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IV
PIECES JUSTIFICATIVES.
nuit. Les esclaves qui portaient les provisions étaient très-fatigués.
Il n’y avait point de cabanes dans la plaine, ni aucunes
habitations. Nous fûmes en conséquence obligés de prendre
notre logement en plein air. J’étais très-barassé, n’ayant point
reposé de la nuit précédente, et venant de faire une longue
journée de marche ; si bien qu’en ce moment je ne trouvais rien
de plus désirable que de me reposer sur un monceau de fougère
, ou de quelque manière que ce pût être.
2Í juillet. Nous nous levâmes au point dn jour, et nous nous
remîmes aussitôt en route. Je me sentis bien remis par l’utile
repos que je venais de prendre durant la nuit. Nous marchâmes
environ deux heures; puis nous nous assîmes, nous fîmes du
feu , et préparâmes notre déjeuner. La journée fut très - favorable,
et la marche dans la plaine agréable; car la route était
généralement bonne, à l’exception de quelques petits marais
occasionés par quelques sources. Le sol de cette plaine est,
en majeure partie, très-propre à la culture, et recevrait faci!
lemeiit la cbarrue.
Après que nous eûmes marché quelques milles, nous aperçûmes
cinq jeunes femmes qui venaient au travers de la plaine.
Aussitôt qu’elles nous découvrirent, elles furent alarmées et
prirent la fuite. Un des nôtres courut après elles et les rattrapa.
Alors elles s’arrêtèrent pour nous attendre : elles nous apprirent
que Nene, l’un des principaux chefs, était parti pour une
expédition guerrière vers le sud ; mais que sa femme était chez
elle, ainsi que VEarou, cbef contre lequel Temarangai s’était
trouve en guerre au coinmancement de cette année. Après
avoir répondu à nos questions, ces femmes coururent en avant,
afin de prévenir les habitans de notre arrivée.
Quand nous eûmes atteint les bauteurs qui dominent la baie
Mercure, située à un mille au-dessous, je m’assis par terre sur
la cime d’une des plus hautes sommités , afin de prendre une
vue de l’Océan, des îles et de la grande terre. La perspective
est tres-étendue. J’observai une île au large, éloignée d’une
quinzaine de lieues au plus du continent, d’où s’élevaient
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d’immenses colonnes de fumée. Je priai Temarangai de me
donner quelques détails à l’égard des îles et des montagnes de
la côte et de l’intérieur qu’il connaissait parfaitement. Il satisfit
à mes questions, puis il me fit le récit de sa dernière visite
à la baie Mercure.
S’étant assis lui-même à côté de moi, il commença par me
raconter que la dernière fois qu’il vint à la baie Mercure, ce
fut pour une expédition militaire , dont il expliqua les motifs
de la manière suivante : Quelques années auparavant une de
ses nièces fut enlevée de Bream-Head par un brick de Port-
Jackson, et ensuite vendue .à uu chef de la baie Mercure,
nommé Sboukori, qui y réside encore, et elle devint son esclave.
Shoukori, et un autre cbef nommcWare, curent querelle
entre eux; par suite, sa nièce fut tuée par Warou, ou
quelqu’un de sa tribu, rôtie et mangée. Quelque temps après,
Temarangai fut instruit du sort de sa nièce ; et il se sentit
obligé de venger sa mort, tant pour l’honneur de sa tribu que
par un sentiment de justice pou rla mémoire de sa parente,
aussitôt qu’il se sentirait en état de demander satisfaction à
Warou. Environ seize années s’écoulèrent, avant qu’il se sentît
assez fort pour déclarer la guerre à ce cbef. Une soeur de Temarangai
avait été enlevée par le même vaisseau à la baie des
Iles, et avait eu la même destinée vers le sud ; il avait déjà
vengé sa mort. En janvier dernier 1820 , il passa la revue de
ses forces qui consistaient en six cents hommes : deux cents de
sa propre tribu, deux cents de la baie des Iles, et deux cents de
Bream-Head; ces quatre cents derniers étalent auxiliaires.
Avec cette troupe, il marcha sur la baie Mercure, et aborda
sur une île située à son embouchure. Warou vint dans sa pirogue
pour savoir ce qui l’amenait dans la baie Mercure. Temarangai
répliqua que Warou avait tué, rôti et mangé sa
nièce , qu’il était venu pour lui demander satisfaction de cette
insulte, et qu’il désirait savoir quelle espèce de satisfaction il
était prêt à lui donner. Warou répondit en ces termes : « Si
c’est là l’objet de votre expédition, la seule satisfaction que je