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Arrivée au cap Nord.
lo août 1819. La nuit dernière, vers minuit, le maître conclut,
d’après son estime, que nous étions près du cap Van-
Diemen, le point le plus sud du cap Nord de la Nouvelle-
Zélande ; il sonda et trouva fond à dix brasses. Aussitôt il
reprit la bordée du large pour deux heures environ, et courut
ensuite suiTa terre ; avant le point du jour, nous en étions près.
Nous eûmes alors une belle brise, modérée et favorable; au
retour du jour, k notre grande satisfaction , nous eûmes une
vue très-rapprocbée du cap Nord, et aperçûmes ensuite les
feux des naturels sur différens points de la terre. Nous prolongeâmes
la côte tout le long du cap Nord.
En peu de temps, nous fûmes entourés d’environ quarante
pirogues pleines de pêcheurs, à quelques-uns desquels
nous parlâmes; nous apprîmes qu’ils ne pouvaient avoir aucune
communication avec nous, attendu qu’ils étaient tahoués.
Ils ne péchaient rien autre que des empereurs {espadons);
tout le poisson de ce genre qu’ils prenaient était taboué, et ils
ne pouvaient pas en disposer, car il devait être réservé pour leur
provision d’hiver. Nous vîmes sur le rivage un grand nombre
de plates-formes dressées pour faire sécher leur poisson. Je m’informai
du cbef el de Jem le Taïtien, et j’appris qu’ils étaient à
terre. Il semblait y avoir environ deux cent cinquante à trois
cents bommes dans les pirogues; mais comme ils étaient ta-
boués, ils ne pouvaient avoir avec nous aucune communication
particulière.
Le temps continua d’être beau et le vent bon, jusqu’.à ce que
nous eussions dépassé le cap. Vers le soir, il tomba par degrés,
si bien que dans la nuit du mercredi nous ne fîmes que peu
de chemin.
Aux Cavalles.
12 août. Vers midi, la brise fraîchit et devint assez jolie , de
manière que nous arrivâmes vis-à-vis les îles Cavalles avant le
coucher du soleil, et nous eûmes alors la visite de plusieurs
pirogues. Dans l’une d’elles était le chef Okida, dont le fils
avait passé un an chez moi à Parramatta et venait d’y retourner
sur l ’Active. Il demanda à rester à bord jusqu’à notre arrivée
à la baie des Iles, ce qui lui fut accordé. Okida nous
apprit qu’ils rassemblaient leurs gens pour aller à la guerre
avec les babitans de Wangaroa, et que Sbongui allait quitter
la baie des Iles vendredi matin avec ses pirogues de guerre et
ses guerriers, pour se joindre à ceux du continent devant les
Cavalles. Okida nous apprit que le démêlé entre Shongui
et le peuple de Wangaroa provenait de ce qu’une baleine
avait été jetée par les flots sur le rivage qui appartenait
à Sbongui, et que le peuple de Wangaroa l’avait mangée ; cet
acte était considéré comme un vol public , et Shongui se mettait
en campagne pour punir la tribu de Wangaroa de cet attentat.
A Rangui-Hou.
Vers m inuit, le General-Gates mouilla beureusement devant
Rangui-Hou, par douze brasses ; aussitôt, et malgré une heure
aussi avancée, les naturels tirèrent plusieurs coups de fusil
pour nous saluer. Plusieurs d’entre eux , avec le pilote, se rendirent
sur-le-cbamp le long du bord, mais nous ne voulûmes
point les recevoir jusqu’au matin ; en conséquence, nous les
priâmes de retourner à terre, et d’informer les gens de l’établissement
de notre arrivée, ce qu’ils firent.
i 3 août 1819. Au point du jour, le navire fut entouré de naturels.
Quelques-uns des colons vinrent à bord, et nous apprirent
que tout allait bien. Notre rencontre procura une satisfaction
sincère à tous ceux qui s’intéressaient à la mission.
Quand nous considérions les plages de la Nouvelle-Zélande,
et les naturels se pressant en foule autour de nous, nos coeurs
s’enflammaient, et nous nous regardions comme arrivés sur la
terre promise.