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» Quoique en général silencieux et réservé, il était toujours
très-communicatif avec son instituteur ; il semblait avoir beaucoup
de considération pour lu i, et il lui disait souvent avec
des yeux étincelansde joie : „ Ob! Monsieur, je penserai sou-
» vent à vous, même quand j’en serai à plusieurs milliers de
» milles. »
» Il était fort remarquable qu’il ne manifestât pas le moindre
intérêt ni la moindre curiosité pour tous les spectacles qui attirent
le peuple. Quand 11 apprit, le 9 novembre, que le lord
maire de Londres passerait dans les rues en grande pompe, suivi
d’bommes armés, de musique, de pavillons, etc., et que ce
serait un spectacle tel qu’il n’aurait pas d’autre occasion d’en
voir un semblable, il ne se soucia nullement d’aller à W es tminster
pour ce jour. Mais s’il était invité à aller visiter une
nouvelle école, un examen d’enfans, une assemblée de société
pour la bienveillance cbrétienne, la distribution des Bibles et
le soutien d’une mission cbez les payens, alors il était tout coeur
et tout zèle.
» Un ami que j’avais cbargé de le surveiller, qui le menait
avec lui à la chapelle et le plaçait souvent dans son banc
(M. Short), m’a rapporté qu’il ne l’a jamais entendu employer
de termes indécens, que jamais un de ces mauvais mots si
communs aux marins n’est sorti de sa bouche, et qu’il n’a
jamais prononcé le nom de Dieu qu’avec crainte et respect. Il
paraissait aussi prudent dans ses paroles, plein de franchise et
de simplicité.
» La température humide et brumeuse de novembre éprouva
cruellement la constitution de Mawi. Il contracta une toux
dangereuse, et pendant un temps il éprouva les symptômes
ordinaires d’une prompte consomption. Je le confiai aussitôt
aux soins d’un médecin de mes parens,M. Charles Woodd; et
en peu de temps je vis avec joie que, grâces .à ses soins, tous
les symptômes alarmans avaient disparu complètement. Comme
il était évident que notre atmosphère humide et froide ne lui
convenait nullement, je jugeai à propos de demander à la Société
son retour dans sa patrie par la première occasion.
• Le jour de Noël, Mawi se plaignit de maux violens à la
tête et dans les reins, et il se trouva si mal, qu’il garda la
maison. Le jeudi matin, je fus informé que son visage était
considérablement enflé, et que les symptômes de la dyssenterie
s’étalent montrés.
» Le vendredi matin, immédiatement après mon déjeuner,
je me rendis à son logement. La nouvelle que j’avais reçue
était très-alarmante. Je montai les escaliers, et je fus témoin
du spectacle le plus afiligeant et le plus effrayant que j’aie jamais
vu. Le plancher de la chambre était teint du sang de mon
pauvre ami, et lui-même en était couvert. Il semblait tout-
à-fait exténué, parlant très-bas et avec une extrême difficulté.
Le séjour de sa chambre était très-dangereux. Sa maladie me
parut tout-à-fait inexplicable. Parmi les nombreux cas que
j ’avais observés, je n’en avais jamais vu aucun de ce genre. Je
courus aussitôt chercher M. C. Woodd qui s’était offert à le
traiter gratuitement, et le priai de se rendre le plus tôt possible
près de Mawi. Il arriva le premier et m’envoya demander à une
école voisine où je me trouvais. Quand j’entrai dans la chambre
il dit : « Il est dangereux pour vous d’être ici. C’est une fièvre
” putride des plus rapides et des plus malignes que j’aie jamais
» observées. » Le fait était que, si je puis m’exprimer ainsi,
tout son être se décomposait. Son sang coulait par tous les
pores, par la bouche, le nez, les oreilles, les yeux. En approchant
de lu i, j’observai que sa peau était couverte de taches
pourprées, et que le sang paraissait même se mêler à sa respiration.
Je me retirai un moment avec le médecin, et envoyai
tout de suite quelques cordiaux au pauvre malade. »
M. Woodd revint ensuite près de lu i, et il entre dans des
détails fort toucbans sur les marques de piété, de constance et
de résignation que ce malheureux insulaire donna dans les
derniers momens de son existence. Le soir lise retira.
« Peu après, comme sa maladie empirait, Mawi tomba dans
le délire, mais par intervalles il revenait à lu i, et dans ces
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