
rie la bataille de Cannes. « L’aîfe gauche de la
'galerie efpagnole ôc gauloife chargea , dit-il ,
1 aile droite de la cavalerie romaine , non pas fui-
vant l’i-lage ordinaire dans ces fortes de combats ;
( minime equefris more pugnce ) ; il n’y a voit aucune
efpace pour efcarmoucher ; ( nullo circà ad eva-
gandum reliélo [patio. ). D ’un côté la rivière & de
' J autre les lignes d’infanterie contenaient celle de
cavalerie , qui niarchoient l’une contre l'autre,. ».
l.a cavalerie romaine , moins accoutumée à ce
genre de^ combat, fut mife en fuite.
Les véîites^inférés entre les turmes pouvoient
«n effet leur être utiles. Une troupe ainfi com-
pofee, s approchoit de celle qu'elle vouloit charger.
La portée des armes de jet étant peu confidérable,
la diftance entre les deux troupes étoit petite. Les
délites commençoient l’attaque en lançant leurs
traits ; & , attirant fur eux une partie de ceux de
l’ennemi, diminuoient le danger pour les turmes;.
qui , trouvant la troupe ennemie en quelque détordre
, Fenfonçoient plus facilement. Cependant
les Romains n’ont employé* que rarement cette
difpofition : d’oii l’on peut conclure qu’ils ne Font '
ni jugée ni trouvée auffi excellente qu’elle a paru
1 etre au commentateur de Polybe. Ce fut au fiège
de Capoue qu’ils en firent ufage pour la première
fois , c eft-à-dire Fan de Rome 542 ,■ avant J. C*
2 1 1 . Dans les fréquentes forties que faifoient les
Campaniens, leur infanterie étoit toujours inférieure
, Ôc leur c a v a le r ie fupérieure à celle des
Romains. Ceux-ci, ayant choifi des jeunes gens
agiles ôc vigoureux , leur donnèrent des armes
légères, les exercèrent à monter en croupe derrière
les cavaliers, & à fauter à terre au fignal.
Lorfqu’on les eut bien dreffés à cette manoeuvre ,
©n les mena contre la cavalerie campanienne. Au
fignal donné ces jeunes gens fautent à terre , Ôc
lancent vivement une grande quantité de traits fur
l ’ennemi étonné de voir un corps d'infanterie naître,
pour ainfi dire, de cette cavalerie. Plufieurs hommes
& plufieurs chevaux furent bleffés ; mais la crainte
que leur imprima ce genre de combat nouveau
& inattendu fut plus grande que le ’dommage ;
Favoris tamen plus ex re novâ a tq u e inopinatâ in- ■
jeftum efi ; & les cavaliers romains chargeant
l ’ennemi effrayé , le mirent en fuite. ( Liv. L.
X X X V I . C. 4. ). Cet avantage engagea les Romains
à joindre aux légions des armés à la légère ; mais
on les voit toujours dans"îa fuite féconder l’infanterie
Ôc rarement la cavalerie. Cæfar en employa
cependant en Macédoine avec fuccès contre la
cavalerie de Pompée qui pourfuivoit fon arrière-
garde , & qui l’atteignit fur la rivière de Genufe.
( Bell, civ. L. III. C. 75. ). H en continua Fufage ,
& dit qu’avec ce fecours mille de fes cavaliers
ne craîgnoient pas dans les plaines tes plus unies
d’attendre ôc de combattre fept mille cavaliers de
Pompée. ( Ibid. C. 8 4 . ).
Ce mélange des deux armes.étoit en ufage chez
les Germains ôc chez les Gaulois. Vercingétorix
exerçoit prefque touts les jours fa cavalerie en' ÿ-
entremêlant des archers. ( Ceef. Bell. G a II. L. VÜ.-
C. 36. Oudendorp. 40. ). Cælar voyant que les
Gaulois lui avoient fermé touts les paffages de la.
Province Ôc de l’ Italie , ôc qu’ils lui étoient fupé-
rieurs en cavalerie , envoya lever au-delà du Rhin,
de la cavalerie germaine , avec les armés à la légère
, qui avoient coutume de combattre parmi
e ( Ibid. C. 65. ). Les Germains penfoient en
générât que l’infanterie avoit plus de force , Ôc
entremeloient les deux aimes : l’agilité de leurs,
gens de pied, qu’ris choififfoient parmi toute la
jeuneffe, ôc plaçoient devant la ligne, conyenoit ÔC
s’adaptoitaux combats de cavalerie. ( T a ch. Germ.).-
J ai dit que ,, l’ufage delà cavalerie étant alors de charger
par petites troupes , le fecours des armés à la
légère pou voit avoir quelque effet ; mais nous avons-
dans Cæfar une preuve de la foibleffe de ce mé--
lange, ïorfque la cavalerie charge en maffe ; c’eft
le combat donne à la vue d’Aléfia*
Les Gaulois avoient inféré entre leurs turmes quef-
ques archers Ôc armés à là légère, pour les protéger,
fi elles plioient, ôc foutenir l’effort de l'a cavalerie
germaine au fervice de Cæfar. Plufieurs cavaliers
germains furent mis hors de combat. Cependant?
lefcarmouche dura depuis midi jufqu’au coucher
du foleil : elle fe continuoit encore avec des avantages
à-peu-près égaux de partôc d’autre ; Ïorfque
les Germains réunifiant ôc ferrant leurs turmes y
una in parte confettis turmis, fondent fur les Gaulois „
les plient, les mettent en fuite, entourent les archers
ôc k s tuent. {Bell. Gall. L. VIL C. 80. j l
Ces pelotons d’infanterie s'éparpillèrent fans doute
comme le dit le chevalier Folard, ( Tom.lV.p. 152.);?
ils fe refusèrent à eux ôc tentèrent de fe dérober
a leurs yeux : mais touts leurs efforts ne purent
empecher qu’ils ne périffent par l’épée des-cavaliers
ou fous les pieds des chevaux.
Le même auteur, voulant appuyer fon opinion*
par de grands exemples-, a écrit qu’à la bataille
delà Trébie , u Annibal fit un trait d’un guerrier habile
& éclairé, en faifant pafier fon infanterie légère-
à fa cavalerie, qu’il entremêla par pelotons parmi-
fes efeadrons. ». Cependant il n’y a pas un feul
mot dans le récit de Polybe , qui puifie faire
foupçonner cette dilpoiition : on y lit au contraire-
que l’armée romaine fut formée dans l’ordre ae-
■ accoutume, kutu tus iiB-ta/uiyus nup ùvr.o7ç tu^ s
& par conséquent que les véiites étoient.en avant,
de la première ligne d’infanterie ; que le combat
commença entre eux & les troupes légères des-
Carth aginois ; art)Vix.7r?iU>cqcrui> ot npûx.Hpc(yoc -rm Iwu-
fiiuv ïvÇam ; que ces troupes légères s’étant- retirées
pat. les intervalles des armures pefantes,.
celles-ci en vinrent aux mains , i| ! | r»
è'ia, tm d'ictçyfitciTVv ras -arçon.tvàmvovTus, x} r-vptrirTty
ru fiuçsu tm 'owXw ûxbjxoïs ; & qu’en même temps,
la cavalerie carthaginoife chargea les Romains aux
deux ailes avec avantage ; u y&M et rm
, un ùfiÇoiv Totv KtçuTOiv Initie v ras utt&ImtIüs» ( l . in. c.72 & 75.).
'L e çhevalier Folard efi: encore moins heureux
clans l’exemple qu’il a prétendu tirer de la bataille
de. Pavie. Ce qu’il dit de la bataille de la Trébie
pourroit avoir été fait comme il Fa imaginé ; mais
ce qu’il avance concernant celle de Pavie efi im-
poffible. Il raconte d’après Varillas que « les
Bafques , fe gliffant entre les files de la gendarmerie
françoilê., faifoient leur coup d’arquebufe
fur le gendarme le plus apparent, reffortoient pour
aller recharger leurs arquebufes , & revenoient tuer
de la même façon qui bon leur fembloit ». L’un &
l’autre oubiioient que cette arquebufe ne fe ma-
nioit pas comme notre fufil, que c’étoit une arme
nouvelle , pefante , incommode , qu’on ne pouvoit
tirer qu’en l’appuyant fur une fourchette , & qu’il
étoit impoflible de manoeuvrer avec elle comment
ils ont imaginé que Font fait les Bafques.
Comme les pelotons d’infanterie ont pu être
inférés avec avantage entre les pelotons de cavalerie
dont l’ufage étoit de combattre en efearmou-
chant, ainfi que le .faifoit la^ cavalerie romaine &
la numide ; ( Polyb, ibid. C. 72. ) ; ils ont pu l’être
de même entre de gros& pefants efeadrons, qu’on
ne menoit à l’ennemi qu’avec lenteur. C ’eft ce
qui efi arrivé à la bataille de Leipfig, gagnée par
Guftaye Adolphe. Ce prince, inférieur en cava-<
lerie, entremêla fes efeadrons de pelotons de mouf-
quetaires. La cavalerie impériale , formée par
efeadrons de cinquante hommes de front fur huit
de hauteur, marcha en avant avec quelaue infanterie
, fur laquelle par conféquent elle fut obligée
de régler Ion pas & fa vîtefie : de plus , ces groffes
& lourdes maffes ne pouvoient fe mouvoir qu’avec
pefanteur, & l’infanterie peu exercée alors ne mar-
choii que très lentement. Gette cavalerie parcourut
donc au pas une grande partie de l’efpace qui la
féparoit de la cavalerie fuédoife. Il efi vraifem-
blable qu’à quelque diftance elle hâta fa marche
pour charger : mais ces gros efeadrons fur huit de
hauteur ne pouvoient pas aller fort vite ; & les
intervalles qui étoient entre eux , fuivant Fufage de
ce temps, rendoit leur charge moins formidable.
Les pelotons d infanterie fuédoife confervèrent tout
leur feu, & ne tirèrent que Ïorfque ces efeadrons
furent près d’eux, c’eft-à-dire environ à la diftance
de quarante ou cinquante pas. L’hiftorien dit que
ce fut à bout portant : ( Hiß. de Gufiav. T. 111.
p. 312-) : c’eft l’exagération d’un auteur qui n’eft
pas militaire. Il ajoute que cette cavalerie déconcertée
recula : cette expreflion ne peut pas être
pnfe dans le fens propre ; il efi: impoflible que des
elcadrons à huit^de hauteur , marchant en avant au
petit tro t, s’arrêtent #ourt & reculent. Ce qu’il y
a de plus probable , c’eft que le bruit de la lalve ,
J eftet du feu, les chevaux Ôc les cavaliers effrayés ,
bleffes , mirent en défordre toute cette cavalerie :
les uns s arrêtèrent ôc relièrent en arrière ; d’autres
marchetent en ayant , mais ne fe voyant pas fuivis
fetfogradèrent âuflitôt, ôc le tout fe retira en con-
fufion jufqu’à la gauche de l’infanterie, fur laquelle
les efeadrons les plus voifins fe jettèrent ôc qu’il»
mirent en défordre. Voilà, fans doute, ce qu’a voulu
dire Fhiftorien en parlant du régiment de Holftein
qui étoit, dit-il ,-æ Vextrémité de la gauche du centre«
11 falloit dire , à l'extrémité de l'aile gauche.
La retraite précipitée de la cavalerie impériale
donna au roi le temps de faire faire un mouvement
par fa droite à la cavalerie de fon aile droite
pour gagner, dit - on, l’avantage du vent ôc du
foleil qui incommodoient beaucoup fes troupes 5
mais il s’y joignit, fans doute , un objet plus important
, celui de gagner le flanc gauche des Impériaux.
Ce mouvement découvrit la réferve de
cavalerie, commandée par Jean Banner, qui étoit
derrière la cavalerie fuédoife de l’aile droite.
La cavalerie impériale, s’étant ralliée, marcha
imprudemment contre* cette réferve qui l’attendit
en bon ordre. Le roi profita auflitôt de cette faute
énorme : il fit charger en flanc cette cavalerie par
fes efeadrons entremêlés d’infanterie, ôc fécondés
par fon artillerie : ils la plièrent fans peine , la battirent,
ôc la mirent en fuite. Il efi évident que,
dans cette a&ion, le fuccès des pelotons d’infanterie
inférés parmi la cavalerie fuédoife fut dû à la
mauvaife dilpofition, à la lenteur, à la pefanteur
de la cavalerie impériale , Ôc à l’imprudence de
celui qui la commandoit.
Le chevalier Folard cite encore la 1)3135116 de
Lutzen,pour exalter l’ufage des pelotons d’infanterie
mêlés à la cavalerie. Guftave y conferva en
effet cette difpofition : mais il paroît qu’ils n’y furent
d’aucune utilité. L’hiftorien de ce prince ôc le
comte -de Kévenhnller n’en font aucune mention ,
ôc les merveilles que Folard en raconte ne fe
trouvent que dans fon ouvrage.
11 n’eft pasdouteux que ce mélange n’ait été utile
en certaines occafions, ôc il ne l’eft pas moins ou iî
feroit très dangereux aujourd hui. Nous fçavons
que la force de la cavalerie confifte dans fa vî-
tefFe, ôc nous tâchons de la porter au plus haut
degré. Il feroit donc abfolument impoflible que
des gens à pieds la fuiviffent : ôc , fi on l’oblieeoit
à régler fa viteffe fur celle de l’infanterie , on lut1
oteroit tout fon avantage Ôc toute fa force ; on
Fexpoferoit à une défaite certaine 1 l’effet du feu
de quelque pelotons d’infanterie, quelque bien dirigé
qu’il fû t, ne retarderoit la courfe ni n’empê-
cheroit le choc d’une ligne pleine ôc bien ferrée :
efeadrons ôc pelotons tout feroit renverli. Le
maréchal de Saxe a dit « il y en a qui veulent
mettre de petites troupes d’infanterie dans les intervalles
delà cavalerie ; cela ne vaut rien. La foi—
bleffe de cet ordre intimide feule ces troupes d’infanterie
, parce que ces pauvres miférables fentent
qu iis font perdus fi la cavalerie eft battue : ÔC
cette cavalerie qui s’eft flattée de leur fecours-,
dès qu’elle fait un mouvement un peu brufqne ,
ce qui eft de fon effence , ne U voyant plus , eft