mousquctsj de la poudre et du plomb, les armes et les muni-
tions de guerre étant les seuls articles que ces peuples voulussent
recevoir. En ce moment il sc trouvait environ trois cents
naturels sur le pont, et Emaï au milieu d’eux; cbacun était
armé d’une pierre verte, suspendue à une ceinture passée autour
de leurs reins. Ils appellent cette arme un mi?7<2y c’est une
pierre d’environ un pied de long, aplatie, de forme oblonguc,
trancbanle sur les deux bords et terminée par une poignée :
ces sauvages s’en servent pour tuer leurs ennemis, en les frappant
sur la tête. On vit alors des fumées s’élever de plusieurs
sommets, et les naturels semblaient sc rassembler sur le rivage
de tous les points de la baie. Le capitaine fut très-effrayc, et il
nous pria de larguer les voiles et de nous bâter de terminer
notre dîner, car il avait l’intention de remettre sur-le-champ
à la voile. Aussitôt que nous eûmes dîné, nous montâmes sur
les vergues et je m’occupai de larguer le foc. En ce moment,
personne autre que le capitaine et le coq ne se trouvaient sur
le pont, le premier maître étant occupé à charger quelques
pistolets dans la salle à manger. Les naturels saisirent eette
occasion pour commencer à attaquer le navire. D’abord le chef
se dépouilla de la natte qu’il portait en guise de manteau; et,
brandissant son tomaliawk, il entonna le chant de guerre.
Alors tous les autres jetèrent aussi leurs nattes, et, désormais
complètement nus, ils se mirent à danser avec une telle violence,
que je crus qu’ils allaient enfoncer le pont du navire.
Le capitaine était alors appuyé contre le capot; l’un des sauvages
se glissa à l’improvistc derrière lu i, et lui asséna sur la
tête trois ou quatre coups de casse-tête qui le tuèrent à l’instant.
Le coq, voyant le capitaine attaqué, courut à son secours;
mais il fut aussitôt assassiné de la même manière. J’étais alors
assis sur le bâton du foc , les yeux baignés de larmes et tremblant
de frayeur. Peu après je vis le maître qui accourait par
rescalier du capot; mais avant d’arriver sur le pont, il fui:
frappé sur la nuque du cou , comme l’avaient été le capitaine
et le coq. Il tomba sur le coup; mais il ne mourut pas tout
de suite. Une fouie de naturels se précipitèrent dans la chambre,
tandis que d’autres y entraient par les fenêtres, et que
d’autres travaillaient â couper les rides des haubans et des
étais. Dans cet instant, quatre hommes de notre équipage s’élancèrent
à la mer de dessus la vergue de misaine ; mais ils
furent ramassés par quelques pirogues qui venaient de terre, et
curent aussitôt les pieds et les mains liés. Alors les naturels
montèrent dans le gréement; ils traînèrent en bas le reste des
hommes de l’équipage et les firent tous prisonniers. Un des
chefs me lit .signe de venir à lui : j’obéis à l’instant, et me rendis
à ce chef. Nous fumes alors placés tous ensemble dans une
grande pirogue, avec les mains liées. Les Nouveaux-Zèlandais
nous fouillèrent et nous enlevèrent nos couteaux, nos pipes,
nos boîtes à tabac, et divers autres objets. Les deux cadavres
et le maître blessé furent jetés dans la pirogue avec nous. Le
maître poussait d’affreux gémissemens et semblait à l’extrémité,
le casse-tête lui ayant entamé le cou à deux pouces de profondeur.
Durant tout ce temps, un des naturels qui était assis
dans la pirogue avec nous, essuyait avec sa langue le sang de la
plaie. Sur ces entrefaites, plusieurs femmes qui étaient restées
sur le navire sautèrent à l’eau et nagèrent vers le rivage, après
avoir coupé le câble du bâtiment, si bien qu’il s’en fut en dérive
et vint échouer sur la barre, à rcmbouchurc de la rivière.
Les naturels n’eurent pas l’adre.ssc de larguer les ris des voiles;
mais ils coupèrent la toile le long des vergues, en y laissant
tenir le reste des bandes de ris. Les cochons que nous avions
achetés furent, en grande partie, tués à bord et portés morts
à terre dans les pirogues. D’autres furent jetés tout vivans pardessus
le bord et voulurent se sauver à terre à la nage; mais
plusieurs furent tués à l’eau parles naturels, qui leur sautaient
sur le dos et les frappaient à la tête avec leurs mere. Plusieurs
des pirogues arrivèrent à temps, chargées du butin fait à bord;
quantité de naturels se querellèrent touchant le partage de ces
dépouilles; ils se battirent et s’entretuèrent. J’observai aussi
qu’ils brisèrent nos pièces à eau , pour s’emparer dos cercles