Je n'ai jamais vu une plus belle race d'bommcs, ni de plus
beaux enfans que dans ce village. Houta-Koura serait une station
importante pour la Mission, en ce quelle ouvrirait de
bonne heure une communication avec tous les babitans des
bords de la rivière, dans une étendue de quarante milles.
Visites à d*autres villages, en descendant la rivière.
2 octobre 1819. Ce matin nous priâmes Moudi-Waï de nous
procurer une pirogue , afin de visiter les différens chefs sur les
bords de la rivière; il se prêta volontiers à ma demande, et
ajouta qu'il nous accompagnerait lui-même. Sur-le-champ il
fut prêt à s’embarquer dans sa pirogue de guerre, avec sa
femme , sa fille, deux petits enfans et quelques esclaves. Cette
pirogue qui avait soixante-trois pieds de long était sûre et
commode. Vers sept heures du matin, au commencement de
la marée descendante, nous quittâmes Houta-Koura. Au moment
de notre départ, un prêtre accomplit certaines cérémonies
religieuses, et fit des prières pour que nous pussions remplir
l’objet de notre visite. La pirogue, avec la marée et l’aide
des pagayes de vingt naturels, descendit rapidement le lit du
fleuve.
A dix milles environ du village, au milieu de la rivière , se
trouve une petite île dont la surface est d’un peu plus d'un
demi-acre. Elle est formée par le confluent de la grande rivière
Shouki-Anga avec une rivière qui vient y tomber du côté du
nord. Sur cette île est situé un petit village rempli d’habitans;
le chef en est très-âgé, et nous nous arrêtâmes pour lui parler.
Il s'était environné de ses enfans et des enfans de ses enfans,
et il fut très-content de nous voir. Je lui offris un ciseau de
charpentier. Il ne voulut pas nous laisser partir sans nous
avoir donné environ trois cents livres de patates, en retour du
présent que nous venions de lui faire. Il est plus que probable
qu’il regardait ce ciseau comme l’objcl le plus précieux qu’il
eût jamais reçu.
A trois milles plus loin; nous arrivâmes en face d'un village
situé sur une hauteur, et nommé Witi-Waï-Tti. Aussitôt
que les habitans nous aperçurent, ils agitèrent une natte en
guise de pavillon, et nous appelèrent à grands cris pour nous
engager à les visiter : les guerriers accoururent armés de mousquets
, de lances, etc. Ils déchargèrent leurs armes à feu, et
exécutèrent leurs danses de guerre , pour nous rendre les
honneurs militaires à leur manière. Nous nous arrêtâmes pour
leur parler, et nous leur expliquâmes que nous ne pouvions
pas leur rendre visite en descendant la rivière, mais qu'à
notre retour nous passerions une nuit chez eux. Je donnai un
ciseau au chef, et nous passâmes outre.
Vers quatre heures de l’après-midi, nous n’étions plus qu'à
un mille du terme de notre voyage. Nos serviteurs se sentaient
affamés et fatigués, et nous fûmes bien aises de descendre à
terre pour faire cuire quelques provisions. En conséquence,
nous débarquâmes près de la résidence d’un chef qui nous
avait accompagnés depuis Rangui-Hou. Sur-le-champ il prit
lin cochon, et quand il l’eut tué nos .serviteurs se hâtèrent
de le préparer pour le repas.
Tandis que nous prenions en cet endroit quelques rafraîchissemens,
les hahitans du village situé le plus près des pointes
de l'entrée, et qui se nomme Widia , nous aperçurent.
Aussitôt un grand-prêtre nommé Te Manguina, qui est prêtre
des pointes du Shouki-Anga, et qui passe pour avoir un pouvoir
absolu sur les vents et sur les flots, vint nous visiter
et nOus inviter à nous rendre au village , chez Mou-Ina, qui
est le premier chef de la rivière.
Quand nous eûmes dîné, nous allâmes au village où nous
fûmes cordialement accueillis par les habitans ravis de joie.
Mou-Ina avait appris notre prochaine arrivée chez lu i, et il
nous procura une bonne cabane pour nous abriter.