frayeur, assurant qu’il ne permettrait
point aux vents ni aux vagues de s’élever. Il y a deux gros
rocbers près des pointes où résident les dieux de la mer, suivant
l’opinion du prêtre et des babitans des bords de la rivière.
Le pretre dit qu’il allait commander aux dieux d’être tranquilles
et de ne point troubler la mer, jusqu’à ce que nous
eussions fait notre reconnaissance, et sondé le banc et le
chenal.
Nous ne fûmes pas plutôt dans la pirogue, que le prêtre
commença à déployer tout son pouvoir pour calmer les dieux,
les vents et les vagues. Il parla d’un ton irrité el impératif.
Cependant je ne m’aperçus pas que les vents ni les vagues cédassent
à ses ordres; quand nous atteignîmes les pointes, la
mer étant houleuse , je demandai à être mis à terre, tandis que
le prêtre et M. Puckey iraient au large pour sonder le banc
de sable. Je débarquai près d’une des roches sacrées; un chef
qui m’accompagnait exprima une vive frayeur que je ne marchasse
sur le sol consacré ; il dit que le dieu le tuerait s’il me
laissait fouler ce so l, et il me retenait souvent quand il pensait
que j’en approchais de trop près. Je fus obligé de profiter de
l’espace que chaque lame laissait en se retirant, pour m’avancer
en courant sur le rivage jusqu’à ce que j’eusse dépassé la résidence
de la divinité imaginaire.
Quand M. Puckey eut pris les relèvemens et les sondes nécessaires,
je revins au village. Là je me préparai à prendre
congé de notre cbef hospitalier, qui nous fournit, ainsi qu’à
nos compagnons, une grande quantité de patates et autres
provisions. Vers sept heures, le chef, son frère et plusieurs de
leurs gens, avec le prêtre, se déterminèrent à nous accompagner
dans notre visite aux autres chefs, jusqu’à ce que nous
quittassions définitivement la rivière.
Visite au village de TVidi-Nahe.
Les pirogues furent bientôt prêtes, et nous fîmes route pour
le prochain village, appelé "Widi-Nake, distant de dix-huit
à vingt milles; nous y arrivâmes vers minuit. Un des chefs
attendait notre arrivée pour nous recevoir. Ce village se trouve,
à la lettre , dans un coin très-obscur du globe, derrière quelques,
montagnes élevées, mentionnées dans le récit du capitaine
Cook. Il est situé au fond d’une grande crique d’eau salée
qui se détache du canal principal, dans une étendue de dix
milles environ; cette crique se termine en un très-beau courant