
* C a p it a in e - général, Ce titre eft fort ancien
en K rance, & donnoit autrefois un commandement
prefque fans bornes à celui qui en étoit revêtu,
dans le diftsiû où il commandoit.
On va voir .par les provifions de capitaine-général
, que Philippe de Valois donna à G uy de Nefle,
en 1349, l’autorité qui y étoit attribuée.
« Philippe, par la grâce de D ieu , roi de France-,
à touts ceux qui ces préfentes lettres verront : falut.
Sçavoir faifons que nous confiant du fens , loyauté,
diligence de notre amé & féal chevalier G uy de
Ne fle, maréchal de France , icelui avons fait &
établi, faifons & établirons par ces lettres, pour
la fureté du pays -, capitaine-général & fouverain
de par nous ès parties de Xaintonges.& ès pays &
marches d’environ, & de touts les lieux voifins :
auquel nous avons donné , & encore donnons
pouvoir , autorité, &. mandement fpécial de mander
, affembler, & tenir à nos gages gens d’armes
& de p ied , tant, tel nombre, & toute fois que
bon li femblera, de vifiter & eftablir les villes &
chafteaux & forterefles du pays & des marches, &
de cfoiftre & apetiffer les eftablies, (les garnirons
) ; de changer, mettre de lieu en autre, &
ofter du tout chaftelains, baillis,prévofts, receveurs,
& toutes manières d’aurres officiers . quiex & en
quelque eftat qu’ils foient, & autres établir de
nouvel en lieux d’eux ; de quitter , remettre , pardonner
toutes .manières de crimes & maléfices
aux personnes qu’il verra qu’à bon foit ; de rappeller
bains , ( bannis ) , de donner lettres d’eftat
à ceux qui font à notre fervice avec lui ou autre
part de fon commandement, du jour que ils partiront
de leur pays jufques à un mois après leur
retour des parties où ils- feront allés ; de com-
pofer à toutes manières de gens , de quelque
effat que ils foient, tenant villes , chafteaux , &
forterefles de nos ennemis qui vouldroient fans
fraude venir à notre obéiffance ; de prendre deniers
fur les receveurs quelconques defdites parties
, pour faire les chofes deffùs dites toute
fois que meffier en fera ; en eux donner quittance
fous fon feel de ce qu’il prendra d’eux, & de
faire toutes autres chofes qui à office de capitain-
général & fouverain puent & doivent appartenir.
Lefquelles chofes deffùs dites ainfi faites par nof- ;
tredit capitain | nous aurons fermes & agréables ,
& icelles ôcceicunes confirmerons par nos lettres
fcellées en lacs de foye de cire verte , fe meffier
eft. Donnons en mandement par U teneur de ces
préfentes à touts nos officiers & fubjets , de
quelque eftat qu’ils foient , que audit marefchal
comme à capitain eftabli de par nous, obéiffent
diligemment & preftent & donnent confeil, confort
, & aide , toute fois que meffier en aura, &
à nos amez & féaux gens de nos comptes à Paris ,
que tout ce que noltredit capitain aura pris ou
receu defdits receveurs , ou d’aucuns d’iceux
pour la caufe deffùs dite , ils allouent en leurs
comptes & rabattent de leurs receptes fans contredits,
& nonobftant que ces préfèntes foient
paffees par les gens de notre fecret confeil ; en
témoin de laquelle chofe nous avons fait mettre à
ces lettres noftre grand feel. Donné au bois de
Vincennes le 9 jour d’aoûft, l’an de grâce 1349 ». m
C ’eft le fçavant M. Ducange qui nous a donné
ce monument tiré du Tréfor des Chartres. Il en
^ cite encore un autre plus ancien de Philippe - le-
B e l, donné a Vincennes l’an 1302 , le mardi
devant la fête de la Magdelaine, au comte %de
! Saint-Paul, bouteiller de France. C ’étoit-là une
| commiflion & non une charge.
Le titre de capitaine - général fut donné par
Louis XIII au duc de Savoie en 1635, Pour les
armées d’Italie : il lui en expédia les patentes ,
qui font rapportées dans les mémoires pourl’hif*
toire du cardinal de Richelieu ; & le maréchal
de C réqui, qui commandoit alors en ce pays-là,
eut ordre de lui obéir.
On trouve encore le titre de capitaine-général
donné depuis ce temps - là fous le règne de Louis
X IV : mais les fondions & les prérogatives attachées
à cette dignité où commiflion n’étoient
pas les mêmes que celles dont on vient de parler ;
ce titre de capitaine - général donné au duc de
Savoie en 1695, lui attribuoitle commandement
fur toute l’armée, & répondoit à celui de généra-
liflime, dont on a ufé quelquefois dè notre temps.
Mais les capitaines - généraux, de nouvelle inftitu-
tion, dont on va taire mention , étoient dans
l’armée fous les ordres du maréchal de France qui
la-commandoit, & leur donnoit feulement le droit
de commander aux autres lieutenants - généraux
fans rouler avec eux.
Le marquis de Caftelnaut & le marquis d’Uxelles
furent honorés de cètte qualité en 1656 : c’eft ce
qu’on trouve dans les mémoires de Buffy-Rabutin,
dont voici l’extrait : on y verra l ’occafion de cette
inftitution.
« Je ne fervois pas, dit-il, comme lieutenant-
général cette campagne ; parce que Caftelnaut,
preffant le cardinal de le faire maréchal de France ,
& ce miniftre ne le voulant ni fatisfaire là-deffus,
ni tou t-à-fait mécontenter, avoir inventé une
charge de capitaine - général, pour le mettre au-
deffus de nous autres fes camarades ; de forte que
Montpéfat, & les autres anciens lieuténants-généraux
ne voulant pas obéir à Caftelnaut , à moins
qu’il ne fût maréchal de France, s’étoient touts
retirés de l’emploi : j’aurois fait comme eux fi je
n’âvois eu une grande charge à faire, à laquelle
je me réduifis, & dans laquelle il n’étoit point
honteux d’obéir, non - feulement aux lieutenants-
généraux d’armée , mais même aux maréchaux-de-
camp».
Dans la confidération qu’eut le cardinal d’obliger
Caftelnaut, il entra encore celle de rebuter
par-là les autres lieutenants - généraux, dont l’élévation
eut bientôt trop preffé fon éminence : & il
trouva bien mieux fon compte à faire des lieu-r
tenants - généraux exprès pour obéir à cette nouvelle
charge de capitaine-général, lefquels étoient
proprement des maréchaux-de-camp fous un plus
grand titre. Dë ce nombre ci furent Créqui,
aHumieres, Bellefonds, Gadagne, & quelques-
autres.
Ce que l’on fit pour Caftelnaut dans l’armée de
Turenne , on le fit pour Uxelles dans l’armée de
Laferté.
Ge titre a encore été donné dans ces derniers
temps à quelques commandants ; ( D aniel, Mil.
Fr. tom. 1, pag. 188.). Le comte de Teffé l’eut
dans l’armée d’Italie en 1702 : il y commanda
d’autres lieutenants - généraux. On trouve aufli
le duc de Nàvailles & le duc de Noailles employés
en cette qualité.
En Efpagne le titre de capitaine - général répond
à celui de maréchal de France. ( J.
C a p it a in e de c h a r r o i . C ’eft le commentan
t d’un équipage des vivres.
Le capitaine de charroi doit être un homme expérimenté
dans le métier ; autrement le fervice en
louffre, & le munitionnaire y perd confidérable-
ment : un équipage périt, quand il eft entre les
mains d’un homme qui n’entènd pas ce métier :
nous n’efr avons-que trop d’expérience.
Du moment que le capitaine a reçu fa çommif-
•fion, il part pour fe rendre au quartier où font
fes chevaux, & la première chofe qu’il fa it, c’èft
de fe charger de l’équipage par un état en forme.
On y mentionne les “chevaux , attelage par attelage
, & le capitaine certifie au bas de l’état qu’on
lui a remis le contenu dont il rendra compte , &
s’oblige d’en avoir foin fuivant fon inftru&ion j
enfuite il remet cet état figné double à celui qui
len a chargé pour l’envoyer au munitionnaire.
C ’eft. une erreur de monter les capitaines & les
conduéleurs j ils doivent avoir des chevaux à I
eux.
Ce capitaine eft encore chargé des effets qui
fuivent, & qu’on tranferit au bas. de l’état, fuivant
leur qualité & quantité , de cette manière.
« De plus, il a été remis audit fleur. . . . dans le
caiffon de bagage les uftenfiles du maréchal de
1 équipage , fçavoir : une bigorne, qui eft une
enclume portative : deux paires de tenailles, l’une
pour chauffer, l’autre pour tenir à la main ; une '
etampe, un poinçon ; cinq cents fers , & dix milliers
de clouds en deux cailles ; douze faulx,
quatre hacher quatre ferpes, trente étrilles, flx
pierres a aiguifer ; flx marteaux a battre les faulx ;
cinquante facs vuides pour mettre l’avoine ; un
baril de vieux oing de cinquante livres ; & un
petit baril contenant flx pintes d’eau de vie , ou
environ ».
Cet état doit être figné double par le capitaine,
. Par. celui ^U1 l’en charge de la part du muni-
tionnaire. .
, O*1™1 aux de cuir de Hongrie , aux
| f S p veaux blancs pour faire ..des coutures,
et, broquettes, cordages, Sic. qui font nécciïaires
pour racommoder les équipages pendant la campagne
, on n’en charge pas d’abord le capitaine.
Touts les harnois étant neufs, on tient ces chofes
dans les magafins de la frontière , & on les envoie
à l’armée à mefure qu’il en eft nëceffaire , de
même que des médicaments pour les chevaux. Le
capitaine s’en charge auffi à mefure qu’il en reçoit
, & prend foin qu’on ne les diffipe. Pour cet
effet il en délivre lui-même les dofes au maréchal
quand il eftnéceffaire dë les employer, & il voit
faire les compofiticms , afin que tout ce qu’il livre
y entre.
11 porte fur fon regiftre le nom des conduéleurs,
du maréchal, du charron , du bourrelier , & des
charretiers de fon équipage ; de même que les
payements qu’il leur, fait de quinzaine en quinzaine
; defquels il dreffe des rôles que les con-
du&eurs lignent, ainfi que ceux qui fçavent écrire ,
jufqu a ce qu il ait joint le tréforier des équipages
, & qu’il en retire fa décharge.
Il ne fait aucune autre dépenfe, foit de deniers,
foit d’uftenfiles qui font en fa garde, qu’elle ne
foit portée fur fon regiftre : obfervant de prendre
des quittances, &. des certificats de tout en bonne
formé.
Il laiffera quelques feuillets en blanc au commencement
de fon régiftre , pour y porter fa
recette.
Il envoie touts les quinze jours au munitionnaire
, ou au commis général prépofé par lu i, un
mémoire de l’état de ion équipage, & un bordereau
de recette & de dépenfe, tant en argent &
en uftenfiles qu’en avoine & en foin.
Il donne avis des moindres accidents qui arrivent
à fon équipage , le plutôt qu’il peut.
Il ne fait que les dépenfes riéceffaires, & épargne
autant qu’il lm eft poflible, les faux frais , comme
fi l’équipage lui appartenoit.
Il fe lève touts les jours de bon matin pour
voir étriller les chevaux.
Il ne manque jamais de voir manger l’avoine,
qu’il fait diftribuer par les conducteurs à chaque
charretier, avec une mefure qu’il conferve exprès.
U a foin qu’il y ait toujours un des conduc*
teurs^dans les environs des écuries, pour mettre
ordre aux chevaux vicieux, & il s’y tient lui-
même le plus fou vent qu’il lui eft poflible, autrement
il peut arriver de grands accidents , quand
on s’en fie à des valets.
Il exerce doucement les chevaux en les envoyant
chercher les provifions dans les endroits où il les
a achetées, afin de les former au travail.
Avant que de payer les charretiers, comme il
a été dit, il fait la revue dans toutes les écuries ,
pour fe faire repréfenter par chacun d’eux les
uftenfiles qui font à leur charge ; & , s’il en trouve
de manque , il les porte au compte de celui qui
les a perdus, & lui en fait payer U valeur conu&ÿ