
pas les faire redevenir citoyens pendant tout té
temps ?
2. Tout militaire & toute perfonne qui aura
lu les articles bas - officiers , brigadier , caporal ,
compagnie, & c . conviendront qu’il eft bon dè ne
donner des congés de fémeftre qu’au fixième des
bas-officiers, ils font l’ame de la difcipline & de
l’inftruéKon.
3 & 4. Quelques adminiftrateurs ont prétendu
que la compofition a&uelle des troupes Fran-
çoifes, affuroit la tranquillité publique : que chaqùe
régiment renferment dans fon fein une foule* d’hommes
qui,, s’ils n’a voient pas pris'le parti des armes ,
auroient fini par effrayer les méchants par les fup-
plices qu’ils auroient fubis, qu’il feroit très dangereux
de fermer cette efpèce d’égoût, & de
remettre au milieu de la lociété , pendant neuf
mois confécutifs, des hommes affez malheureu-
fement nés, ou plutôt affez mal élevés pour avoir
befoin qu’une furveillance perpétuelle les éloigne
des vices & des crimes. G’eft parce que nous
avons reconnu la vérité dé ces réflexions que nous
avons adopté les .principes que nous avons pofés
dans les numéros 3 & 4. En prenant les précautions
que nous, avons indiquées-, on ne remettra
dans la fociété que des hommes à qui leur fortune,
leur induftrie & leur a&ivité auront affuré leur
fubfiftance'; Si. on retiendra, dans"l’impoffibilité
de mal faire , touts ceux que la pareffe, le befoin,
ou des pallions fougueules folliciteroient au mal.
Dans les premières années qui fuivroient l’éta-
bliffement du réglëment que nous venons de
propofër, on ne trouveroït peut-être pas à remplir
touts^les congés que nous avons demandés; mais
bientôt loin d’être trop nombreux , ils le feroient
trop peu.
Les chefs des corps devroient veiller avec la
plus grande exaélitude à ce que les capitaines
n’admiffent jamais de certificats faux , & à ce
qu’ils fiffent punir avec une extrême févérité , les
foldats qui les produiroient.
5. Permettre aux foldats qui obtiennent un
congé limité, d’emporter touts les effets qui leur
appartiennent , c’eft en quelque forte leur donner
la permiffion de les vendre; mais certainement
c’eft les mettre dans le cas de confumer leur paye
de fémeftre en effets de remplacement, & de ne
tirer , par conféquent , aucun avantage de leur
abfence. Il fuffit qu’un foldat qui obtient un congé
de fémeftre, emporte une bonne paire de fouliers,
deux chemifes, une paire de bas, & une paire
de guêtres de route; tout le refte plié dans fon
fac de toile, doit être dépofé entre les mains du
" fourrier de fa compagnie; à fon retour,- il trouve
touts ces effets, & fa paye de fémeftre lui procure
l’argent néceffaire au remplacement des effets
qu’il a ufés. Une longue expérience eft le garant
de la bonté de ce que nous propofons.
6. L’article des ordonnances militaires qui oblige
le chirurgien-major de chaque régiment à vifiter
les foldats qui fe propofent d’aller en fémeftre y
& à s’affurer qu’ils ne peuvent porter dans l’intérieur
du'royaume, ni répandre dans les villages
la contagion la plus funefte au bonheur de l’homme
& à la profpérité des états, eft un des plus fages
que nous çonnoiffions. Si les chefs des corps te-
noienf la main à ce qu’il fût obfervé avec tout
le foin qu’il; mérite, combien de maux ne pré-
viendroient-ils pas;
Le foldat qui obtient un congé de fémeftre, fans
avoir l’argent dont il a befoin pour aller chez lu i,
eft obligé ou de faire des journées qui l'excèdent 9
ou de prendre de l’argent chez'les commiffaires,
ou d’aller d’hôpital en hôpital, ou de folliciter la
pitié publique, ou enfin de forcer les voyageurs
à lui fournir ce dont il manque : tous ces maux
ne font pas àuffi graves les uns que les autres ;
les moins dangereux le font cependant affez pour
mériter toute notre attention. On ne devroit peut-
être pas fe contenter d’obliger les foldats a montrer
l’argent qui leur eft néceffaire pour faire leur route.
On devroit s’informer encore d’où ils l’auroient
tiré , & s’en rendre le dépofitaire. Ainfi on trom-
peroit Tefpérance des perfonnes qui le leur aù-
roient* prêté, feulement pour en faire montre. Les
précautions propôfées dans le feptiëme numéro 9
rempliront cet objet.
7. En délivrant leur cartouche dans leur gar-
nifon, aux foldats qui vont en fémeftre , &. en
leur permettant de partir à leur volonté, ou s’ex-
pofe à les voir ne fortir de la place qu’au moment
où on va en fermer les portes ; dépenfer dans
un feul jour une grande partie de l’argent qui de-
voit les conduire chez eux, & donner dans quel-
• ques-uns des travers ou des vices dont nous avons
parlé dans le numéro 6. En les faifant partir de
grand matin, conduire à une liéue de la place,
& en ne leur rendant que dans ce heu l’argent
néceffaire à leur route, on prévient touts ces abus.
8 & 9. Pour qu’il n’y ait point d’engorgement
dans les auberges , il faut faire partir les foldats
par petits pelotons, on prévient ainfi les -maraudes
, les attroupements & les querelles ;* c’eft
pour éviter encore plus sûrement touts cès dé-
fo.rdres, que les maréchauffées doivent etre infiniment
plus actives dans cette circonftance. que
dans toute autre.
10 & ï i . Les précautions dont nous avons
parlé dans les numéros 10 & 1 1 , font trop visiblement
néceffaires pour que nous ayons befoin
de les motiver. .
12 & 13. Ce que nous avons demandé dans
les numéros 12 & 13 , pourroit etre fufceptiblé
de quelques objeéfions. On dira, par exemple ,
que les revues auxquelles nous affujettiffons les
foldats, leur feroient coûteufes ; cela eft vrai, mais
on doit fe fouvenir qu’ils touchent près de trois
fols pour chaque jour, pendant neuf mois, Sc
qu’on ne leur demande qu’un ou deux jours de
içrvice dans chaque mois; fi l’on difpit que ces.
jlours de revues deviendront des jours bruyants
& tumultueux, nous répondrions : cela n’arrivera
pas, fi l’on diyife les fémeftriers de chaque difi-
triéf en quatre parties , fi on en fait venir une
chaque dimanche, & fi on les oblige de repartir
auffitôt après que la revue fera pafléerLe lendemain
de chaque revue , l’officier de la maréchauffée
devroit envoyer un ou deux de fes cavaliers,
îçavoir quelles font les raifons*1 _qui ont empêché
tel ou/tel foldat de venir la paffer; le foldat qui
ne pourroit pas en alléguer de valables , feroit
puni par huit jours de prifon. Ces revues doii-
neroient de la peine âux officiers de la maréchauffée
; mais elles augmenteroient leur confi-
dération ; elles accroîtroient auffi les fatigues des
cavaliers, mais la sûreté générale y gagneroit. On
n’eft peut-être pas -affez convaincu de l’effet heureux
que produifent dans les campagnes les apparitions
fréquentes des cavaliers de la maréchauffée.
( Voyez Ma r échaussée. ) .
En obligeant les foldats fémeftriers à prendre
l’attache des officiers de la maréchauffée, pour
pouvoir aller avec sûreté à fix lieues de l’endroit
où ils ont fixé leur réfidence, on préviendroit beaucoup
d’abus, & o n fçauroit toujours ce que font
devenus les différents foldats de chaque régiment.
14 Si. 15. Il n’y a peut-être pas dans tout le
royaume vingt officiers retirés , qui ne viffent
avec quelque efpèce de plaifir qu’ils ont confervé
une autorité aéfive. On n’a pas impunément con_
tra&é' pendant trente ans l’habitude de commander.
D ’ailleurs,tel foldat qui met à contribution,
ou fait trembler tout un pays, vivroit en citoyen
paifible, s’il fçavoit que fon feigneur, ou un chevalier
de Saint-Louis du voifinage, peut d’un mot
l’envoyer en prifon, ou l’obliger à rejoindre fon
corps. Qu’on ne dife pas que ces précautions font
fuperflüeSj les miniftres font importunés plufieurs
fois- chaque année , par des perfonnes qui leur
demandent des ordres pour faire rejoindre des
fémeftriers. Les foldats fe plaindront, dira-t-ôn
encore, d’être ainfi continuellement furveillés-;
eft-ce qu’ils ne le feroient pas davantage à leurs
corps? On n’eft pas efclave quand on n’a perdu
que l’impoffibilité de faire le mal.
16 & 17. Qu’on adopte touts les articles du
règlement que nous propofons, ou qu’on lâiffe
fubfifter ceux qui exiftent, il n’en eft pas moins
eftentiel de trouver un remède aux prolongations
de congé, & de mettre le foldat dans le cas de
n’avoir point envie d’en demander. Pour y parvenir,
ne pourrait-on pas exiger le remplacement
de toute la durée des prolongations. On doit bien
fe garder dé montrer ce remplacement de fervice ,
comme ’une punition, il* eft un aéle de juftice
ordinaire, « Vous vous êtes engagé à me fervir pendant
huit ou dix ans, vos affaires vous ont empêché
de me rendre pendant une année-le'fervice quevous me
deviez , il efl jufle que vous me dédommagiez ». Le
remplacement montré lous cet afpeft feroit à l’abri
des reproches que nous ne cefferons de faire à une
prolongation de fervice regardée comme punition.
18. Nous avons prouvé déjà qu’il eft très dangereux
de faire regarder le'ferviçe militaire comme
une peine,«qu’on court le rifque en le montrant
fous cet afpeéf de décourager, d’avilir le foldat,
pu de n’infliger qu’une punition peu fenfible ; nous
paiderons donc tout de fuite au numéro 19.
19. Dans un des régiments de l ’armée françoife,
il manquoit le 15 de mai 1784, cent foldats fémeftriers
; le 13 de juin ce nombre avoit un peu
diminué; au mois d’août, époque où*ils dévoient
être contumacés, il y en avoit au moins vingt qui
n’avoient pas rejoint. Comme touts les régiments
de l’armée françoife font compofés de la même
manière, comme ils font fournis à la même difcipline,
il y a apparence qu’ils étoient touts dans
le même cas. Calculez fur cent régiments, & vous
trouverez que l’armée eft tout d’un coup diminuée
de deux mille hommes. Si toutes les années ref-
femblent à celle-ci, l’état perd par les congés expirés
un corps d’armée touts les vingt ans. Obligez
les cavaliers de la maréchauffée à aller vers le
premier d’avril vifiter touts les villages où ils fça-
vent qu’il y a des foldats fémeftriers; forcez-les
d’y retourner vers le 7 ou le 8 du même mois;
qu’ils ayent ordre d’arrêter, de conduire en prifon
les foldats qui.ne feront pas partis ; puniffez févère-
ment l’officier de la maréchauffée qui fera convaincu
d’avoir fa it, avec négligence, ce fervice
très important,'& vous verrez le nombre des
congés expirés diminuer fenfiblement.
20. Les certificats que nous avons demandés
dans le numéro 20, peuvent fe paffer d’apologie.
21. Nous avons donné la moitié de leur paye
aux foldats fémeftriers , pour qu’ils ayent de quoi
aller dans leur province, &,rejoindre leur corps
fans être à charge à> leurs familles.
Nous avons réparti entré les foldats qui paffent
Tannée entière fous les drapeaux, le quart de la
paye des foldats fémeftriers, afin de les dédommager
de la peine qu’ils prennent en faifant le
fervice militaire pour leurs camarades, & afin de
leur tènir lieu d’une augmentation de décompte
qu’il feroit peut-être ..néceffaire de donner aux
troupes. { Voyez D é c om p t e . ).
■ : 'Nous avons enfin réparti le dernier quart de la
paye des fémeftriers fur la totalité des Foldats, afin
de leur procurer la quantité de pain dont ils manquent
pendant les mois deftinés à l’inftruélion.
Les- perfonnes qui ne voyent pas journellement
,des foldats , feront peut-être étonnées de ce que
nous venons d’avancer, peut-être même auront-
elles peine à croire que notre affertion foit véritable.
Pour fe convaincre qu’elles.'entrent dans
-nos quartiers même pendant l’h iver, qu’elles in-
{.terragent tous les jeunes gens : touts lès hommes
: faits qui-ont reçu un eftomac très aélif; touts ceux
j qui ont monté la garde entre- deux diftribufions ;