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PIECES JUSTIFICATIVES.
ressant. Vers trois heures après-midi, notre troupe se remit en
marche, guidée par une des filles de Rewa, âgée de quatorze
ans environ, qui portait un fusil de chasse à deux coups.
Rewa n’avait pas encore dîné ; au coucher du soleil nous arrivâmes
à l’habitation d’un des amis de ce chef, et c’est Là qu’il
nous rejoignit. Sur-le-champ six grandes corbeilles de kou-
maras furent préparées pour notre souper.
21 mars. Nous ne pûmes guère dormir, car Rewa et une
foule de femmes ue firent que causer et rire toute la nuit. A la
première pointe du jour nous fûmes debout, et en route avant
que le soleil se levât. Nous rencontrâmes quelques personnes
qui nous instruisirent des mouvemcns de l’armée, ce qui nous
fil hâter le pas. Nous rattrapâmes deux détachemens bien
armés de fusils ; ils furent très-curieux de connaître le motif
de notre voyage, et Rewa le leur expliqua. Vers midi, nous
aperçûmes la fumée du camp, et à deux beures nous y arrivâmes
: nos amis nous firent un accueil amical, et nous plantâmes
nos tentes près de Toï-Tapou. Nous eûmes un long entretien
touchant les dispositions générales de nos naturels;
quelques-uns de ceux qui à Pabia s’étaient moqués de l’idée de
faire la paix, désiraient désormais que nous fissions tous nos
efforts pour y amener l’ennemi. Après avoir pris quelques
rafraîcbissemens, les divers détacberaens se rendirent à la
revue : leur ensemble formait une force considérable, et presque
chaque homme avait un fusil. Il y eut plusieurs shakas ou
danses exécutées, et le terrain tremblait alors sous leurs pieds.
Plusieurs discours furent ensuite prononcés, et il était clair que
le voeu général était pour la paix. Le reste de la journée se
passa paisiblement.
22 mars. Pour empêcher l’ennemi de surprendre le camp ,
on tira plusieurs coups de fusil durant la nuit. Au point du
jou r, tout fut en mouvement, les guerriers s’armèrent et se
préparèrent à marcher : quelques minutes après, ils s’élancèrent
tous à la fois vers le sentier qui conduisait au pâ. Quant
à nous, nous restâmes au centre avec plusieurs des chefs, et
PIÈCES .lUSTIEICATIVES.
nous marchâmes à grands pas au travers d’un bois très-considérable
et en partie au travers d’un marais. Il y eut beaucoup
de pluie et de tonnerre ; la pluie rendit notre marcbe fort pénible
et le tonnerre frappa les naturels d’épouvante; ils le
regardèrent comme le présage infaillible d’une bataille. Nous
fîmes balte au pied d’une colline jusqu’à ce que tous les guerriers
fussent rassemblés. Alors deux ou trois cbefs firent une
harangue ; ensuite nous nous remîmes en marcbe et nous arrivâmes
enfin dans une belle vallée vis-à-vis d’un pa. Nos gens
se mirent à courir en tous sens, les uns pour détruire les maisons,
quelques-uns pour chercher des vivres, d’autres pour
voir le lieu où Ware-Oumou avait péri. En trois heures de
temps, plusieurs rangs de cabanes furent dressés pour l’usage
des différentes tribus; elles étaient disposées dans un ordre
admirable, et chaque tribu avait sa place séparée.
Dans l’après-midi, Rewa et Toï-Tapou se consultèrent avec
nous ; ils remarquèrent qu’il ne serait pas convenable qu’aucun
d’eux allât au pâ dans la journée, mais qu’il vaudrait mieux
que nous y allassions nous-mêmes pour nous assurer des véritables
dispositions de l’ennemi. En conséquence nous nous
dirigeâmes vers le pâ, accompagnés de deux naturels parens
de Rewa qui en étaient venus. Nous fûmes reçus avec beaucoup
d’aménité et conduits devant Patou-One et plusieurs autres
cbefs ; ils témoignèrent le désir de voir faire la paix et le regret
des combats qui avaient eu lieu , et parurent enchantés de nous
voir. Ware-Rabi demanda s’il ne faudrait pas que P a ï, le cbef
du p â , allât avec nous dans le camp. Comme nous n’avions
pas d’instructions à cet égard, nous sentîmes que ce serait
prendre sur nous une trop grande responsabilité; c’est pourquoi
nous lui conseillâmes de rester pour le moment. Ware-
Rabi revint avec nous dans le camp ; le pauvre vieillard semblait
abattu et fatigué , nous le conduisîmes à son frère Rewa.
Comme nous nous rendions à notre tente , les naturels nous
entourèrent pour nous demander les nouvelles, et ils furent
contens d’apprendre que tous désiraient la paix.