pauvres nations païennes qui ne leur ont jamais fait le moindre
mal.
Seize années se sont bientôt écoulées depuis que le Vénus
fut enlevé par des convicts; e t, par suite de cet enlèvement
et des crimes que commirent ensuite les pirates, les têtes des
pères de famille et des cbefs de tribus sont aujourd’hui exposées
en spectacle à Rangui-Hou, tandis que leurs femmes, leurs
enfans et leurs serviteurs, ont été ou massacrés ou livrés à une
triste captivité!...
Récit de Shongui touchant son expédition au cap Est.
Avant de terminer les observations de ce jo u r , j’allai an
devant de Sbongui et de Temarangai. Comme je désirais apprendre
tous les détails de leur expédition vers le cap Est, je
les priai de m’accompagner cbez M. Kendall, afin de m’aider
de son secours pour les interroger avec soin. Après une conversation
de près de deux heures, je rassemblai les particularités
suivantes, toucbant leur expédition et leurs coutumes.
Temarangai avait principalement en vue de venger la mort
de sa soeur, ainsi qu’on l’a exposé. Il prit avec lui quatre cents
guerriers, et le but de son voyage une fois atteint, il revint
avec un petit nombre de prisonniers de guerre. Il fit cette expédition
avant Sbongui, mais ils ne se rencontrèrent nulle
part sur la côte.
Shongui avait deux projets : l’un était de venger le meurtre
de la femme appartenant à sa tribu, qui avait été emmenée
par le Vénus, comme il a été dit; l’autre d’aider Houpa, l’un
des cbefs de la rivière Tamise, à se venger de trois meurtres
qui avaient été commis sur sa tribu , trois années auparavant.
Il y avait long-temps que Houpa sollicitait Shongui de l’aider
a punir la tribu qui avait massacré ses gens.
Shongui quitta la baie des Iles le 7 février i8i8 , avec ses
guerriers , pour se joindre à Houpa à la rivière Tamise.
Quand ils firent voile de cet endroit, leurs forces réunies
montaient à huit cents bommes.
A leur arrivée dans les districts où ils avaient le projet de
faire la guerre, ceux des naturels qui en eurent le temps s’enfuirent
dans l’intérieur, en abandonnant leurs habitations.
Sbongui dit qu’ils brûlèrent cinq cents villages. Les babitans
sont très-nombreux sur la côte , entre la rivière Tamise et le
cap Est. Plusieurs peuples furent attaqués à l’improviste , et
n’eurentpas le temps de se préparer au combat; c’estpourquoi
ils étaient réduits .à chercher leur salut en s’enfuyant dans
l’intérieur, à mesure que Shongui avançait.
Nombre de chefs furent tués , soit par surprise , soit en
défendant leurs villes et leurs sujets; et les têtes de plusieurs
d’entre eux furent rapportées par le parti vainqueur.
Les colons m’apprirent qu’environ soixante-dix têtes avaient
été rapportées à Rangui-Hou, dans une seule pirogue. Ils
firent aussi deux mille prisonniers de guerre , tant bommes
que femmes et enfans, qu’ils ramenèrent avec eux en guise
de butin. Ces prisonniers furent partages entre les chefs et
leurs officiers, et faits esclaves.
Sacrifices humains offerts aux Dieux durant la guerre.
J’étais curieux de savoir si décidément ils mangeaient ceux
qui sont tués dans le combat : c’est pourquoi je priai Shongui
et Temarangai de me faire connaître ce qui avait lieu sur le
champ de bataille, quand les ennemis en venaient aux mains,
et, en outre, s’ils mangeaient ceux qui étaient tués. En réponse
.î mes questions, ils firent le récit suivant :
Quand le cbef de l’un des partis est tu é , son corps est
aussitôt réclamé par ses ennemis; et, comme nous l’avons déjà
dit, si le parti du chef tué est intimidé, le corps est sur-le-
cbamp livré. Si le chef était marié, sa femme est aussi réclamée,
et sur-le-cbamp livrée aux m.iins de l’ennemi. Elle est
emmenée avec le corps de son mari, et mise à mort. Si elle
: