PIEC E S JUSTIFICATIVES. PIECES JUSTIFICATIVES. 411
cause, on dit que c’était là qu’était l’Atoua, et ce fut tout cc
que nous pûmes en savoir. Ces lamentations continuant sans
interruption, nous résolûmes de visiter l ’Atoua le lendemain
matin, pour connaître quel était cet objet dont tout le monde
semblait si occupé.
Nous nous levâmes au point du jour et nous parcourûmes
le camp. Nous'trouvâmes encore les cbefs assis en cercle. Ils
semblaient n’avoir pas bougé de leur position, depuis le moment
de notre arrivée près d’eux la veille. Après avoir fait
un tour et pris congé des cbefs, nous quittâmes cette singulière
assemblée, dans l’intention de déjeuner cbez le fils de
Sbongui, qui avait demeuré cbez moi à Parramatta et dont
le village était tout proche. Nous nous proposions de visiter
l’Atoua , car les lamentations continuaient et les cris avaient
redoublé. Quand nous arrivâmes, nous trouvâmes notre hôte
avec sa mère et ses soeurs, au milieu de leurs gens. La femme
de Sbongui nous fit un accueil très-cordial, et donna des ordres
pour qu’on nous préparât sur-le-champ quelques provisions.
Tandis que nous étions occupés à converser ensemble,
une troupe de gens en armes se montra sur le bord du bois,
près d’un champ de patates qui se trouvait entre eux et nous.
Ces guerriers étaient nus et s’étaient mis dans une attitude
défensive. Aussitôt que le fils et les filles de Sbongui les eurent
aperçus, ils coururent saisir leurs armes. D’abord je ne
sus pas s’il s’agissait d’un combat réel ou feint ; mais quand je
vis que les filles de Sbongui ne chargeaient leurs armes qu’à
poudre, je fus convaincu que ce n’était qu’un simulacre.
Quand les deux partis furent prêts et rangés en ordre de bataille,
ce qui fut bientôt fait, ils commencèrent le combat.
Les femmes chargeaient et déchargeaient leurs mousquets
avec une ardeur vraiment guerrière, et semblaient prendre
beaucoup de plaisir à cet exercice. Je ne doutais pas que
dans une bataille réelle elles n’eussent montré autant de courage
et d’activité. Les hommes combattaient avec leurs lances
et leurs patous. Dans la mêlée, ils se terrassaient les uns lc.s
autres, et faisaient prisonniers de guerre ceux qu’ils pouvaient
entraîner hors du cbamp de bataille. Quand ils se furent divertis
quelque temps de cette manière, ils terminèrent le tout
par une danse guerrière ; puis nous prîmes notre déjeuner.
Le détachement qui parut dans le bois appartenait à Shouki-
Anga , et était venu au congrès général.
Déification d’un chef mort,
M. Marsden poursuit ainsi :
Nous prîmes congé de la famille de Shongui et allâmes voir
l’Atoua , près de qui les lamentations continuaient. A notre
arrivée, nous trouvâmes un cbef mort assis dans tout son
appareil. Ses cheveux avaient été arrangés .suivant la coutume,
ornés de plumes et d’une guirlande de feuilles vertes. Sa
figure était propre et luisante, car on venait de la frotter
d’builc, et elle avait conservé sa couleur naturelle. Nous ne
pourrions dire .si le corps s’y trouvait tout entier ou non;
car des nattes le couvraient jusqu’au menton. 11 avait l ’aspect
d’un homme vivant, assis sur un siège. J’en avais vu
un quelque temps auparavant, dont la tête avait été arrangée
de la même manière, et le corps desséché et conservé aussi
bien que la tête. Ce chef, au moment où il mourut, était un
jeune bomme âgé de trente ans environ. Sa mère, sa femme
et ses enfans étaient assis devant lu i, et à sa gauche les crânes
et les os de ses ancêtres étaient rangés sur une ligne. Je m’informai
du lieu où il était mort, et l’on me répondit qu’il avait
été tué, quelques mois auparavant, dans une bataille à la
rivière Tamise.
C’était de ce chef qu’on m’avait tant parlé le jour précé-
dent sous le nom d’Atoua. Les Nouveaux-Zélandals semblent
nourrir l’opinion que la divinité réside dans la tête d’un cbef,
car ils ont toujours la plus profonde vénération pour la tête.
S’ils adorent quelque idole, c’est certainement la tête de leur