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Je restai assis quelque temps avec Hinou. qui ne proféra pas
une parole; mais il me regardait fixement, comme pour juger
d’après les traits de mon visage de la nature de mes intentions:
puis je me levai et allai me réunir aux différens groupes dispersés
dans l’enclos. Tous ces naturels s’amusaient beaucoup
de me, voir, et me priaient avec leur empressement ordinaire
de m’asseoir parmi eux. Ils examinaient mes bottes et mes
babits avec une attention minutieuse, et nul article de mon
costume n’écbappait à leurs remarques. Je trouvai qu’il était
assez désagréable d’etre assujetti à cet impertinent examen, car
ils sc pressaient autour de moi de manière à me mettre en
contact avec leurs koutous (poux), dont je n’avais déjà eu que
trop souvent l’occasion de me débarrasser. Cependant je n’aurais
pu leur refuser cette liberté qu’en les repoussant d’une
manière péremptoire, et c’était une mesure à laquelle je ne
jugeai pas qu’il fût prudent de recourir. Quelques-uns déboutonnaient
mon habit et insistaient pour voir ma poitrine^;
puis ils sc règ’ardaient l’un l’autre, comme s’ils voyaient en
moi une créature autrement organisée qu’eux-mêmes et tout-
à-fait extraordinaire dans sa conformation, et ils proféraient
certaines paroles à mesure que leur admiration se trouvait
excitée par quelque nouvel objet d’étonnemcnl. Tandis que je
leur faisais voir ma montre, dont le ressort ne manquait pas
d’occasioner leurs exclamations habituelles de surprise, les
chefs s’écriaient avec leur ton d’orgueil naturel : I ti iti tangata,
voulant nous faire entendre par là que les personnes
dont je satisfaisais la curiosité n’étaient que des gens du commun
auxquels je n’aurais pas dû faire attention. Mais je ne
me prêtai point à cette exception peu généreuse, et l’injuste
vanité des chefs ne put me porter à priver les pauvres koukis
d’un spectacle qui intéressait tant leurs supérieurs. Au milieu
d’un de ces groupes, j’observai un homme qui était né con-
* Leur but en cela était de s’assurer, à ce que j ’imagine, s’ils devaient me
considérer comme un homme ou comme une femme.
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li'cfalt ; son dos était voûté, scs jambes tortues, el sa taille si
rapetissée qu’il avait presque Tair d’un nain. Ce fut le seul
exemple de difformité semblable que je découvris parmi ces
peuples; car leurs membres sont en général parfaitement tournés,
et leurs personnes ne peuvent guère offrir d’autres traits
il blâmer que ceux qu’ils se fout eux-mêmes, ou par suite de
leurs superstitions en temps de deuil, ou dans le but extravagant
d’ajouter à leur beauté naturelle.
Sur ces entrefaites, une bande de cuisiniers préparaient les
corbeilles de patates que 'Wiwia avait envoyées ; elles avaient
été d’abord toutes apportées au milieu du camp, sous la direction
d’un des cbefs de W iw ia, et réunies ensemble. Après
certaines cérémonies, qui consistaient partie dans la répétition
de quelques paroles que je ne puis comprendre ,
partie cri divers mouvemens exécutés sur Tensemblc des corbeilles
, elles furent distribuées avec ordre aux différentes
tribus.
De tous les guerriers rassemblés pour cette circonstance, je
n’cn vis pas un plus remarquable que W are , Tbomme qui
avait séduit la femme de Doua-Tara, et qui se présentait pour
la seconde fois à nous depuis qu’il s’était ccbappc du navire.
Bien qu’il ne fût pas costumé comme ses compatriotes, son
extérieur n’en était ni moins formidable ni moins imposant ;
aucun de ces guerriers n’avait un air plus martial, un maintien
plus déterminé : vêtu d’une jaquette et d’un pantalon de matelot,
il portait un mousquet, et une giberne était suspendue
à son coté. II me tendit la main ; et ne jugeant pas qu’il fût
politique en cette occasion de manifester le moindre souvenir
de son crime en repoussant sa politesse, je lui donnai la
mienne comme si j’eusse tout-à-fait oublié sa conduite passée.
J’entrai sans façon en conversation avec lu i, et lui fis quelques
questions sur les gens de ce canton et sur son avis toucbant
ce qui venait de so passer. Temarangai survint et ne toucha la
main de Ware qu’avec une sorte de répugnance; il lui reprocha
même sa conduite dans les termes les plus durs. Ware lui