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Tandis que nous étions livrés à cette triste perplexité, les
p ilk rd s , ayant vidé tous les bâtimens secondaires, commencèrent
a jeter bas les fenêtres et les portes de la maison principale
; ils pénétrèrent dans toutes les cbambrcs et s’emparèrent
de tous nos effets. Les jeunes naturels qui devaient nous accompagner
parurent fort alarmés, et nous pressèrent de partir,
assurant que, pour peu que nous tardassions encore, nous
ne poumons écbapper qu’avec notre peau seulement, voulant
dire par là que nous serions dépouillés des babits même que
nous portions. Mais, quoique notre situation fût extrêmement
périlleuse, nous balancions encore; car nous éprouvions la plus
grande répugnance à abandonner un établissement auquel nous
.avions consacré tant de soins et de travaux et qui nous était
devenu cber sous tant de rapports intéressans. Enfin la dernière
lueur d’espoir s’évanouit : nous fûmes complètement
convaincus que la crise fatale était arrivée et qu’un devoir impérieux
nous forçait de fuir pour sauver nos vies. En conséquence
vers six beures, lorsque celte oeuvre de pillage et de
dévastation durait depuis une beure et plus avec une fureur
aveugle et continuelle, nous nous mîmes en route, et le coeur
oppressé, nous dirigeâmes nos pas vers Kidi-Kidi, la plus
voisine des stations qui appartenaient à la mission de l’Eglise.
Notre troupese composaitdes deux missionnaires,MM.Tur-
iier et Hobbs, de madame Turner qui n’était accouebée que
depuis cinq semaines et qui était encore très-faible; trois petits
cnlaiis , miss Davis, Luc W’ade , domestique anglais , sa
femme qui avait été grièvement malade durant plusieurs
semaines, et qui pouvait à peine marcber, cinq garçons et
deux jeunes filles du pays, complétaient la totalité qui montait
a seize personnes. Nous avions à faire un voyage de vingt
milles au travers d’un pays montagneux et très-raboteux. Certaines
bautciii-s sont si escarpées, que sans les racines des
arbres qui forment comme des degrés, elles seraient presque
inaccessibles.
Cc ne fut pas sans éprouver de vives inquiétudes sur la possibililé
d’effectuer un si long voyage, que nous l’entreprîmes;
les plus forts soutenaient les faibles et tous sc confiaient dans
l’aide de la divine providence. La route conduisait d’abord à
une vallée au milieu de laquelle une rivière coule en serpentant;
il fallut la traverser plusieurs fois, et nous fûmes obligés
de transporter les femmes dans nos bras. Après avoir encore
marcbé l’espace d’un mille, nous rencontrâmes trois des babitans
qui avaient quitté la vallée où nous résidions le vendredi
précédent : ils nous apprirent qu’une troupe considérable,
composée de mille guerriers, arrivait de Sbouki-Anga et se
trouvait tout piocbe; qu’ils étaient .suivis par Tepoubi et
plusieurs de ses gens, et que leur but était de soustraire la
femmeetlesenfansdeTepoubiaux atteintes de Sbongui pour les
conduire dans un Heu de sûreté. Ils nous pressèrent fortement
de nous déranger de la route et de nous cacher, soutenant que
si cette troupe nous rencontrait, elle nous massacrerait très-
certainement. Nous n’avions aucun sujet de douter de la nouvelle
qu’ils nous donnaient, maisnous avions de puissans motifs
pour nous défier de leur avis, car nous connaissions ces gens
pour être de très-mauvais sujets. L’un d’eux avait tenté, deux
ans auparavant, d’assassiner M. Turner; et nous savions qu’un
autre était cc même bomme qui avait eu la perfidie de conduire
deux bommes de l’équipage du Boyd dans un endroit
où ils furent tués et mangés. Nous étions fort embarrassés de ce
que nous devions faire; mais comme il n’y avait pas de temps
à perdre, nous tournâmes sur le côté pour nous cacher. Nous
n’étions pas loin quand ces bommes nous ordonnèrent de
nous asseoir; cela ranima nos soupçons, attendu que de cet
endroit nous pouvions être facilement aperçus de la route.
Ces soupçons se trouvant fortifiés par la conduite singulière
de CCS bommes sous d’autres rapports, nous fûmes portés à
croire que leurs intentions étaient perfides; c’est pourquoi,
nous nous décidâmesà regagner la route, et, atout hasard, à
poursuivre notre voyage. Avant d’atteindre le sentier , nous
fûmes contcns de rencontrer deux autres naturels qui pou