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eux avec scs guerriers. Il répondit qu’il se rallierait à eux à
Kaï-Para dans le temps indiqué. Nous comprîmes que nous
allions combattre à Kaï-Para contre un certain nombre de
cbefs de la baie des Iles et de la rivière Tamise, en vertu d’une
convention arrêtée avec les ebefs de notre voisinage. En conséquence
tout fut préparé pour notre voyage aussi promptement
qu’il fut possible : les femmes s’occupèrent sur-le-cbamp
de fabriquer une grande quantité de corbeilles neuves pour
transporter nos provisions. Dans ces sortes d’expéditions,
cbaque guerrier doit se procurer scs armes, ses munitions, scs
provisions et les esclaves nécessaires pour les porter. D’un
autre coté, le butin que fait cbaque famille est pour son propre
compte, et elle ne doit au cbef que ce qu’elle juge convenable
de lui accorder. Les esclaves ne sont point forcés de combattre,
bien que dans la mêlée ils accourent souvent au secours
de leurs maîtres.
» Quand le jour de notre départ fut arrivé, je me mis en
marcbe avec le reste de l’armée, muni de mon mere, d’une
paire de pistolets, d’un fusil de cbasse à deux coups, de poudre
, de balles, et d’une grande quantité de plomb à canard,
que j’emportai pour tuer du gibier le long du cbemin. J’étais
accompagné par ma femme Epeka, qui portait trois nattes
neuves pour nous servir de lit; ces nattes avaient été fabriquées
par Esbou durant notre voyage à Tara-Nake. Les guerriers et
les esclaves qui marcbaient avec nous montaient en tout à cinq
cents personnes environ; mais à mesure que les esclaves
étaient débarrassés des provisions qu’ils portaient, on les renvoyait
à la maison , attendu qu’on n’cn avait plus besoin. Dans
le voyage, si nous arrivions dans un village ami, nous y passions
la nuit, sinon nous campions dans les bois. Quand les
provisions que nous avions apportées avec nous furent toutes
consommées, il nous fallut en dérober partout où nous pouvions
en trouver. Notre voyage, eu égard à la saison pluvieuse
qui régnait alors, fut plus pénible que do coutume. Nous employâmes
cinq semaines pour atteindre Kaï-Para, où nous
trouvâmes environ onze cents autres naturels campés au bord
d’une rivière. A notre arrivée, des cabanes furent sur-le-
champ construites pour notre troupe , et il y en eut une destinée
pour moi et ma femme. On nous désigna aussi deux
femmes esclaves pour arracher les racines de fougère, ramasser
les coquilles et pêcher le poisson pour notre nourriture,
car ce fut là nos seules provisions durant tout notre séjour en
cet endroit, excepté quand j’allais de temps en temps au
bois pour y tirer quelques pigeons ou un cocbon sauvage.
» Du côté opposé de la rivière, qui avait au moins un demi-
mille de large, et qui pourtant n’avait pas plus de qua tre pieds
de profondeur, étaient campés environ quatre cents ennemis
qui attendaient des renforts. En attendant, des courriers se
rendaient continuellement d’une armée à l’autre pour porter
des messages concernant la guerre. L’un d’eux nous apprit qu’il
y avait dans son parti un homme blanc qui avait entendu parler
de moi el désirait me voir ; il ajouta que les cbefs qui dési-
raientaussime voir me donneraient la permission de traverser la
rivière pour me rendre près du blanc, et que je pourrais ensuite
m en retourner sans être inquiété , si je le jugeais convenable.
En conséquence, du consentement d’Emaï, je traversai
la rivière; mais on ne me permit point d’aller en armes, ni
même de mener ma femme avec moi. Quand j’arrivai sur le
bord opposé, plusieurs des chefs vinrent me saluer à la manière
ordinaire, en appliquant leur nez contre le mien, puis
j’allai m’asseoir au milieu d’eux, à côté de Tbomme blanc, qui
me dit que son nom était John Mawman, qu’if était originaire
de Port-Jackson, et qu’il avait déserté du Tees, corvette de
guerre, tandis qu’elle était mouillée dans cette île. Depuis ce
moment il s’était réuni aux naturels, et il vivait maintenant
chez un chef nommé Rau-Mate, dont il avait épousé la fille,
et qui résidait dans un lieu nommé Sbouki-Anga, sur la côte
occidentale, à cinquante milles de la baie des Iles. Il me raconta
qu’il était peu de temps auparavant à la baie des Iles,
et qu’il avait vu plusieurs des missionnaires anglais. Il me
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