PIECES JUSTIFICATIVES.
tance trois houes, une hache, quelques clous et une vrille.
Je lui dis qu’il les aurait. M. Butler, lorsqu’il m’accompagna
à Korora-Reka, avait été témoin de la détresse où
se trouvait King-George faute d’outils, et il nous dit qu’il
irait se pendre s’il ne pouvait obtenir une hache. En conséquence
, nous convînmes de donner à ces cbefs quinze
houes, deux bêches , deux haches, quatre vrilles, quelques
clous, douze peignes, deux miroirs, deux ciseaux de charpentier
, et une centaine d’hameçons. Ils reçurent ce présent
avec une joie et une reconnaissance extrêmes, et retournèrent
dans leurs districts aussi beureux que des rois chargés de
butin.
7 septembre 1819. MM. Butler et Francis Hall m’ont accompagné
à Tepouna , établissement des naturels, si.tué à deux
milles à peu près de Rangui-Hou. La terre en est principalement
plantée en patates douces, qui forment l’aliment le plus
recherché des naturels. La qualité du sol est généralement
riche et légère , et bien appropriée à la culture de cette racine.
Méthode pénible de cultiver la terre employée par
les naturels.
Lesprincipaux babitans de Rangui-Hou ont à Tepouna leurs
jardins de patates douces. Nous en trouvâmes un grand nombre
à l’ouvrage dans leurs lots particuliers; les uns se servaient
de bêches et de piocbes qu’ils avaient reçues de nous ; d’autres
de bêches de bois à long manche et de la même largeur que
la bêche anglaise; quelques-uns, qui n’avaient ni bêches ni
piocbes, retournaient la terre avec de petites spatules de trois
pieds de long. Les bêches de bois et les spatules ne peuvent
servir que pour les terres légères et qui ont été déjà travaillées.
Ils ont un autre instrument, de sept pieds de long,
acéré comme un piquet; à deux pieds environ de la pointe est
assujetti un morceau de bois , sur lequel se pose le pied pour
aider a 1 enfoncer en terre. Cet outil se nomme koho. Ils arrachent
avec les mains toutes les mauvaises berbes, et les recouvrent
de terre à mesure qu’ils continuent à bêcber.
' Les naturels furent enchantés de nous v o ir , et tous à l’envi
réclamaient des bêches et des pioches. Nous regrettâmes beaucoup
qu’il ne fût pas en notre pouvoir de satisfaire leurs désirs.
Nous voyons avec chagrin les pénibles fatigues qu’ils
endurent et le peu de fruit qu’ils en retirent, en travaillant
avec leurs grossiers instrumens.
En traversant ces champs de patates, nous apprîmes que
Sbongui possédait un lot très-étendu, et qu’il se trouvait alors
dans son jardin. Nous allâmes le visiter, et nous le trouvâmes
au milieu de ses gens, qui étaient tous occupés à préparer la
terre pour planter. Shongui nous reçut avec une grande politesse.
Je vis sa femme travaillant avec une spatule, tandis
que sa petite fille, âgée de quatre à cinq ans, était assise sur
le sillon que traçait sa mère. Je connaissais l’age de cette
enfant; car elle était née dans le pâ (village fortifié) de
Sbongui, à trente milles environ de Rangui-Hou, la nuit
même où j’y couchai la première fois que je vins dans la Nouvelle
Zélande. La femme de Sbongui me rappela cette circonstance
, et ajouta qu’elle avait donné le nom de Marsden à la
petite, en souvenir de ce que je me trouvais alors cbez eux.
Cette femme a trente-cinq ans environ , et est tout-à-fait
aveugle. Elle perdit la vue par suite d’une inflammation qui
lui attaqua les yeux il y a trois ans environ. Elle paraissait
bêcber la terre aussi vite et aussi bien que ceux qui voyaient
clair : elle arrachait d’abord l’berbe avec les mains, à mesure
qu’elle avançait, puis elle la gardait sous ses pieds pour savoir
où elle était ; ensuite elle bêchait et recouvrait enfin la mauvaise
herbe avec la terre fraîchement remuée. Je lui dis que si
elle voulait me céder sa spatule , je lui donnerais en retour une
bêche ; cette offre fut acceptée avec empressement, et elle
envoya sur-le-cbamp sa fille porter la spatule à M. Butler, et
recevoir en échange la bêche.
Quand nous considérions la femme d’un des plus grands