GC, PIÈCES JUSTIFICATIVES.
pêche. Chaque pirogue porte ordinairement sept à huit
hommes.
.. Indépendamment de c e s bateaux qui paraissent appartenir à
divers particuliers, chaque village possède en commun deux
ou trois grandes pirogues de guerre, destinées pour l’attaque.
J’en ai mesuré de ces dernières qui avaient soixante pieds de
longueur sur six de largeur, quatre de creux : le fond d’un seul
tronc d’arbre, surhaussé d’une planche cousue adroitement
sur chaque bord, la couture bien enduite de résine, et toute
la pirogue peinte en rouge à l’hulle. Ces bateaux de guerre
sont chargés de sculptures très-élevées à la poupe et à la
proue.
» Les sauvages se servent de pagaies au lieu de rames pour
conduire leurs pirogues. Ces pagaies sont parfaitement bien
taillées et contournées avantageusement pour ajouter, par
l’élasticité de la pale, à la force du coup qui frappe le fluide.
Ces pagaies pourraient, à certains égards, servir de modèles
aux avironnerles de nos ports. Celles des chefs qui gouvernent
ordinairement les pirogues sont sculptées assez agréablement
du côté opposé à celui qui frappe l’eau.
» Ce qu’il y a d’étonnant dans l’industrledessauvagespourla
construction de leurs bateaux, de leurs pagaies, dans leurs
sculptures, enfin dans tous les ouvrages, c’est qu’ils n’ont pas
de fer ni aucun autre métal qui puisse le remplacer; ils n’ont
par conséquent aucun des instrumens dont se servent nos ouvriers.
Ils y ont suppléé par des pierres très-dures aiguisées et
taillées en forme de fers de haches, de ciseaux, d’herminettes.
Les pierres qu’ils emploient à cet usage sont principalement le
jade et le basalte. C’est assurément une grande industrie que de
remplacer le fer par des matières si brutes et si différentes de
ce métal.
„ Les bateaux de la Nouvelle-Zélande sont tous d’un bois de
cèdre admirable dont le pays est couvert. En suivant la méthode
des expériences de M. Duhamel sur la pesanteur respective
des bois, j’ai reconnu que le cèdre de la Nouvelle-Zélande,
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fraîchement coupé, ne pesait par pied cube qu’une livre et
demie de plus que le pin de Riga de première qualité.
» J’ai dit que les sauvages se nourrissaient de coquillages.
Cette espèce, de nourriture n’exige aucune industrie; ce sont
les femmes et les filles qui vont journellement les ramasser autour
des roches dans la mer. Pour cette opération elles s’enveloppent
d’un tablier de jonc fait en forme de paillasson, pour
garantir leur cotte de l’eau de mer ; elles ont à leur ceinture un
cabas de jonc dans lequel elles ramassent les coquillages et les
portent dans leurs villages.
«Ces sauvages ne connaissent d’autre chasse que celle du filet
et du lacet coulant; ils y prennent des cailles, des canards sauvages
, des pigeons ramiers d’une très-grosse espèce , et divers
autres oiseaux dont je parlerai ci-après ; ils ne connaissent pas
l’usage de l’arc et de la flèche.
»J’ai déjà parlé de l’industrie des sauvages austraux dans la
formation et la disposition de leurs villages, dans la construction
de leurs magasins publics et de leurs cabanes particulières;
celle qu’ils emploient à la fabrication de leurs vêtemens embrasse
un plus grand nombre d’objets. Ils cultivent des plantes
à filasse ; ils ont l’air de les faire rouir. Après le rouissage, ils
les battent pour en détacher les parties ligneuses ou dures ; ils
peignent leur filasse avec des peignes faits de grandes coquilles
de mer; ils ont une espèce de rouet pour tordre leur fil, un
moulinet très-grossier et très-simple pour doubler les fils. Ils
ont aussi un fil composé de cinq à six brins de cbqveux : ce fil
est fort. Enfin, ils ont un métier qui paraît être le commencement
de celui de nos tisserands, qui leur sert à faire des toiles
d’un tissu bien serré et d’un bon usage.
» Los sauvages de la Nouvelle-Zélande sont dans un état de
guerre continuelle; leurs villages palissadés, entourés de
fossés, plantés sur des pointes de terre très-escarpées, prouvent
qu’ils craignent des ennemis, et que tous sont au moins
sur la défensive. Cet état de guerre a tourné leur industrie vers
la fabrication de toute espèce d’instrumcns propres à détruire
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