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sible à décrire, que ma rançon était arrivée. Cette délivrance
extraordinaire était due aux événemens suivans.
QuaniWie capitaine quitta le bâtiment pour aller sur la côte,
la première cbose qu’il aperçut fut un insulaire emportant les
sabres de nos gens; et lorsqu’il eut rejoint ceux-ci, il apprit
qu’effectivement ils avaient été dépouillés de leurs armes.
Il donna aussitôt l’ordre de détacber la cbaloupe, mais les
rames n’y étaient plus : on vit, sur un des roobcrs, l’insulaire
qui les avait prises et qui les tenait encore. Nos gens le poursuivirent
avec tant de vigueur qu’il jeta les rames et s’enfuit.
Comme ils revenaient vers la cbaloupc, les sauvages cachés
derrière les rochers tirèrent sur eux, et ne leur firent heureusement
aucun mal. Ils avaient à peine quitté le rivage qu’ils
s’aperçurent que les insulaires s’étaient emparés du brick : ils
étaient sans armes ; par conséquent il était inutile de songer à
sauver le bâtiment. Ils s’avancèrent en pleine mer, se dirigeant
vers le nord-ouest en faisant force de rames, et ils eurent
l’heureux hasard de rencontrer lagoèleitelaNouvelle-Zélande,
capitaine Clarke, venant de Sydney, et qui les reçut à son bord.
Ce capitaine, apprenant le sort de notre bâtiment, résolut de
le reprendre, ee qu’il fit ainsi que nous l’avons vu. Les lambeaux
de chair humaine répandus sur le pont, les débris du
feu qu’on y avait allumé, ne laissèrent pas de doute que les
malheureux restes a bord n’eussent été dévorés par ces cannibales.
La goélette rentra dans le mouillage de Tauranga. Là,
on apprit que j ’étais encore vivant cl prisonnier à W alk i-
Tanna. Le capitaine envoya deux ebefs porter des fusils pomma
rançon ; ils allèrent par terre, et arrivèrent le g mars. Je
partis aussitôt avec eux : ma faiblesse me rendit encore ce
voyage plus pénible que la première fois. J’eus beaucoup de
peine à traverser les montagnes couvertes de fougère tellement
mouillée par la rosée que je ne pouvais m’y reposer.
Mes guides me procurèrent cependant quelque soulagement
en faisant dans lo sable des trous dans lesquels je me couchais
jusqu a cc que le froid et le frisson m’obligeassent à marelier
de nouveau; il nous fallait aussi faire de nombreux détours
pour éviter les insulaires. Après trois jours et trois nuits d’une
marcbc pénible, nous atteignîmes Tauranga, où j’eus le bonheur
inexprimable de retrouver mon capitaine et mes camarades
, et où nous nous racontâmes tous les événemens qui s’étaient
passés depuis notre séparation.
Nous arrivâmes le i 5 mars dans la baie des Iles. Le capitaine
me mena à terre auprès du révérend M. Williams, missionnaire
établi dans ces parages ; mais, n’étant pas médecin,
il ne put me donner d’autre secours qu’une poudre pour empêcher
l’excroissance des chairs. Je partis pour Sydney le 17 ,
à bord de la Nouvelle-Zélande, et nous arrivâmes le 25, ayant
ainsi passé vingt-trois jours sans aucun secours des gens de
l’art. On extirpa de mon bras trois jilombs et plusieurs esquilles;
la blessure était en si mauvais état que le cbirurgien
voulait faire Tamputallon; je n’y pus consentir. Je passai trois
mois à Sydney pendant lesquels ma blessure sc guérit ; mais
désespérant de pouvoir jamais me servir assez bien de mon
bras pour continuer mon service dans la marine, je retournai
en Angleterre où j’arrivai après une traversée de quatre
mois et demi.
( United Service Journal.)