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590 PIEGES JUSTIFICATIVES.
de la vengeance, et sans considérer que sa propre tyrannie
avait provoqué de la part de ces hommes les plus insignes représailles,
il eut Taudace de laisser son navire sans défense, et,
sans autre escorte que l’équipage d’un canot, de se diriger
vers le rivage où l’attendait une cohorte de cannibales furieux
et prêts à l’exterminer. Le dénouement de cette sanglante tragédie
fut prompt. A peine eut-il mis les pieds à terre, qu’il
fut assommé et massacré par Tepoubi; et ses malheureux matelots,
partageant son triste sort, furent tous dépouillés par les
barbares qui parurent aussitôt revêtus des babits de leurs victimes
et marchèrent au navire pour consommer le carnage. Ils
arrivèrent à bord encore altérés de sang et brûlant du désir de
compléter leur vengeance : ils’cnsuivit un massacre universelde
tout ce qui restait de marins et de passagers sur le navire. A l ’ex-
ception de quatre individus, pas un bomme, une femme ou un
enfant de tous ceux qui avaient quitté Port-.Tackson, n’échappa
à la fureur de leurs impitoyables assassins. En vain ces infortunés
cherchaient à se cacher, ils étaient bientôt découverts et
entraînés bors de leurs retraites pour endurer les plus affreux
tourmens. Vainement quelques-uns des matelots s’étaient enfuis
sur le gréement, dans Tespoir que leurs vies pourraient
être épargnées quand la fureur des sauvages serait apaisée : ils
eurent le môme sort que leurs infortunés compagnons. Us
étaient descendus, .à la demande de Tepahi qui, le matin même
de cette affreuse journée, était arrivé de la baie des Iles à Wangaroa,
et ils s’étalent placés sou.s sa protection. Mais, bien que
ce vieux cbef fît tout son possible pour les empêcher d’être
égorgés, ses efforts furent impuissans, et ils succombèrent sous
ses yeux, victimes de cette dernière scène de sang et d’hor-
l'eur. Je me trompe, cette scène ne fut pas la dernière,
car il y en eut encore une autre dont l’humanité frémit,
ainsi que celui qui la raconte. Ces sauvages, non contcns
de la vengeance qu’ils venaient d’accomplir, et fidèles ;i leur
caractère connu de cannibales, se rassasièrent des cadavres
de leurs victimes, en dovorani leur cbair ensanglantée jusqu’à
PIÈCES .lUSTIEICATIVES. 591
ce que leurs appétits féroces fussent complètement assouvis.
Les quatre personnes qui échappèrent au sort fatal de tous
leurs compagnons furent une femme, deux enfans et le mousse
de la chambre. Tous, à l’exception du dernier, eurent le bonbeur
de se soustraire aux recherches des barbares jusqu’au
moment où leur fureur fut apaisée. En conséquence, quand
ils furent découverts, ils furent épargnés et traités avec une
certaine douceur. Le mousse de la chambre, pendant le
voyage, s’était mis en faveur près de Georges par divers actes
d’amitié, et eut dans cette occasion le bonbeur d’obtenir la
plus précieuse des récompenses pour lu i , la conservation de
sa vie. Ce chef, reconnaissant des bons offices qu’il avait reçus
de ce jeune homme, l’accueillit avec affection, tandis qu’il
réclamait sa protection et qu’il s’écriait d’un ton lamentable :
« Georges, vous ne voudriez pas me tuer; » car il lui répondit
d’un ton qui prouvait que, malgré toute sa cruauté, il était
susceptible de reconnaissance ; « Non , mon garçon , je ne
vous tuerai point; vous êtes un bon enfant. » Et il le prit sous
sa protection immédiate.
(Page lyS-) La case de Doua-Tara ou , s’il est permis de
s’exprimer ainsi, son palais, différait peu de celle de ses sujets;
elle ne s’en distinguait que parce qu’elle avait été 'con.struite
sur une-plus grande échelle et qu’elle était entourée d’un enclos
plus va.ste. Elle avait environ vingt pieds de long, quinze
pieds de large et buit de hauteur, avec un faîte 'en forme de
to it, et elle était construite en pieux entrelacés de branches.
La porte, comme dans toutes les autres, était si étroite, qu’il
n’était possible d’y pénétrer autrement qu’en rampant sur les
pieds et sur les mains. L’intérieur n’off'rait aux regards que
quelques pierres rapprochées pour servir de foyer. La fumée
n’.ayant pour s’échapper d’autre issue que la porte, ce triste
édifice était rempli d’une vapeur étouffante et formait, avec
ses malheureux bûtes, un tableau complet de l’état de bar-
barie. •
Mais l’abjccto misère cio ces cabanes était en quelque sq^lc
y' Il