Nos jeunes fiUes du pays étaient toutes dehors; madame
Fairburn et moi nous étions prisonnières chez nous, et nos
fenêtres furent tout le jour masquées par les têtes des naturels
qui regardaient cbez nous. J’en fus bientôt excédée, et leurs
remarques cessèrent de m’amuser : il faisait extrêmement chaud,
ot nous étions privées du grand air. Les pauvres enfans commençaient
à languir par défaut d’air et de liberté.
Vers cinq heures, M. Williams, qui s’était rendu au milieu
des naturels, vint à la fenêtre de la chambre à coucher, et
nous dit que tout était plus tranquille et que les naturels se
dispersaient. En conséquence, je fis passer deux des enfans parla
fenêtre; mais à peine leurs pieds touchaient à la terre,
qu’on entendit tout-.à-coùp des coups violens qui semblaient
appliqués derrière le magasin ; on eût dit qu’on voulait ouvrir
une brèche au travers des murs de bois. Les enfans furent replacés
en bâte dans la chambre, et M. 'Williams courut sur
le terrain. Le tumulte et les clameurs devinrent très-grands.
Les enfans étaient fortement persuadés que les naturels allaient
tuer leur père. Comme j’étais assise au milieu de la chambre
à coucher, avec un enfant au sein et les trois autres collés
contre moi, je vis par la petite fenêtre de la salle, une fois la
première émeute passée, un homme pointer son fusil vers la
maison, prêt à faire un effort pour y entrer, et mon mari se
jeter au-devant de lui. Alors mes craintes furent portées au
plus baut degré; cependant je conservai assez de courage pour
résister aux souffrances qui vinrent déchirer mon ame dans
cc moment terrible. Les cbers enfans, criant et sanglottant,
tombèrent à genoux, cl répétèrent avec moi une prière inspirée
par la circonstance. Le bruit continua; ils secouèrent
plusieurs fois nos faibles murailles de bois, mais la maison
résista et les enlans devinrent plus calmes. Je voulus rassurer
lamé , en lui disant que plusieurs des naturels étaient de nos
amis, et qu’ils tâcheraient de sauver papa. « Oh ! maman,
s’écria l’enfant, que nos amis sont d’effrayantes créatures ! »
Les femmes en dehors défendaient l’accès de notre fenêtre,
en criant de temps en temps : « E/i modeler ! eh modderl te na
ra ko koe inodder! (mèrel mère! prenez courage, mère!)»
Enfin Apou vint nous montrer sa bonne et affectueuse figure,
en m’annonçant que le combat était fini pourla journée; que
tous les hommes étaient partis, et qu’elle s’était vaillamment
battue pour nous; car les femmes combattent aussi à la Nouvelle
Zélande. Je débarrai de bon coeur la porte, pour laisser
entrer M- Williams qui nous dit que tout était fini. Cette seconde
querelle avait été tout-à-fait distincte de la première.
Durant la dernière affaire, Toï était resté en repos, et penchait
même en quelque sorte pour nous. Pour complaire aux
voeux réunis des chefs nos amis, le pot en litige lui avait été
donné, et il était retourné chez lui.
{Missionnary Begister, décembre 1826, pag. 6i 3 <5/ suivi)
Le 24 janvier 1825, le petit schooner le Herald, de cinquante
cinq à soixante tonneaux, conslruit par les missionnaires
de la Nouvelle-Zélande à Pahia, fut lancé heureusement
aux acclamations des naturels. Le 20 février il partit pour son
premier voyage, et arriva à Sydney le 7 mars; il quitta
Sydney le 18, et fut de retour à la baie des Iles le 25 du
même mois. Cc petit navire sc trouva avoir d’excellentes qualités.
Ce fut à cette époque que Rangui-Toukc, fils de Tekoke,
alla à Port-Jackson où il resta quelque temps... Le Herald, se
perdit à l’entrée du Sbouki-Anga, le 6 mai 1828.
{Missionnary Begister, décembre 1 8 2 6 , G17
et 619 , et décembre 1828 , pag. 63o.)
Voici le récit des événemens qui amenèrent la ruine de
la Mission de Wang^aroa au commencement de l’année
1827 :
La mission Wesleycnne sur la Nouvelle-Zélande fut commencée
au mois de juin 1823. Elle était établie dans une belle
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