
larges épées longues au plus de trois coudées ;
qu’ils tenoient à deux mains, pour frapper avec
plus de force. Les cavaliers portoient deux javelots
& un bouclier moins grand que celui de Fin-'
fanterie.
Ces defcriptîons peuvent donner une idée générale
des armes dans cet ancien temps chez les
peuples civilifés de l’Afie. Mais les petites peuplades,
encore à demi fauvages, qui habitoient les
pays ftériles & montagneux , n’avoient que les
armes propres à ce degré de civilifation. Léon-
natus, lieutenant d’Alexandre, trouva fur la rivière
de Tomère, ( rivière d ’H a u r ) , un peuple armé de
grofles lances, longues de fix coudées, dont le
bout étoit pointu, & durci au feu. Us avoient la
barbe & les cheveux épais & hériffés , le corps
couvert de poil, les ongles longs & durs comme
ceux dès bêtes féroces : c’étoient les feuls inftru-
ments qu’ils e.mployoient pour fendre la chair du
poiflon, & le bois peu compare. Celui qui étoit
plus dur, ils le coupoient avec des pierres tranchantes.
Leurs vêtements étoient de peaux d’animaux
fauvages , ou de grands poiffons. Voilà
comme touts les hommes, commencent,
E U R O P E .
A r m e s d e s G r e c si
Ce peuple, dont le génie devoit éclairer l’Europe
, fut trouvé dans cet état par les premiers
•Egyptiens qui vinrent en Grèce. Les plus anciens,
guerriers dont les écrivains grecs nous parlent,
Hercule-, Périphète, Théfée, Ereuthalion, por-
toient encore. la pe.au des animaux fauvages, &
pour arme la maffue.. Ce peuple ingénieux reçut
avidement, les leçons, de fes. maîtres , & perfectionna
bientôt, fes armes, ainfi que touts fes arts.
La maffue n’étoit plus en ufage. au fiége de. Troie ,
mais on y voit, toutes les autres armes, les Locriens
armés de fronde.s faites avec de la laine. ; Teucer
tendant , à l’abri du bouclier d’Ajax, fon arc recourbé,
touts les guerriers lançant d’abord, leurs
piques, & combattant enfuite avec Fépée. Celle-ci
étoit portée par un- ceinturon pajfiTé en bandoulière
, & tombant jufques fur la çuifle. On voit
Agamemnon jettet fur fes épaules {fon épée ornée,
de clous, d’or & entourée d’un fourreau d’argent
attaché avec des. courroies d’or. On y joi-
gnoit une efpèce de couteau ou de poignard,qui
peutrêtre fervoit moins au combat que. dans les
facrifîces; mais on employoit la hache à Fun &
l’autre ufage. La plupart de ces armes étoient
de cuivre. : il y en avoit peu quifuflent de fer. Mais
les héros grecs & troyens ne dédaignoie.nt point
encore, la plus, ancienne des armes. Le chef des
Grecs combattoit avec là. lance. & l’é p é e .& de
grandes pierres. Hë&or,bîëffé par A jax,; s’éloigne*
oc prenant de fa main robufte un gros, caillou
noirâtre j en frappe dans fon milieu le vafre bau^-
cher d*Ajax, &. l’airain retentit de ce coup terrible.
Alors Aj.ax, élevant une pierre beaucoup
plus grande, & l’ayant fait tourner en l’air, la
lance en y employant toutes fes forces immenfes.
Semblable à une meule, elle frappe & brife le
bouclier , bleffe les genoux & renverfe le héros.
Plufieurs autres employèrent la même arme, ou en.
éprouvèrent les effets.
Les armes défenfives étoient la cuirafle de cuivré
ou de toile, quelquefois couverte d’une peau de
bete fauvage, & embellie d’ornements divers, la
mitre ou ceinture de lames de cuivre, le calque:
fait de peau de chien marin , de taureau, ou de
belette , fouvent orné d’aigrettes de crin de cheval,
attaché fous le menton, par une courroie. Les plus
jeunes guerriers le portoient fans cône & fans
aigrette ; le bouclier rond ou oblông, couvrant
tout le corps, fait de plufieurs. cuirs de boeuf,
recouvert de lames de cuivre ou d’étain débordées
en-dehors par les cuirs. Celui d’Enée étoit
de deux lames de cuivre, deux d’étain & une.
d’or: celui de Neftor, entièrement d’or avec les
manches du même métal. Il y en avoit deux., l’un
pour l’attacher à l’épaulé gauche, par une large
courroie qui entouroit le cou, & couvrait la poi.--
trine &les deux épaules ; l’autre, pour le tenir de lai
main gauche.. Quand on ne s’en fervoit pas , on.
le rejettoit en arrière fur les épaules ; comme
Ajax , quand il fe retire devant les Troyens , ou
comme He&or allant au combat. Celui de ce
guerrier touchoit de fa bordure de cuir ,.d’une part
la cheville du pied, de l’autre le. cou. Il y en avoit
de plus, petits, que Fon donnoit aux moins,braves» |
Les cnémides ou bottines de cuivre s’attachoient
avec des agraffes : on employoit quelquefois à ces
armes plufieurs métaux fondus enfemble»
Dans les fiècles fuivants, les Grecs coiffer-
vèrent l’ufage de toutes ces armes chaque peuple
les adopta en tout ou en partie., & y- fit divers
changements., fuivant fes. inftitutions , fes arts, fes
richeffes, fes usages, &. fon caractère. Athènes &
Lacédémone en. eurent de toute efpèce. ; celles des
Qplites. étoient la pique , l’épé.e , le cafque, le
bouclier rond ou oblong., la cuirafle., & lès, bottines
: celles des pfiles,. le javelot,. l’arc & la
flèches, la fronde , même Les, bâtons & les pierres :.
la plupart des Ætoliens. avoient l’armure, pfile ou
légère.: celles, des peltaftes étoient le javelot plus
petit que. les, piques & les fariffes, plus pefant que
celui des pfiles.,. le cafque. & le bonnet lacédé-
monien ou arcadien-, les bottines. & la. cuirafle de.
mailles, ou d’anneaux minces, la. pelte, petit bouclier
légerrond ou quarté, duquel ce genre de
troupe avoit tiré, fon nom , la. demi-cuirafle&
fouvent des cafques légers.
L’épé.e, des Spartiates étoit courte.. Lorfque la.
pique cêffa d’être, arme de jet , elle fut allongée*.
Celles, des. Grecs, aux Thermopyles étoient. plus,
longues, que celles des Perfes. 11. y en eut de différentes,
longueurs: celle qu’on nommo.it. kqÿ,
étoit la plus grande , & la plus petite ne devoit
pas avoir moins de huit coudées. ( 11 p. 4 p. 81.).
Au .combat de P y le , les Lacédémoniens avoient
des cuiraffes de feutre ou de laine foulée : ils porto
ïent aufli fur leurs Cafques des bonnets de feutre,
pareils à ceux des Arcadiens. Dans la guerre de
Meflene» ceux qui n’avoient ni cuirafle ni bouclier
, (&. les Arcadiens des montagnes étoient
fur-tout dans ce cas) , fe couvrirent de peaux de
chèvre , de mouton, ou de bêtes fauvages. A la
bataille de Mantinée les oplites arcadiens portoient
des maffues, comme les Thébains. Les Béotiens
avoient des cafques, qui couvroient le cou , la j
tête entière, & n’empêchoient pas de voir.
Iphicrates fit de grands changements dans les
armes des Athéniens. ( A v . J . C. 360. ). Jufqu’à lui
ils s’étoieiit fervis de grands boucliers, difficiles à
manier. Il les réduifit à une grandeur fuffifante
pour couvrir le corps , & à cette légèreté qui
mettoit ceux qui s’en fervoient, en état de fe
mouvoir facilement de touts côtés. Ce bouclier
reffemblant à la pelte, les oplites prirent alors le
nom de peltaftes.
Iphicrates fit un changement contraire à F égard
de la pique & de l’épée ; il augmenta celle-là d’un
tiers, &. l’autre preîque de moitié. L’expérience
en ayant prouvé les avantages, rendit célèbre l’invention
de ce général. Il fit aufli donner au ioldat
une chauffure plus légère &. plus commode, qui
fut nommée iphïcratide. Il changea les cuiraffes de
cuivre en cuiraffes de toiles, recouvertes de lames
de fer difpofées en écaille.
Les Macédoniens, armés comme les autres Grecs,
étoient diftinguéa par les dknenfions plus parfaites
de leur bouclier, & par leurs piques nommées
fariffes. Le bouclier étoit rond, de cuivre, médiocrement
concave „ de huit palmes de diamètre ,
( Z3, pouc. 1.}.
La concavité étoit de trois palmes , ( 8 poue.
M |
La fariffe devoît avoit foize coudées; (2 2 p.
9 p. 4 h ) j mais elle n’étoit, en effet , que de
quatorze ,. ( 18 p. 9 p. 2 L)..
Les armes fubirent de grands changements dans
le Péloponnèfe , ainfi que dans Athènes au temps
d’Iphicrates. Philopoemen , général des Achéens ,
rétablit parmi eux les anciens ufages *. il réforma
les vices, introduits dans l’armement & dans l’ordonnance
des troupes. Les Achéens avoient des
boucliers légers,, faciles à manier , mais infuffifants.
pour couvrir le corps , & des piques beaucoup
plus courtes, que les fariffes. Us fe fbrmoient en
phalange %y mais, avec des armes fi foibles, ce corps
n’étoit propre ni à la ' charge ni au fynafpifme.
Philopoemen leur fit prendre au lieu, du bouclier
macédonien, la fariffe , le cafque ,1 a cuirafle, tout
Farmement.des oplites, ôe les rendit ainfi capables
de combattre de pied ferme , au Heu d’efcar-
moncher comme des peltaftes. Ce fut un change-
ment contraire, à.celui d’Iphiçxates 3 qui transforpw
en peltaftes les oplites. Il me femble que celui-ci
étoit moins d’un homme de guerre.
La cavalerie grecque, pefamment armée , portoit
la lance longue ou kovtoç , la moyenne ou
tTofu , la demi - pique ou h b y% n , Fépée ou le
fabre recourbé, le javelot, le cafque, la cuirafle,
le bouclier, & les bottines. Celle qui portoit des
boucliers fe nommoit thyréophore; celle qui avoit le
javelot nommé x y fte portoii le nom de xyjlophore*
La cavalerie légère ou acrobolifte, c’eft-à-dire
qui combattoit de loin ,’ avoit la demi-pique , le
javelot , l’arc & les’flèches. Celle qui portoit la
demi-pique ou jayelot, l’épée &c la hache , étoit
nommée hypacontifle ou tarentine ; celle qui avoit
l’arc & les flèches, hippotoxote ou fcythe.
Alexandre forma une troupe de cavalerie
femblable à nos dragons : il la nomma J'if/.couu,
ou les double-combattants. Elle étoit armée plus
légèrement que les oplites, plus pefamment que
la cavalerie , & combattoit à pied ou à cheval :
un hypérète , qui fui voit chaque cavalier , prenoit
fon cheval, & le cavalier devenoit oplite. Alexandre
eut aufli de la cavalerie fariffophore.
La cavalerie cataphra&e étoit celle dont les
hommes & les chevaux étoient couverts d"armes
! défenfives. Le cavalier avoit une cuirafle faite de
; toile recouverte d’anneaux minces, ou de petites
lames de fer qui fe recouvroient comme des
écailles. Quelques-unes étoient de toile fimple ,
& d’autres de corne. On y ajouta des cuiffarts &
des gantelets : les chevaux portèrent des garde-
flancs & de«/ frontaux. Xénophon avoit propofé
une armure à-peu-pres femblable , peut-être d’après
! ce qu’il en avoit vu en Afie oh cette armure étoit
, commune. Elle ne paffa que fort tard dans la Grèce ,
& n’y devint jamais générale*
A R M E S D E S R O M A I N S .
Les Grecs , ancêtres des Romains ,• apportèrent-
en Italie les armes qui étoient alors en ufage dans'
la Grèce. On les reconnoît dans celles que Ser-
: vius-Tullius prefcrivit pour les différentes claffes
de citoyens. Les foldats de la première eurent le
bouclier argolique , la hafte ou lance grecque ,.
( <Eo/w , ) , le cafque de cuivre ,. la cuirafle , les
bottines & l’épée. Ceux de la fécondé eurent les
mêmes armes , excepté la cuirafle ; & au lieu du
bouclier tond ils portèrent le bouclier oblong &
re&angulaire. La cuirafle & les bottines furent
ôtées à ceux de la troifième. Dans la fuivante ils-
ne confervèrent que le bouclier oblong, la haftff
& Fépée dans la cinquième ils n’eurent que la
fronde & le javelot- appellé cciviov ,- ceLvviov ,
v erriculum& verutum^(Dïodor. L. 4 ,p. z i i . L. 22.).
Dans la fuite les citoyens romains abandonnèrent
la. fronde aux troupes auxiliaires & al l iéestel s
que les Cretois & les Baléariens. Dans la. guerre
civile Cæfar eut trois mille archers, touts- crétois,,
f laçédimoniens > lyriens , ou pontiques. Sa- cava--