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M. Cruise raconte ainsi qu’il suit, l’alarme que causa
l’invasion de Poro et de ses gens dans la tribu de Georges
ù Wangaroa, tandis que le Dromedary se troüvait mouillé
dans cette baie pour charger des espars de Koudi. (Pages
J 92 et suiv. )
3 août 1820. Le soir on vit plusieurs feux dans un marais
à l ’extrémité méridionale du h â v re , près de l’embouchure de
la rivière Kamimi. Les naturels dirent que c’était le camp du
cb e f Poro du cap N o rd , ajoutant qu’un grand combat allait
avoir lieu ; mais après de nombreuses questions, on ne put
s’assurer d’une manière satisfaisante si l’attaque allait avoir
lieu sur le peuple de Georges ou sur celui de Tepere. Les babitans
semblaient vivement alarmés, et aucune de leurs pirogues
n’osa s’aventurer vers cette partie du bâvre.
4 août. L a même inquiétude et la même ignorance sur
les intentions de Poro ont régné parmi les naturels. Tepere
est venu de bonne heure à b o r d , e l ne s’en est allé qu’à la
nuit. I l était évidemment dans une grande anxiété, et la peur,
plutôt qu’aucune affaire, semblait le retenir sur le navire. Dans
la soirée, les feux de Poro ont disparu, et les naturels ont
rapporté qu’il s’était avancé sur les bords du K am im i, vers le
district de Georges.
5 août. Dans Taprès-midi le cbarpentier et Georges sont
venus à b ord ; le premier a annoncé qne l’apparition de Poro
avait plongé G eorges et sa tribu dans les plus grandes alarmes;
toute espèce de travail avait cessé depuis quelques jou rs , et
l’on faisait toutes sortes de préparatifs pour repousser le formidable
agresseur.
Quand Poro se remit en marche le troisième jo u r , il se dirigea
au travers des bois vers le pâ de Georg es, et prit position
sur une colline précisément en fa c e , qui n’en est séparée
que par le Kamimi, guéablc en cet endroit, et par une vallée
intermédiaire, d’un demi-mille de large. Le mouvement de la
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tribu de Poro au travers des bois ne put être aperçu des E u ropéens
, mais du moment qu’ils en sortirent jusqu’à celui où
ils occupèrent la colline éloignée d’un mille à peu p rès, leurs
opérations furent visibles.
Sur la lisière du b o is , ils laissèrent leurs femmes, leurs enfans,
leurs koukis, leurs bagages et leurs babils , et s’avancèrent
vers le sommet de l ’éminence , en trois divisions qui mar -
cbaicnt avec rap id ité , et ne portaient absolument rien que
leurs armes. Leurs corps étaient entièrement nus et peints en
ro u g e , leur cheveux liés au sommet de la tête et h u ilé s , et
leurs figures barbouillées d’une espèce de peinture b le u e , assez
commune en quelques parties de la Nouvelle-Zélande. En
arrivant au sommet de la co lline , ils exécutèrent la danse de
guerre, et poussèrent des cris pour défier leurs ennemis ; ensuite
le bagage se mit en route et ils formèrent leur camp. La
danse de guerre et les cris furent sur-le-cbamp répétés par le
peuple de Georges du côté opposé; les hommes étalentpeints
en rouge et armés, et plusieurs femmes semblaient costumées
delà même façon pour rendre l’aspect de leurs forces pins imposant.
Durant la nuit on observa le plus profond silence ; au
moindre bruit les hommes couraient aux armes, et Tepoubi
fit souvent tirer des coups de fu s il, afin de prouver à ses ennemis
que sa propre tribu était pourvue de ces armes redoutables.
L e lendemain malin , le charpentier annonça son intention
d’aller au camp de Poro pour s’assurer de l’objet de sa v is ite ,
et W e to ï, le naturel de S h ouk i-A n g a qui nous avait déjà
donné plusieurs preuves de sa fidélité, ayant quelques parens
dans l ’armée de Poro , s’offrit à l’accompagner. Georges s’opposa
fortement à cette démarche, prétextant le danger personnel
auquel le cbarpentier allait s’exposer ; enfin il fut convenu
que Houdou , frère de Georges, se joindrait à Tambas-
sadc. Comme ils approchaient du camp, Houdou fut subjugué
par ses craintes, et saisissant le charpentier par son
h ab it, il le conjura, mais en vain , de ne pas aller plus loin.
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