
touts ceux enfin qui fortent depuis pçu de Pho- I
pital; touts diront : le pain que le roi donne ne
nous fuffit pas. Elles verront le troifième jour de la
diftribution, vers les dix heures du matin, toutes
les planches vuides, ou fi elles apperçoivent par-ci
par-là quelque petit chanteau, il appartiendra à
quelque vieux foldats, que l’eau-de-vie ou le vin
foutiennej*t ; pendant les longues journées de Pété,
& pendant l’automne, quand on fait l’exercice
prefque chaque jour, le paineft encore plus rare;
la fin du troifième jour voit la fin de la quatrième
ration. Que faire pendant la quatrième journée?
il faut fe contenter de la foupe, des légumes &
de la viande de l’ordinaire; le premier jour d’une
nouvelle diftribution arrive enfin , le pain eft tendre
, le foldat a grand faim, il mange avidement
une pâte affez mal faine, quand elle n’eft pas un
peu raffife ; & fouvent l’indigeftion qu’il gagne,
le conduit ou le ramène à Phopital. Si la bonté
de fon eftomac le met à l’abri d’une indigeftion ,
le pain ne va plus bientôt jufqu’à la fin du troifième
jour. Pour fe procurer celui dont il auroit
befoin, il. cherche à travailler j s’il ne trouve point
de travail ; fi fon fourrier n’a point d’argent à lui;
li fon capitaine n’eft point allez riche pour lui
fournir quelque fecours; fi. fes camarades ne lui
prêtent ni pain, ni argent, il trouve un inftant
favorable, il fouille dans fon fac , il prend une
chemife , il la préfente à un juif, & la donne ;
\ c’eft bien ici le cas) pour un morceau de pain., ■
heureux quand il n’a pas fouillé dans le fac de
fon camarade, ou qu’il n’â pas volé le citoyen chez
lequel il étoit entré par hafard. Je n’héfite pas à
le dire, la plus grande partie des vols qui fe commettent
dans les quartiers, ont le manque de pain
•pour caufe première. Mais fuppofons que-la voix
de l’honneur arrête le foldat ; qu’il aime mieux
• fupporter la faim, que bleffer les lolx de la probité
; je je vois maigre & fans couleur ; Cou eftomac
fe débilite ; fa fanté s’affaiblit ; il finit, s’il eft jeune ,
par tomber dans une efpèce de marafme qui le
conduit au tombeau ; ou fi fon tempérament eft
bien formé, ii perd cette vigueur & cette force,
qui conftituent le bon foldat. Qu’on daigne m’en
croire : ce tableau eft vrai. Aurois- je ofé- le tracer ?.
L ’aurois-je figfté, fi j’avois pu craindre d’être démenti
? f Voye^ Pa in . ).
Le fupplément de pain que produiroit le quart
de la paye des femeftriers , feroit confervé pour
les trois mois d’inftruéiion. La trop petite quantité
de pain eft une des confidérations qui nous ont
engagés à demander la multiplication des congés.
de fémeftre , elle eft bien faite , ce me femble,.
pour déterminer les âmes honnêtes & fenfibles à
dilcuter de nouveau cette, queftion importante»
Pendant la- guerre , d’autres temps , d’autres
loix , ou plutôt on n’en reçoit alors que de la né-
ceffité. C'eft elle qui force la main au miniftère,
& qui l’oblige à rappeller les fémeftriers avant
l’époque qu’on leur avoit. fixée :.le retour des fol-.
dats-fémeftriers, le 15 de janvier 178^,8 coûté
à l’armée une fomme d’argent très confidérable ,
& elle l’a' privée d’une grande quantité d’excellentes
recrues. Si l’obfervateur attentif a vu avec
chagrin les funeftes effets de ce retour inopiné, il
a été bien dédommagé en remarquant que les
foldats n’avoient jamais rejoint avec plus de plaifir,
& qu’il n’en avoit jamais moins manqué à l’appeL
§- x .
Des petits congés ou perrpijjïons accordés aux foldats»
O n donne le nom de petit congé ou de per-
miffion aux congés limités qu’on accorde aux foldats
qui ont un beloin réel d’aller chez, eux , & à qui
il ne revient point de congé de fémeftre.
Comme les ordonnances militaires ne parlent
qu’en un feul endroit des petits congés , &. qu’elles
n’en parlent que d’une manière indire&e : ce que
nous allons en dire eft donc uniquement fondé
I fur l’ufage.
: Il n’y a point d’inftant déterminé pour le départ
des petits congés 3 cependant ©n n’en accorde
^uère que pendant les mois, d’o&obre, novembre
décembre, janvier & février, temps abfolument
mort pour l’état militaire»
Les petits congés ne durent guère que cinquante
ou foixante jours ; le commiffaire des guerres
n’ayant pas ordre de reconnoitre cette efpèce de
congé , il feroit obligé de mettre au nombre des
abfens, les foldats à qui on auroit accordé un
congé plus long que le temps compris entre deux.
revuesi.
Le nombre des petits congés n’eft point fixé *
on en accorde affez ordinairement fept ou huit
par compagnie. Comme les petits congés ont peu
de durée, l’on n’en donne qu’aux foldats dont la
famille eft voifine de la garnifon du régiment. .
Le défaut de travailleurs , la cherté des vivres
obligent quelquefois à. donner un plus grand
nombre de petits congés , & à. faire partir le foldat
même pendant les mois des manoeuvres & des
exercices. En 1770, les denrées étoient fi chères
à Strasbourg , qu’on fut obligé de donner pendant
l’été deux permiflions par ordinaire.
Par une bifarrerie affez fingulière, on n’exige
point que les foldats qui demandent de petits
congés, produifent de certificat,. & qu’ils rapportent
des preuves par écfrit d'une bonne conduite.
La paye, du foldat qui obtient un petit congé
eft divifée de la manière fuivante.
Pour un mois il a de paye 9 liv. 10 fols. Il paye
à celui- de fes camarades qui- fait fon fervice 4 liv-«
ci . . . . . . . . ----- . . . . . . . . . . . . f . . . ........... 4 *
A la maffe de propreté* . . . . . * • * . * • - 1 r o fi
On.lui retient pour fon décompte* • 1
Il lui revient .............................................. 3
Sommes égales, 9.H 10.£ 5 ci.» • • • • • • 9 * i o f %
Le foldat qui obtient un petit congé, reçoit une
cartouche femblable à celle dont nous avons parlé
au paragraphe IX. La feule différence qui exifte
entre les deux cartouches eft , que la cartouche
des permiflions n’eft point vifée par le commiffaire
des guerres.
Parmi les réflexions que doivent infpirer les
petits congés , la première eft relative au filence
que les ordonnances gardent fur cet objet. Si les
petits congés font néceflaires , il faut qtfe les ordonnances
militaires en parlent en détail. Si les
permiflions font inutiles, il faut empêcher les chefs
des corps d’en donner.
Si l’on adoptoit nos idées fur les congés de fémeftre,
les petits congés deviendroient inutiles
& dans le cas où l’on feroit forcé d’en donner ,
ce devroit être toujours avec charge de remplacer
le temps de leur durée.
Dans la conftitution aétuelle , on ne peut trop
multiplier les petits congés, ils opèrent une partie
des avantages qu’on pourroit efpérer de la multiplication
& du prolongement des grands congés.
Pour différencier un peu les différentes efpèces
de cpngès limités, celle qui nous occupe pourroit
porter le nom de permiifion.
§. X I .
Des congés de fémeftre pour les officiers.
Il feroit aufli inutile qu’ennuïeux de rapporter
‘en détail les différentes variations que les congés
de fémeftre des officiérs de l’armée françoife ont
éprouvées , il fuffit de noter les principales : chacune
des années du règne de Louis XIV offre une
variation dans les ordonnances relatives aux fé-
meftres. Le règne de Louis XV en offre auffi beaucoup.
Les officiers ne fervirent d’abord que pendant
fix mois. De là l’origine du mot fémeftre. Bientôt
après les congés de fémeftre ne durèrent que quatre
mois, & il n’y eut que le tiejrs des officiers qui
en jouit en même temps. On réforma enfuite totalement
les fémeftres, on les recréa peu de temps
après. Ils. ont commencé avec feptembre & fini
avec février, avec novembre & fini avec mars,
puis avec a v r il, enfuite avec mai. Enfin, le 18
oéfobre 1777 parut l’ordonnance qui eft actuellement
en vigueur.
Donnons un réfumé dé cette ordonnance , &
joignons-y la partie des inftruétions données aux
ànfpeâeurs , qui eft relative à l’objet, qui nous-
occupe..
Les meftresrde-camp-commandants , ainfi que
les meftres-de-camp en fécond r excepté ceux
qui font officiers généraux , font tenus de refter
à leur régiment pendant les mois de juin, juillet,
août & feptembre tils peuvent s’abfènter, le. refte
de l’année.
Les lieutenants-colonels , majors , capitaines ,
qui ont des. fémeftres , peuvent s’abfenter depuis
le premier o&obre , jufqu’au 16 mai de l’année
fuivante.
Ils s’affemblent en conféquence d’après les ordres
du commandant de la. province ou de la place ,
dans le courant du mois de feptembre , pour figner
le procès-verbal chez le commiffaire chargé de la
police du régiment.
Le lieutenant-colonel & le major roulent en-'
femble pour le fémeftre , & dans chaque compagnie
le capitaine-commandant roule avec le
capitaine en fécond , le premier lieutenant avec
le lieutenant en fécond. Un des deux fous-lieutenants
s’abfente alternativement, de manière qu’il
refte- à chaque compagnie un officier de chaque
grade.
Les porte-drapeaux ont auffi des fémeftres alter^
natifs.
Le quartier-maître-tréforier ne peut s’abfentetr
que fur urt congé.
Un officier eft libre de partager, ou de cédetf
fon fémeftre ; mais cela ne fe peut, qu’autant que
celui avec lequel il a fait un arrangement eft préfent
au corps»
On inferit fur le procès-verbal les noms des
officiers qui partent, & le lieu où chacun d’eu*
fe propofe de paffer fon fémeftre.
Tous ces officiers fignent leurs noms au bas du
procès-verbal, & leurs fignatures font certifiées
par le commandant du régiment, le commiffaire
des guerres & le commandant de la place.
Lorfqu’un régiment change de garnifon ou de
quartier dans le courant des quinze derniers jours
de feptembre , les officiers peuvent tirer le fémeftre
, & partir avant le premier oâobre : fi le
corps a eu ordre de fè mettre en marche avant
les quinze premiers jours de m a i, alors les officiers
ne font tenus d’être préfents qu’à l’arrivée
du régiment à fa nouvelle deftination.
Il faut,, pour autorifer le payement des appointements
des offiçiers-fémeftriers, pendant le temps
de l’abfence, ( lequel payement doit fe faire après
! la revue de juin ) , rapporter au tréforier le procès-
I verbal de fémeftre, les certificats de non payement v
j avec un certificat de retour , du commandant de1
! la place, vifé du commiffaire des guerres chargé
de là police du régiment.
Tout officier qui ne rejoint pas à l’expiration
de fon fémeftre , eft privé de fes appointements ,
à moins qu’il n’obtienne un congé , ou une lettre
qui le difpenfe de joindre. Le miniftre lur accorde'
alors un relief , qui eft une autorifation pour le
tréforier de tenir compte à l’officier d'e fes appointements
, pendant fon abfence»
Les. officiers de fémeftre font afîùjettis à faire
chacun deux hommes de recrue.
Les obfervations que nous avons faites fur l e
moment du départ des- foldats fémeftriers font
applicables à celui dès officiers, nous renvoyons*
donc au numéro Ier du §V EX.
; Comme, les officiers font moins utilbs dans les