
ne point trop s'éloigner du liège, de ne perdre
jamais l’ennemi de vue, & d’être toujours en état
de le prévenir, de quelque côté qu’il veuille exécuter
ion deflein. Le maréchal de Saxe s’étoit pofté
fur la Lys en 1744, de manière qu’il couvroit les
lièges de Menin , d’Ypres, & autres que fit l’armée
du roi dans cette partie. Quelquefois, au lieu d une
armée d’obfervation, on a plufieurs corps détachés
qui rempliffent le même objet : le dernier liège de
Maeftricht étoit couvert de cette manière.
Quelque parti que l’on prenne pour faire fure^
ment le liège d’une place , quoique fupérieur meme
en forces à l’ennemi, on fera bien de fe retrancher
auffi parfaitement que le permettront le temps &
les lieux.
Du relie ^outre les intentions qu’il faut avoir en
pareil cas pour bien affeoir fon camp , il y a encore
quelques règles générales à obferver.
I. Lorfque votre circonvallation eft coupée par
une ou plufieurs rivières, confirmiez des ponts de
communication ; qu’ils foient hors de la portée du
canon de la place, ou couverts par des hauteurs,
& retranchés. S’il fe rencpntre des canaux, des
ruiffeaux , marais , ravins ou autres objets qui
puilfent empêcher les différents quartiers de votre
armée de fe communiquer & de fe fe courir promptement
les uns les autres au befoin, etabliffez-y des j
partages furs, & plutôt plus que moins.
II. Prenez les plus grandes précautions contre les |
inondations : alïurez-vous des digues, des ecluf|s ,
& de tout ce qui pourra vous garantir d’un pareil
danger.
I il. Etabliflez autant de parcs d’artillerie qu’il y
aura d’attaques ; profitez des endroits qui, par leur
fituation ou par les retranchements que vous y
ferez, puilfent mettre ces parcs à l’abri de toute
infulte & de tout accident : obfervez les memes
précautions pour l’emplacement du grand parc,
celui des magafins, & . celui de l’hôpital ambulant.
I Y . Choififlez pour votre quartier général un
lieu d’où vous puiflîez découvrir les tranchées & la
place d’auffi près que le canon des affiégés pourra
le permettre.
V . Si vous avez une armée d’obferyation, confier
véz-vous une communication avec.les places
d’où yous devrez tirer vos convois : fi vous n etes
pas affez en forces pour avoir deux armées, amenez
avec vous , autant qu’il fera poflible, tout ce
qui fera nécefiaire pendant la duree du fiège : & ,
en toutes circonftances, difpofez-vous de maniéré
à communiquer librement avec les places voifines
qui vous feront utiles. Voye^ les articles L igne ,
C ir c o n v a l l a t io n , C o n tr e v a l l a t io n ,
Siè g e . ( Suppl. ).
C a m p r e t r a n c h é s o u s y n e p l a c e .
Cet article fait partie de la guerre défenfive feulement.
Un camp retranché tous une place peut
avoirquelqu’objet particulier, ou plufieurs objets
à la fois. Sous une place importante, il fert principalement
à rendre l’entreprife du fiège plus
difficile, à en retarder ou en empêcher la prife.
Sous une place entourée de hauteurs, comme fous
quelque autre qui n’a qu’une fimple enceinte où de
mauvaifes fortifications , il devient nécefiaire pour
leur défenfe. Il ne l’eft pas moins ,'lorfqu’on a beaucoup
de troupes dans une place, pour les raffem-
bler, les placer commodément , & les mettre en
état d’agir contre l’ennemi, fuivant les occâfions
qui peuvent fe préfenter. Il fert à mettre en fureté
des magafins, des convois, & en général à débarraf-
fer une place dont on veut faire un entrepôt : c’eft
un appui pour une armée qui n’eft pas allez forte
pour tenir la campagne , & un point de ralliement
& de retraite pour celle qui auroit été battue. Enfin
il eft utile en certaines occâfions pour retirer les
habitants de la campagne avec leurs effets, leurs
chevaux , leurs beftiaux, leurs fourrages , & tout
ce qui pourroit fervir à l’ennemi. 11 faut que les
branches d’un tel camp foient bien appuyées & flan-*
quées par les ouvrages de la place, & que fon étendue
foit réglée fuivant fon objet, la fituation du
lieu, & le nombre de troupes qu’on eft en état d’y
tenir pour le garder & le défendre.
C A M P V O L A N T .
La force & la compofition d’un camp volant, que
nous appelions depuis quelque temps allez improprement
réferve, doivent être réglées fuivant l’objet
qu’on fe propofe, & fuivant qu’on eft plus ou
moins en état de détacher des troupes de fon'
armée.
Dans la guerre offenfive , oii forme un camp
volant pour donner de l’inquiétude a l’ennemi ck le
fatiguer, en menaçant l’une ou l’autre de fes ailes
ou fes derrières ; pour lui enlever quelques convois
ou quelque pofte eflentiel ; pour faire une
incurfion dans fon pays , y lever des contributions,
y détruire fes érabliflements, le ravager, le
ruiner, & quelquefois pour donner au beioin du
fecours à une armée avec laquelle on agit de concert.
Dans la guerre défenfive, l’objet d’un tel
camp doit être de s’oppofer aux différentes entre-
prifes dont on vient de faire mention , ainfi qu a
toutes les autres que l’ennemi voudroit tenter , ou
d’en former foi-même quelques-unes de femblables
contre lu i.-
Soit qu’on agiffe offenfivement ou défenfive-
ment, le général qui commande un camp volant
doit obferver dans le choix de fes pofitions , félon
qu’il le juge nécefiaire , ou que les circonftances le
lui permettent, les maximes générales & particulières
comprifes dans lés articles précédents. De
i plus, il eft eflentiel qu’il tienne fes troupes dans la
plus exaéte difcipline ; qu’il empêche que qui que
ce foit ne s’écarte du camp ; qu’il ait continuelle-
| ment des partis & des efpions en campagne , &.
qu’il faffe fes marches avec beaucoup de fecret 81
de précaution. En un mot, il ne fçauroit être trop
attentif ni trop vigilant , fur-tout lorfqu’il eft près
de l’ennemi, afin d’être toujours en état de profiter
des occâfions qui fe préfenteroifT, de lui faire
le plus de mal qu’il pourra, & d’éviter lui-même
toute entreprife inopinée de fa parti
Ca m p de p a i x et d ’e x e r c i c e .
On fait camper des troupes, en temps de paix ,
tant pour les; exercer & y maintenir l’ordre & la
difcipline , que pour inftruire ces troupes & ceux
qui les commandent des différentes opérations de
la guerre ; elles doivent faire le fervice auffi exactement
que fi elles étoient campées en préfence
de l’ennemi. G’eft à quoi l’officier général qui
commande en chef doit veiller. Il doq: examiner
fi les gardes font bien placées; fi les officiers font
vigilants ; s’ils font fuffifamment inflruits de ce qu’ils
ont à faire dans leurs poftes ; fi l’exercice & les
manoeuvres des troupes s’exécutent félon les ordonnances;
en un mor^ildoit mettre tout en mouvement
, veiller, &, préfider à tou t, comme s’il
avoit une armée ennemie en tête.
Il eft'certain qu’un camp de paix répété touts les
ans , où l’on pratiqueroit les différentes opérations
de la guerre , feroit le plus fûr moyen d’établir
& de conferver l’ordre. & l’uhiformÆ'té dans le fer-
vice; les foldats & les officiers s’y inftruiroient ;
nos armées deviendroient moins difficiles à former
&. à conduire , & feroient plus redoutables. Il y a
eu en France, depuis environ tin fiècle, plufieurs
de ces camps ; mais on ne fçauroit en faire trop
fouveht, ni trop en multiplier & étendre les opérations.
( Suppl, à Tencycl. ).
[ L’uniformité du fervice & l’exécution des ordonnances
concernant les exercices , quoiqu’elles
foient utiles, font le moindre objet des camps de
paix. Ils doivent être l’école des troupes pour les
grandes manoeuvres, fur-tout par conféquent
celle des officiers généraux. C ’eft dans les garni-
fons qu’il faut s’attacher aux exercices particuliers.
Les camps de paix devroient être confacrés "aux
grandes manoeuvres. Marche des armées à un
champ de.bataille, développement des colonnes,
formation en lignes ; voilà les premières inftruc-
tions que l’on y doit prendre : elles~font communes
aux foldats & aux officiers.
Un autre objet encore plus grand ne concerne
que les officiers généraux. C ’eft l’art de prendre les
camps, de marcher , de faire des difpofitions pour
l’attaque & pour la défenfe. 11 faut y divifer les
troupes en deux armées, chacune aux ordres d’un
officier général, & que ces deux corps cenfés ennemis
campent, marchent , couvrent un pays ,
protègent une place , s'attaquent , fe défendent,
tentent des paflages de défilés , de rivières , fe
tiennent tour a tour fur la défenfive ; faflent des
retraites , comme ils feroient à. la guerre ; enfin,
Art militaire. Tome 1.
pratiquent toutes.les parties fublimes de l’art. Q u ’un
camp de paix foit- l école où les officiers généraux
s’inftmifent dans la grande tactique : c’eft l’unique
moyen de les former. Si on ne le ipe-t. en ufage ,
ils feront toujours novices dans les premières campagnes,
n’apprendront leur métier qu’aux dépens
de l’état, & ri’en fçauront quelque chofe qu’à la
fin de la guerre. Faites des camps de paix touts les
ans : alors ceux qui auront du talent & de ^émulation
s’inftruiront de la théorie dans leur'cabinet,
pour en faire l'application dans ces camps ; ceux
qui auront le plus de talent fe feront connoître,
&. pourront être préférés pour le commandement
à. la guerre. Nous-inftrnifons avec foin nos foklats
& nos officiers particuliers dans toutes'les parties
qui les concernent. Perfuadés que le corps de l’afv
tillerie & celui du génie ne peuvent fe fo rm e r '
qu’en mettant la théorie en pratique , nous avons
inftitué des écoles qui les ont rendus fupérieurs
à ceux de touts les autres peuples; & , par une
contradiâion des plus étonnantes chez une nation
auffi éclairée, nous laiffons fans inftruélion les
officiers chargés des parties les plus effentielles ,
les plus fublimes , les plus difficiles Ae l’art militaire
: nous nous en repofons fur eux du foin d’acquérir
les connoiflances théoriques ; inftruélion
difficile & prefque impoffible au fein d’une cour ôc
d’une capitale abondantes en plaifirs, en voluptés,
en diftraélions, en dilfipations de tout genre. Il fuit
de-là prefque néceffairement que l’officier général
qui a fçu quelque chofe de fon art l’oublie, &
que celui qui fert la première fois comme tel eft fem-
blable à un enfant qui, n’ayant vu de place fortifiée
que fur le papier, ne reconnoît rien dans-
une place de guerre , quand il y entre pour la
première fois. Ayons des - camps de paix touts les
ans , en plufieurs lieux du royaume , & nous aurons
bientôt des officiers généraux auffi fupérieurs
& auffi célèbres que nos ingénieurs &. nos artilleurs.
(K .) .] .
C A M P A G N E . Suite d’opérations militaires
faites pendant une année ou partie d’une année
de guerre.
[ I. L’objet d’une campagne eft d’attaquer l’ennemi
, ou de fe défendre , ou de fecourir un allié.
Quel que puifle être cet objet, il fuppofe des
forces, des moyens, & des préparatifs. 11 faut
des armées' plus ou moins nombreufes, mais fur-
tout de l’argent pour fournir aux frais de la campagne
^ &. des magafins confidérables de toute
efpèce, fur les frontières où les armées doivent
fe raflembler & opérer.
I I . Le plan général d’une campagne doit être
l’ouvrage du prince & de fon confeil : il eft né-
ceffaire qu’il s?accorde avec la politique, & qu’il
foit réglé fur le<s conjonélures. Quand la guerre
eft offenfive^p-dvfe conlulte pour fçavoir fi l’on
^ e u t—agtf-'bnenfiwment par-tout; ou fi l’on fe
tiendra d’un côté fur ia défenfive , pour agir offenfivement
& avec plus de forces de l’autre. Ce qu’oa
F f f -