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une harangue. Aussitôt que nous parvînmes en vue de ces
guerriers, ils nous reçurent de la manière la plus gracieuse et
nous firent faire place. Nous nous plaçâmes de manière à leur
adresser la parole, d’après le désir qu’ils nous en témoignèrent
eux-mêmes. Après avoir réclamé le silence, afin que tout le
monde pût entendre, nous nous exprimâmes aussi librement
avec eux que nous l’eussions jamais fait, et rien n’était plus
satisfaisant que l’attention qu’ils portèrent à nos paroles. Ensuite
ils firent défiler leurs troupes pour que nous pussions
juger de leur force. T oï-Tap ou , qui appartient à l’autre
p a rti, l.es admira beaucoup, et s’écriait avec un sentiment
d’orgueil, en montrant du doigt les différentes tribus : « Celles-
là sont à mol ! et celles-là aussi sont à moi! » Au bout de deux
heures, nous nous en allâmes, espérant qu’il n’arriverait
aucun malheur.
6 mars i 83o. Vers neuf beures, nous avons entendu plusieurs
décharges de mousqueterie à Korora-Reka. A l’aide de
nos lunettes, nous pouvions observer des personnes courant
dans toutes les directions, et des pirogues chargées de monde
quittant le rivage pour se diriger vers les navires. Sur-le-
champ , M. Davis et moi nous nous embarquâmes dans le
canot; et après avoir communiqué avec le capitaine King à
bord du Royal - Sovereign, nous allâmes à terre pour essayer
de faire cesser le feu. Nous débarquâmes sur le théâtre du
combat; mais nous ne pûmes voir aucun chef de distinction,
attendu qu’ils étaient tous eacbés par les palissades et les re-
trancbemens. Les deux partis étaient à vingt-quatre verges
environ de distance l’un de l’autre. Je fis autant de bruit qu’il
me fut possible, mais ce fut en vain. Je m’avançai vers notre
vieil ami Toï-Tapou qui se reposait sur ses armes à l’autre
bout de la plage. Je fis en sorte de lui persuader de m’accompagner
vers l’armée ennemie pour l ’engager à se retirer; mais
il ne voulut pas bouger. Un jeune chef, nommé Touai-Angui,
fut chargé de m’accompagner. Rewa s’avança vers moi, et fit
signe à ses troupes de cesser le feu. Quand nous fûmes près
du champ de bataille, nous apprîmes que plusieurs d’entre
eux étaient tués et blessés. Je fus conduit devant Oudou-Roa ,
qui pouvait à peine parler : du reste, une foule de guerriers
m’environnèrent et portèrent toute leur attention à ce que je
voulais leur dire. Ils convinrent de la justesse de nos argumens,
et reconnurent que Satan les avait poussés à cette
mauvaise action. Peu après, plusieurs personnes descendirent
des navires dans les canots pour visiter le cbamp de bataille :
plusieurs étaient morts, d’autres mourans , et le nombre des
blessés ne fut pas connu. Il y eut une cbose qui m’étonna
beaucoup, en cette circonstance, dans la conduite de ces
hommes. Un quart-d’beure après que le fou eut cessé, un
grand nombre de guerriers de chaque parti se mêlaient indistinctement
avec leurs ennemis, et nous trouvâmes que des
parens , des enfans et des frères avaient combattu les uns
contre les autres.
A cette occasion, M. Davis écrit :
Hélas! quel jour d’horreur et de détresse! Hier au soir,
nous avions quitté les deux partis avec le désir apparent de
faire la paix ; mais ce matin, entendant le feu et jugeant que
le combat avait commencé , nous lançâmes notre canot à la
mer, et nous nous rendîmes vers les navires. Comme le Royal
Sovereign, capitaine King, n’était mouillé qu’à deux ou trois
cents verges du lieu de l’action , nous nous dirigeâmes de son
côté. Je montai à bord. M. Williams se rendit au rivage où il
débarqua, et fit son possible pour arrêter le feu; mais il fut
obligé de rentrer dans son canot, attendu que les deux partis
faisaient un feu très-vif. Ce fut une démarche très-périlleuse
de la part de M. Williams, et il courut de grands ri.sques
d’être tué. Le pont du Royal Sovereign présentait un déplorable
spectacle d’horreur et de désespoir : plusieurs des blessés
avaient été transportés à bord et gisaient étendus sur le tilla c ,
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