
cer ; occupez celui qui l’empêche d’aller à fon
b u t, ou qui vous met à portée de le prévenir partout
j & , s’il faut vous retirer, de lui échapper fans
danger.
X V . Obfervez continuellement votre ennemi ,
afin de pouvoir régler vos difpofitions & vos mouvements
d’après ce que vous lui verrez faire.
XVI. Enfin lorfque vous devrez quitter un camp
retranché j & que vous jugerez que l’ennemi puifle
trouver quelqu avantage à le venir occuper., dé-
truilez-en les fortifications, & brûlez les magafins
que vous n’aurez pu évacuer.
C A M P D E P A S S A G E .
Dans la guerre offenfive on campe paffagère-
ment, quand on marche, foit pour attaquer l’ennemi
, ou le déporter par différentes manoeuvres ;
foit pour le prévenir à quelque partage, & péné^
trer dans fon pays ; foit pour invertir une place , &
en former le liège ; foit enfin pour le joindre à une
armée ou à quelque corps avancé.
Dans la guerre défenfive, comme dans l’offen-
fivé , on occupe un camp de partage lorfqu’on va
fe porter pour couvrir fon pays, qu’on eft obligé
de régler les mouvements fur ceux qu’on voit faire
a fon ennemi, qu’on a pour objet quelque réunion,
enfin qu’on eft contraint d’abandonner un
porte, une frontière , même une partie de fon pays
pour en couvrir une autre.
De quelque efpèce que foit la guerre, & de
quelque nature que foit le pays où on la farte, loin
ou près de l’ennemi, on a foin de faire partir
à l’avance les campements, & de les faire précéder
, fi les circonftances y obligent, par des détachements.
Du refte, on obferve que pour tout
ce qui concerne ces fortes de camps, & les cas
différents où Ion peut fe trouver, tout ce qui a été
dit précédemment.
C A M P S T A B L E .
Un camp ftable peut avoir divers objets, fui-
vant qu’on agit offenfivement ou défenfivement.
Quand on eft fur l’offenlive, on occupe un camp
pendant un certain temps, pour faire le liège ou le
blocus d’une place, pour attendre l’effet d’une di-
verfion ou la prife d’une place qu’on aura fait attaquer
par un corps détaché de l’armée , pour donner
à quelque renfort de troupes ou à un convoi le
temps d’arriver ; dans le cours ou à la fin d’une
campagne pour confommer ou évacuer les fourrages
oc les fubfiftances d’un pays qu’on a deflein
d’abandonner; pour donner du repos à fon armée à
la luite de quelque longue marche ou opération qui
aura caufé de la perte en hommes ou des maladies ;
ou enfin dans le cours d’une campagne qui n’aura
pas été aufli heureufe qu’on l’avoit d’abord
elpéré.
Lorfque l’on campe devant une place pour l’attaquer,
qu’on fçait que l’ennemi ne peut afiembler
une armée allez forte pour tenter de la fecourir,
& qu’on a peu à craindre des détachements qu’il
pourroit envoyer, foit pour cet objet, foit pour
troubler les opérations du liège ; alors on ne fait
que diftribuer les troupes autour de la place ; mais,
en les campant aufli commodément qu’il fe peut,
il eft effentiel de refferrer la circonvallation de
façon que les communications foieiit courtes ÔC
faciles, & que rien ne s’échappe de la place ; à quoi
l’on parviendra plus furement, en profitant des
hauteurs & autres objets qui pourront couvrir le
camp, & le mettre à l’abri du canon ôc des bombes
des alïiégés.
Lorfqu’on eft fur la défenfive, on prend un camp
ftable pour couvrir fon pays, ou quelque place
importante que l’ennemi a deflein d’afliéger. Outre
ces deux objets, un camp ftable, dans le cas dont il
s’agit » peut en avoir plufieurs autres ; mais,
comme ils font communs avec ceux dont on a fait
mention au premier cas, on fe difpenfera de les
répéter, d’autant qu’ils font aifés à diftinguer : on
peut y en ajouter encore un , qui eft quelquefois
d’attendre que l’ennemi ait fépacé fon armée pour
prendre fes quartiers d’h iver, afin de pouvoir les
prendre de fon côté fans craindre d’être inquiété de
fa part.
De quelque manière que vous agifliez, ne prenez
jamais un camp ftable fans vous conformer à toutes
les maximes précédentes, fuivant que vous ferez
dans l’un ou l’autre des cas qu’on a fuppofés. Affu-
rez-vous fur-tout de la falubrité de l’air dans votre
camp, & faites-y obferver la plus grande propreté :
qu’on enterre au loin toutes les immondices, ou
qu’on les jette dans la rivière quand vous en aurez
une à proximité, & qu’elle fera affez confidérabie
pour que l’eau n’en puiffe pas être gâtée.
C A M P R E T R A N C H É .
On fait retrancher fon camp foit en campagne
foit devant, foit fous une place. Ces trois cas fup-
pofant desraifons & des circonftances différentes ,
doivent être néceflairement traités féparément.
Ca m p r e t r a n c h é en c a m p a g n e .
Si l’on ne doit jamais fe repofer fur la fupériorité
du nombre quand on fait une guerre offenfive, il
eft encore plus prudent de retrancher toujours fon
camp. Les Romains & plufieurs autres nations fai-
foient rarement quelque féjour dans un lieu fans
s’y fortifier. Les retranchements n’empêchent
point de marcher à l’ennemi, quand on le juge à
propos ; ils mettent une armée à l’abri de toute
infulte, fur-tout quand elle eft compofée de troupes
peu aguerries , ou de nouvelle le v é e , & ils
donnent, en cas d’attaque, l’avantage du terrein.
Avec des retranchements, fi l’on eft obligé de
faire quelque gros détachement pour Je fourrage
ou quelque autre opération, le refte des troupes,
les bagages, les vivies , font en fureté ; les troupes
fe trouvent foulagées, parce qu’il n’eft pas beloin
chaque jour d’un aufli grand nombre de gardes.
Enfin, s’il eft vrai que rien n’énerve plus le courage
que de penfer qu’on eft fur la défenfive ; en
accoutumant le foldat à fe retrancher en toutes
occafions, on parviendra plus facilement à prévenir
en lui l’idée du danger & le fentiment de la
foibleffe ; on le rendra en même-temps plus industrieux
&. plus laborieux. «Nous autres, dit le roi de
Pruffe, ( injlrutfion militaire, article VIII ) , nous
retranchons nos camps comme autrefois ont fait les
Romains, pour éviter non - feulement les entre-
prifes que les troupes légères ennemies, qui font
nombreufes , pourroient tenter la nuit, mais pour
empêcher la défertion ; car , continue ce prince ,
j ’ai toujours obfervé que quand nos redans étoient
joints par des lignes tout-au-tour du camp, la déler-
tion étoit moindre que quand cette précaution avoit
été négligée. C ’eft une chofe qui, toute ridicule
qu’elle paroiffe , n’en eft pas moins vraie ». ( Cet
ufage eft plus néceffaire dans les troupes pruflïennes
que dans toutes les autres , parce qu’elles font com-
pofées en grande partie d’étrangers, & que ,< pour
prévenir la défertion, on y rapproche toutes les
nuits les gardes du camp. ).
Il ne luffit pas, lorfqu’on eft fur la défenfive ,
. qu’un camp foit fort par la fituation ; il faut encore ,
fur-tout quand l’ennemi eft obligé de venir vous y
attaquer , fuppléer aux moindres défauts du terrein
par des retranchements qui vous mettent parfaitement
à couvert & en état de faire la défenfe la plus
vigoureufe & la plus opiniâtre.
Dans un pays de plaine, obfervez, en conf-
truifent vos retranchements, de bien faifir touts les
avantages que peut offrir le terrein ; profitez des
rivières, ruifleaux , canaux , marais , chemins
creux , fortes , villages , cimetières , châteaux ,
cenfes, &c. S’il y a un bois, il faut le couper , l’enfermer
, le brûler, ou s’en éloigner. Faites de
bonnes redoutes, des lignes coupées, des épaule-
ments, des puits, des tranchées, des inondations;
ayez des chevaux de frife , des chauffes-trapes,
pour les employer où vous le jugerez à propos : en
un mot, en fuivant les meilleures règles de la for- j
tification de campagne, étendez vos retranche- j
ments le moins que vous pourrez, attendu que
ce ne font pas eux;qui arrêtent l’ennemi, mais
les troupes qui les défendent. Multipliez par-tout
vos défenfes , de manière à donner la même
force à toutes les parties, & que l’attaque ne puirte
avoir lieu que dans un ou deux peints au plus où
vous aurez redoublé les obftacles. « Je n’aurois
garde, dit le célèbre auteur que j’ai cité dans cet
article,. de. faire- des retranehementSrqüe je ne pour-
rois pas border d’une chaîne de bataillons , & d’une,
réierve d infanterie , pour la porter par-tout où elle j
feroit néceffaire »»'■ :■
Dans un pays de bois. & de montagnes , ebfer- |
vez non-feulement tout ce qui vient d’être dit pour
ce qui concerne les partitions que vous pourrez:
prendre dans un pays de plaine, mais ne néglige#
pas d’occuper les hauteurs & les bois ; faites cies
abattis, des efearpements, des retenues d’eau, &c.
Quand on entreprend de couvrir un pays par
des lignes, comme on l’a pratiqué pendant quelque
temps , mais prefque toujours fans fuccès ; on obferve
autant qu’on le peut, dans la manière de les
conftruire, tout ce qui a été dit au fujet des camps
retranchés dans la guerre défenfive. Une ligne de
cette elpèce étant néceflairement fort étendue ,
il faut dans fe conftruélion profiter des forêts, des
bois les plus fourrés, des marais, des rivières, des
ruifleaux efearpés & bourbeux, des chaînes de montagnes
coupées de peu de gorges faciles à garder ,
en.-un mot de touts les objets qui peuvent donner de
. l’avantage, & réduire l’ennemi à un petit nombre
| de points d’attaque très forts : les extrémités de ces
lignes doivent fur-tout être appuyées de façon qu’on;
ne puiffe ou qu’on n’ofe les tourner.
Camp r e tran ch é d e v a n t une p l a c e .
On retranche fon camp devant une place qu’ont
veut attaquer ; foit pour ôter aux afliégés toute
efpèce de iecours , & couvrir les opérations dufièee
lorfque l’ennemi peut affembler une armée allez,
confidérabie pour efpérer de le faire lever ; foit
po^f contenir les afliégés quand ils font allez en
force pour attaquer les afliégeants. On fait pour
ce double objet une ligne de circonvallation , &
une de contrevallation , entre lefquelles on campe
l’armée. En s’enfermant ainfi par des lignes qu’on
a le projet de défendre, il eft effentiel de profiter ,
en les conftruifent, de touts les avantages du terrein
, & de multiplier les obftacles par-tout & de
toutes manières, afin que l’ennemi ne trouve que
très difficilement quelque point où le fuccès de
l’attaque foit vraifemblable. Telle étoit la ligne de
circonvallation que le maréchal de Rerwich fit
faire devant Philisbourg en 1734; elle parut fi
refpe&able au prince Eugène que , quoiqu’il fut
à la tête de quatre-vingt mille hommes,, il n’ofe pas
Tinfulter.
Mais, l’expérience nous ayant appris qu’il y a peu
de lignes attaquées qui ne foient forcées , on préfère,
au lieu d’employer un temps confidérabie à.
fe retrancher devant une place , de reconnoître uns
bon champ de bataille du côté par lequel' oa fup-
pofe que l’ennemi peut venir à fon fecours, & ©fi
l’on va le recevoir avec la plus grande partie de
l’arméecomme fit le maréchal de Saxe àTouraay »
en 1745. .
La meilleure façon de couvrir un fiëge eH
d’avoir une armée d’obfervation , dût-elle être
formée même aux dépens de la circonvallation *
quand on n’eft pas en état d’y pourvoir autrement»
Alors c’eft au général qui commande cette armée
à fe porter avantageufemem ; obfervant fur-tout de