
continuelles efcarmouches, fans les aborder : après
les avoir fatiguées longtemps, il fit femblant de
prendre Ja fuite , afin de leur faire quitter leur ordre !
■ de bataille , en voulant les pourfuiv-re. Cette feinte
ayant réuffi, il les attaqua &L les défit, .Obfervons
-.que les Parthos étoient armés a ‘la légère, & ac-
-coutumés à-fe battre à la débandade; au lieu que
les Romains étoient pefamment armés ,.& n ’avoient
coutume de combattre qu’en bataille rangée.
A la bataille d’Ægine , que les Etoliens gagnèrent
contre les Athéniens, commandés par Démofthène
.par Prodès 3 les Etoliens defeendoient des c o l- •
fines par divers endroits, lançoient leurs traits ,
&. fe retiroient immédiatement après, .lorfque leurs
.ennemis s’avançoiént pour leur taire tet-e: -ils no
■ celsèrent point de les harceler ; ils les pourfuivoient
meme lorfqu’ifs avoient de l’avantage dans ces
«petits .combats. Enfin, comme ils étoient armés
à la légère naturellement agiles, ils fatiguèrent
;li fort par ces efcarmouches les Athéniens , qui
.étoient pefamment armés, qu’ils les mirent -en
déroute.
L a maxime de fatiguer les .ennemis fert non-
ifeulement pour le combat, mais encore pour les
-fuites ; foit qu’ étant vainqueur vous pourfuiviez
l'ennemi, foit qu’étant vaincu vous laffiez retraite.
Si les ennemis font moins en état de fupporter
la fatigue que vos foldats ; tâchez, dans les derniers
jours qui précéderont la batailla, de les fatiguer
par de fréquentes marches, auxquelles ils fe verront
forcés par celles que vous ferez vous- même :
, c’eft ce qu’Iphicrate , général athénien * pratiqua
dans un cas temblable.. Il eft certain que huit
ou dix jours de marche continue fatigueront fi
fort les ennemis., qu’ils feront obligés de laiffer
derrière eux plufieurs hommes & plulieurs chevaux
malades ou eftropiés. Pour y réuffir , faites femblant
de menacer différentes places , .de penter di-
.verfes furpwles, &. des incarfipns de quelque
côté Oh les ennemis,pour venir s’y oppofer, ayent
à faire beaucoup plus de .chemin que vos troupes ;
ce qui vous fera moins difficile, fivous éte,s maître
des ponts fur les rivières qui ne font pas guéables.
. 11 faut au contraire tâcher de terminer promp.-
tement le combat, fi vos troupes font moins acr
coutumées à la fatigue que. celles des ennemis ;
fi elles font plus haraffées par les marches &
les travaux précédents ; fi la chaleur du pays, de
la faifon , & de l’heure , doit leur être plus infup-
portable ; enfin fi elles font moins accoutumées
au poids de leurs, armes.
A l’égard des armes défenfives, je dois avertir
e u e , fi les ennemis font armés à la légère, „s’ils
ont coutume de charger par détachement?» & par
pelotons, & fi, avec la même viteffe .qu’ils viennent
à la charge , ils évitent de la foutenir, ainfi .qué
plufieurs nations du leyant & de 1 Afrique , qui
\ fient fur leur légèreté, fur celle de leurs chevaux,
ôt.fur le grand nombre de leur cavalerie-;
cg cas ne formez poipt le.dçffein dslespour:;
fuivre dans leur fuite. Au contraire, laiflez les
courir de la droite à la gauche , & ne faites faire
à votre armée que le moins de mouvement qu’il
vous fera poffible , tant pour n’y caufer aucun
dérangement, que pour ne pas la fatiguer ; ce
font les deux objets que les ennemis peuvent fe
propofer. Contentez-vous de faire avancer quelques
pelotons de fuftlier-s, ou de petits partis de cavalerie
légère , pour foutenir les efcarmouches, fans
engager le gros de votre année en des évolutions
continuelles.
Xénophon fut réprimandé dans fa retraite
par un autre plus ancien capitaine nommé Chiri-
fophe, de ce que, dans les efcarmouches qu’Ar-
taxerxe faifoit faire par des frondeurs & quelque
cavalerie légère, il s’étoit engagé avec des troupes
armées de cuirafles à pourfuivre les ennemis, qui
venaient continuellement à la charge, & qui
fuyaient -immédiatement après. Xénophon reconnut
fa faute -; il forma des partis de cavalerie légère
& de Rhodiens armés de frondes, qui foutinrent
avec avantage les efcarmouches, & n’engagea plus
dans cette efpèce de combat les troupes pefamment
armées.
Si vous êtes fupérieur en artillerie, & que ceux
qui fervent vos batteries ayent plus d’adreffe que
ceux qui fervent celles des ennemis ; vous devez
prolonger le combat , & ne vous avancer pour les
aborder, qu’après avoir fait avec votre artillerie
un grand ravage dans leur armée , & avoir effrayé
plufieurs de leurs troupes par l’effet & le bruit de
votre cation : mais, fi vous êtes inférieur, fi vos
batteries font plus mal placées, fi vous n’avez
pas d’aufïi habiles officiers d’artillerie ni d’auili
bons canonniers que les ennemis, venez en d’abord
aux mains, afin que leurs batteries faffent moin?
de ravage dans votre armée.
Dans la bataille entre Machanidas & Philo-
pcemen., celui-là prétendok ruiner de loin l’armée
de fon ennemi par les armes qu’il lançoit avec
des machines : mais Philopoemen 'les rendit inutiles
en abordant d’abord les troupes de Machanidas, ôç
remporta la victoire. Faites durer le combat' de
loin , lorfque dans l’armée enpemie il y a moins
de fufils, de frondes, ou de -flèches que dans la
vôtre.
Les Romains défirent fur le mont Olimpe une
armée grecque parce qu’ayant un plus grand
nombre d’armes de jet, ils tuèrent plufieurs des
Grecs , avant de les aborder.
A la bataille de Marathon , que les Athéniens
fous les ordres de Miltiade , gagnèrent contre l'armée
de Darius Hiftafpe , commandée par Arta-
pherne & Datis , les Athéniens, qui ri’avoient pas
de flèches comme les Perfes , coururent précipitamment
pour les aborder , & commencer le
combat ayec les armes de main.
11 peut arriver que vos armes à feu ayent été
mouillées, & que celles des ennemis ne Payent
pas êîé$. foitpar.ee qu’ils les ont tenues à couvert
fpu.s
fous les pavillons, tandis que votre, armée, dans
une marche, aura effuyé une pluie allez conlide-
rable ; foit parce que, les. deux armees étant en
marche, un nuage fe fera déchargé fur la votre
fàns arriver à celle des ennemis. Dans ce cas ,
tâchez d’en venir d’abord aux armes de main,
parce qu’avec celles de jet vous perdriez plus uo
monde qu’eux. Comme il eft poflible auffi que
le, contraire vous arrive , & que les armes de^ vos
ennemis foient mouillées , fans que les vôtres,,
le foient ; prévenez les efpions &. les^ perlonnes
affidées que vous avez dans leur armée de vous
en donner avis promptement. < _
Si vos fufils portent plus loin , foit par rapport
à leur fabrique, foit par rapport a la meilleure
qualité de la poudre ; fervez vous en, des que
vous ferez à la portée de but en blanc, afin que
VOS foldats bleffent fans être blefles , tant que les
ennemis ne s’approcheront pas de plus près, Si au
contraire vos fufils portent moins loin que les
leurs, approchez-vous jufqu’à leur portée , quand
même votre deffein feroit de prolonger la bataille.
En fuppofant de part & d’autre une égalité
d’armes à feu , il fe peut qu’il vous foit avantageux
d’entretenir,,ou de terminer promptement 1 action ;
foit parce que vôtre nation eft plus accoutumée
à corabatrc contre tels ou tels ennemis ; foit parce
quelle craint moins le fufil ou l’arme de main ,
&. qu’elle eft plus exercée à manier l’une ou l’autre
de çes deux armes.
Les nouvelles troupes ne font pas auffi bonnes
que les Vieilles pour foutenir un long feu , parce
quelles ont plus de temps pour conjiderer le
danger , &. que le fpe&acle des morts & des blefles
les effraye. Si votre armée n’eft pas auffi aguerrie
que. celle des ennemis, ne différez pas den venir
à l’arme de main. ..
11 eft encore affez ordinaire que de nouvelles
troupes mal disciplinées confondent les évolutions,
qu’elles fe démüniffent mal-à-propos de
tout leur feu , &. que la crainte rende leurs coups
moins juftes : c’eft une autre raifon de prolonger
la bataille , lorfque vous avez, des troupes mieux
aguerries. I , r
Vous devez auffi entretenir le combat, lorlque
vous fçavëz que les cartouches des ennemis ne
contiennent que huit ou dix charges ; lorfque , par
les avis de vos efpions, vous etes certain quon
ne leur a pas diftribué d’autres munitions. Si vos
troupes ont de grandes cartouches , vous vous
trouverez fupérieur en feu. . .
Dans le combat des Selinuntins , contre lai-
mée d’Annibal , une des principale? caufes qui
donnèrent la viâoire aux Carthaginois fut que
leurs ennemis.manquèrent de traits.
Vo.us me direz peut-être que les ennemis pourront
faire diftribuer de nouvelles munitions durant
toute cette diftribution donnera bien de 1 embarras.
le .combat; mais alors une grande partie de ces
munitions fe répandra ^ une autre partie prendra
feu aux coups des fuffts yoifins qui fe tirent, ÔC
D’ailleurs , fi vous fçavez que leurs munitions
font confumées , & qu’ils font occupes
à en diftribuer de nouvelles , abordez-les, &vous
trouverez que la plupart de leurs armes font déchargées.
H HH ,
Si vos ennemis font du nombre de ceux qui
font d’abord touts leurs efforts , & mettent tout
leur courage à attaquer avec furie, tachez dentretenir
la bataille,; il vous fera plus aile de les
mettre en déroute, lorfque leur fureur fera ral-
lentie. c
Fabius fçaehant, que les Gaulois ot les bamnites
faifoient leurs plus grands efforts au commencement
d’une bataille , mais qu’ils ji’avoient pas enfuite
autant de fermeté que les Romains , donna ordre
à fes troupes d’attendre & .de foutenir le choc.
Il chargea enfuite à fon tour , lorfque la première
ardeur des ennemis fût paffée , il les défit. Ce
fut auffi à cette conduite que Philippe dut la victoire
qu’il remporta fur les Athéniens a Cheronee*
Si votre armée eft inférieure en cavalerie 8c
fupérieure en infanterie, faites durer le combat
autant que vous le pourrez , afin d affoiblir les
ennemis- par votre feu. Tâchez au contraire de^ le
terminer au plutôt, fi vous etes inferieur en infanterie
& fupérièur en cavalerie. Quoique votre
cavalerie & vos dragons montés ayent des mouf-
quetons & des fufils, ces armes tirées de deffus
des chevaux font prefque auffi inutiles quelles
font dangereufes par le défordre qu elles caufent.
Lorfque vous êtes inférieur en infanterie &.en
cavalerie , faites tous vos efforts pour termine?
promptement le combat ; s’il dure trop longtemps ,
les ennemis fubftitueront continuellement des
troupes fraîches à celles qui font fatiguées , ÔC
vous ferez forcé de fuççomber de laffitude >
& par le nombre des morts & des blefles. ,La
même raifon doit vous engager à prolonger le
combat, lorfque votre armée eft plus npmbreulg
que celle des ennemis»
A la bataille de Rigoméfie , que quelques autres
appellent la bataille de Confone , Jean Huniade
fut défait par Amura* II , parce qu’Amurat ,
fupérieur en nombre , en?refint longtemps le
combat ; à force de faire avancer des troupes
toujours fraîches, il Suffit à lafler la petite armee
de Jean Huniade , qui ne put plus fupporter la
trop longue fatigue. r ■ rr n-
Cortès, à la bataille d’Otumba , fe vit affaillt
par un nombre infini de Mexicains, qui lui op-
pofoient fuçceffivement des troupes fraîches.
Voyant que le petit nombre de fes foldats ne
pourrait pas réfifter à cette fatigue continuelle ,
fl prit la généreufe réfolution de taife un grand OC
dernier effort pour enlever le.grand etendart du
Mexique : il y réuffit, & la prife de cet etendart
donna la viftoire aux Efpagnols.
Si vos troupes font formées fur plus d hotntJies.de
hauteur que selles des ennemis; foit parce quun