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Zélande avaient mangé leurs cnfaîi.s aussitôt qu’ils étaient nés.
» Leurs pirogues, dit Rutherford, sont construites avec des
pins de la plus grande dimension ; ces pièces de bois qui ont généralement
quarante à cinquante pieds de long , sont creusées
dans toute leur étendue, alongées à chaque extrémité par d’autres
pièces de bois de huit pieds de long et exhaussées de cbaque
côté par des planches de deux pieds de largeur. Ces pirogues
portent une figure à Tavant, et leur arrière s’élève de près de dix
pieds au-dessus de Teau ; cette partie est bien sculptée, ainsi que
la figure de devant et tout le corps de la pirogue. Les côtés sont
ornés de morceaux de nacre incrustés dans les bas-reliefs , et
au-dessus règne un cordon de plumes. Dans l’intérieur et dans
toute la longueur de cbaque pirogue sont des bancs où deux
bommes peuvent s’asseoir de front. Ces embarcations arment
environ cinquante pagaies de chaque bord, et plusieurs d’entre
elles portent jusqu’à deux cents personnes. Quand ces naturels
pagaient, le chef se tient debout et les anime par une chanson
à laquelle ils se joignent en choeur. Ces pirogues roulent beaucoup
et peuvent filer jusqu’à sept noeuds; leurs voiles sont des
nattes en paille et taillées dans la forme de voiles latines. Les
naturels font leur cuisine à bord de ces pirogues, mais ils descendent
toujours à terre pour manger. Ils s’avancent souvent
jusqu’à trois ou quatre cents milles le long de. la côte. »
Maintenant nous avons rapporté toutes les aventures que
Rutherford s’est rappelé lui être arrivées durant sa résidence
à la Nouvelle-Zélande, et il ne nous reste plus qu’à raconter
la manière dont il s’échappa à la fin de ce pays. C’est cc que
nous allons faire dans ses propres termes.
« Peu de jours après notre retour du Shouraki, nous fûmes
alarmés à Taspect de plusieurs colonnes de fumée qui sc montraient
sur diverses montagnes; les naturels couraient aussi de
tous côtés dans le village, en criant : Kaï-pouke, ce qui signifiait
qu’un navire était sur la côte. A cette nouvelle, je fus
ravi de joie ; de concert avec plusieurs guerriers et suivis par
une troupe d’esclaves chargés de nattes et de patates et conduisant
devant eux des cocbons pour vendre aux gens du navire,
Emaï et moi sur-le-champ nous nous mîmes en route pour
Toko-Malou ; en deux jours nous arrivâmes en cet endroit,
malbeureux théâtre du désastre de notre bâtiment et de son
équipage, dans la journée du 7 mars i8i6 . Je ne tardai pas à
distinguer le navire à vingt milles environ de la eôte, car le
vent qui soufflait avec force de terre Tempêcbait d’en approcher.
En attendant, comme la nuit arrivait, nous campâmes et
nous nous mîmes à souper. Je remarquai que plusieurs des
habitans portaient encore au cou et aux poignets plusieurs des
bagatelles qu’ils avaient volées à bord du navire. Comme Emaï
et moi soupions ensemble, un esclave vint avec une corbeille
neuve qu’il plaça devant moi, en disant que c’était un présent
de la part de son maître. Je lui demandai ce qu’il y avait dans
la corbeille, et il m’apprit que c’était un morceau de la cuisse
d’une jeune esclave que Ton avait tuée trois jours auparavant.
Je lui ordonnai d’ouvrir la corbeille, ce qu’il fit, et cette
viande avait tout-à-fait Tapparence d’une pièce de porc qui
avait été cuite au four. J’cn fis présent à Emaï qui la partagea
entre les cbefs.
» Les cbefs tinrent conseil et décidèrent que, si le navire
entrait dans la baie, ils s’en empareraient et massacreraient
l’équipage. Le lendemain matin il parut bien plus près de terre
qu’il ne Tétait la veille ; mais les cbefs craignaient encore qu’il
ne vînt point au mouillage; en con.séquence ils résolurent de
m’envoyer à bord pour l’attirer vers la côte, et je promis d’agir
suivant leurs désirs. J’étais alors revêtu d’un manteau de plumes
, d’une ceinture, d’un turban, et armé d’une bacbe de
combat dont la lance était fabriquée avec une pierre assez semblable
à du verre vert, mais si dure qu’elle pouvait résister au
coup le plus violent du meilleur acier ; la poignée était d’un
bois noir, dur, joliment sculpté et orné de plumes. Dans cc
costume je m’embarquai dans une pirogue, accompagne par
le fils d’un des chefs et par quatre esclaves. Quand nous fûmes
arrivés le long du bâtiment, qui se trouva être un brick amé