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possédait toutes les qualités à un degré éminent, sueeédèrcnt
T oupe, Temarangai et deux autres ebefs de notre parti qui
parlèrent ebaeun à leur tour. Puis on entendit un troisième
orateur du côté opposé, qui n’offrit rien de remarquable dans
sa manière ni dans son élocution. La barangue de cet bomme
fut la dernière qui fut prononcée. Alors je demandai à Toupe
quel était le résultat de ces débats oratoires, et il me dit que
les deux partis en étaient venus à un arrangement amical.
Quelques formalités préliminaires, à cc qu’il paraît, avaient
eu lieu entre Wiwia et Hinou avant mon arrivée ; et quoique
le vieux guerrier représentât avec force la nécessité de recourir
immédiatement aux armes, je suis persuadé que ses argumens
furent réfutés par les autres orateurs qui n’étaient point
cndammés par le même esprit d’hostilité implacable.
Je n’avais pas encore vu W iwia , mais il s’avança alors vers
moi d’une façon très-amicale, suivi de cinq ou six de ses guerriers;
il me toucha la main avec beaucoup de cordialité, puis
il s’cn retourna et sc confondit avec ses gens. Cet homme dont
l’intrigue illégitime était la cause de tous les discours que je
venais d’entendre et de toutes les démonstrations dont j’avais
été témoin , était l’aimable et galant Lolhario de ces contrées.
Il semblait être âgé de trente-cinq ans environ ; sa taille était
moyenne, mais sa figure était gracieuse et ses formes très-belles.
Une jolie natte , ornée de plumes , était liée autour de sa
ceinture, et laissait à nu le baut de son corps qui était copieusement
enduit d’huile et d’ocre rouge ; scs cheveux étaient proprement
liés sur le sommet de sa tête et surmontés d’un large
peigne, aussi blanc que l’ivoire, fabriqué avec un os de céta-
oée et travaillé avec goût. Scs joues étaient peintes en rouge ,
ce qui donnait à ses yeux du feu et de la vivacité, et formait
un contraste curieux et d’un bon effet avec sa barbe noire et
touffue. Sa tournure était bien capable d’exciter l’attention des
dames de son pays, qui le considéraient comme le vrai modèle
d’un bomme du bon ton.
Toupe m’apprit que les guerriers qui suivaient Wiwia et Hi-
PIÈC E S JUSTIFICATIVES.
non lui appartenaient, bien qu’en cette circonstance ils eussent
été obligés d’embrasser des intérêts contraires, parce que
les cbefs inférieurs dont ils dépendaient immédiatement les
avaient placés en opposition les uns aux autres. Mais je conjecturai
qu’il voulait seulement dire que ces guerriers reconnaissaient
l’autorité de son frère Tara, qui était Ariki, et que
lui-même étant son général, avait en conséquence un certain
pouvoir sur eux.
Tous les différends étant désormais arrangés à l’amiable, ils
voulurent couronner leur réconciliation par un copieux banquet.
Toupe me conduisant du côté d’Hinou , un des naturels
me fit traverser la rivière sur ses épaules, tandis que nous étions
suivis d’autres gens qui portaient une quantité de patates
à Hinou. Wiwia les envoyait en présent à son adversaire,
qu’il savait à court de provisions, pour célébrer cette joyeuse
circonstance. Je trouvai Hinou avec son fils Temoudi, assis au
milieu de son camp et environné des guerriers dc^sa propre
tribu ou de celles de ses alliés. Après avoir passé au milieu
d’une file de ces gens, j’arrivai près du chef; et après avoir mis
mon nez en contact avec le sien, suivant la cérémonie d’usage,
à sa prière je m’assis près de lui. Il n’y avait entre ce chef et
Wiwia aucune ressemblance, ni pour la figure ni pour la
tournure. Quoiqu’à une épo([uc plus reculée de sa vie il eût
dû être un homme de bonne mine, Hinou n’avait plus rien
alors dans sa personne qui pût lui garantir l ’attachement
d’une femme dont la fidélité ne dépendait que des impressions
extérieures. Toute sa vigueur avait disparu devant le progrès
insensible des années , et il n’était pas surprenant que sa
femme, qui ne se croyait liée que par le plaisir des sens, eût
préféré son rival, alors dans la fleur de l’âge et doué de tous
les attraits personnels les plus admirés dans le pays. Le fils de
Hinou était presque aussi âgé que Wiwia, et Hinou lui-mcme
ne devait pas avoir moins de soixante-dix ans ; sa barbe , aussi
blanche que la neige, couvrait sa poitrine, et lui donnait une
gravité patriarcale.