Y
H .
; i
î: 3
.t:
706 P IE C E S JU S T IF IC A T IV E S .
tifié. Ils supposaient qu’ils s’étaient battus contre des esprits
qui soufflaient du feu et de la fumée sur eux par la boucbe avec
de gros tubes de fer. Ils donnèrent au fusil le nom de pou qui
lui resta et qui, dans leur langue, signifie souffler. Les Français
les poursuivirent sur la grande terre et en massacrèrent un
nombre considérable.
L ’bomme qui aVait tué le capitaine Marion se nommait 2’e
Kouri (le Cbien) ; 11 était natif de Wangaroa, el il est assez remarquable
que la tribu de "Wangaroa fut la première et la
dernière à faire du mal aux Européens.
Les bardes du pays ont composé plusieurs ebansons sur cette
bataille et sur la mort de Marion. Il y est souvent fait mention
de Micki et de son enfant. J’avais, en diverses occasions, entendu
cbanter ces ebansons; mais je n’cn avais pas jusqu’alors
compris le sens.
Quand les naturels apprirent que M. Cbaigneau était un
compatriote de Marion , ils lui donnèrent le nom de Marion ,
et continuèrent toujours à l’appeler ainsi.
(Tome I , page 222.) 12 juillet. Au nombre des spectateurs
était un orateur femelle, prêtresse du rang le plus élevé, et
jouissant d’une grande considération parmi les tribus environnantes.
Elle sc nommait "Wanga-Taï. Cette femme était regardée
par ses compatriotes comme au-dessus du commun des
mortels, et ils lui supposaient une puissante influence sur la
déité q u i, d’après leur croyance, gouverne les ames dans l’autre
monde. On lui prêtait aussi le pouvoir de maAonto«, c’est-
à-dire d’ensorceler les gens et de les faire mourir par ses sortilèges
quand il lui plaisait. C’était en même temps une espèce de
sibylle; et, dans toutes les expéditions contre les ennemis, on
la consultait sur le résultat qu’elles devaient avoir; on apprenait
d’elle le jour le plus propice pour mettre à la voile, ainsi
que le jour et l’beure o ù , pour être agréable à la déité dont
elle était l’organe, il convenait de livrer bataille. Comme de
raison, elle exerçait Tempire le plus absolu sur Tesprit des naturels,
et ses oracles toucbant l’issue d’une campagne ne pou-
P IÈ C E S JU S T IF IC A T IV E S . 707
valent manquer de s’accomplir souvent, par suite de la défiance
ou de la confiance qu’elle avait donnée aux guerriers,
selon que son caprice ou son intérêt la portait à désirer ou à
craindre le succès d’une entreprise.
On assure que cette prêtresse aime beaucoup les Européens,
et elle en donne une preuve assez évidente, en cboisissant toujours
un époux parmi eux. Sa personne est regardée comme
trop sacrée pour qu’il s’établisse des relations intimes entre
elle et des individus de sa nation.
( Tome / , page 228 et suiv. ) i 3 juillet. Vers midi la prêtresse
"Wanga-Taï revint nous voir. Elle était accompagnée
des deux fils de feu Pomare, qui avaient désiré s’entretenir
avec Bryan Borou. Quelques autres chefs faisaient partie de sa
suite. Tous embrassèrent tendrement Bryan Borou, et déplorèrent,
en versant d’abondantes larmes, la malheureuse
affaire qui avait rompu Tamitié des deux familles, et les forçait
de chercher à avoir le sang des amis de Borou.
Les fils de Pomare racontèrent la mort de leur père à peu
près de la manière suivante : ils commencèrent par me demander
si je me souvenais d’une circonstance de mon dernier
voyage sur le Saint-Patrick, pendant que j’étais en charge
dans leur Tamise. Voici de quoi il s’agissait : j’avais, ainsi
qu’ils me le rappelaient par leurs questions, demandé à leur
père, qui faisait alors une tournée dans la baie des Iles, d’amener
avec lui deux mille bommes pour me couper du bois
de mâture, attendu que les gens de la Tamise m’assistaient
avec trop de lenteur, et je lui avais promis, dans le cas où il
parviendrait à compléter ma cargaison en deux mois, de lui
faire présent de cinq fusils et de deux barils de poudre. Cette
espèce de marché avait été conclu à la grande satisfaction du
père des deux jeunes narrateurs *.
* Il est certain que ce marché dut parfaitement convenir à l’avide Poma re,
ainsi qu’à ses cruels compagnons ; mais on doit faire observer ([ue M. Dillon ne
pouvait provoquer un meilleur moyen pour consommer la ruine des malheu-
45“
pli -