
3.4 A C T
dans les, prairies » entre les deux camps,, firent
chargés par les NàvarrôiS. Quelques troupes
françôifes'iës feèôururent ayea avantage. Ûn ef-
péroif que'les' 'ennemis fôutiendroient les' leurs ,.
& que Ja' bataillé pourroit s’engager ; mais ' le .
captai rie js’éïiranlâ ! pas ; il fe"confioit dans l’ayan-'
tige de ïa .pofitibn. Ce général s’étoit laifle trom*-'
uer par les difpofitions de du Guefclin, qui fail
l i t ' pâfoïtrè Fermée frânÇôïfe d’un tiers plus
for,te qu’elle ne l’étoit, & voulo.it,attendre un
reiifort d£ "quatre cents lances, que lui amènent
t o u S ::d'ë' m v a r te 'j père, de Charles, Sçachant
que ïeà François0 nïanquoiéht de vivres , il fe
fiattoit que la difette les éloigner o i t , ou qu’emporté)
» par leur courage , ils viendroient s’expofer
à une défaite prefique. certaine.
Tandis que les deux àrm)ées.s’obfervoient.ainfi,
ùn chevalier anglois vint défier le. plus vaillant
des cHëvalièrs dë Tarmée françdifé : toùts fe pré-)
fëntèrent. Bertrandf honora de là préférence Roland
du Boisj'geritilhomme breton,renommé poÙ£
fit forcé, & pour Ion 'adrèfle. Il juftifia pleinement j
. le choix d,ë fon ‘ général ; T anglais fût percé d’un I
coup de lancé à la vue des r deux armées , qui" I
étoient -fo.ùs les' armes. Roland, tenant le cheval
du vaincu', revenoit au camp, lorfqüefix chevaliers
ànglprs accoururent pour enlever le cheval :
& le mort. Six bretons marchent contre. eux, en
tuent dèuxV font déux prifonnièrs, '& les; deux
autres, s’enfuient. ‘
Ce petit combat en faifoit efpérer un plus g r a n d |
& ;du Güèfclin s’y prépàrôit : mais, le ’ 'captai né ;
fit aucun mouvement. Du Guefclin lë voyant ine-J j
branlable, aïïemble fes principaux «officiers, leur
fait part dë fes deïïeins , Ô£ fe difpofe à la retraite.
Aufli-tôt lés bagages pafleht le pbnt, lès troupes
gafconnes les fùiyirëntjie fécond corps, commandé;
par le comte d’Auxerre , défila ènfuitël ’ A ,'cetté
vue les chefs des Anglôis s’affemblent. Jean Jouel
foutient que lés François fuient, que la viéloire
échappe au captai, Celûi-ci répondit ; quilndvoit
mie entendu dire 'que du Guefclin eujtjamais daigné
décamper j que c étoït une rufe. Jouel, irrité de
ce flegme , court à les troupes irritées auffi par là
défaite des fept Anglois j il s’écrie que l’ennemi fuit ,
que le captai fait une fauté énorme dë ne pas' lé ’
pourfuivre, étant fous les armes & le plus fort.
Il met l’épée à la main, commande quel’on marche,
ôc pouffe fon cheval , en criant, faint Georgesi. '
Dès que du Guefclin vit l’armée ennemie descendre
de la colline., il repaffe promptement lé
pont, fe forme dans la plaine, ôi fon armee\ eft
aûffi-tôt en bataïUe que . celle des ennemis. 7* ’ '
"Le captai, voyantfaçon] eéhire changée en certitude,
envoya un héraut dire à du Guefclin que,
fi les vivres mànquoient aux François, il leur en
fournir o it, & lefir laifleroit la retraité libre. Le
héraut ajouta , foit de) lui-même, ou qu’il en, eût )
réç'ù‘ Tordre, « que ce feroit ün^gfand dommage.)
de répandre de part'Jfc. lé,.'fdng'.'qq)’tafitvJ
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de braves hommes. « Gentil héraut, répond du
Guefclin ' vous fçav.ez très bien piefçher auffi
p.our votre difcoiirs je. vous donne .'un courfier de
cent florins : mais dites. au. captai ;que, je ; veux
combattre, &L que s’il ne vient pas à moi, je
marcherai, à lui : avant la fin du jour je mangerai
un quartier du captai ». Il vouïoit dire, qu’il
aurbit un quàrt. des biens du captai pour fa
rançon, j ÔC jamais fire Bertrand ne manquoit à fa
parole.
Lffiftoire ne. npus apprend point Tordopnance
■ des troupes. Je foupçonne qu’elles étoient fur trois
] corps fuiyànt l’ulage de du Quefclin, Ôc qu’il com-
I îhandoit. l’arrière - garde ; le comte d’Auxerre le
corps de bataille ou du centre ; Boueftel l’avant-
garde , formée par les troupes gafconnes : les
| Nayafxpis obferyè,rent le même ordre.
Les archets cornmençèrent le combat. Enfuite les
gep<krm.es fe chargèrent avec furie. Du Guefclin,
prefeht par-tout, animoit fes troupes. Sa préfence
lés fputèiioit ; fa voix donn.oit du courage aux
plus timjdes. « Pour D ieu , amis, crioit-il, fou-
venez-vous que nous avons, un. nouveau roi , que
fa couronne foit étrennée par vous ». Alors touts
. les généraux combattaient comme les foldats. Du
Guefclin, dont la bravoure, égaïoit le génie militaire
, fe jétta daps la mêlée. Un chevalier ennemi,
ripmçné" le .Bdfqué de Màreil., lui cria, J moi,
Bertrand, à rnoi. Bertrand fe retournant fondit
ffir lu i, & le renverfa d’un feul. coup. Il alloit
: lui couper la tê te , lorfque plufreurs chevaliers
anglois, le réuniffant, le lui,enlevèrent. Le Bafque,
■ revenu lui , reptra dans la mêlée , ÔC périt
d’un coup dp. hache que' lui porta le ; comte
d’Auxerre, L’impétueux Jean Jouel fut renyerfé.,
; & làiffé laps. conh.oiffance., Le Bafque avant de
j pérvir àyofi tué Baudouin d’^annequin,, njaître
des arbàléfriers. Trois neveux de Jean Chandos
, avoient perdu la vie. La perte de part & d’autre
étoït'préfque égale : la viéloire reftoit indécife. Du
Gùefçliu? qui joignoit au courage bouillant d’un ,
! foldat, lé fàng-froid d’iid grand général, ordonne,
au brefpn* la H.ouffaie de prendre deux cents
lances,-de tourner un. petit b9isuqui copvroit la
droitp des ennemis, & de.yepiir les. charger par
i dërngre. ' . ': ■ ) ,•
Cependant Bqueffel &fes. Gafcons avoient défait
le corps des Navaryois qui leur, étoitoppqfé, Dès
que du Guefclin .vit la H.ouffaie charger les ennemis,
en. queue aye,c .avantage , il '.ordonna aux Gafcpns
dé lçs prendre, en flahc. A j cette, charge , toute
'j Tàriuëe navarréife fut en défordre. Trente;., che-
valie/s..g|fcoijs s’étoient promis, d’enlqyer le çaptah
Ils pénétrèrent jufqu’à lui ayeç ’Thibault du Pont,
cbeyalier. breton, fi vigoureux, qu’il fe feryoit
d’une épée de ÏLx pieds, de long, pefant dpuz,e
: livres,. IL faifit le ; captai par fon cafque , & , Ten-
|tfàînbit en lui criant, de.fe rendre, ou.quhl étoit
moçfi Du Guefclin .paruç - ,ce fut. à . luj, feuf que.
|lé‘ c^ptal.yQn)nt. le rendre, .
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Feindre une diminution de forcés. r
L ’apparence vraifemblàble d’une diminution de
5 forcés peut engager une alïion. Sous le prétexte
; faux ou vrai d’un foulèvement dans une province
éloignée , d’une, invafion des ennemis -, d’-un fourrage
confidérable que vous voiis propofez loin ,
| de votre camp , d’un fecours à envoyer dans une
place àlfiégée, d’un renfort à une autre armée
de votre prince *ou de vos alliés , d’un licenciement
de troupes auxiliaires, publiez que vous
détachez une partie de vos forces. Attendez que ;
.le bruit en parvienne à vos ennemis. Quand vous
les fçaurez ou croirez inffruits, faites partir fans
f,affectation votre détachement avec armes & bagages
, mais cependant à leur vue s’i l efl: poflible.
|.J*officier qui lè commande aura un ordre fecret
de rentrer dans votre camp de nuit, en grand
filence, de camper en un lieu couvert par quelque
bois ou colline élevée, de refferrer beaucoup fon
camp , de n’en laiffer fortir aucun foldat, d’y laiffer ‘
^arriver les habitants dii pays, & de les y retenir , ;
<?u bien de s’arrêter avec les mêmes précautions,
en quelque endroit favorable à vos vues, & affez
proche , pour que ce corps vous joigne à temps, j
.^ôur dérober plus long-temps à l’ennemi la ^entrée
du détachement, il faut augmenter fur votre front le
nombre des gardes, afin d’empêcher, s’il fe peut,
: ||ës deferteurs & les efpions de donner connoif-
. pànce de vos deflèins. Vous pouvez répanàre en
meme temps qu’il vous arrive quelques troupes,
Toibles, délabrées par une longue marche & dès
maladies, incapables du moindre ferv ice, foit
pour les gardes, foit pour le combat. Vous feindrez
de lès avoir arrêtées à quelque diftance, en lieu
plus propre à les rétablir, & même d’avoir deffein
de les renvoyer dans les places voifines pour garder
vos hôpitaux & vos magafins. Si elles rentrent
dans votre camp; vous pouvez, pour quelques
fluits, en faire coucher la plupart dans les tentes
de vos régiments reftés en ligne , ( comme lé
firent devant Afdrubal les confuls Livius &. Néron,)
6 fur-tout les foldats les plus beaux & les mieux
vêtus. Vous affemblerez, comme pour uné revue
ceux qui feront de plus chétive apparence, afin
^U-/r e,rpi° ns f n rendent compte. Qu’il ne parodie
d ailleurs ni plus d’armes ni plus de drapeaux,
■ giï on ne voie pas plus de feux , qu’on n’entende
pas plus de tambours & de trompettes, jufqu’à
||Ce que l’ennemi prenne la rélblution de vous
attaquer. Pour le mieux tromper, vous pourrez
■ Krf marcher au loin fur la route que devront
tenir votre détachement, quelques colonnes de
l & f e H df P^ÇeVvoifines’ & «Pi
& vont «îu.elles "ennent de l’armée,
foire' accroire.-deftmatl0n qU® V°US aurez voulu
* l mêa e te? ps fetnbl“ t,de craindre :
“ vos P°f e s i fortes travailler lentement,
». - A c T . , u oc en plufieur's endroits, à dés retranchement^;
. feignëz de vouloir changer de pofition ; répandez
même le bruit de votre retraitemettez-vous en
marche, foit pour ébranler Te'nnetni , foit pour
prendre en effet un carftp jplùs avantageux pour
vós fourrages ou vos fubfiftances ; marchez de
nuit en fai tant femblant de voulôir dérober votre
marche. Si Vous ne pouvez-décamper que de jour;
refferrez vds troupes, ch'ôilîffez un terrein couvërt
! de bois qui puiffe 'cacher une de vos colonnes :
refferrez Auffi votre noüveàu camp. S’il y a des
défilés fur votre marche , plàcez-y quelques troupes
& des officiers dë confiance', pour émpêchér qui
que ƒ ce foit d’en approcher ; afin que lés efpions
de 1 ennemi ne viennent pas-y compter Vos fo'rces.
Ces démonfiratiôns de fôibleffe & de crainte ont
réuffi quelquefois. ‘
Charles V , duc de Lorraine , voulant ’attirer
1 armée turque hors de fes retranchements, fit
plufieurs gros détachements, les uns vers Si clos
& Sigeth, d’autres au delà du Danube, avec
ordre de ne pas s’éloigner de plus d’une lieue.
Les Turcs , peu précàütiônriés à leur ô'rdinaïre,
furent trompés par cette apparence. Us attaquèrent
le duc qu’ils croyoient âffoibli par ces détachements
; mais ceux-ci ayant rejoint- avant Ïdâtïort,
les Turcs furent défaits auprès de Mohats.
Si vous ne voulez, engager qu’un combat de
cavalerie, faites fortir un détachement inférieur
à celui de l’ennemi, comme pour fourrager ou
ëmmener quelques- troupeaux. Afin d’en mieux
impofer, il mènera quelques valets, ou du bétail
qu’il fera marcher devant lu i, comme s’il l’avoit
enlevé, & qu’il peut trouver à un rendez-vous
convenu où vous l’aurez fait conduire. Chaque
cheval portera en croupe un foldat habille dë
même couleur que le cavalier, & dont le fufil
fera pofé le long du moufqüëton, dé crainte que
fi 'les deux armes étoient féparéës, leur éclat ne
fît connoître qu’il y a deux hommes fur chaque
cheval. Quelques partis deftinés à s’avancer vers
l’ennemi ne porteront point de foldats en croiipe;
Si votre détachement. paffè à portée d’être vu
par un pofte affez proche pour qu’on y puifte
diftinguer deux hommes fur un cheval, il faut
que le rang le plus voifin de ce pofte foit fimple,
ou choifir alors un terrein d’ou il fe puiffe élever
beaucoup de pouffière, & l’augmenter en faifant
galopper cette cavalerie, ou faire faire dés courfes
au galop par quelques cavaliers répandus fur le côté
voifin de l’ennemi : il eft vraifemblable que fe
croyant fupérieur en nombre , il viëndra vous
attaquer, & que"votre cavalerie, foutenue par
l’infanterie bien poftée, défera la fienne. Cependant
vous devez craindre qu’ayant découvert le
ftratagêmè , il n’apporte auffi de l’infanterie en
croupe, ÔC qu’étant alors füpériêür dans lés deux
efpèces de troup'es, vous né tombiez dans votre
propre piège. Pour l’éviter, muniffez - vous de
lunettes d’approche , & fi. vous découvrez quil